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Décisions

Cass. crim., 13 janvier 2009, n° 08-84.908

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Farge (conseiller le plus ancien faisant fonction)

Avocat :

Me Jacoupy

Trib. sup. app. Saint-Pierre-et-Miquelon…

11 juin 2008

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par le procureur de la République près le Tribunal supérieur d'appel de Saint-Pierre-et-Miquelon, contre l'arrêt de ladite juridiction, chambre correctionnelle, en date du 11 juin 2008, qui a renvoyé Arthur X, des fins de la poursuite du chef de tromperie ; Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation, 121-3 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, défaut de réponse à conclusions ;

" en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé le prévenu des fins de la poursuite ;

" aux motifs que, d'une part, une simple abstention consistant à ne pas vérifier la motorisation exacte des véhicules vendus ne saurait s'analyser comme une intention coupable, alors qu'un représentant de Citroën-France a pu l'induire en erreur, d'autre part, la preuve de la mauvaise foi du prévenu n'est pas rapportée et, enfin, la fraude se déduisant de la simple réticence ou du défaut de contrôle n'est pas établie s'agissant de la commercialisation non pas de véhicules d'occasion mais de véhicules neufs ;

" 1) alors que, le seul fait, pour un vendeur professionnel, de vendre trois véhicules automobiles soi-disant d'une puissance de 90 chevaux vapeur-élément substantiel attesté dans des documents contractuels et commerciaux telles que des devis et factures-alors qu'une vérification sommaire par un spécialiste du négoce automobile normalement prudent et diligent permet de constater, au moyen d'une simple opération arithmétique à partir du formulaire " cerfa " intitulé "demande de certificat d'un véhicule neuf ", que la puissance du moteur n'est que de 75 chevaux, suffit à caractériser la mauvaise foi et partant l'intention frauduleuse ;

" 2) alors que, le ministère public soutenait dans ses réquisitions écrites d'appel que Arthur X, en sa qualité de professionnel de la vente automobile, avait le devoir de vérifier que la puissance du moteur mentionnée sur les documents contractuels correspondait à la réalité et que, pour caractériser le délit de tromperie, s'agissant d'un professionnel, il n'est pas nécessaire de faire la preuve du mensonge, celle d'une simple réticence ou du défaut de contrôle nécessaire est suffisante ;

" 3) alors que, en écartant l'élément intentionnel de l'infraction de tromperie, motif pris de ce que les principes constants dégagés par la jurisprudence en la matière ne s'appliquaient que pour la vente de véhicules automobiles d'occasion et en admettant que l'erreur d'un tiers a pu exonérer de toute responsabilité pénale un vendeur et réparateur agréé de la marque Citroën, tout en ajoutant qu'il n'a pas mis en danger délibérément la vie d'autrui, le tribunal supérieur d'appel n'a pas répondu aux réquisitions du parquet et n'a pas justifié sa décision au regard de motifs inopérants " ; Vu l'article 593 du Code de procédure pénale ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'Arthur X, gérant d'une concession automobile à Saint-Pierre-et-Miquelon, a vendu trois véhicules en mentionnant, sur les factures, qu'ils étaient équipés d'un moteur de 90 cv, au lieu de 75 cv ;

Attendu que, pour relaxer le prévenu du chef de tromperie, les juges du second degré retiennent qu'il a agi de bonne foi en reportant, sur les indications du représentant du fabricant, la mention erronée sur les documents de vente, et " qu'il n'a pas mis en danger délibérément la personne d'autrui ni sa sécurité " ;

Mais attendu qu'en se déterminant par ces motifs, partiellement inopérants, sans rechercher, comme l'y invitaient les réquisitions du ministère public, appelant, si, en sa qualité de professionnel de l'automobile, Arthur X n'avait pas le devoir de vérifier la puissance fiscale des voitures qu'il commercialisait et si cette caractéristique n'était pas une qualité substantielle des véhicules, au regard de leurs performances et de leur valeur, le tribunal supérieur d'appel n'a pas justifié sa décision ; d'où il suit que la cassation est encourue.

Par ces motifs : Casse et Annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé du tribunal supérieur d'appel de Saint-Pierre-et-Miquelon, en date du 11 juin 2008 ; Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, Renvoie la cause et les parties devant le tribunal supérieur d'appel de Saint-Pierre-et-Miquelon, autrement composé, à ce désigné par délibération spéciale prise en chambre du conseil.