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Décisions

CA Metz, 1re ch., 18 mai 2011, n° 09-00523

METZ

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Artola

Défendeur :

Bournet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Staechele

Conseillers :

M. Ruff, Mme Ott

Avocats :

Mes Garrel & Meunier Garrel, Vanmansart

TGI Thionville, ch. civ., du 30 déc. 200…

30 décembre 2008

M. Jean-Claude Artola a acheté auprès de M. Frédéric Bournet un camping-car Acapulco diesel de marque Peugeot, immatriculé 230 BPD 57, au prix de 9 000 euro.

Une expertise a été ordonnée en référé le 6 décembre 2005 à la demande de l'acquéreur.

Par demande introductive d'instance du 9 mars 2007, M. Jean-Claude Artola a fait citer M. Frédéric Bournet sur le fondement des articles 1641 et suivants du Code Civil aux fins de prononcer la résolution de la vente du camping-car. Il demandait au tribunal de lui donner acte de son accord pour rendre le véhicule au vendeur, et de condamner M. Frédéric Bournet à lui payer la somme de 9 000 euro avec les intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2005 et celle de 3 000 euro à titre de dommages-et-intérêts pour défaut de jouissance, outre un montant de 1 500 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile.

Il a exposé avoir acheté ce camping-car suite à une annonce dans un magazine faisant état d'un véhicule en très bon état, affichant 80 000 km au compteur ; que le rapport d'expertise montre que le véhicule est impropre à l'usage auquel il est destiné à raison d'un vice caché, en insistant sur le pourrissement de l'ossature qui selon l'expert s'est fait de manière progressive, et sur la sousmotorisation du véhicule par rapport à son équipement ; que l'expert a évalué la remise en état à 15 000 euro soit bien plus que le prix d'achat de 9 000 euro.

M. Frédéric Bournet a conclu au débouté et réclamé une indemnité de 1 500 euro au titre des frais irrépétibles.

Il a répliqué que le véhicule vendu est conforme aux spécifications du constructeur, a fait l'objet de deux contrôles techniques sans anomalie et d'une attestation de conformité délivrée par le service des mines compte-tenu de sa provenance communautaire ; que l'annonce a indiqué par erreur un kilométrage de 80 000 kms, et que cette erreur a été rectifiée d'emblée auprès de M. Jean-Claude Artola qui connaissait donc l'ancienneté du véhicule (immatriculé la première fois en 1990) et le kilométrage réel de 141 000 km. Il fait valoir qu'il n'y a pas de vice caché, car l'acquéreur qui a examiné et essayé le véhicule a pu se rendre compte de son état relevant d'une usure normale pour un engin bas de gamme de 15 ans d'âge. Il souligne, concernant le reproche de sousmotorisation, que le véhicule de bas de gamme est équipé d'origine par le constructeur d'un moteur diesel d'une puissance de 51 kw ou 70 cv, soit une puissance fiscale en France de 8 chevaux fiscaux, ce qui est mentionné sur les documents du véhicule.

Par jugement en date du 30 décembre 2008, le Tribunal de grande instance de Thionville, chambre civile, a débouté M. Jean-Claude Artola de ses demandes, et l'a condamné aux dépens.

Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré que l'acheteur avait connaissance de la date de première mise en circulation et du kilométrage de 140 000 km, de telle sorte que compte-tenu de l'ancienneté du véhicule il ne pouvait s'attendre à trouver un véhicule exempt de toute corrosion. Le tribunal a noté que d'après l'expertise les boursouflures de peinture sur le toit sont bien visibles, alors que l'acquéreur a examiné le véhicule et ne peut reprocher sa propre carence au vendeur ; que la sousmotorisation ne peut être imputée au vendeur qui n'est pas responsable de la conception du camping-car ; que les experts, privé et judiciaire, ont conclu que le véhicule est utilisable en l'état.

Par déclaration enregistrée au greffe le 26 janvier 2009, M. Jean-Claude Artola a interjeté appel du dit jugement.

Par ses dernières écritures du 14 janvier 2010, M. Jean-Claude Artola demande à la Cour en infirmant le jugement entrepris, au vu des articles 1641 et suivants du Code civil, de :

' prononcer la résolution de la vente du véhicule Peugeot,

' donner acte à M. Jean-Claude Artola de ce qu'il restituera le véhicule à M. Frédéric Bournet,

' condamner M. Frédéric Bournet à payer à M. Jean-Claude Artola la somme de 9 000 euro correspondant au prix du véhicule avec les intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2005,

' le condamner au paiement de la somme de 3 000 euro à titre de dommages-et-intérêts pour trouble de jouissance,

' le condamner à rembourser à M. Jean-Claude Artola la somme de 762 euro au titre des préjudices annexes avec les intérêts au taux légal à compter de la demande,

' le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel y compris ceux de la procédure de référé expertise,

' le condamner au paiement de la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ses dernières écritures du 9 novembre 2009, M. Frédéric Bournet conclut à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris, et réclame le paiement d'un montant de 3 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 mai 2010.

Sur ce :

Vu les dernières écritures des parties auxquelles la Cour se réfère expressément ; vu les pièces ;

Attendu que conformément à l'article 1641 du Code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un prix moindre, s'il les avait connus ;

Attendu que les vices dont argue l'appelant tiennent d'une part à la sous-motorisation du camping-car, d'autre part au pourrissement de l'ossature en bois de la cellule, étant observé qu'il n'est pas contesté que si l'annonce, à laquelle a répondu M. Jean-Claude Artola, pouvait comporter une indication erronée du kilométrage, pour autant celui-ci a fait l'acquisition de ce véhicule en toute connaissance tant de l'année de mise en première circulation (1990) que du kilométrage réel parcouru ( 141 000 euro ) ;

Attendu, s'agissant de la sous-motorisation, qu'il ressort du rapport d'expertise de M. Koessler, désigné en référé, que le camping-car de marque Peugeot type Acapulco 45 immatriculé 230 BPD 57 est équipé d'un moteur de 8 cv, que la carte grise mentionne bien 8 cv, et que l'examen du compartiment moteur fait apparaître que le moteur qui équipe ce véhicule est d'une puissance de 1 900 cm3 ;

Qu'il est vain pour l'appelant de se prévaloir de la notice descriptive faisant mention d'un équipement par moteur de 2 300 cm3, dès lors que l'expert a relevé que cette notice descriptive, faisant certes état d'un moteur de 2 500 cm3 pour une puissance administrative de 10 cv, concerne des véhicules dont le type et la version sont 280G52 alors que le véhicule litigieux est de type et version 280G62 ;

Qu'il s'ensuit que cette notice technique ne peut donc s'appliquer au camping-car en cause, dont il est constant qu'il a été importé d'Allemagne ainsi que cela ressort d'ailleurs du certificat d'acquisition d'un véhicule en provenance de la communauté européenne en date du 24 novembre 2003 que produit l'appelant;

Que si l'appelant a pu être déçu des qualités de conduite et de reprise au regard d'une telle motorisation pour un camping-car, il n'en demeure pas moins qu'il a fait l'acquisition d'un véhicule d'une puissance administrative de 8 cv nettement mentionnée sur la carte grise du véhicule qui lui a été remise barrée par le vendeur et qu'il n'est donc pas fondé à voir un vice caché dans ce qui ressort de la conception de ce type de véhicule par le constructeur automobile;

Attendu, s'agissant du pourrissement de l'ossature de la cellule, qu'il ressort du même rapport d'expertise judiciaire que des travaux d'enjolivement ont été réalisés à l'intérieur de la cellule du camping-car et qu'en décollant le revêtement mural au-dessus de la porte l'expert a pu constater que l'ossature en bois est pourrie et a pour conséquence de déformer le cadre de porte ;

Que pour autant l'expert a noté que l'état général de présentation de l'engin est moyen, que le coin arrière gauche de la cellule a été sommairement redressé et mastiqué, que le pavillon a été sommairement réparé avec un rajout d'une tôle rivetée et que la tôle latérale avant droite, au dessus de la porte de cabine, est percée par la corrosion ; qu'il a conclu que l'état de pourrissement des parties hautes et arrières de l'ossature en bois de la cellule est la conséquence d'infiltrations d'eau dues à la réparation sommaire du toit ;

Que si l'expert judiciaire a estimé, ainsi que le souligne l'appelant, que le pourrissement de l'ossature est un vice caché puisqu'il est nécessaire de décoller le revêtement mural, cet avis de l'expert ne lie pas la Cour à qui il appartient de statuer en droit ;

Qu'au vu des constatations de l'état de l'extérieur du camping-car retracées par M. Koessler dans son rapport, ainsi que des photographies du véhicule qui y sont annexées corroborées par les photographies jointes au rapport d'expertise privée de M. Tanferri, l'état extérieur du camping-car apparaît dégradé, ce que peut constater un acquéreur normalement avisé qui procède à un minimum d'examen du véhicule dont il compte faire l'acquisition, d'autant plus qu'il ne s'agit pas d'un véhicule neuf mais d'un véhicule mis en circulation en 1990 et ayant parcouru plus de 140 000 km lorsque M. Jean-Claude Artola l'achète en juillet 2005 ; que cet aspect extérieur ne pouvait que laisser craindre à un acquéreur normalement avisé et diligent un problème de corrosion de la carrosserie et donc d'infiltration d'eau dans l'habitacle ;

Qu'ainsi le vice ne peut être qualifié de caché ;

Qu'il convient en outre de relever que M. Koessler a estimé que le véhicule est utilisable en l'état ;

Attendu qu'en l'absence de démonstration par l'appelant d'un vice caché, les considérations qu'il émet quant au prix de vente perçu par l'intimé qui a pu opérer une plus-value par rapport au prix où lui-même avait acheté le véhicule, sont inopérantes ;

Attendu que dans ces conditions, le jugement entrepris, qui a débouté M. Jean-Claude Artola de l'ensemble de ses demandes non fondées, doit être confirmé ;

Attendu que l'appelant qui succombe sur son appel doit être condamné aux entiers dépens d'appel ;

Attendu qu'il est inéquitable de laisser à la charge de l'intimé les frais exposés à hauteur de Cour et non compris dans les dépens ; qu'il convient de lui allouer la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ces motifs : - LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement : - Déclare M. Jean-Claude Artola recevable, mais mal fondé en son appel ; l'en déboute; - Confirme en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de grande instance de Thionville, chambre civile, en date du 30 décembre 2008.