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Décisions

CA Nancy, 2e ch. com., 1 juin 2011, n° 10-01195

NANCY

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Cybervitrine (SA)

Défendeur :

Wentzel, Lixxbail (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cunin

Conseillers :

Mme Zecca-Bischoff, M. Bruneau

Avoués :

SCP Millot-Logier, Fontaine, SCP Chardon & Navrez, Me Gretere

Avocats :

Mes Kihl, Jeanney-Madrias, Mourot

T. com Saint-Dié des Vosges, du 9 janv. …

9 janvier 2008

Monsieur Wentzel, qui exerce une activité d'agent immobilier et possède deux agences, l'une à Baccarat et l'autre à Raon l'Etape, a signé avec la société Loc Infor, aux droits de qui se trouve la société Lixxbail, un contrat de location d'une cybervitrine pour une durée de 48 mois moyennant un loyer mensuel de 263,12 euro pour l'agence de Baccarat et de 356,41 euro pour l'agence de Raon l'Etape.

Monsieur Wentzel a prétendu que le matériel loué ne fonctionnait pas et a notifié à la société Lixxbail le 7 novembre 2003 la résiliation du contrat de location. Celle-ci l'a mis en demeure de respecter ses engagements de payer les loyers.

La société Lixxbail a fait assigner Monsieur Wentzel pour le voir condamner à lui payer la somme de 15.683,56 euro, outre les intérêts. La société Cybervitrine a été appelée en intervention forcée.

Par jugement en date du 16 janvier 2008, le Tribunal de commerce de Saint Dié a condamné Monsieur Wentzel à payer à la société Lixxbail la somme de 15 683,56 euro avec intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2003, outre la somme de 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. La société Cybervitrine a été condamnée à garantir Monsieur Wentzel de toutes condamnations contre lui et à lui payer la somme de 1 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société Cybervitrine a relevé appel de cette décision, mais a été mise en liquidation judiciaire le 6 mai 2008.

Monsieur Wentzel a formé un appel incident contre le jugement et a déclaré sa créance à l'encontre la société Cybervitrine.

Il demande à la Cour d'infirmer le jugement en déboutant la société Lixxbail de ses demandes. Subsidiairement, il demande que les sommes mises à sa charge soient admises au passif de la société Cybervitrine. Il réclame une somme de 1 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il fait valoir que le paiement des loyers avait pour contrepartie le bon fonctionnement du matériel loué et prétend que le contrat de location du matériel conclu avec la société Lixxbail et le contrat de prestation de service signé avec la société Cybervitrine sont indivisibles, de sorte que la défaillance du prestataire de service constatée le 9 avril 2003 entraîne la résolution du contrat de location.

La société Lixxbail demande à la Cour de confirmer le jugement déféré et de condamner Monsieur Wentzel à lui payer la somme de 1 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle prétend que la preuve du mauvais fonctionnement du matériel n'est pas apportée et que cette circonstance n'est pas de nature à justifier les prétentions de Monsieur Wentzel. Elle rappelle en effet qu'en application des clauses du bail, le bailleur est déchargé de toute obligation du fait de la garantie des vices cachés et que Monsieur Wentzel reste tenu du paiement des loyers. Elle ajoute que le contrat ne prévoyait aucune clause d'indivisibilité.

La Selarl Francis Villa a été assignée en qualité de liquidateur de la société Cybervitrine à sa personne, mais n'a pas constitué avoué. Il sera donc statué par arrêt réputé contradictoire.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que Monsieur Wentzel verse au dossier le bon de commande signé le 12 juillet 2002 avec la société Cybervitrine et portant sur la fourniture et l'installation de matériel informatique moyennant le paiement d'un loyer hors taxe de 298 euro sur 48 mois ; que le fournisseur s'engageait à assurer gratuitement pendant la durée du contrat la maintenance du matériel ;

Attendu que Monsieur Wentzel a encore signé le 20 juillet 2002 avec la société Locinfor, aux droits de qui se trouve la société Lixxbail, un contrat de location portant sur le matériel livré et installé par la société Cybervitrine ; que ce contrat contenait les clauses suivantes :

" Le locataire reconnaît que le constructeur et l'équipement ont été choisis par lui-même et que l'équipement est conforme en tous points à ses besoins. Le bailleur n'assume aucune responsabilité dans le choix fait et ne garantit pas l'exécution des obligations du constructeur. "

" Le bailleur n'assume pas la garantie des vices cachés. Le bailleur n'aura aucune responsabilité directe ou indirecte vis-à-vis du locataire ou de tiers du fait de l'équipement de son état, de sa détention ou de son utilisation. Cette responsabilité incombe exclusivement au locataire et celui-ci garantit le bailleur contre tout recours qui serait dirigé contre lui à ce titre. Le bailleur cède au locataire tous les droits qu'il pourrait avoir contre le constructeur. " ;

Attendu que Monsieur Wentzel verse au dossier les lettres qu'il a adressées à la société Cybervitrine pour dénoncer les dysfonctionnements du matériel et produit un constat d'huissier dressé le 10 octobre 2003 ; qu'il prétend qu'il ne saurait être tenu au paiement des loyers pour du matériel qui n'a jamais fonctionné ;

Mais attendu que, si la responsabilité de la société Cybervitrine est engagée en raison des dysfonctionnements dénoncés par Monsieur Wentzel et du fait de son incapacité à assumer son obligation contractuelle d'assurer le bon fonctionnement et la maintenance du matériel qu'elle a livré et installé, les obligations de la société Lixxbail doivent s'apprécier en considération des clauses du contrat ;

Attendu que la société Lixxbail verse au dossier le procès-verbal signé le 19 juillet 2002 par Monsieur Wentzel par lequel celui-ci a déclaré avoir réceptionné le matériel commandé sans aucune réserve ; que dès lors, les dysfonctionnements apparus postérieurement ne relèvent pas de la responsabilité du bailleur ; qu'en effet la société Lixxbail n'assume pas, en application des clauses du contrat, la garantie des vices cachés et n'est tenue d'aucune responsabilité vis-à-vis du locataire ;

Attendu cependant que Monsieur Wentzel prétend que le contrat de location du matériel conclu avec la société Lixxbail et le contrat de prestation de service signé avec la société Cybervitrine sont indivisibles et interdépendants, de sorte que la défaillance du prestataire dans l'exécution de ses obligations rend caduc le contrat de location ;

Mais attendu que le contrat de location précise que le bailleur ne garantit pas l'exécution des obligations du constructeur, n'assume pas la garantie des vices cachés et en général toute responsabilité directe ou indirecte vis-à-vis du locataire ou de tiers du fait de l'équipement, cette responsabilité incombant exclusivement au locataire, et qu'il cède au locataire tous les droits qu'il pourrait avoir contre le constructeur ;

Attendu que les contrats de location et de prestation de service ne contiennent aucune clause d'indivisibilité ; qu'au contraire les parties ont accepté, en limitant la responsabilité du bailleur, l'indépendance des contrats ; que dès lors, l'apparition des désordres ne dispensait pas Monsieur Wentzel du paiement des loyers ;

Attendu que le décompte établi le 7 novembre 2003 par la société Lixxbail n'est pas contesté et correspond aux clauses du bail ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré qui a condamné Monsieur Wentzel à payer la somme de 15 683,56 euro avec intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2003, date de la mise en demeure ;

Attendu que Monsieur Wentzel est fondé à obtenir la garantie de la société Cybervitrine, de sorte que le jugement déféré sera confirmé sur ce point ; que cependant, dans la mesure où la société Cybervitrine a été mise en liquidation judiciaire, la créance de Monsieur Wentzel sera mise au passif de cette société ;

Attendu que Monsieur Wentzel et la société Cybervitrine, qui succombent en leur appel, seront déboutés de leurs demandes et seront condamnés aux dépens d'appel ; que la société Cybervitrine sera condamnée à payer à Monsieur Wentzel la somme de 1 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; que Monsieur Wentzel sera condamné à payer à la société Lixxbail la somme de 1 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ces motifs - Et ceux non contraires des premiers Juges. - LA COUR, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, - Confirme le jugement en date du 9 janvier 2008 du Tribunal de commerce de Saint Dié, hormis en ce qu'il a condamné la société Cybervitrine à supporter la condamnation prononcée au détriment de Monsieur Wentzel ; - Et statuant à nouveau sur ce chef de demande : - Vu le jugement en date du 6 mai 2008 ayant prononcé la liquidation judiciaire de la société Cybervitrine et ayant désigné la société Villa en qualité de liquidateur ; - Fixe la créance de Monsieur Wentzel sur la société Cybervitrine résultant du présent arrêt au passif de la société Cybervitrine ; - Déboute la société Lixxbail du surplus de ses demandes.