Livv
Décisions

Commission, 22 février 2012, n° 2012-541

COMMISSION EUROPÉENNE

Décision

Concernant l'aide d'État SA.26534 (C 27-10 ex NN 6-09) octroyée par la Grèce en faveur de United Textiles SA

Commission n° 2012-541

22 février 2012

LA COMMISSION EUROPÉENNE,

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et notamment son article 108, paragraphe 2, premier alinéa, vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 62, paragraphe 1, point a), après avoir invité les parties intéressées à présenter leurs observations conformément à l'article 108, paragraphe 2, premier alinéa, du traité (1) et compte tenu de ces dernières, considérant ce qui suit :

I. PROCÉDURE

(1) Après avoir été informée que la Grèce envisageait d'accorder une garantie pour de nouveaux emprunts d'un montant de 35 millions euro destinés au financement de United Textiles, la Commission a demandé aux autorités grecques de présenter leurs observations concernant la mesure en question par lettres du 11 septembre 2008, du 14 octobre 2008, du 20 octobre 2008, du 18 novembre 2008 et du 4 décembre 2008. Les autorités grecques ont fourni des réponses incomplètes par lettres du 15 octobre 2008 et du 10 novembre 2008.

(2) Pour cette raison, le 3 mars 2009, la Commission a adressé à la Grèce une injonction de fournir des informations, conformément à l'article 10, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 659-1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d'application de l'article 93 (*) du traité CE (2), par laquelle elle lui demandait de présenter toutes les informations nécessaires pour apprécier si United Textiles avait reçu une aide d'État et si l'aide était compatible avec le marché intérieur. La Grèce a fourni les informations demandées par lettre du 11 mars 2009.

(3) La Commission a demandé des informations supplémentaires sur la mesure visée au considérant 1, ainsi que sur certaines autres mesures prises en faveur de United Textiles et de ses banques prêteuses, par lettres du 20 mars 2009, du 8 février 2010, du 17 mars 2010, du 19 juillet 2010 et du 23 août 2010. Les autorités grecques ont répondu par lettres du 7 avril 2009, du 25 février 2010, du 26 mars 2010, du 13 août 2010 et du 30 août 2010.

(4) À la demande des autorités grecques, une réunion a eu lieu le 7 juillet 2010. À cette occasion, un nouveau plan de restructuration de United Textiles a été présenté. La société a reconnu que ce plan n'était pas lié à de précédentes mesures de restructuration, qui avaient été adoptées en 2007 et qui avaient échoué.

(5) Par lettre du 27 octobre 2010, la Commission a informé la Grèce de sa décision d'ouvrir la procédure prévue à l'article 108, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) au sujet des mesures suivantes :

a) garantie d'État de mai 2007 ;

b) rééchelonnement de dettes de 2009 portant sur des cotisations de sécurité sociale ;

c) garantie d'État de juin 2010.

(6) Le 31 décembre 2010, la Grèce a présenté ses observations concernant la décision de la Commission d'ouvrir la procédure.

(7) La décision de la Commission d'ouvrir la procédure a été publiée au Journal officiel de l'Union européenne (3). La Commission a invité les parties intéressées à présenter leurs observations sur les mesures en question.

(8) La Commission a reçu les observations de United Textiles les 7 et 9 février 2011. Les observations ont été transmises à la Grèce afin que cette dernière puisse les commenter. Ses observations ont été reçues le 4 mai 2011.

(9) Le 28 juillet 2011, la Commission a demandé aux autorités grecques des renseignements complémentaires. La Grèce a répondu par lettre du 30 août 2011.

(10) À la demande des autorités grecques, une réunion a eu lieu le 4 avril 2011. Lors de cette réunion, les autorités grecques ont présenté leurs arguments concernant les mesures d'aide alléguées.

II. DESCRIPTION DÉTAILLÉE DE L'AIDE PRÉSUMÉE

II. a. Bénéficiaires potentiels

United Textiles

(11) United Textiles est une grande entreprise textile grecque cotée à la Bourse d'Athènes. En 2008, elle a réalisé 45 % de ses ventes en Grèce (38 % en 2007), 54 % dans d'autres pays de l'Union européenne (60 % en 2007) et 1 % dans des pays tiers (2 % en 2007).

(12) En 2009, le total de ses actifs était de 201,7 millions euro et son chiffre d'affaires de 4,5 millions euro (ventes limitées des stocks). Les ventes des années précédentes s'élevaient à 30,6 millions euro en 2008 et 74,7 millions euro en 2007. Fin 2009, l'entreprise employait 839 personnes. La société possède quatre filiales dans trois pays : la Bulgarie, l'Albanie et l'ancienne République yougoslave de Macédoine. Son actionnaire principal est une société offshore dénommée European Textiles Investments Ltd (Maurice).

(13) United Textiles a pour activité la production de vêtements, de fibres et de tissus. Elle réalise ses ventes à la fois sur les marchés de gros et sur les marchés de détail. Elle possède 12 usines dans différentes régions de la Grèce. Ces usines, ainsi que celles des sociétés filiales mentionnées au considérant 12 ont cessé leur activité depuis 2008, faute de fonds de roulement.

(14) La situation de la société se détériore constamment depuis au moins 2004, avec une diminution progressive des ventes, un résultat net avant impôt négatif et des fonds propres négatifs depuis 2008. En raison de ce problème, la société peut être dissoute conformément à la législation grecque (4).

(15) D'après les rapports annuels de la société, depuis 2001, le soutien des banques prêteuses à la société est limité, avec une diminution des facilités de crédit et des prêts. À partir de juin 2008, une grande partie des activités ont été interrompues. En mars 2009, la production a presque totalement cessé. En juillet 2008, l'actionnaire principal de la société a décidé de ne pas participer à une augmentation de capital prévue. Depuis 2008, presque tous ses prêts bancaires sont en souffrance. Depuis février 2010, la cotation de l'action de la société est suspendue à la Bourse d'Athènes. Selon des communiqués de la société publiés sur son site internet (5) et sur le site de la Bourse d'Athènes (6), les états financiers de 2010 n'ont pas été publiés en raison d'un arrêt de travail qui se poursuivait au 29 août 2011 (date du dernier communiqué disponible).

Les banques prêteuses

(16) Les banques grecques prêteuses de United Textiles, qui sont impliquées dans les mesures d'aide d'État examinées, sont la National Bank of Greece, Emporiki Bank, ATE Bank, Alpha Bank et Eurobank. Ce sont toutes des banques commerciales dont l'activité consiste à proposer une gamme complète de produits et services financiers. Elles sont implantées, par l'intermédiaire de filiales, dans d'autres pays de l'Union européenne, et notamment en Bulgarie, à Chypre, en France, en Allemagne, au Luxembourg, aux Pays-Bas, en Pologne, en Roumanie et au Royaume-Uni (7).

II. b. Mesures examinées

(17) Au cours de la période 2007-2010, trois mesures d'État, susceptibles de contenir des éléments d'aide d'État, ont été adoptées en faveur de la société United Textiles ; elles sont décrites aux considérants 18 à 23.

Mesure 1 : l'aide d'État de mai 2007

(18) Le 30 mai 2007, la National Bank of Greece, banque prêteuse de United Textiles, a reçu la garantie de l'État pour un nouveau prêt qui comprenait : a) le refinancement d'un prêt initial de 7,5 millions euro, et b) un nouveau prêt d'un montant de 12,5 millions euro. La garantie d'État couvrait 80 % du prêt. Ce nouveau prêt avait un taux d'intérêt Euribor à six mois, plus 1,85 % (spread) (8), s'élevant au total à 6,10 % au 30 mai 2007. Il n'avait pas été prévu de prime pour la garantie d'État. Conformément à l'accord de refinancement du prêt, le prêt initial était couvert par une hypothèque sur un actif immobilisé. Par ailleurs, selon les rapports annuels de United Textiles des années 2007, 2008 et 2009, le nouveau prêt en question était couvert par la garantie de l'actionnaire principal. Il était également prévu qu'il soit couvert par des sûretés réelles, mais il n'est nulle part fait mention de la constitution de ces sûretés.

(19) La garantie était fondée sur un arrêté ministériel du 26 janvier 2007 (arrêté 2-75172-0025-26.01.2007). L'arrêté prévoyait que des garanties d'État pourraient être accordées pour des prêts existants à des entreprises industrielles, minières, d'élevage ou hôtelières implantées dans le département d'Imathia (où se trouve une partie des activités de United Textiles). Le régime n'excluait pas les entreprises en difficulté et ne prévoyait pas de prime pour la garantie d'État. Le régime ne prévoyait aucune espèce de critère objectif pour la sélection des entreprises bénéficiaires. La Commission fait observer que le régime n'avait pas été notifié conformément à l'article 108 TFUE et que, par conséquent, elle se réserve le droit d'enquêter sur d'autres aides d'État éventuellement octroyées au titre du régime.

(20) Sur la base de la garantie, les contrats de prêt ont été signés le 11 octobre 2007.

Mesure 2 : rééchelonnement de dettes portant sur des cotisations de sécurité sociale

(21) Le 25 mai 2009, les autorités grecques ont procédé au rééchelonnement des dettes échues de la société vis-à-vis de la sécurité sociale pour la période 2004-2009, qui s'élevaient à 14,57 millions euro, en 96 mensualités d'un montant de 0,19 million euro chacune. Le rééchelonnement a été effectué dans le cadre de la loi n° 3762-2009 (9). Le montant du rééchelonnement comprenait en partie des dettes ayant fait l'objet de rééchelonnements antérieurs qui n'avaient pas été respectés. En outre, d'après les renseignements fournis, United Textiles ne semble pas avoir versé de cotisations jusqu'à présent.

Mesure 3 : la garantie d'État d'octobre 2009 et de juin 2010

(22) Le 30 juin 2010, par arrêté ministériel 2-35129-0025, l'État grec a accordé une garantie aux banques prêteuses de United Textiles. Ces banques sont la National Bank of Greece, Emporiki Bank, ATE Bank, Alpha Bank et Eurobank. La garantie couvrait un nouveau crédit syndiqué d'un montant prévu de 63,6 millions euro, se divisant en trois sous-montants aux fins suivantes :

a) 36,6 millions euro pour le rééchelonnement de prêts accordés à la société par les banques prêteuses d'août 2008 à septembre 2009. D'après les informations disponibles, les prêts en question avaient des taux d'intérêt Euribor à trois et six mois, plus 1,25 % à 3 %. De plus, selon les renseignements disponibles, ces prêts n'étaient pas couverts à l'origine par une garantie d'État ;

b) 15 millions euro pour le financement des dettes impayées de la société vis-à-vis de l'État, de ses fournisseurs et de son personnel ;

c) 12 millions euro pour le financement d'investissements et de frais d'exploitation.

(23) Le prêt syndiqué sous-jacent programmé avait une durée de neuf ans. L'arrêté ministériel 2-35129-0025 relatif à l'octroi de la garantie ne précisait pas le taux d'intérêt des prêts à couvrir. Il indiquait simplement que les prêts devaient être au taux du marché. La garantie d'État couvrait 80 % du prêt. Il est prévu pour l'État une prime de garantie annuelle égale à 2 % de la moyenne du montant annuel dû. Les banques prêteuses reçoivent pour le nouveau prêt, en plus de la garantie d'État, des sûretés sous la forme d'un nantissement d'actions de la société pour au moins 25,9 % du total de ses actions et d'une inscription hypothécaire de premier rang sur les actifs immobiliers de la société. L'État n'a pas reçu de sûretés pour sa garantie mais, en cas d'appel de la garantie, les sûretés du prêt devaient être transférées à l'État.

(24) La garantie octroyée en juin 2010 en vertu de l'arrêté ministériel 2-35129-0025 a remplacé (en la révoquant) la garantie précédente qui avait été accordée le 2 octobre 2009 (arrêté ministériel 2-71055-0025). Cette garantie avait été octroyée pour un nouveau prêt de 40 millions euro qui avait également pour objet le rééchelonnement de prêts accordés à la société sur la période allant d'août 2008 à février 2009 [voir considérant 22, point a)]. Toutefois, le prêt de 40 millions euro n'a jamais été octroyé et la garantie d'octobre 2009 n'a par conséquent jamais été mise en œuvre. Au contraire, cette garantie a été remplacée par la nouvelle garantie de juin 2010, qui couvrait le prêt syndiqué de 63,6 millions euro. Selon les autorités grecques, la raison de ce remplacement était que le montant du prêt de 40 millions euro ne suffisait plus à couvrir les besoins en liquidités de la société.

(25) Malgré cette garantie, le prêt sous-jacent n'a jamais été accordé. En raison des graves problèmes de la société, les banques ont évité de signer le contrat de prêt et n'ont jamais versé le prêt.

???. MOTIFS DE L'OUVERTURE DE LA PROCÉDURE OFFICIELLE D'EXAMEN

(26) Le 27 octobre 2010, dans sa décision d'ouvrir la procédure, la Commission a émis des doutes quant à savoir si les conditions des garanties d'État de 2007 (mesure 1) et de 2010 (mesure 3) étaient conformes aux conditions du marché et à la communication de la Commission sur l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides d'État sous forme de garanties (10) ("communication sur les garanties d'État").

(27) En ce qui concerne la mesure du rééchelonnement de dettes échues vis-à-vis de la sécurité sociale (mesure 2), dans la décision d'ouvrir la procédure du 27 octobre 2010, la Commission a émis des doutes quant à savoir si, dans un tel contexte, un créancier privé aurait accepté un rééchelonnement des dettes sous quelque forme que ce soit. En effet, la possibilité d'un remboursement ultérieur de la dette semblait limitée puisque United Textiles connaissait déjà de graves problèmes financiers et avait cessé la majeure partie de sa production.

(28) En conséquence, la Commission a examiné si les mesures en cause constituaient une aide d'État illégale au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE et si elles étaient compatibles avec le TFUE.

IV. OBSERVATIONS DE LA GRÈCE ET DU BÉNÉFICIAIRE

(29) Les informations présentées par les autorités grecques et par United Textiles (le bénéficiaire) en ce qui concerne les mesures examinées peuvent être résumées comme suit :

IV.a. Mesure 1 : la garantie d'État de mai 2007

(30) En ce qui concerne la mesure 1, étant donné que les observations de la Grèce et celles du bénéficiaire coïncident dans une large mesure, la Commission les exposera conjointement, comme suit :

(31) La Grèce et le bénéficiaire reconnaissent qu'à l'époque de la garantie de 2007, la société était en difficulté en raison, selon eux, de la concurrence internationale de pays ayant des coûts moins élevés. La Grèce reconnaît également qu'elle a octroyé les garanties susmentionnées.

(32) Les autorités grecques et le bénéficiaire font valoir que la garantie de 2007 ne constitue pas une aide d'État car elle n'avait pas un caractère sélectif en faveur de United Textiles. La garantie avait été octroyée en vertu d'un arrêté ministériel qui ne concernait pas uniquement United Textiles mais aussi d'autres entreprises.

(33) Ensuite, la Grèce et le bénéficiaire soutiennent que la garantie de 2007 a été accordée conformément à la loi grecque n° 2322-1995, qui permettait au ministère des Finances d'octroyer des garanties d'État à des établissements bancaires pour des prêts ayant pour objet le rééchelonnement de dettes ou l'octroi de nouveaux fonds de roulement.

(34) En outre, la Grèce et le bénéficiaire affirment qu'avant l'octroi de la garantie, l'entreprise avait présenté aux autorités grecques un plan de restructuration financé par des banques et sans aucune garantie de l'État. Ce plan de restructuration n'a jamais été présenté officiellement à la Commission.

(35) La Grèce fait également valoir que la garantie de 2007 a été accordée conformément aux règles sur les aides d'État en vigueur dans l'Union européenne. Selon les allégations de la Grèce, la garantie avait un taux maximum de couverture de 80 % et avait été accordée pour des prêts souscrits aux taux du marché. La Grèce affirme aussi que le prêt était convenablement garanti par la mise en gage de marchandises et des garanties personnelles des actionnaires et qu'il avait été accordé pour une opération et une durée précises.

(36) Par ailleurs, la Grèce et le bénéficiaire soutiennent que ce dernier représente l'une des plus importantes entreprises textiles en Grèce, qui emploie de nombreux travailleurs et exerce ses activités principalement dans des régions frontalières.

(37) La Grèce et le bénéficiaire font également valoir que la National Bank of Greece (la banque prêteuse) a accepté de renoncer à la garantie d'État et, en lieu et place, d'inscrire sur les actifs immobiliers de United Textiles une hypothèque qui libérera la garantie.

(38) Enfin, la Grèce et le bénéficiaire affirment que la garantie a été incorporée à la garantie de 2010 et qu'il y a donc une approche intégrée en ce qui concerne le règlement des dettes de la société.

IV.b. Mesure 2 : le rééchelonnement des dettes échues vis-à-vis de la sécurité sociale

(39) La Grèce et le bénéficiaire font valoir que la mesure est fondée sur la loi n° 3762-2009, qui est une loi générale applicable à toutes les sociétés ayant des dettes échues ou impayées vis-à-vis de la sécurité sociale ; par conséquent, la mesure en cause n'est pas sélective.

IV.c. Mesure 3 : la garantie d'État de juin 2010

(40) La Grèce reconnaît qu'elle a octroyé la garantie de 2010 et affirme qu'elle l'a fait parce que l'étendue de la garantie précédente de 2009 (qui n'a jamais été mise en œuvre) ne suffisait plus à couvrir les besoins en liquidités de la société ; la garantie de 2009 a alors été incorporée à la garantie de 2010.

(41) La Grèce soutient que la garantie de 2010 était conforme à la communication de la Commission relative aux lignes directrices communautaires concernant les aides d'État au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté (11) ("lignes directrices pour les aides au sauvetage et à la restructuration") et qu'elle ne confère pas d'avantage à United Textiles. La Grèce affirme également qu'il n'y a pas eu violation du principe de "non-récurrence", prévu dans les lignes directrices pour les aides au sauvetage et à la restructuration, car la garantie de 2010 remplace celle de 2009 et modifie plusieurs dispositions de la garantie de 2007 (voir mesure 1 au considérant 18). Par conséquent, la garantie de 2010 incorpore l'ensemble des clauses des prêts de la société dans un seul et unique texte ayant des dispositions unifiées. La Grèce indique également que la garantie n'est pas encore en vigueur car le service compétent du ministère ne l'a pas encore approuvée.

(42) Enfin, la Grèce a informé la Commission que la garantie de 2010 n'a pas encore été mise en œuvre puisque la société n'a signé aucun contrat de prêt avec la banque et que le prêt n'a pas été versé. De plus, les autorités grecques ont attiré l'attention de la Commission sur le fait que l'arrêté ministériel 2-35129-0025-28.06.2010 concernant l'octroi de garantie prévoyait que les deux premières fractions du prêt (36,6 millions euro + 15 millions euro) devaient être versées avant le 28 juillet 2010 et que, ce délai ayant expiré, la garantie ne peut finalement pas être mise en œuvre.

(43) United Textiles fait valoir que le contrat de prêt sous- jacent n'a pas encore été signé et que le taux d'intérêt n'a donc pas été fixé. Lorsque le contrat sera signé, le taux d'intérêt sera conforme aux taux du marché.

(44) En ce qui concerne le plan de restructuration de 2010 (voir considérant 4), United Textiles soutient qu'il prévoit une réduction drastique de la production et que, par conséquent, le retour prévu à la viabilité ne cause pas de distorsion de la concurrence.

V. ÉVALUATION DE L'AIDE

(45) Sur la base des faits exposés précédemment et des arguments avancés par la Grèce et United Textiles, la Commission procèdera dans la présente section à l'évaluation des mesures en cause. Tout d'abord, la Commission évaluera la situation de United Textiles à l'époque où les mesures examinées ont été prises, afin de conclure si l'entreprise était ou non en difficulté (sous-section V. a.). Ensuite, la Commission appréciera si les mesures en cause ont le caractère d'aides, afin d'établir s'il s'agit ou non d'aides d'État (sous-section V. b). Puis, si une mesure constitue effectivement une aide, la Commission appréciera si la mesure est compatible avec le marché intérieur (sous-section V. c).

V. a. Situation de la société

(46) Ainsi qu'il est constaté aux considérants 14 et 15 et comme il est analysé plus en détail dans le tableau 1 suivant, l'activité économique et les résultats financiers de la société se sont sérieusement détériorés pendant la période 2004-2009.

<EMPLACEMENT TABLEAU 1>

(47) Sur la base de ces données financières, la Commission conclut que l'entreprise était en difficulté au sens du point 10 des lignes directrices pour les aides au sauvetage et à la restructuration, à l'époque où les mesures en cause ont été prises en faveur de celle-ci (période 2007-2010). La Commission estime également que la société est actuellement en difficulté.

(48) Plus précisément, en ce qui concerne le point 10 a) des lignes directrices pour le sauvetage et la restructuration, le capital social, tel qu'il apparaît dans les états financiers des années 2004 à 2009, n'a pas disparu mais a augmenté durant la période 2004-2009. Toutefois, la Commission note que, pendant la même période, les fonds propres de la société ont été réduits au minimum (2007) ou sont devenus négatifs (2008 et 2009). Dans le même temps, la société n'a pas pris de mesures appropriées pour faire face à la diminution de ses fonds propres, comme le prévoit la législation grecque (12). Ces mesures auraient consisté soit en une augmentation du capital, soit en la consolidation des pertes, ce qui aurait conduit à éliminer le capital social. Il semble que seule la deuxième solution aurait été possible pour United Textiles, en raison de la gravité de sa situation financière (voir tableau 1) et de ses difficultés d'accès au financement (voir considérant 15). Par conséquent, la Commission estime que l'entreprise avait perdu plus de la moitié de son capital social.

(49) En outre, en ce qui concerne le point 10 c) des lignes directrices pour le sauvetage et la restructuration, la société remplissait depuis 2008 les conditions de soumission à une procédure collective d'insolvabilité fixées par la législation grecque (13).

(50) Enfin, en ce qui concerne le point 11 des lignes directrices pour le sauvetage et la restructuration, les indices habituels d'une entreprise en difficulté, comme l'augmentation des pertes, la diminution du chiffre d'affaires et l'endettement croissant, étaient présents depuis au moins 2004.

V. b. Existence d'une aide au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE

(51) L'article 107, paragraphe 1, TFUE dispose que "sauf dérogations prévues par les traités, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions".

(52) La Commission appréciera ensuite si les mesures examinées prises en faveur de United Textiles constituent une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE.

V. b. 1. Mesure 1 : garantie d'État de mai 2007

Aide en faveur de United Textiles

a) Ressources d'État

(53) La Commission fait observer que la garantie d'État en question comprend effectivement des ressources d'État puisqu'elle a été octroyée directement par l'État. La décision ayant été prise par le ministre compétent, elle est imputable à l'État. Par conséquent, le critère de ressources d'État est rempli.

b) Avantage

(54) La Grèce et le bénéficiaire font valoir que la National Bank of Greece (la banque prêteuse) a accepté de renoncer à la garantie d'État et, en lieu et place, d'inscrire sur les actifs immobiliers de United Textiles une hypothèque qui libérera la garantie. À l'appui de cette allégation, la Grèce et le bénéficiaire présentent une lettre de la National Bank of Greece du 24 décembre 2010 (réponse à une lettre de United Textiles du 23 décembre 2010).

(55) La Commission ne saurait accepter cet argument. En effet, la lettre susmentionnée de la National Bank of Greece indique simplement que la banque est disposée à examiner l'échange de sûretés proposé, notamment à condition que les actifs immobiliers faisant l'objet de l'hypothèque soient choisis par la banque et que l'échange soit accepté par toutes les parties concernées. En conséquence, la Commission considère que la National Bank of Greece n'a pas accepté dans les faits l'échange de sûretés proposé.

(56) La Grèce prétend également que la garantie de 2007 a été octroyée conformément aux règles sur les aides d'État en vigueur dans l'Union européenne. Selon les allégations de la Grèce, la garantie avait un taux de couverture maximum de 80 % et avait été accordée pour des prêts souscrits aux taux du marché.

(57) La Commission ne peut accepter les arguments susmentionnés et estime que la garantie de 2007 a effectivement conféré un avantage injustifié à United Textiles. Conformément aux points 2.2 et 3.2 de la communication sur les garanties d'État, lorsque l'emprunteur ne paie pas une prime conforme au prix du marché, il obtient un avantage. Il est des cas où, sans la garantie de l'État, l'emprunteur, en tant qu'entreprise en difficulté, ne trouverait pas d'établissement financier disposé à lui concéder un prêt, à quelque condition que ce soit.

(58) En l'espèce, la garantie de 2007 a été octroyée pour des prêts à une entreprise en difficulté et il n'était pas prévu de prime pour le garant (l'État). Prenant en considération les points 3.2 et 4.2 de la communication sur les garanties d'État, la Commission souligne la sérieuse détérioration de la situation économique de l'entreprise durant la période 2004-2007, le défaut de paiement de ses emprunts et le fait que dès 2001, le soutien apporté par les banques prêteuses était limité, avec une diminution des facilités de crédit et des prêts. De l'avis de la Commission, United Textiles se classe dans la catégorie de notation de crédit "mauvaise" puisqu'au moment où la mesure a été prise, elle faisait face à de graves difficultés.

(59) En outre, la Commission relève que, d'après les rapports annuels de l'entreprise de 2007, 2008 et 2009, il était prévu que le prêt garanti soit couvert par des actifs immobiliers de l'entreprise ; par conséquent, la sûreté en question n'avait pas encore été constituée (voir considérant 18). Par ailleurs, la Commission fait observer qu'en décembre 2010, il a été proposé à la National Bank of Greece (la banque prêteuse) de renoncer à la garantie d'État et, en lieu et place, d'inscrire une hypothèque sur les actifs immobiliers de United Textiles (voir considérant 37). La Commission considère que cette proposition montre clairement que la sûreté en question n'avait pas été octroyée. Les autorités grecques ont déclaré à ce propos que la garantie de 2007 était couverte par la mise en gage de marchandises de la société et par des garanties personnelles apportées par les actionnaires (voir considérant 35), mais les faits ne confirment que l'existence des garanties personnelles des actionnaires. Partant, la Commission considère que le prêt sous-jacent n'était pas assorti de sûretés.

(60) En conséquence, la Commission doute qu'un garant privé quelconque aurait accordé une telle garantie et qu'une banque privée quelconque aurait accepté de financer la société sans la garantie de l'État, étant donné que, dans une telle situation, il aurait été extrêmement difficile pour la société de rembourser le prêt et que le garant n'aurait pas pu éviter l'appel de sa garantie. En conséquence, la Commission estime que le montant de l'aide qui résulte de la garantie de 2007 s'élève au montant total du prêt garanti, soit 16 millions euro (80 % des 20 millions euro).

c) Caractère sélectif

(61) Les autorités grecques et le bénéficiaire font valoir que la garantie de 2007 ne constitue pas une aide d'État car elle n'avait pas un caractère sélectif en faveur de United Textiles. Elle a été octroyée en vertu de l'arrêté ministériel 2-75172-0025-26.01.2007, qui ne concernait pas uniquement United Textiles mais aussi d'autres entreprises.

(62) La Commission fait observer que l'arrêté ministériel sur lequel se fondait la garantie concernait uniquement certains secteurs d'une région géographique, à savoir le nome d'Imathia. De plus, en l'espèce, les autorités grecques disposaient d'une importante marge de manœuvre quant à l'octroi d'une garantie en faveur de United Textiles, puisqu'il n'existait pas de critères objectifs pour décider si la garantie devait être accordée ou non. En l'absence de tels critères objectifs, la mesure était effectivement sélective car les autorités l'ont appliquée sur une base individuelle en vertu de leur pouvoir discrétionnaire (14). Selon une jurisprudence constante (15), lorsqu'un organisme qui octroie des avantages financiers dispose d'un pouvoir discrétionnaire qui lui permet de déterminer les bénéficiaires ou les conditions de la mesure accordée, celle-ci ne saurait être considérée comme présentant un caractère général. En conséquence, le critère de sélectivité est effectivement rempli.

d) Distorsion de concurrence et affectation des échanges entre les États membres

(63) United Textiles opère dans un secteur dont les produits font l'objet d'échanges intensifs entre les États membres et qui est soumis à une concurrence acharnée. À l'époque où les aides ont été accordées, United Textiles était une entreprise qui réalisait la majeure partie de ses ventes dans d'autres États membres (voir considérant 11). En outre, la mesure en cause a conféré à United Textiles un avantage sur ses concurrents (voir considérants 45, 46 et 47). Selon une jurisprudence constante (16), lorsqu'une aide d'État renforce la position d'une entreprise par rapport à d'autres entreprises concurrentes d'autres États membres, ces autres entreprises doivent être considérées comme affectées par cette aide. En conséquence, les critères de distorsion de concurrence et d'affectation des échanges entre États membres sont effectivement remplis.

Aide en faveur de la banque prêteuse

(64) En ce qui concerne la banque qui accordé le prêt bénéficiant de la garantie de 2007 (National Bank of Greece), l'enquête a montré qu'elle n'avait pas tiré profit de la garantie en cause. En effet, la garantie a été octroyée dans le cadre d'un nouveau contrat de prêt, d'une nouvelle durée de 10 ans. Conformément au point 2.3.1 de la communication sur les garanties d'État, si une garantie de l'État est accordée ex post pour un prêt sans que les modalités de ce prêt ne soient adaptées, il est possible que le prêteur bénéficie aussi d'une aide. Toutefois, en l'espèce, les modalités du prêt existant ont été modifiées par modification de la durée du prêt. Par conséquent, la Commission considère que la garantie de 2007 ne constituait pas une aide en faveur de l'organisme de crédit.

(65) En même temps, la garantie de 2007 a simplement eu pour résultat que la banque qui a accordé le prêt n'a pas cherché à ce qu'il soit immédiatement remboursé. Pourtant, la banque aurait pu récupérer le prêt existant par la voie des procédures de liquidation. À ce sujet, la Commission fait observer que le prêt de 2007 était déjà couvert par une hypothèque sur un actif fixe (17).

Conclusion concernant l'existence d'une aide dans la mesure 1

(66) Les considérations qui précèdent permettent de conclure que la garantie d'État de mai 2007 (mesure 1) constitue une aide d'État illégale en faveur de United Textiles au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE.

(67) La Commission considère que la garantie d'État de mai 2007 ne constitue pas une aide d'État en faveur de la banque prêteuse National Bank of Greece, au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE.

V. b. 2. Mesure 2 : rééchelonnement des dettes échues vis-à-vis de la sécurité sociale

a) Ressources d'État

(68) La Commission fait observer que les cotisations sociales visent à financer le budget des organismes de sécurité sociale, qui sont des personnes morales de droit public placées sous la tutelle de l'État. Cela signifie que le non- encaissement de ces cotisations prive l'État de ressources. En conséquence, le présent critère est satisfait.

b) Avantage

(69) La Commission fait remarquer qu'un délai de huit ans a effectivement été accordé à United Textiles pour le remboursement d'une dette, à une époque où la société faisait face à de graves problèmes financiers et où il y avait une forte probabilité de défaillance de sa part. Selon une jurisprudence constante (18), pour établir si le non- recouvrement de dettes a constitué un avantage sélectif et si cet avantage pourrait être considéré comme une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE, il convient de vérifier si United Textiles n'aurait pas pu obtenir un tel avantage dans des conditions normales du marché. De ce point de vue, la question essentielle est de savoir si l'attitude de l'État en tant que créancier pourrait être comparée à l'attitude d'un créancier privé avisé.

(70) Selon les autorités grecques, les accords précédents de rééchelonnement n'avaient pas été respectés par United Textiles. En même temps, il avait effectivement été accordé à la société un délai de huit ans pour le remboursement d'une dette d'un montant de 14,57 millions euro (voir considérant 16), à une époque où la société connaissait de sérieux problèmes financiers et où il y avait une forte probabilité de défaillance de sa part. Un tel délai n'aurait pas été accordé par un créancier en économie de marché, surtout après l'échec des tentatives précédentes de rééchelonnement des dettes.

(71) Pour les raisons susmentionnées, la Commission considère que l'attitude des autorités grecques ne saurait être comparée à celle d'un créancier privé avisé, puisque le rééchelonnement de 2009 a été mis en œuvre malgré l'échec des accords précédents de rééchelonnement et que la société faisait face à de graves difficultés financières et avait interrompu la majeure partie de sa production, ce qui rendait d'autant plus improbable la perspective d'un remboursement de sa dette.

(72) Ainsi, la Commission considère que le rééchelonnement des dettes de la société portant sur les cotisations de sécurité sociale qui a eu lieu en 2009 a conféré un avantage à la société au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE.

c) Caractère sélectif

(73) Les autorités grecques et le bénéficiaire font valoir que le rééchelonnement était fondé sur des dispositions législatives nationales générales (19), applicables à toutes les sociétés en Grèce, et que par conséquent la mesure n'avait pas un caractère sélectif.

(74) La Commission ne saurait accepter cet argument. En effet, dans le cas d'espèce, les autorités grecques disposaient d'une importante marge de manœuvre en ce qui concerne le traitement des cotisations de sécurité sociale dues par United Textiles, dès lors qu'il n'existait pas de critères objectifs pour décider s'il fallait ou non procéder au rééchelonnement de la dette. En l'absence de tels critères, la mesure était effectivement sélective car les autorités l'ont appliquée sur une base individuelle en vertu de leur pouvoir discrétionnaire (20). De plus, selon une jurisprudence constante (21), lorsqu'un organisme qui octroie des avantages financiers dispose d'un pouvoir discrétionnaire qui lui permet de déterminer les bénéficiaires ou les conditions de la mesure accordée, celle-ci ne saurait être considérée comme présentant un caractère général. En conséquence, le critère de sélectivité est effectivement rempli.

d) Distorsion de concurrence et affectation des échanges entre les États membres

(75) Enfin, les critères de distorsion de concurrence et d'affectation des échanges entre les États membres sont satisfaits de la même façon qu'au considérant 63.

e) Conclusion concernant l'existence d'une aide dans la mesure 2

(76) À la lumière des considérations qui précèdent, la Commission conclut que le rééchelonnement de 2009 des dettes échues vis-à-vis de la sécurité sociale constitue une aide d'État en faveur de United Textiles au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE.

(77) Le montant de l'aide est égal à 14,57 millions euro, octroyés à la société lors du rééchelonnement des dettes échues vis-à-vis de la sécurité sociale, le 25 mai 2009, soit le montant total des dettes rééchelonnées.

V. b. 3. Mesure 3 : la garantie d'État de juin 2010

(78) La Commission fait également remarquer que la société a cessé ses activités dès 2009 et que, depuis, elle ne publie même plus d'états financiers (voir considérant 15). La garantie ne suffisait pas pour obtenir un nouveau financement et l'entreprise n'a pas repris ses activités avant l'expiration de la garantie. Dans ces conditions, la Commission considère que la garantie n'a pas causé de distorsion ni n'a menacé de fausser la concurrence. Par conséquent, la garantie ne constitue pas une aide d'État.

V. c. Compatibilité des aides avec le marché intérieur

V. c. 1. Généralités

(79) Dans la mesure où les mesures 1 et 2 constituent des aides au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE, la compatibilité des aides en question doit être examinée sur la base des dérogations prévues aux paragraphes 2 et 3 de ce même article.

V. c. 2. Entreprise en difficulté

(80) Ainsi qu'il a été analysé aux considérants 46 à 50, l'activité économique et les résultats financiers de la société se sont sérieusement détériorés pendant la période 2004- 2009. Sur cette base, la Commission conclut que l'entreprise était en difficulté au sens des points 10 et 11 des lignes directrices sur le sauvetage et la restructuration à l'époque où les mesures examinées ont été prises en faveur de l'entreprise (période 2007-2010), comme le reconnaissent la Grèce et le bénéficiaire. La Commission estime également que la société est actuellement en difficulté puisque sa situation ne s'est pas améliorée depuis.

V. c. 3. Dérogations au titre de l'article 107, paragraphes 2 et 3, TFUE

(81) Il est clair que les dérogations prévues à l'article 107, paragraphe 2, et à l'article 107, paragraphe 3, points d) et e), ne s'appliquent pas et les autorités grecques ne les ont pas invoquées.

(82) L'article 107, paragraphe 3, point a), dispose que l'on peut considérer comme compatibles avec le marché intérieur "les aides destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi". United Textiles se trouve dans une région aidée au titre de l'article 107, paragraphe 3, point a), et peut éventuellement bénéficier d'une aide à finalité régionale.

(83) Les lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale pour la période 2007-2013 (22) ("lignes directrices sur les aides régionales"), qui étaient en vigueur au moment où ont été mis en œuvre la garantie de 2007 et le rééchelonnement des dettes de 2009 (mesures 1 et 2), définissent les conditions d'approbation des aides régionales à l'investissement.

(84) Les entreprises en difficulté sont clairement exclues du champ d'application des lignes directrices sur les aides régionales. United Textiles était déjà en difficulté lorsque les mesures 1 et 2 ont été prises et elle n'était donc pas éligible à une aide régionale. Par conséquent, la Commission conclut que l'aide ne peut pas être déclarée compatible sur la base des lignes directrices sur les aides régionales.

(85) La Commission examinera également la compatibilité des mesures en cause sur la base du règlement (CE) n° 800-2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des article 87 et 88 du traité (règlement général d'exemption par catégorie) (23). La Commission fait observer que les aides aux entreprises en difficulté sont exclues du champ d'application du règlement général d'exemption par catégorie. United Textiles était déjà en difficulté lorsque les mesures 1 et 2 ont été prises et l'aide accordée à United Textiles n'est donc pas compatible au titre du règlement général d'exemption par catégorie.

(86) La Commission doit également examiner dans quelle mesure certaines des mesures en cause seraient compatibles au titre des règles concernant la lutte contre la crise qui sont énoncées dans la communication de la Commission intitulée "Cadre communautaire temporaire pour les aides d'État destinées à favoriser l'accès au financement dans le contexte de la crise économique et financière actuelle" (24) (ci-après, le "cadre temporaire"). Toutefois, la Commission fait observer que United Textiles était clairement une entreprise en difficulté avant le 1er juillet 2008 et qu'elle ne peut donc pas bénéficier d'une aide au titre du cadre temporaire.

(87) Dès lors que United Textiles était une entreprise en difficulté à l'époque où les mesures visant à son soutien ont été prises, la compatibilité des mesures d'aide ne peut être évaluée que sur la base des lignes directrices pour le sauvetage et la restructuration, c'est-à-dire sur la base de l'article 107, paragraphe 3, point c), TFUE.

(88) Premièrement, la Commission estime que les mesures en cause ne sauraient être considérées comme étant compatibles en tant qu'aides au sauvetage. En effet, la garantie n'a pas une durée limitée de six mois, ainsi qu'il est prévu au point 25 c) des lignes directrices sur le sauvetage et la restructuration, et le rééchelonnement des dettes, qui est comparable à un prêt, a lui aussi une durée supérieure à la période de six mois autorisée pour les aides au sauvetage. De même, les mesures ne se limitent pas au montant strictement nécessaire, prévu au point 25 d) des lignes directrices sur le sauvetage et la restructuration et résultant de la formule définie à l'annexe de ces lignes directrices.

(89) Deuxièmement, aucune des mesures ne saurait non plus être considérée comme étant compatible en tant qu'aide à la restructuration. La Grèce et le bénéficiaire soutiennent qu'avant l'octroi de la garantie de 2007, la société avait présenté un plan de restructuration financé par des banques et sans aucune garantie d'État. Ce plan de restructuration n'a cependant jamais été présenté officiellement à la Commission. Par conséquent, les mesures en cause ont été prises sans qu'il existe de plan de restructuration, qui constitue pourtant une condition indispensable pour garantir la viabilité à long terme de l'entreprise. En effet, d'après les éléments de l'enquête, un tel plan n'a jamais existé et toutes les tentatives de restructuration entreprises à l'époque avaient échoué, au point que la société avait pratiquement cessé ses activités et n'était plus cotée en bourse. En dépit de l'échec de la restructuration, l'État a continué de fournir des fonds de roulement à United Textiles, à travers la garantie d'État de 2007. En conséquence, la Commission considère que les mesures 1 et 2 constituaient clairement une aide au fonctionnement dépourvue du moindre fondement de restructuration fiable.

(90) Enfin, il n'a pas été présenté officiellement de mesures compensatoires au sens des points 38 à 42 des lignes directrices sur le sauvetage et la restructuration.

(91) En ce qui concerne la possibilité pour United Textiles de bénéficier d'aides à la restructuration, la Commission fait remarquer que la société recevait des aides au fonctionnement au moins depuis 2007, année pendant laquelle elle connaissait déjà des difficultés. La Commission considère que cette circonstance est contraire au principe de "non-récurrence", ce qui prouve que les problèmes auxquels la société fait face présentent un caractère récurrent et que les mesures d'aide en faveur de la société ont conduit à des distorsions de concurrence contraires à l'intérêt commun. Par ailleurs, le bénéficiaire affirme que la garantie de 2007 a été incorporée à la garantie de 2010 et qu'il y a, par conséquent, une approche intégrée en ce qui concerne le remboursement des prêts de la société. Cependant, la Commission estime qu'il n'existe pas d'éléments suggérant l'existence d'une approche intégrée concernant la restructuration, étant donné que les aides de 2007, 2009 et 2010 ont été octroyées pendant plusieurs années sans que soit remplie la condition préalable d'un plan unifié de restructuration ou d'une stratégie capable de rétablir la viabilité à long terme de l'entreprise.

(92) À la lumière des considérations qui précèdent, la Commission estime que le principe de "non-récurrence" n'a pas été respecté.

(93) Enfin, vu que United Textiles était une entreprise en difficulté à l'époque où ont été prises les mesures, la Commission n'a connaissance d'aucune autre réglementation sur les aides d'État, en vertu de laquelle l'aide présumée serait compatible avec le TFUE.

V. c. 4. Conclusion sur l'incompatibilité

(94) Compte tenu de ce qui précède, la Commission conclut que les mesures d'aide 1 et 2 ne sont pas compatibles avec le TFUE.

VI. RÉCUPÉRATION

(95) En conséquence, la Commission conclut que la garantie d'État de 2007 et le rééchelonnement de 2009 concernant les dettes échues vis-à-vis de la sécurité sociale constituent une aide d'État qui n'est pas compatible avec le marché intérieur. La Commission conclut également que la garantie d'État octroyée en 2010 ne constitue pas une aide d'État.

(96) L'article 14 du règlement (CE) n° 659-1999 dispose qu'"en cas de décision négative concernant une aide illégale, la Commission décide que l'État membre concerné prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer l'aide auprès de son bénéficiaire".

(97) Par conséquent, puisque les mesures examinées sont qualifiées d'illégales et incompatibles, le montant de l'aide doit être récupéré afin que soit rétablie la situation qui prévalait sur le marché avant l'octroi de l'aide. Le point de départ considéré pour la récupération sera défini comme le moment où l'avantage a été octroyé au bénéficiaire, soit le moment où l'aide a été mise à la disposition du bénéficiaire, et les montants à récupérer doivent être majorés d'intérêts jusqu'à leur recouvrement effectif.

(98) L'élément d'aide d'État incompatible de la garantie d'État de 2007 (mesure 1) est fixé au montant total du prêt garanti. La Commission estime que l'aide octroyée de cette façon à United Textiles s'élève à 16 millions euro.

(99) L'élément d'aide d'État incompatible de la mesure 2 est fixé au montant total des dettes rééchelonnées, ce qui signifie que le montant de l'aide accordée à United Textiles s'élève à 14,57 millions euro. Les paiements effectués qui ne concernent pas des montants versés au titre de l'accord peuvent être déduits du montant total à recouvrer au titre de l'aide illégale et incompatible.

(100) Le montant exact à récupérer et le taux d'intérêt applicable à la récupération devront être calculés par les autorités grecques,

A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION :

Article premier

1. L'aide d'État accordée par la Grèce en violation de l'article 108, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne en faveur de United Textiles S.A., sous la forme d'une garantie d'État en 2007 et d'un rééchelonnement de dettes impayées vis-à-vis de la sécurité sociale en 2009, est incompatible avec le marché intérieur.

2. La garantie d'État de 2010 ne constitue pas une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

Article 2

1. La Grèce récupère auprès du bénéficiaire l'aide mentionnée à l'article 1er, paragraphe 1.

2. Les montants à récupérer comprennent les intérêts calculés à partir de la date à laquelle ils ont été mis à la disposition du bénéficiaire jusqu'à celle de leur récupération effective.

3. Les intérêts sont calculés sur une base composée, conformément aux dispositions du chapitre V du règlement (CE) n° 794-2004 de la Commission (25).

4. La Grèce annule tous les paiements en cours de l'aide mentionnée à l'article 1er, paragraphe 1, avec effet à la date d'adoption de la présente décision.

Article 3

1. La récupération de l'aide visée à l'article 1er, paragraphe 1, est immédiate et effective.

2. La Grèce garantit l'exécution de la présente décision dans un délai de quatre mois à compter de la date de sa notification.

Article 4

1. Dans un délai de deux mois suivant la notification de la présente décision, la Grèce transmet à la Commission les renseignements suivants :

a) le montant total (principal et intérêts) à récupérer auprès du bénéficiaire ;

b) une description détaillée des mesures qui ont déjà été prises ou qui seront prises afin de se conformer à la présente décision ;

c) les documents attestant que le bénéficiaire a été mis en demeure de restituer l'aide.

2. La Grèce tient la Commission informée de l'avancement des mesures nationales prises pour mettre en œuvre la présente décision, jusqu'à la récupération complète de l'aide mentionnée à l'article 1er, paragraphe 1. Si la Commission en fait la demande, la Grèce lui transmet dans les plus brefs délais tous les renseignements concernant les mesures qui ont déjà été prises ou qui seront prises pour se conformer à la présente décision. La Grèce lui fournit aussi des renseignements détaillés concernant les montants de l'aide et des intérêts déjà récupérés auprès du bénéficiaire.

Article 5

La République hellénique est destinataire de la présente décision.

Notes :

(1) JO C 357 du 30.12.2010, p. 18.

(*) Ultérieurement article 88 du traité CE ; à compter du 1er décembre 2009, les articles 87 et 88 du traité CE sont remplacés respectivement par les articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

(2) JO L 83 du 27.3.1999, p. 1.

(3) Voir note 1 de bas de page.

(4) En vertu de l'article 47 de la loi grecque n° 2190-1920, si le total des fonds propres de la société devient inférieur à 50 % du capital social, l'assemblée générale des actionnaires doit décider (dans les six mois suivant la fin de l'exercice) la dissolution de la société ou l'adoption d'une autre mesure.

(5) http ://www.unitedtextiles.com/Alist.asp?catid=312&section=0.08.00

(6) http ://www.ase.gr/content/gr/companies/ListedCo/Profiles/pr_press. asp?Cid=111&coname=%C5%CD%D9%CC%C5%CD%C7+%CA%CB% D9%D3%D4%CF%DB%D6%C1%CD%D4%CF%D5%D 1% C3%C9%C1+%C1%2E%C5%2E.

(7) Ainsi qu'il est mentionné dans les états financiers et sur les sites internet des banques.

(8) Y compris une taxe de 0,6 % applicable à tous les prêts en Grèce (à l'exception des crédits hypothécaires et des prêts agricoles pour lesquels elle est de 0,12 %).

(9) Journal officiel de la République hellénique, série 75, premier volume, du 15 mai 2009.

(10) JO C 155 du 20.6.2008, p. 10.

(11) JO C 244 du 1.10.2004, p. 2.

Notes du Tableau 1 :

- (*) Augmentation due aux capitaux plus élevés qui permettaient le fonctionnement d'un plus grand nombre d'usines.

- (**) Septembre 2009.

(12) Voir note 4 de bas de page.

(13) Voir note 4 de bas de page.

(14) Voir communication de la Commission sur l'application des règles relatives aux aides d'État aux mesures relevant de la fiscalité directe des entreprises (JO C 384 du 10.12.1998, p. 3). Voir également l'arrêt de la Cour du 26 septembre 1996 dans l'affaire C-241-94, France contre Commission (Kimberly Clark Sopalin), Rec. 1996, p. I-4551.

(15) Décision du Tribunal du 11 juillet 2002 dans l'affaire T-152-1999, Hamsa contre Commission, Rec. 2002, p. 3049, points 156-157.

(16) Arrêt de la Cour du 17 septembre 1980 dans l'affaire 730-79, Philip Morris contre Commission, Rec. 1980, p. 2671, point 11, édition spéciale grecque 1980-???, p. 13.

(17) Il convient également de noter qu'en principe, les banques en Grèce n'acceptent comme sûretés que des biens dont la valeur en cas de vente d'urgence (environ 75 % de la valeur marchande) est au moins égale au montant du prêt.

(18) Voir, par exemple, arrêt de la Cour du 29 avril 1999 dans l'affaire C-342-96, Espagne contre Commission, Rec. 1999, p. I-2459 ; arrêt du Tribunal du 11 juillet 2002 dans l'affaire T-152-1999, HAMSA contre Commission, Rec. 2002, p. II-3049 ; arrêt de la Cour du 29 juin 1999 dans l'affaire C-256-97, DM Transport, Rec. 1999, p. I-3913.

(19) Loi n° 3762-2009, Journal officiel de la République hellénique, série 75, premier volume, du 15 mai 2009.

(20) Voir note 14 de bas de page.

(21) Voir note 15 de bas de page.

(22) JO C 54 du 4.3.2006, p. 13.

(23) JO L 214 du 9.8.2008, p. 3.

(24) JO C 16 du 22.1.2009, p. 1, modifiée par la communication de la Commission modifiant le cadre communautaire temporaire pour les aides d'État destinées à favoriser l'accès au financement dans le contexte de la crise économique et financière actuelle (JO C 303 du 15.12.2009, p. 6).

(25) JO L 140 du 30.4.2004, p. 1.