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Décisions

CA Rennes, 1re ch. B, 10 octobre 2008, n° 07-04159

RENNES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Pasek

Défendeur :

Blandin

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Piperaud

Conseillers :

Mme Nivelle, M. Gimonet

Avoués :

SCP Jean Loup Bourges & Luc Bourges, SCP Castres, Colleu, Perot & Le Couls-Bouvet

Avocats :

Me Boistard, SCP Quiniou Cocaud-Chatteleyn Marchand

TGI Nantes, du 14 mars 2007

14 mars 2007

Par jugement du 14 mars 2007 le Tribunal de grande instance de Nantes a prononcé la résolution pour vice caché du contrat de vente d'une automobile conclu le 23 juillet 2003 entre Joanna Pasek et Olivier Blandin, a condamné Joanna Pasek à payer à Olivier Blandin la somme de 14 212,92 euro au titre du prix d'achat et des frais occasionnés, la somme de 4 320 euro à titre de dommages-intérêts et la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, a dit qu'Olivier Blandin devra restituer le véhicule, a ordonné l'exécution provisoire et a condamné la venderesse aux dépens ;

Joanna Pasek a interjeté appel de cette décision et, par écritures du 1er février 2008 exposant ses moyens et arguments, a conclu avant dire droit à ce que soit ordonnée une contre-expertise du véhicule, à l'infirmation du jugement dont appel, au débouté d'Olivier Blandin en toutes ses demandes et à la condamnation de ce dernier à lui payer la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; à titre subsidiaire l'appelante a conclu à la déduction du prix de vente à rembourser du montant des réparations de l'automobile, au débouté d'Olivier Blandin en sa demande de dommages-intérêts et de frais irrépétibles et à la condamnation de l'intimé à lui payer la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; à titre infiniment subsidiaire Joanna Pasek a conclu au débouté des demandes de dommages-intérêts présentées par Olivier Blandin faute de justificatif ;

Par écritures du 2 mai 2008 dans lesquelles il a fait valoir ses moyens et arguments Olivier Blandin a conclu au rejet de l'appel de Joanna Pasek, à la confirmation du jugement dont appel en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente pour vice caché et condamné la venderesse à lui payer les sommes de 14 212,92 euro et de 2 000 euro, au débouté de l'appelante en sa demande de contre-expertise et à sa condamnation à lui payer la somme de 8945 euro à titre de dommages-intérêts et une somme de 2 000 euro au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Sur quoi, la cour :

Considérant qu'il résulte des pièces versées aux débats que le 23 juillet 2003 Joanna Pasek a vendu à Olivier Blandin, au prix de 12 900 euro, un véhicule d'occasion Peugeot 307 qu'elle avait elle-même acheté 'en l'état' pour le prix de 4 200 euro, le 12 mars 2003 à la société Coffy, la facture établie par cette dernière à cette date mentionnant qu'il s'agissait d'une automobile accidentée ;

Considérant qu'Olivier Blandin ayant lui-même accidenté son véhicule le 20 octobre 2003 à 47603 kilomètres l'expert commis à cette occasion par son assureur a constaté d'une part que ce sinistre avait causé des dommages au pare-chocs avant, aux optiques de phare, à la calandre, à l'aile avant gauche et au pare-chocs arrière, dont le coût de la réparation était évalué à la somme de 1 828,50 euro TTC, d'autre part qu'il existait des dommages antérieurs consécutifs à une précédente réparation de qualité douteuse concernant un défaut de finition du passage de roue avant droite, une durite d'eau sommairement modifiée, et une fixation arrière du berceau sur le longeron avant droit déformée, ces derniers défauts rendant le véhicule dangereux et impropre à la circulation ;

Considérant qu'une expertise judiciaire ayant été ordonnée l'expert judiciaire DROUAL a découvert que le véhicule en cause avait été sinistré une première fois à 29117 kilomètres le 25 juin 2002 à la suite d'un choc à l'avant droit qualifié de violent par l'expert d'assurance, lequel l'avait alors examiné et avait évalué à 14 701,96 euro le coût des réparations, et qu'il avait été vendu en cet état accidenté par l'assureur du propriétaire d'alors à la société Coffy précitée ; que dans son rapport l'expert judiciaire a conclu que les dommages constatés sur la caisse et l'avant droit du véhicule, à savoir notamment la déformation de la fixation arrière du berceau sur le longeron avant droit, le déport de trois centimètres sur la gauche de tout le bloc avant du véhicule et le défaut de parallélisme et des valeurs d'angle de chasse et de pivot situées en dehors des tolérances du constructeur avaient pour origine l'accident du 25 juin 2002 et rendaient l'automobile dangereuse et inapte à la circulation ;

Considérant enfin que Joanna Pasek a expliqué dans ses conclusions qu'elle avait acheté le véhicule accidenté pour le compte de son oncle qui l'avait réparé en Pologne puis qui le lui avait restitué ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments, à savoir les conclusions de l'expertise judiciaire fondée sur les constatations techniques faites par les experts des assurances lors des deux sinistres des 25 juin 2002 et 20 octobre 2003, la preuve suffisante qu'à la date de la vente passée le 23 juillet 2003 entre Joanna Pasek et Olivier Blandin l'automobile vendue présentait, à la suite de réparations non conformes aux règles de l'art faites après le sinistre du 25 juin 2002, des désordres affectant le berceau, le longeron et la géométrie et rendant le véhicule dangereux et par conséquent impropre à sa destination ; qu'ainsi la preuve de l'existence de vices cachés au sens de l'article 1641 du Code civil étant rapportée c'est à bon droit que le premier juge a ordonné la résolution de la vente ;

Considérant, sur la restitution par le vendeur du prix de vente à titre de conséquence de la résolution de la vente, que Joanna Pasek est bien fondée à conclure subsidiairement à ce que soit déduit de ce prix le coût des réparations du sinistre du 20 octobre 2003 ; qu'en effet si en cas de résolution d'une vente pour vice caché le vendeur ne peut prétendre à l'indemnisation ni de l'utilisation du bien par l'acheteur ni de la dépréciation éventuellement subi par ce bien, en revanche il peut réclamer la réparation de l'atteinte portée à la chose vendue lorsqu'elle est imputable à son usage anormal par l'acheteur ; qu'il en est ainsi en cas de dégâts causés par le fait de ce dernier; qu'ainsi au titre de la restitution du prix de vente Joanna Pasek sera condamnée à payer à Olivier Blandin la somme de 12 900 euro - 1 828,50 euro = 11 071,50 euro ;

Considérant que l'appelante est également débitrice du coût de la carte grise, soit 99,02 euro ; qu'en revanche ni le montant de 193,74 euro correspondant au coût d'un contrôle de la géométrie du véhicule, exécuté par le garage Bertaud en cours d'expertise judiciaire, ni le montant de 1 020,16 euro représentant les intérêts de l'emprunt souscrit par Olivier Blandin pour financer l'achat du véhicule en cause, sommes allouées par le premier juge, ne constituent des frais occasionnés par la vente au sens de l'article 1646 du Code civil ; qu'ainsi le jugement dont appel sera réformé de ce chef, Joanna Pasek étant condamnée à régler à Olivier Blandin au titre du remboursement du prix de vente et des frais occasionnés par celle-ci la somme de 11 071,50 euro + 99,02 euro = 11 170,52 euro ;

Considérant, sur la demande de dommages-intérêts présentée par Olivier Blandin, qu'elle n'est recevable, en application des dispositions de l'article 1645 du Code civil qu'à la condition que la venderesse ait eu connaissance du vice affectant l'automobile avant la vente ou soit présumée l'avoir connu ;

Considérant, à cet égard, qu'en ayant procédé à l'achat du véhicule accidenté dans le but de le réparer et en le revendant après réparation trois fois plus cher, sans justifier ni alléguer l'avoir utilisé à titre personnel Joanna Pasek s'est comportée comme une professionnelle et est donc présumée avoir eu connaissance du vice ; qu'en conséquence elle doit réparer les préjudices subis par Olivier Blandin en relation de cause à effet avec ces vices ;

Considérant, à cet égard, que c'est à titre de dommages-intérêts que sera allouée à l'acheteur la somme précitée de 1 020,16 euro ; qu'en effet du fait de l'impropriété du véhicule acheté à son usage la charge des intérêts du prêt destiné à son acquisition s'est révélée pour l'essentiel être une dépense inutile pour la réparation de laquelle l'acheteur a droit à des dommages intérêts de ce montant ;

Considérant, sur l'indemnisation du préjudice résultant de l'immobilisation du véhicule, pour laquelle Olivier Blandin réclame la somme totale de 8 625 euro, et des frais de location d'un véhicule de remplacement, soit 320 euro, que force est de constater que l'immobilisation du véhicule Peugeot à compter d'octobre 2003 a d'abord été la conséquence d'un sinistre qui lui est imputable ; qu'en conséquence et compte tenu du rôle causal joué par le vice affectant cette automobile dans son immobilisation et son remplacement par un véhicule de location durant 14 jours il sera accordé à l'intimé la somme de 1 000 euro, soit un total de dommages-intérêts de 2 020,16 euro ;

Considérant que le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a alloué au titre des frais irrépétibles de première instance la somme de 2 000 euro ;

Considérant qu'en cause d'appel chaque partie succombe partiellement en ses prétentions ; qu'ainsi chacune d'elles conservera la charge de ses dépens, les demandes respectives concernant les frais irrépétibles d'appel étant rejetées;

Considérant qu'il sera ajouté au jugement dont appel en ce que le coût de la facture Bertaud, soit 193,74 euro fait partie des frais d'expertise et de référé inclus dans les dépens de première instance ;

Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement du Tribunal de grande instance de Nantes du 14 mars 2007 en ce qu'il a prononcé la résolution du contrat de vente d'une automobile conclu le 23 juillet 2003 entre Joanna Pasek et Olivier Blandin, condamné Joanna Pasek à payer à ce dernier la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et condamné Joanna Pasek aux dépens qui comprendront les frais d'expertise et de référé ; Dit que le coût de la facture Bertaud est inclus dans les frais d'expertise ; Réforme le jugement du 14 mars 2007 en ses autres dispositions ; Condamne Joanna Pasek à payer à Olivier Blandin : la somme de 11 170,52 euro avec intérêts au taux légal à compter du jugement au titre du prix de vente et des frais accessoires ; la somme de 2 020,16 euro à titre de dommages-intérêts ; Déboute les parties de leurs autres demandes ; Laisse à chaque partie la charge de ses dépens d'appel.