CA Nîmes, 1re ch. civ. B, 22 juin 2010, n° 08-05563
NÎMES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Automobiles SP Motors (SAS)
Défendeur :
Savoye, Automobiles Hyundai France (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Deltel
Conseillers :
Mme Thery, M. Testud
Avoués :
SCP Curat - Jarricot, SCP Pomies - Richaud - Vajou, SCP Pericchi
Avocats :
Mes Jaouen, Glaucere, Selarl Leroy
FAITS CONSTANTS ET PROCÉDURE :
Par déclaration déposée le 15 décembre 2008 dont la régularité n'est pas critiquée, la SAS Automobiles Motors a interjeté appel du jugement rendu le 3 novembre 2008 par le Tribunal de grande instance d'Avignon qui a :
- prononcé la résolution du contrat de vente du véhicule Type Galloper de marque Hyundai consenti par la SAS Automobiles SP Motors à Madame Savoye le 1er juillet 2004,
- en conséquence, condamné la SAS Automobiles SP Motors à restituer à Madame Savoye la somme de 13 750 euro correspondant au prix de vente du véhicule,
- dit que par suite de la résolution, Madame Savoye est tenue de restituer le véhicule à la SAS Automobiles SP Motors,
- condamné en outre la SAS Automobiles SP Motors à payer à Madame Savoye les sommes de :
* 1 500 euro à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance,
* 1 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- déclaré la demande de garantie de la SAS Automobiles SP Motors à l'encontre de la SAS Automobiles Hyundai France recevable en la forme,
- débouté la SAS Automobiles SP Motors de sa demande de garantie à l'encontre de SAS Automobiles Hyundai France,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de la SAS Automobiles SP Motors ni de la SAS Automobiles Hyundai France,
- condamné la SAS Automobiles SP Motors aux entiers dépens,
- rejeté toutes autres prétentions.
Pour se déterminer ainsi, le premier juge a considéré que Madame Savoye était fondée à obtenir la condamnation du vendeur de son véhicule au titre de la garantie des vices cachés mais que la SAS Automobiles Hyundai France n'était pas tenue à garantie en l'absence d'un lien contractuel justifiant ladite mise en jeu de la garantie.
MOYENS ET DEMANDES :
Dans ses dernières conclusions signifiées le 16 avril 2009 auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé sur l'argumentation, la SAS Automobiles SP Motors demande la réformation du jugement pour qu'il soit jugé qu'elle n'est pas tenue pour responsable du vice caché et être mise hors de cause.
Elle demande que la SAS Automobiles Hyundai France soit condamnée à la relever et garantir de toutes les condamnations mises à sa charge.
Elle réclame la condamnation solidaire de Madame Savoye et de la SAS Automobiles Hyundai France à lui payer une somme de 1 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre celle aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP Curat-Jarricot, avoués.
Au terme de ses dernières écritures en réplique signifiées le 4 août 2009 auxquelles il convient également de se référer pour plus ample exposé sur l'argumentation, la SAS Automobiles Hyundai France conclut ainsi :
Sur l'appel principal formé par la SAS Automobiles SP Motors à l'encontre du jugement du 3 novembre 2008 par le Tribunal de grande instance d'Avignon ;
Constater que la SAS Automobiles SP Motors ne prouve pas qu'il existe un lien contractuel entre le véhicule de Madame Savoye et la SAS Automobiles Hyundai France ;
Juger en tout état de cause que la SAS Automobiles Hyundai France n'est pas le vendeur, l'importateur ou le constructeur du véhicule de Madame Savoye ;
Constater que la SAS Automobiles Hyundai France a toujours contesté être le vendeur, l'importateur ou le constructeur du véhicule de Madame Savoye ;
Constater que la SAS Automobiles Hyundai France n'est pas la filiale du constructeur coréen Hyundai Motor ;
Confirmer en conséquence le jugement du Tribunal de grande instance d'Avignon du 3 novembre 2008 en ce qu'il a " débouté la SAS Automobiles SP Motors de sa demande de garantie à l'encontre de la SAS Automobiles Hyundai France " ;
Sur l'appel incident formé par la SAS Automobiles Hyundai France à l'encontre du jugement du 3 novembre 2008 par le Tribunal de grande instance d'Avignon ;
A titre subsidiaire ;
Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
" Prononcé la résolution du contrat de vente du véhicule type Galloper de marque Hyundai consenti par la SAS Automobiles SP Motors à Madame Savoye le 1er juillet 2004 ;
En conséquence, condamné la SAS Automobiles SP Motors à restituer à Madame Savoye la somme de 13 750 euro correspondants au prix de vente du véhicule ;
Dit que par suite de la résolution, Madame Savoye est tenue de restituer le véhicule à la SAS Automobiles SP Motors " ;
Et statuant à nouveau ;
Constater que Madame Savoye a introduit son action au delà du bref délai posé par l'article 1648 du Code civil ;
Constater que la SAS Automobiles SP Motors a pareillement introduit son action au delà du bref délai posé par l'article 1648 du Code civil ;
Dire et juger que tant l'action de Madame Savoye que l'action de la SAS Automobiles SP Motors sont tardives ;
Débouter en conséquence la SAS Automobiles SP Motors de toutes ses demandes à l'encontre de la SAS Automobiles Hyundai France ;
A titre plus subsidiaire encore ;
Constater l'absence de caractère contradictoire à l'égard de la SAS Automobiles Hyundai France des trois rapports d'expertise produits par Madame Savoye et la SAS Automobiles SP Motors ;
Rejeter les rapports d'expertise, lesquels sont inopposables à SAS Automobiles Hyundai France ;
Débouter en conséquence la SAS Automobiles SP Motors en toutes ses demandes à l'encontre de la SAS Automobiles Hyundai France ;
En tout état de cause, condamner la SAS Automobiles SP Motors à verser à la SAS Automobiles Hyundai France une somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Au terme de ses dernières écritures en réplique signifiées le 17 novembre 2009 auxquelles il convient également de se reporter pour plus ample exposé sur l'argumentation, Madame Martine Savoye née Ponzo conclut en ces termes :
Confirmer au principal les dispositions du jugement du Tribunal de grande instance d'Avignon du 3 novembre 2008 en ce qu'il a prononcé la résolution du contrat de vente du véhicule Hyundai Type Galloper consentie à la SAS Automobiles à Madame Savoye le 1er juillet 2004 ;
Et ce sur les bases des articles 1641 et 1644 du Code civil ;
Dire et juger qu'il ne peut être reproché à Madame Savoye de ne pas avoir engagé la procédure à bref délai ;
Condamner la SAS Automobiles SP Motors à restituer à Madame Savoye le prix de vente d'un montant de 13 750 euro outre intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance, y ajoutant ;
Faisant droit à l'appel incident de la concluante ;
Condamner la SAS Automobiles SP Motors à verser la somme de 13 698,63 euro représentant le gardiennage du véhicule facturé par la société Auto Moto Center en date du 5 novembre 2009 ;
Condamner la SAS Automobiles SP Motors à payer 3 000 euro de dommages et intérêts en réparation des nombreux tracas et surtout de la privation de jouissance du véhicule à chaque panne survenue et encore actuellement ;
Condamner la SAS Automobiles SP Motors à payer 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
La condamner aux entiers dépens de la procédure d'appel distraits au profit de la SCP Pomies-Richaud-Vajou ;
La débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires.
DISCUSSION :
Madame Martine Ponzo épouse Savoye a acquis le 1er juillet 2004 un véhicule automobile de marque Hyundai type Galloper.
Par acte du 6 juillet 2007 elle a assigné son vendeur, la SAS Automobiles SP Motors, pour obtenir la résolution de la vente pour vice caché.
Elle a respecté le bref délai puisque son assignation a été faite six mois après un compte rendu d'expertise amiable et contradictoire rédigé par le Cabinet GFD qui a confirmé les dysfonctionnements du véhicule et notamment la perméabilité du bloc moteur constitutif d'un vice caché évident qui n'avait pas encore été clairement déterminé avant cette expertise.
L'article 1648 du Code civil qui impose que l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un bref délai a été respecté puisque ledit délai a commencé à courir le 1er mars 2007 date du rapport d'expertise et de la découverte du vice.
I - Sur la demande principale
Rapidement après son achat du 1er juillet 2004, Madame Savoye s'est aperçue du mauvais fonctionnement de son véhicule et son assureur a missionné un expert qui a constaté le 14 octobre 2004 l'existence d'une culasse fendue. Début 2005 des réparations ont été faites mais le 11 mai 2006 une nouvelle panne s'est produite similaire à la panne initiale.
Le 22 juin 2006 une expertise contradictoire a été réalisée aux Etablissements Hyundai du Pontet qui a permis d'établir la présence d'un important refoulement du liquide de refroidissement au niveau du vase d'expansion après fonctionnement. Après démontage du moteur, il était alors constaté que le cylindre n°1 est corrodé mais que le joint de culasse et la culasse sont intacts. L'expert a estimé que les désordres étaient la conséquence d'un défaut de conception du moteur et plus particulièrement du système de refroidissement. Il a chiffré la remise en état à 8 441,82 euro.
Le 1er mars 2007 une nouvelle expertise contradictoire a confirmé les précédentes constatations. A cette date, le véhicule avait effectué environ 15 000 km en trois ans.
Il est ainsi établi par les trois expertises du Cabinet GFD que le véhicule est affecté d'un vice caché qui le rend impropre à son usage.
La faute du conducteur étant exclue par les expertises, ce sont les Etablissements Automobiles SP Motors vendeur et réparateur du véhicule qui en leur qualité de professionnel ont manqué à leur obligation de conseil et de résultat.
En application des dispositions de l'article 1641 du Code civil la résolution du contrat de vente doit être prononcée. La SAS Automobiles SP Motors sera en conséquence condamnée à restituer à Madame Savoye la somme de 13 750 euro correspondant au prix du véhicule et celle-ci sera tenue de rendre ledit véhicule au vendeur compte tenu du choix qu'elle a fait en application de l'article 1644 du Code civil.
Madame Savoye a subi des tracasseries diverses et de la privation de jouissance de son véhicule résultant des pannes, des réparations et des expertises. La somme de 1 500 euro qui lui a été allouée à titre de dommages et intérêts au titre de l'article 1645 du Code civil doit être confirmée. Appelante incidente, elle est bien fondée à réclamer paiement de la somme de 13 698,63 euro correspondant aux frais de gardiennage du véhicule facturés le 5 novembre 2009 par la société Auto Moto Center.
II - Sur l'appel en garantie
Aux termes de l'article 1641 du Code civil seul le vendeur est tenu à la garantie légale des vices cachés et l'article 1315 alinéa 1er dudit Code stipule que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Bien que l'action du sous acquéreur ou du vendeur intermédiaire contre le vendeur originaire soit recevable, la justification d'un lien contractuel direct ou découlant d'une chaîne de contrats translatifs de la propriété du véhicule avec le vendeur originaire s'impose.
Pas davantage en cause d'appel qu'en première instance la SAS Automobiles SP Motors ne produit une facture ou un écrit qui prouverait l'existence d'un quelconque lien contractuel entre le véhicule et la SAS Automobiles Hyundai France. Elle se contente de présumer l'existence d'un lien contractuel en postulant que le véhicule a été nécessairement introduit en France par la société Hyundai France en sa qualité d'importateur exclusif de la marque. Il est démontré qu'en réalité le véhicule a été initialement importé en Belgique et que la société Automobiles Hyundai France est l'importateur exclusif pour la France et en aucun cas pour la Belgique.
Lors des diverses expertises du Cabinet GFD la société Hyundai France a maintenu qu'elle ne faisait pas partie de la chaîne contractuelle de vente du véhicule et que sa responsabilité ne pouvait pas dès lors être engagée sur le fondement des vices cachés.
C'est donc avec pertinence que ladite société expose qu'étant ni vendeur, ni distributeur, ni importateur ou constructeur, elle ne peut être débiteur de la garantie des vices cachés.
Ladite société doit être mise hors de cause.
L'équité commande d'allouer à Madame Savoye une somme supplémentaire de 1 000 euro et de 1 000 euro à la SAS Automobiles Hyundai France.
La SAS Automobiles SP Motors qui succombe sur ses demandes est tenue aux entiers dépens.
Par ces motifs, LA COUR, Après en avoir délibéré conformément à la loi, Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort, Réforme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de la SAS Automobiles Hyundai France au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Confirme les autres dispositions du jugement ; Statuant à nouveau ; Condamne la SAS Automobiles SP Motors à payer : - à Madame Savoye la somme de 13 698,63 euro à titre de dommages et intérêts pour les frais de gardiennage du véhicule et celle de 1 000 euro supplémentaire au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, - à la SAS Automobiles Hyundai France la somme de 1 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.