Livv
Décisions

CA Paris, 8e ch. A, 25 septembre 2008, n° 06-03888

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Assurances Générales de France Iart (SA), Atac (SAS)

Défendeur :

Maaf Assurances (SA), Davoust, de Keating (ès qual.), de Neef Herman (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Percheron

Conseillers :

Mmes Bonnan-Garçon, Bouscant

Avoués :

SCP Grappotte Benetreau Jumel, SCP Goirand

Avocats :

Mes Laborie, Blanc

TGI Paris, du 7 sept. 2004

7 septembre 2004

Au cours de l'année 2000, la société Nouvelle O'Clair a commercialisé un combustible pour poêles à usage domestique sous la marque Alaska. Ce produit était distribué par la chaîne de magasins Atac.

Le 3 novembre 2001, un incendie s'est déclaré au domicile de M. Pignol et de sa compagne Mme Wirth demeurant à Cosne sur Loire.

Le 8 novembre 2000, un autre incendie a pris naissance chez Mme Evrard demeurant à Cosne sur Loire.

Les deux familles étaient équipées de poêles dits à pétrole qu'ils alimentaient avec le combustible Alaska acheté dans le magasin Atac.

La Maaf assurances, assureur des deux sinistrés, a indemnisé ses sociétaires.

Une première expertise amiable diligentée par le cabinet Cerutti, expert missionné par les AGF, assureur de la société Atac, a conclu que la cause des sinistres résidait dans l'emploi du produit Alaska qui était défectueux.

La société O'Clair a retiré de la vente les produits incriminés et la société Atac ''a supprimé de ses rayons".

Par ordonnances des 2 mai 2001, 22 novembre 2001 et 29 novembre 2001, M. Jean-Luc Geronimi a été désigné en qualité d'expert.

Au terme de son rapport du 5 août 2002, l'expert a retenu en substance que les incendies : "[sont] résultés de la distribution par la société Atac d'un produit défectueux produit par la société O'Clair sous la marque Alaska La défectuosité du produit conditionné par la société O'Clair [ayant] été la conséquence d'une mauvaise manipulation au sein même de cette société où 20 000 litres de Kerdane, de chez Total, ont été transvasés dans un réservoir renfermant déjà 2 000 litres d'acétone." ;

Par jugement du 7 septembre 2004, le Tribunal de grande instance de Paris a déclaré la société O'Clair et la société Atac responsables in solidum des incendies survenus chez M. Pignol et Mme Evrard, a condamné in solidum la société O'Clair, et la société Atac et la compagnie AGF en sa qualité d'assureur de cette société à payer à la Maaf la somme de 18 439 euro en remboursement des indemnités qu'elle a versées à M. Pignol et Mme Evrard en réparation des dommages qu'ils ont subis avec intérêts au taux légal à compter du jour du paiement subrogatif ainsi que la somme de 1 500 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile, a débouté M. Pignol et Mme Evrard de leurs demandes, a sursis à statuer sur la demande de condamnation du G AN jusqu'à ce qu'une décision définitive soit intervenue sur sa garantie de la société O'Clair pour l'activité à l'origine du sinistre dont cette dernière est responsable, a ordonné le retrait de l'affaire du rôle des affaires en cours et dit qu'elle serait réinscrite au rôle à la demande des parties, a débouté les sociétés O'Clair et Gan Eurocourtage de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en tant que formulée à l'encontre de la Maaf, M. Pignol et Mme Evrard et de la société Atac et AGF, a dit que la société Atac et les AGF conserveraient à leur charge les frais irrépétibles qu'ils auront exposé, a condamné in solidum la société O'Clair, la société Atac et les AGF aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise.

La société Atac et son assureur la compagnie AGF ont relevé appel de cette décision.

Par jugement du 4 novembre 2004, le Tribunal de grande instance de Paris a considéré que la compagnie Gan devait garantir la société Nouvelle O'Clair des conséquences à l'égard des tiers du sinistre consécutif au défaut de conditionnement du produit défectueux commercialisé du 13 au 15 septembre 2000 sous le nom Alaska et des préjudices liés à ce sinistre dont la réparation sera réclamée par les victimes.

Il n'a pas été interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance du 24 janvier 2006, le conseiller de la mise en état a constaté l'interruption de l'instance par l'effet du jugement du Tribunal de commerce de Pontoise prononçant la liquidation judiciaire de la société la société Cosode dont le nom commercial est société Nouvelle O'Clair avec pour liquidateur Maître de Keating et ordonné le retrait du rôle dans l'attente de la reprise de l'instance par le liquidateur.

Un accord est intervenu entre les parties (Maaf, Evrard, Pignol, et Gan Eurocourtage Iard) le 15 mars 2007 dans les termes suivants :

"Article 1 :

Il a été versé par la compagnie Gan Eurocourtage Iard la somme de 15 390,04 euro pour le préjudice matériel.

A titre de transaction, de manière définitive et forfaitaire, la compagnie Gan Eurocourtage Iard versera à la Maaf les sommes suivantes :

-1) dommages matériels :

préjudice matériel de Mme Evrard : 5 661,20 euro

préjudice matériel de M. Pignol : 13 350,73 euro

total: 19 011,93 euro

à déduire le règlement reçu : 15 390,04 euro

soit un solde de : 3 621,89 euro

- 2) les intérêts au taux légal : 2 184,14 euro

- 3) le préjudice moral : 1 000 euro pour Mme Evrard

1 000 euro pour M. Pignol

- 4) l'article 700 : 2 200 euro

- 5) les dépens

honoraires d'expertise de M. Geromini : 914, 79 euro

état de frais de Me Blanc : 246,27 euro

état de frais de différents avoués : sur justificatifs

état de frais d'assignation et de signification : sur justificatifs

Article 2 :

Ces sommes seront versées à la Maaf dans un délai de 15 jours à compter de la signature

de toutes les parties.

Article 3 :

Les parties conviennent expressément que la présente transaction et les sommes versées en exécution des présentes terminent définitivement leur litige. En échange de ces versements, le même jour et par le même acte, les parties se désistent mutuellement de toute instance et action concernant les dommages ci-dessus rappelés.

Article 4 :

A défaut de règlement des sommes prévues au protocole, celui-ci deviendra nul et non avenu et les parties retrouveront l'intégralité de leurs droits et action.

En cas de différend pour l'interprétation la validité et l'exécution des présentes, et plus généralement pour tout litige auquel le présent accord a donné lieu, il est expressément fait attribution de compétence aux tribunaux de Paris.

Article 6 :

Chacune des parties déclare avoir pris conseil, avant la signature du présent protocole et que son consentement libre, personnel et traduit sa volonté éclairée.

Article 7 :

Sous réserves de la parfaite exécution des présentes, le présent protocole, compte tenu des

• concessions réciproques entre les parties, constitue une transaction au sens de l'article

• 2044 et suivant du Code civil.

D'un commun accord entre les parties, la présente transaction, intervenu librement après négociation, est soumise aux dispositions de l'article 2052 du Code civil. "

La société Cosode dont le nom commercial est société Nouvelle O'Clair a fait l'objet d'un jugement de liquidation du Tribunal de commerce de Pontoise du 20 juillet 2005, Maître de Keating étant désigné en qualité de liquidateur.

Prétentions des parties :

Vu les conclusions de la SA Maaf, M. Pignol et Mme Evrard en date du 25 octobre 2007 tendant à ce qu'ils leur soit donné acte de ce qu'ils renoncent à toutes demandes contre les autres parties au litige et au débouté de la société Atac et des AGF de toutes demandes à leur encontre ;

Vu les conclusions de la compagnie Gan Eurocourtage Iard venant aux droits de CGU Courtage en date du 10 septembre 2007 tendant à ce que soit donné acte à SA Maaf, M. Pignol et Mme Evrard de leur renonciation à toutes demandes contre toutes les parties au litige du fait du protocole d'accord régularisé entre eux et la compagnie Gan le 20 mars 2007, à ce qu'il lui soit donné acte de son acceptation de cette renonciation, au débouté de la société Atac et la société AGF de leurs demandes à son encontre, à ce qu'il soit constaté que la compagnie Gan n'est pas à l'origine de la mise en cause de la société Atac et son assureur devant le Tribunal de grande instance de Paris par , SA Maaf, M. Pignol et Mme Evrard, en conséquence au débouté pur et simple de la société Atac et son assureur de leurs demandes en application de l'article 700 du Code de procédure civile, subsidiairement à la réduction de la somme sollicitée en application de cet article, au débouté de la société Atac et son assureur de leurs demandes consistant

* dans la prise en charge les honoraires de l'expert ;

Vu les conclusions de la compagnie AGF et de la société Atac en date du 24 août 2007 tendant à l'irrecevabilité en raison de la prescription de l'action engagée par la Maaf, M. Pignol et Mme Evrard à rencontre de la société Atac et la compagnie AGF, à leur mise hors de cause, à titre subsidiaire et dans tous les cas à la condamnation de Maître de Keating ès-qualités de liquidateur de la société Cosode dont le nom commercial est société Nouvelle O'Clair et la compagnie Gan solidairement à les garantir de toutes condamnations prononcées à leur encontre sans application de la franchise, à la condamnation in solidum de SA Maaf, M. Pignol et Mme Evrard et la compagnie Gan Eurocourtage Iard à leur payer 700 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et la somme de 16 241,21 euro au titre des frais d'expertise ;

Vu la dénonciation de l'assignation en intervention forcée de la SA Maaf assurances à l'encontre de Maître de Keating, ès-qualités de liquidateur de la société COSODE dont le nom commercial est société Nouvelle O'Clair ;

Sur ce la cour :

Considérant qu'il convient de donner acte à la SA Maaf, M. Pignol et Mme Evrard de ce qu'ils renoncent à toutes demandes contre les autres parties au litige ;

Considérant qu'il convient de donner acte également à Gan Eurocourtage Iard venant aux droits de CGU Courtage de son acceptation de cette renonciation ;

Considérant que ne demeurent en question que les demandes formées contre Maître de Keating ès-qualités de liquidateur de la société Cosode dont le nom commercial est société Nouvelle O'Clair et la compagnie Gan par la compagnie AGF et la société Atac ;

Considérant qu'il n'est pas contesté et résulte des conclusions de l'expert :

- que le produit Alaska était impropre à l'usage pour lequel il a été vendu à savoir comme combustible pour poêle à pétrole puisqu'il contenait environ 11 % d'acétone alors qu'un échantillon témoin du produit non défectueux n'en renferme que des traces négligeables,

- que ce taux d'acétone anormalement élevé a rendu le produit dangereux en raison du pouvoir solvant de l'acétone sur les matières plastiques, ce qui a eu pour conséquence de provoquer une attaque du matériau constituant les réservoirs mobiles des poêles et un défaut d'étanchéité provoquant le déversement du combustible et dans un second temps son inflammation ;

Considérant que la société O'Clair n'a jamais contesté avoir été fabricant du produit dangereux ;

Considérant qu'il n'est pas contesté non plus qu'en application de l'article 1386-1 du Code civil, la société O'Clair en sa qualité de producteur d'un produit n'offrant pas une sécurité normale d'utilisation est responsable du dommage causé ; que la société Atac n'a pas vendu le produit sous sa propre marque et ne peut en conséquence être considérée comme un fournisseur au sens de l'article précité ;

Considérant que, dans la mesure où le producteur est identifié, la responsabilité de la société Atac ne peut être retenue ;

Considérant que la mise en cause de la société Atac en tant que cocontractant était indispensable, que la Maaf Assurances, Mme Evrard et M. Pignol qui renoncent expressément à leurs demandes contre Atac et les AGF et donc au bénéfice du jugement à leur égard, ne sauraient être condamnés à payer les frais engagés par la société Atac ; que cette condamnation incombe à la compagnie Gan

Euro Courtage Iard ;

Considérant qu'eu égard à la considération d'équité les demandes en application de l'article 700 du Code de procédure civile ne sauraient aboutir ;

Considérant qu'il convient de condamner la compagnie Gan Eurocourtage Iard aux dépens de première instance et d'appel comprenant les frais d'expertise ;

Par ces motifs : Donne acte à la SA Maaf, M. Pignol et Mme Evrard de ce qu'ils renoncent à toutes demandes contre les autres parties au litige, Donne acte également à Gan Eurocourtage Iard venant aux droits de CGU Courtage de son acceptation de cette renonciation, Infirme le jugement déféré en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société Atac et la garantie des AGF, Statuant à nouveau, Déboute les parties de toutes les demandes formées à leur encontre, Condamne la compagnie Gan Eurocourtage Iard à payer à la compagnie AGF et la société Atac la somme de 16 241,21 euro au titre des frais exposés, Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la compagnie Gan Eurocourtage Iard aux entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise et dit qu'ils pourront être recouvrés en application de l'article 699 du Code de procédure civile.