CA Lyon, 7e ch., 2 octobre 2009, n° 08-00666
LYON
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Brejoux
Conseillers :
Mme Carrier, M. Wyon
Par jugement contradictoire, en date du 08 novembre 2007, le Tribunal de grande instance de Saint-Etienne, saisi des poursuites à l'encontre de X, prévenu :
- d'avoir dans le département de la Loire, à Saint-Etienne en tout cas sur le territoire national, et depuis temps n'emportant pas prescription, courant 2002, 2003 et 2004, après avoir démarché diverses personnes selon liste ci-jointes, à son domicile, sa résidence ou son lieu de travail, en avoir exigé ou obtenu de celui-ci ou celle-ci, directement ou indirectement, une contrepartie ou un engagement avant l'expiration du délai de réflexion de 7 jours, en l'espèce en proposant des services de dépannage.
infraction prévue et réprimée par art. L. 121-21, L. 121-25, L. 121-26 et L. 121-28 du Code de la consommation.
- d'avoir dans le département de la Loire, à Saint-Etienne en tout cas sur le territoire national, et depuis temps n'emportant pas prescription, courant 2002, 2003 et 2004, effectué une publicité comportant, sous quelque forme que ce soit des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur portant sur les prix en conditions de vente de services ainsi que sur les motifs ou procédés d'une vente ou d'une prestation de services, en diffusant des documents publicitaires faisant référence à des prix TTC qui n'en étaient pas et sur lesquels était appliqué un taux de TVA lors de la facturation et promettant une intervention " jour/nuit " et " dans l'heure dans tout le département " alors que celle-ci se faisait au bout de plusieurs heures d'attente (Monsieur T - 6 heures, Monsieur B - 3 heures).
infraction prévue et réprimée par art. L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6 et L. 213-1 du Code de la consommation.
- d'avoir dans le département de la Loire, à Saint-Etienne en tout cas sur le territoire national, et depuis temps n'emportant pas prescription, courant 2002, 2003 et 2004, par quelque moyen que ce soit, même par l'intermédiaire d'un tiers, étant partie ou non au contrat, trompé ou tenté de tromper Yvette G, les époux D, Mireille R, les époux B, Bruna Z, Odette P, Suzanne C, Ignazio T, Mathilde B, contractants, sur la nature, les qualités substantielles, la quantité des marchandises ou de la prestation de services, en l'espèce en leur facturant un forfait " petites fournitures " de 20,95 euro hors TVA ne correspondant à aucune prestation identifiée et justifiée.
infraction prévue et réprimée par art. L. 213-1, L. 216-1, L. 216-2 et L. 216-3 du Code de la consommation.
Sur l'action publique :
a dit que, du fait de sa liquidation judiciaire, la société Y sera recitée à une audience ultérieure,
déclaré X coupable des faits de publicité trompeuse s'agissant de l'intervention de la société Y dans le délai d'une heure et sur tout le département,
l'a relaxé du surplus de la prévention,
l'a condamné à une peine d'amende de 1 500 euro, ainsi qu'au paiement du droit fixe de procédure.
Sur l'action civile :
a reçu Madame Françoise M, Mademoiselle Sandra S, Monsieur Jean S et Madame Laurence R en leur constitution de partie civile,
les a déboutés de leur demande du fait de la relaxe partielle de X.
La cause a été appelée à l'audience publique du 4 septembre 2009, en laquelle :
Monsieur Wyon, conseiller, a fait le rapport,
Il a été donné lecture des pièces de la procédure,
Le prévenu a fait défaut,
La partie civile a écrit à la cour le 27 août 2009,
Monsieur Feron, avocat général, a résumé l'affaire et a été entendu en ses réquisitions,
Sur quoi, la cour a mis l'affaire en délibéré ; après en avoir avisé les parties présentes, elle a renvoyé le prononcé de son arrêt à l'audience publique de ce jour, en laquelle, la cause à nouveau appelée, elle a rendu l'arrêt suivant :
FAITS ET PROCÉDURE :
Attendu qu'il ressort de la procédure et des débats les faits suivants :
Saisie de plusieurs réclamations, la DDCCRF de la Loire a dressé le 23 février 2003 un procès-verbal contre la Sarl Y 42 et son gérant de l'époque, X.
Il a été constaté par les agents de la DDCCRF que de très nombreux documents publicitaires de la société Y avaient été distribués dans les boites aux lettres de la région stéphanoise, promettant une " intervention rapide jour et nuit, 7 jours sur 7 ", " une intervention en urgence à toutes heures ", ou encore " nuit et jour ".
Par ailleurs, la Sarl Y a fait paraître dans l'annuaire téléphonique " les pages jaunes " des encarts publicitaires dans les rubriques dépannages, électricité, plomberie, chauffage, serrurerie, stores et volets roulants, vitrerie, promettant une " intervention 7 jours sur 7 dans l'heure sur tout le département ", ou jour et nuit, et dans la rubrique dépannages un encart annonçant " une intervention dans l'heure sur tout le département " en serrurerie, plomberie, électricité, chauffage, sanitaire et vitrerie.
Or deux clients domiciliés à Saint-Etienne, Madame T et Monsieur B ont du respectivement attendre 6 heures pour un dépannage de plomberie, et 3 heures pour un dépannage en serrurerie.
D'autre part, neuf clients de l'entreprise Y 42 se sont vu facturer un forfait petites fournitures d'un montant de 20,95 euro HT, sans justificatif. X a expliqué qu'il s'agissait d'un forfait supposé couvrir les accessoires non compris dans le matériel installé.
Les agents de la DDCCRF ont également constaté qu'un certain nombre de clients qui avaient eu recours en urgence aux services de la société Y s'étaient vu proposer des devis correspondant à des travaux d'une importance et d'un coût dépassant largement les besoins d'un simple dépannage initial. Les employés de la société Y facturaient et exigeaient le règlement des travaux sur le champ.
Par jugement en date du 8 novembre 2007, le Tribunal correctionnel de Saint-Etienne a statué comme il est en tête du présent arrêt.
Le ministère public a relevé appel principal de ce jugement le 15 novembre 2007.
Madame Françoise M, en qualité de partie-civile, a interjeté appel contre X des dispositions civiles du jugement le 7 décembre 2007.
X a été cité pour l'audience du 4 septembre 2009 par acte d'huissier de justice en date du 21 août 2009 remis à parquet.
Madame Françoise M a été citée pour l'audience du 4 septembre 2009 par acte d'huissier de justice remis à domicile le 20 juillet 2009, l'accusé de réception ayant été signé le 22 juin 2009.
MOTIFS :
en la forme :
Attendu que les appels du ministère public et de Françoise M, partie-civile venant aux droits de sa mère décédée Madame B, interjetés dans les formes et délais légaux, sont réguliers et recevables ;
sur le fond :
I- Sur l'action publique :
- tromperie :
Attendu que par des motifs pertinents que la cour adopte, le tribunal a justifié sa décision de relaxe de ce chef ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris sur ce point ;
- publicité mensongère :
Attendu qu'il ressort suffisamment des déclarations non contestées des clients T et B que la Sarl Y n'a pas tenu dans ces deux cas ses engagements publicitaires en matière de délais d'intervention ; que le délit est constitué ;
- infraction à la réglementation sur le démarchage à domicile :
Attendu qu'entrent dans le cadre légal du démarchage à domicile, dès lors qu'ils ne sont plus strictement nécessaires pour rétablir le fonctionnement normal de l'installation, les travaux qui par leur nature, leur objet ou leur montant dépassent largement le cadre d'un simple dépannage ;
Attendu qu'en l'espèce, il a notamment été constaté qu'à la suite du mauvais fonctionnement d'une serrure, M et Mme D ont accepté des travaux pour un montant de 978 euro, Mme C pour 413 euro, Mme Z pour 682 euro, Mme D pour 767 euro, M. T pour 835 euro ; qu'à la suite d'une panne électrique, Mme R a accepté un devis pour 962 euro, Madame B pour 1 002 euro, M et Mme M pour 2 628 euro ; qu'à la suite du mauvais fonctionnement d'un néon, Mme P s'est vu facturer 706 euro de travaux ; que pour un débouchage de canalisation, Madame R s'est vu facturer 1 262 euro de travaux ; que pour une fuite, Mme E s'est vu facturer 766 euro de travaux ;
Attendu que ces travaux ont bien été commandés par ces clients à l'occasion de la venue à leur domicile des employés de Y ;
Que ceux-ci ont facturé les travaux aux clients, et ont demandé et perçu le paiement immédiat de ces travaux ;
Que si l'on s'en réfère à leur nature et à leur coût, ces travaux dépassaient manifestement le cadre d'un simple dépannage ; que le délai de rétractation de sept jours exigé par l' article L. 121-25 du Code de la consommation aurait dû être respecté; que le délit est constitué et qu'il convient d'infirmer sur ce point le jugement entrepris ;
Attendu, s'agissant de la peine, que les délits commis relèvent de pratiques malhonnêtes facilitées par l'urgence des interventions et érigées en mode de fonctionnement commercial ; qu'il s'agit d'agissements générant pour les victimes des préjudices importants, et pour le prévenu des profits substantiels ; qu'il convient en conséquence de réformer la décision sur la peine et de porter l'amende à 5 000 euro ; qu'il convient également de prononcer la peine complémentaire de publication prévue par l' article L. 121-4 du Code de la consommation ;
II- Sur l'action civile :
Attendu que Françoise M, partie civile appelante, venant aux droits de sa mère décédée Madame B, a écrit pour faire savoir qu'elle ne se présenterait pas à l'audience ; que tout comme en première instance, elle ne formule aucune demande.
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt de défaut à l'égard du prévenu, et contradictoire à signifier à l'égard de Madame M partie-civile, en matière correctionnelle, après en avoir délibéré conformément à la loi, Déclare recevables les appels formés par le ministère public et la partie civile ; - sur l'action publique : - réforme le jugement entrepris ; statuant à nouveau, renvoie X des fins de la poursuite du chef de tromperie ; le déclare coupable des délits de publicité trompeuse et d'infractions en matière de démarchage à domicile qui lui sont reprochés ; le condamne en répression à une amende de 5 000 euro ; ordonne la publication d'un extrait du présent arrêt dans le quotidien le Progrès, édition de Saint - Etienne ;- sur l'action civile : constate que Françoise M ne formule aucune demande ; confirme la décision entreprise sur la recevabilité de sa constitution de partie-civile ; Dit que le condamnés sera tenu au paiement du droit fixe de procédure, Dit que dans la mesure de la présence effective du condamné au prononcé de la décision, le président l'a avisé de ce que, s'il s'acquitte du montant de l'amende et du droit fixe de procédure dans un délai d'un mois à compter de ce jour, ce montant est diminué de 20 % sans que cette diminution puisse excéder 1 500 euro, ce paiement ne faisant pas obstacle à l'exercice des voies de recours.