Livv
Décisions

Cass. crim., 8 janvier 2008, n° 07-82.133

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Avocats :

SCP Rocheteau, Uzan-Sarano

Bordeaux, ch. corr., du 30 janv. 2007

30 janvier 2007

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par la société V, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, en date du 30 janvier 2007, qui, pour tromperie, l'a condamnée à 2 500 euro d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ; Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation " des articles 121-2 du Code pénal, L. 121-6, L. 213-1 et L. 213-6 du Code de la consommation,2, 3, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la Sarl V coupable de tromperie sur les qualités substantielles et la composition de marchandises ;

" aux motifs propres qu'il ressort des échanges de courriers de la Sarl V avec ses fournisseurs, et notamment du courrier A / B du 16 juin 2005, que le fabricant, pour des raisons techniques, a renoncé au cours des années 80 à utiliser des peaux de lapin pour la confection de ses colles ; que l'intention coupable de la société V est suffisamment caractérisée dès lors qu'en sa qualité de professionnelle elle ne pouvait continuer à affirmer que la colle vendue était effectivement fabriquée avec des peaux de lapin sans obtenir au préalable une confirmation du fabricant alors que dès la première livraison son attention avait été attirée par son client sur l'importance qu'il attachait à la composition de la colle (arrêt, page 5) ;

" et aux motifs, adoptés des premiers juges, que pour l'application de l'article L. 213-1 du Code de la consommation qui prévoit le délit de tromperie, il importe peu que l'acheteur ait la qualité de " professionnel " et que le vendeur soit un simple importateur du produit : il lui appartient en cette qualité d'effectuer les contrôles nécessaires ; que la société V soutient qu'elle s'est assurée de l'excellente qualité du produit vendu par elle sous la référence " colle peau de lapin ZH 41 " et de sa conformité à l'usage auquel il était destiné ; qu'elle produit une attestation de la société mère dans ce sens, ainsi qu'un mémoire établi par M.X, auteur d'un dictionnaire des matériaux du peintre, qui a en outre été entendu à l'audience en qualité de témoin ; que ces éléments visent à établir la bonne qualité du produit litigieux, mais ne remettent pas en cause l'analyse de la composition de celui-ci, telle qu'elle résulte du procès-verbal établi par la DGCCRF ; qu'or, l'article L. 213-1 du Code de la consommation vise la tromperie portant " 1° soit sur la nature, l'espèce, l'origine, la composition ou la teneur en principes utiles de toutes marchandises.. " ; qu'en l'espèce, il est établi que l'acheteur a été trompé sur la composition du produit, indépendamment de la question de ses qualités, de son efficacité, et de l'incidence éventuelle des techniques de mise en œuvre qui ont pu être employées ; qu'il suffit d'ailleurs de se reporter à la description figurant au catalogue du fabricant avant les poursuites pour constater que le produit litigieux est présenté comme : " colle de peau de lapin : cette colle de très bonne qualité est obtenue à partir de peau de lapin ", ce qui constitue une présentation inexacte et trompeuse au sens de l'article précité ; qu'en revanche, l'édition suivante du catalogue précise : " Colle Zank Type colle dite peau de lapin, granulés : la colle est extraite du collagène animal. En raison de la difficulté de trouver la matière première de bonne qualité, cette colle n'est plus fabriquée à partir de peau de lapin ; mais ses propriétés sont similaires ", ce qui constitue une présentation rigoureusement exacte, au moins en ce qui concerne la composition ; qu'il apparaît donc que la présentation faite par le fabricant et reprise par l'importateur et vendeur du produit est de nature à tromper l'acheteur, indépendamment de la question de la qualité et de la fonctionnalité de celui-ci ; que le consommateur est en droit d'avoir une information exacte et sincère sur la qualité du produit qu'il achète, ce qui n'a pas été le cas pour Philippe Y (jugement, pages 5 et 6) ;

" alors qu'une personne morale ne peut être déclarée pénalement responsable que s'il est établi qu'une infraction a été commise, pour son compte, par ses organes ou représentants ; que, dès lors, en se bornant à énoncer, d'une part, par motifs propres, que l'intention coupable de la société V est suffisamment caractérisée dès lors qu'en sa qualité de professionnelle elle ne pouvait continuer à affirmer que la colle vendue était effectivement fabriquée avec des peaux de lapin sans obtenir au préalable une confirmation du fabricant, d'autre part, par motifs adoptés des premiers juges, que la présentation faite par le fabricant et reprise par l'importateur et vendeur du produit est de nature à tromper l'acheteur, sans rechercher si ces faits, à les supposer établis, avaient été commis par un organe ou un représentant de la personne morale, agissant pour le compte de cette dernière, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 121-2 du Code pénal " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Philippe Y, artiste peintre, a acheté à la société à responsabilité limitée V, dont le gérant est Stéphan Z, de la colle dite de "peau de lapin" utilisée pour enduire ses toiles ; que, mécontent du résultat obtenu, il a porté plainte auprès de la direction générale de la consommation et de la répression des fraudes ; que l'analyse d'un échantillon de la colle a révélé l'absence d'ADN de lapin ; que la société V a été poursuivie pour avoir, en avril 2003, par l'intermédiaire de l'un de ses représentants, en l'espèce M.Z Stéphan, agissant pour son compte en qualité de gérant ", trompé son cocontractant sur les qualités substantielles d'une marchandise ;

Attendu que, pour déclarer la prévenue coupable, l'arrêt confirmatif prononce par les motifs propres et adoptés reproduits au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que le gérant de la société poursuivie était expressément désigné par la prévention comme le représentant ayant commis l'infraction pour le compte de la personne morale, la cour d'appel a justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme.

Rejette le pourvoi.