Livv
Décisions

CA Paris, 4e ch. sect. 10, 2 juin 2009, n° 09-00518

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

V

Défendeur :

Ministère public, C

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Meridias

Conseillers :

Mme Sarda, M. Reygrobellet

Avocats :

Mes Gerphagnon, Mesle

CA Paris n° 09-00518

2 juin 2009

LA PREVENTION :

V Rémi a été poursuivi sur citation à comparaître à l'audience du Tribunal de grande instance de Meaux pour avoir à Brou sur Chantereine, le 2 mai 2003, trompé Laurent C sur la qualité du véhicule de marque Audi A4 vendu par Rem'Auto pour le prix de 10 366,53 euro

LE JUGEMENT :

Le tribunal, par jugement contradictoire, a relaxé V Rémy du chef d'organisation d'insolvabilité, a déclaré V Rémi coupable de tromperie sur la nature, la qualité substantielle, l'origine ou la quantité d'une marchandise, le 2 mai 2003, à Brou sur Chantereine, infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3, L. 216-8 AL.5 du Code de la consommation

- et, en application de ces articles, l'a condamné à une amende délictuelle de 400 euro ;

ET, SUR L'ACTION CIVILE :

A reçu C Laurent en sa constitution de partie civile,

A condamné Rémi V à lui payer :

- la somme de 15 594,37 euro à titre de dommages-intérêts pour le préjudice matériel ;

- la somme de 200 euro à titre de dommages-intérêts pour le préjudice moral,

- la somme de 600 euro en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale,

- l'a condamné aux dépens de l'action civile,

LES APPELS :

Appel a été interjeté par :

- Maître Keynaud Gaëlle, avocat au barreau de Meaux, au nom de Monsieur V Rémi, le 16 avril 2008, des dispositions civiles et pénales du jugement,

- M. le Procureur de la République, le 17 avril 2008 contre Monsieur V Rémi

DEROULEMENT DES DEBATS :

À l'audience publique du 5 mai 2009, le président a constaté l'identité du prévenu, comparant, libre, assisté de son conseil.

La partie civile était représentée par son conseil.

Maître Gerphagnon et Maître Mesle ont déposé des conclusions, régulièrement visées par le président et le greffier et jointes au dossier de la procédure.

V Rémi a indiqué sommairement les motifs de son appel ;

Monsieur Logelin, avocat général, représentant le Ministère public à l'audience de la cour, a sommairement indiqué les motifs de l'appel interjeté par le Procureur de la République de Meaux;

Monsieur Méridias, président, a fait un rapport oral ;

V Rémi a été interrogé et entendu en ses moyens de défense ;

ONT ETE ENTENDUS

Maître Mesle, avocat de la partie civile, en ses conclusions et plaidoirie ;

Monsieur Logelin, avocat général, en ses réquisitions ;

Maître Gerphagnon, avocat du prévenu, en ses conclusions et plaidoirie ;

V Rémi, qui a eu la parole en dernier.

Le président a ensuite déclaré que l'arrêt serait prononcé le 2 juin 2009 et audit jour, il a été procédé à la lecture du dispositif de l'arrêt par l'un des magistrats ayant participé aux débats et au délibéré, conformément aux dispositions de l'article 485 dernier alinéa du Code de procédure pénale

DECISION :

Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,

Considérant que Rémi V, prévenu, à titre principal, et le Ministère public à titre incident, sont régulièrement appelants du jugement susvisé par lequel ce prévenu a été relaxé du chef d'organisation d'insolvabilité mais a été déclaré coupable de tromperie, à Brou sur Chantereine, le 2 mai 2003, au préjudice de Laurent C sur la qualité d'un véhicule Audi A4 vendu par la société Rem'Auto, dont V était le gérant mais à l'égard de laquelle l'action publique a été déclarée éteinte en raison de la clôture de sa liquidation amiable, et a été condamné de ce chef à 400 euro d'amende, ainsi qu'à payer à Laurent C, constitué partie civile, à titre de dommages-intérêts, les sommes de 15 594,37 euro en réparation du préjudice matériel et 200 euro en réparation du préjudice moral, 600 euro au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, et aux dépens de l'action civile;

Considérant que Rémi V a comparu assisté, alors que la partie civile a comparu volontairement, après avoir été citée à parquet général, représentée par son conseil ;

Considérant que les dispositions du jugement concernant la société Rem'Auto, qui n'est pas appelante ni intimée, et la relaxe de Rémi V du chef d'organisation d'insolvabilité qui ne fait pas l'objet d'un appel de la partie civile et dont le Ministère public indique que son appel incident ne porte pas sur elle, ne sont pas susceptibles de remise en cause devant la cour ;

Considérant que les faits à l'origine du litige et leurs circonstances sont rappelés aux motifs du jugement auxquels il est sur ce point fait référence ;

Considérant sur la tromperie au sens de l'article L. 213-1 du Code de la consommation, qu'il y a lieu de relever, d'une part, que Rémi V a reconnu avoir su, en raison du prix auquel il avait acheté l'Audi A4, que celle-ci avait été accidentée et ne saurait le contester alors qu'il a établi une facture indiquant que "le véhicule est livré dans l'état, sans contrôle technique, ayant subi un choc latéral gauche et arrière" ;

qu'en revanche cette facture, qui n'est pas contresignée par l'acheteur et à laquelle rien ne vient donner date certaine, ne démontre pas qu'elle ait été établie à l'époque de la vente ni qu'elle ait été portée à la connaissance de l'acheteur, qui prétend sans que rien le démente utilement n'avoir été informé que d'un choc léger ; que ces éléments suffisent à caractériser de la part d'un professionnel l'infraction de tromperie sur une qualité substantielle du véhicule, à savoir une information importante sur l'intégrité structurelle du véhicule qui avait subi un accident grave (nécessitant en l'espèce un passage au marbre) sans que l'acheteur en ait été informé ; qu'il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement sur la déclaration de culpabilité ;

Considérant sur la peine, que la gravité de cette tromperie doit être appréciée en tenant compte de ce que, si le prévenu a nécessairement su, pour les raisons énoncées au motif précédent, que le véhicule qu'il vendait à C avait subi des dommages importants, il n'est pas établi que V ait été exactement informé sur l'importance réelle de ces dommages, qui avaient rendu le véhicule économiquement irréparable et devant être soumis à une nouvelle expertise conformément à l'article L. 327-2 du Code de la route, la Matmut assureur du véhicule accidenté n'ayant pas transmis le certificat d'immatriculation au représentant de l'Etat comme il en avait l'obligation légale; que ces circonstances font apparaître la peine de 400 euro d'amende prononcée par les premiers juges comme constituant une juste application au prévenu de la loi pénale ;

Considérant, sur les intérêts civils, que Laurent C, partie civile intimée non appelante, est irrecevable en ses demandes visant la société Rem'Auto et la remise en cause de la relaxe partielle de Rémi V du chef d'organisation d'insolvabilité ;

Considérant, sur la réparation du préjudice résultant de la tromperie, qu'il y a lieu de relever que l'inaptitude du véhicule acheté par la partie civile à l'usage auquel il était destiné n'est pas démontrée, l'attestation sommaire et informelle délivrée le 26 juin 2003 par Ludovic Deleglise étant inopérante et non probante, et les événements consécutifs à la vente démontrant que le véhicule - qui n'avait pas fait l'objet d'une immobilisation administrative en raison des agissements de la Matmut - était utilisable par son acquéreur qui lui a fait passer avec succès en 2003 puis en 2005 le contrôle technique permettant la circulation du véhicule, ce qui a d'ailleurs été le cas puisque le nouveau propriétaire a eu un autre accident de circulation à son volant ; qu'il y a lieu de réformer le jugement sur le montant du préjudice matériel apprécié par les premiers juges en tenant compte d'une immobilisation de longue durée qui n'était pas justifiée et qui n'est pas établie, en réduisant l'évaluation du préjudice en conséquence, ainsi que sur l'évaluation de la perte de valeur du véhicule que l'acheteur a voulu conserver au prétexte de désaccord sur le prix d'équipements secondaires alors que le vendeur acceptait de restituer le prix en cas d'annulation de la vente ; que la cour possède des éléments suffisants d'appréciation du préjudice matériel subi par la victime en conséquence directe de l'infraction pour en évaluer le montant à 5 000 euro ; qu'il convient de confirmer la somme allouée en réparation du préjudice moral ;

Considérant qu'il y a lieu de faire partiellement droit à la demande présentée sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale en portant à 1 200 euro la somme allouée à ce titre par la partie civile pour les deux degrés de juridiction;

Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement. Donne acte à la partie civile de sa comparution volontaire en cause d'appel, Reçoit les appels de Rémi V et du Ministère public. Sur l'action publique, Confirme le jugement sur la relaxe partielle de Rémi V du chef d'organisation d'insolvabilité et sur la déclaration de culpabilité du chef de tromperie sur la qualité d'une marchandise, Le confirme sur la peine, Sur l'action civile, Infirme le jugement, Déclare recevable la constitution de partie civile de Laurent C à l'encontre de Laurent V, Condamne Rémi V à payer à Laurent C ; - 5 000 euro à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel, - 200 euro à titre de réparation du préjudice moral, - 1 200 euro au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, Rejette comme irrecevable ou non fondé le surplus des demandes de la partie civile.