CA Paris, 8e ch. A, 4 décembre 2008, n° 07-16538
PARIS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Augay
Défendeur :
Giffard (ès qual.), OVMS (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Percheron
Conseillers :
Mmes Bonnan-Garçon, Bouscant
Avoué :
SCP Lamarche-Bequet-Regnier-Aubert-Regnier-Moisan
Avocat :
Me Tref
M. Augay a, le 20 juillet 2006, acheté à la société OVMS, professionnel de la vente de véhicules automobiles, un véhicule d'occasion de marque Saab pour le prix de 5 000 euro, la facture mentionnant que le véhicule est "vendu en l'état sans aucune garantie".
Le 26 juillet 2006, le véhicule est tombé en panne et a été remorqué auprès des Etablissements AVM (concessionnaire Saab) à Créteil qui ont préconisé le remplacement du turbo.
Une expertise a été diligentée le 10 août 2006 par le cabinet ADR, expert de la compagnie d'assurances de M. Augay qui a rédigé son rapport le 22 novembre suivant.
M. Augay a fait assigner la société OVMS le 30 mars 2007 devant le tribunal d'instance afin d'obtenir, en application des dispositions de l'article 1641 du Code civil, sa condamnation au paiement de la somme de 3 759,38 euro à titre de restitution partielle du prix de vente ainsi que de celle de 430,37 euro à titre de dommages et intérêts.
Par jugement contradictoire du 7 septembre 2007, le Tribunal d'instance de Montreuil sous-bois a débouté M. Augay de l'ensemble de ses demandes.
M. Augay a relevé appel de cette décision le 27 septembre 2007.
Par jugement du 19 octobre 2007, le Tribunal de commerce de Bobigny a prononcé la liquidation judiciaire de la société OVMS et a désigné Maître Giffard en qualité de liquidateur.
Par lettre recommandée du 30 octobre 2007, M. Augay a déclaré sa créance au passif de la société OVMS auprès de Maître Giffard, ès qualités puis a assigné celui-ci en reprise d'instance par acte du 7 janvier 2008 remis à une employée qui a accepté de recevoir la copie.
Par conclusions du 14 janvier 2008 annexées à l'assignation, M. Augay sollicite l'infirmation du jugement et la fixation de sa créance à la liquidation judiciaire de la société OVMS aux sommes suivantes :
- 3 759,38 euro au titre de la réduction du prix de vente, avec intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2007, date de l'assignation,
- 430,37 euro à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice complémentaire,
- 49,84 euro sauf à parfaire au titre des dépens de première instance.
Maître Giffard ès qualités n'a pas constitué avoué.
Sur ce, la cour
Considérant que le premier juge a rappelé que lors des opérations d'expertise, il avait été constaté que l'axe du turbo était cassé ; que le représentant de l'atelier Saab avait indiqué que 'lors d'un stockage important du véhicule, la procédure de remise en route est spécifique ; qu'il faut déposer le turbo pour graisser le système de géométrie variable afin d'éviter toute détérioration du turbo; que cette opération n'a pas été réalisée avant la vente du véhicule' ; que le représentant de la société OVMS avait reconnu que le véhicule était effectivement resté stocké quelque temps dans les locaux sans tourner ;
Qu'il a considéré qu'en l'absence de précision sur la définition d'un stockage important du véhicule, sur les préconisations du constructeur quant au délai au-delà duquel une remise en route spécifique doit être effectuée et sur la durée de l'immobilisation du véhicule en cause, la casse du turbo pouvait avoir d'autres causes et que la preuve d'un vice caché n'était pas rapportée ;
Que M Augay fait valoir au soutien de son appel que le rapport d'expertise établi contradictoirement en présence d'un représentant de la société OVMS démontre que la cause de l'avarie moteur résulte bien de l'absence de révision dans les règles de l'art du véhicule avant la vente ;
Considérant que la panne est intervenue seulement six jours après l'acquisition ;
Que le cabinet d'expertise ADR a énoncé clairement dans son rapport qu'au regard du peu de kilomètres parcourus depuis son acquisition, l'avarie n'aurait pas dû se produire si le véhicule avait été convenablement révisé avant la vente ;
Que ce même cabinet d'expertise a précisé dans un courrier complémentaire du 29 octobre 2007 répondant à la question posée par M. Augay sur les règles de remise en route à respecter lors de l'immobilisation du véhicule, qu'il n'existe aucune note interne à ce sujet mais que tout professionnel de l'automobile doit connaître cette procédure ;
Qu'il a ajouté qu'un défaut de conduite du propriétaire est peu probable ;
Qu'il est ainsi établi que le véhicule vendu était atteint d'un vice caché le rendant impropre à sa destination ;
Que ce vice n'a pu être décelé par M. Augay, simple particulier ignorant les règles spécifiques de remise en route du véhicule après stockage ;
Que ce vice était antérieur à la vente ainsi que l'a retenu l'expert ;
Que la clause de vente du véhicule 'en l'état sans aucune garantie' par un professionnel qui est présumé avoir connaissance du vice ne peut qu'être déclarée abusive et privée d'effet en application de l'article 132-1 du Code de la consommation ;
Qu'il convient, en conséquence, en application des dispositions de l'article 1644 du Code civil, de faire droit à la demande de réduction du prix de vente et de fixation de la créance de M. Augay au montant des réparations effectuées selon facture du 19 décembre 2006 de la société Automobiles du Val de Marne pour la somme de 3 759, 38 euro avec intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2007, date de l'assignation, dont le montant a été déclaré auprès de Maître Giffard et que le cabinet ADR a estimé acceptable ;
Considérant qu'en application de l'article 1645 du Code civil, le vendeur professionnel réputé connaître les vices de la chose vendue est tenu outre la restitution du prix de tous dommages et intérêts envers l'acheteur ;
Que M. Augay qui a acheté le véhicule en cause à un professionnel, justifie avoir loué un véhicule de remplacement pour un coût total de 430,37 euro du 1er août au 26 octobre 2006 suivant factures de la société Hertz ;
Qu'il convient de fixer la créance de M. Augay au titre du préjudice complémentaire au passif de la liquidation de la société OVMS au montant de cette somme qui a fait l'objet d'une déclaration auprès de Maître Giffard ;
Qu'il n'y a pas lieu de fixer au passif de la liquidation, la créance de 49,84 euro au titre des dépens de première instance qui n'a pas été déclarée pour cette somme ;
Considérant que l'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel à concurrence de la somme de 1 500 euro ;
Que Maître Giffard, ès qualités, qui succombe, sera condamné au paiement de cette somme ainsi qu'aux dépens d'appel ;
Par ces motifs, LA COUR, Infirme le jugement, Statuant à nouveau, Fixe la créance de M. Augay au passif de la société OVMS aux sommes suivantes : 3 759,38 euro au titre de la réduction du prix de vente avec intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2007, 430,37 euro à titre de dommages et intérêts ; Condamne Maître Giffard pris en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation de la société OVMS au paiement de la somme de 1 500 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens d'appel dont le recouvrement pourra être poursuivi conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;