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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 31 octobre 2012, n° 11-06158

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Alinéa (SAS)

Défendeur :

P. & CSpA (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rajbaut

Conseillers :

Mmes Chokron, Gaber

Avocats :

Mes Bernabe, de Moustier, Caron

TGI Paris, du 4 mars 2011

4 mars 2011

EXPOSÉ DU LITIGE

La société de droit italien P. & CSpA est titulaire des marques internationales suivantes désignant la France :

- la marque verbale P. n° 217011 enregistrée le 5 février 1959 et régulièrement renouvelée visant notamment en classe 20 les matelas et semblables en caoutchouc ou en mousse de résine,

- la marque semi figurative n° 592485 enregistrée le 16 octobre 1992 et visant notamment en classe 20 les matelas.

Constatant les 4 et 16 novembre 2010 que la SAS Alinéa proposait à la vente sur son site Internet <alinea. fr> des matelas Enzo, A. et Olly présentés comme étant des matelas P. en reproduisant les marques dont elle est titulaire, la société P. & CSpA a fait assigner le 14 décembre 2010 la société Alinéa en contrefaçon.

Vu le jugement rendu contradictoirement le 4 mars 2011 par le Tribunal de grande instance de Paris qui a :

- constaté que la demande tendant à ce que le tribunal se déclare compétent est sans objet,

- dit que les marques internationales P. n° 217011 et 592485 ne sont pas des marques de renommée en France,

- dit qu'en ayant utilisé les signes P. pour commercialiser des matelas, la société Alinéa a commis des actes de contrefaçon par reproduction de la marque semi figurative n° 592485 et de la marque verbale P. n° 217011 appartenant à la société P.,

- interdit en conséquence à la société Alinéa de faire usage à quelque titre que ce soit de ces marques, sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée, cette astreinte prenant effet dans un délai de quinze jours suivant la signification de sa décision et courant pendant un délai de trois mois, se réservant la liquidation de cette astreinte,

- condamné la société Alinéa à payer à la société P. la somme de 45 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de contrefaçon,

- ordonné la publication d'extraits du jugement dans deux journaux français au choix de la société P. et aux frais de la société Alinéa sans que le coût de chaque insertion n'excède la somme de 5 000 euros HT,

- ordonné la publication du texte suivant sur la page d'accueil du site Internet de la société Alinéa accessible à l'adresse <alinea. fr> pendant une durée d'un mois à compter de la première mise en ligne et ce dans un délai de 48 heures une fois le jugement devenu définitif :

Par jugement du 4 mars 2011, le Tribunal de grande instance de Paris a condamné la société Alinéa pour avoir reproduit sur son site internet les signes P. constituant la contrefaçon des marques internationales dont est titulaire la société P.

- dit qu'il sera procédé à cette publication en partie supérieure de la page d'accueil du site de façon visible et en toute hypothèse au-dessus de la ligne de flottaison, sans mention ajoutée, en police de caractères times new roman, de taille 12", droits, de couleur noire et sur fond blanc, dans un encadré de 468 x 120 pixels, en dehors de tout encart publicitaire, le texte devant être précédé du titre Communiqué Judiciaire en lettres capitales de taille 14, aux seuls frais de la société Alinéa,

- dit que la société Alinéa a commis à l'encontre de la société P. des actes d'usurpation de son nom et de sa raison commerciale,

- débouté la société P. de sa demande de dommages et intérêts fondée sur l'usurpation de son nom et de sa raison commerciale,

- débouté la société P. de sa demande au titre des pratiques commerciales déloyales,

- débouté la société P. de sa demande au titre de l'usage de mauvaise foi de ses marques dans un texte publicitaire,

- débouté la société Alinéa de ses demandes reconventionnelles,

- condamné la société Alinéa aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Vu l'appel interjeté le 31 mars 2011 par la SAS Alinéa.

Vu les dernières conclusions de la SAS Alinéa, signifiées le 4 juin 2012.

Vu les dernières conclusions de la société P. & CSpA, signifiées le 2 juillet 2012.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 3 juillet 2012.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Considérant que, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ;

Considérant que la SAS Alinéa conclut à l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a estimé que la preuve de l'épuisement des droits n'était pas rapportée ;

Considérant que la société P. & CSpA conclut à la confirmation du jugement entrepris sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en dommages et intérêts fondée sur l'usurpation de son nom et de sa raison commerciale, en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre des pratiques commerciales déloyales et sur le quantum des condamnations prononcées en première instance ;

Considérant en conséquence qu'aucune des parties ne critique les chefs du dispositif du jugement entrepris ayant constaté que la demande tendant à ce que le tribunal se déclare compétent était sans objet et dit que les marques internationales P. n° 217 011 et 592485 ne sont pas des marques de renommée en France ;

Considérant dès lors que le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs par adoption de ses motifs pertinents en fait comme en droit ;

I : SUR LA CONTREFAÇON :

L'épuisement du droit :

Considérant que la SAS Alinéa invoque l'épuisement du droit tel que prévu à l'article L. 713-4 du Code de la propriété intellectuelle en affirmant que les produits en cause sont bien des matelas P. qui lui ont été livrés par la SAS Sapsa Bedding dans le cadre du contrat de licence conclu entre cette société et la société P. & CspA ;

Considérant qu'elle soutient que son fournisseur, la SAS Sapsa Bedding, est une filiale à 100 % de la société Sealy Corporation, licenciée de la société P. & CSpA et qu'un avenant au contrat de licence de marque conclu entre ces deux dernières sociétés la rendait bénéficiaire, pour une période de six mois, de produits pouvant être estampillés sous la marque P. ;

Considérant qu'elle affirme que l'existence d'un contrat de licence prouve que les biens étaient librement vendus sur le sol français et que la règle de l'épuisement du droit lui permet de vendre régulièrement en France des biens qui ont déjà été commercialisés ; que dès lors les actes de contrefaçon allégués ne sont pas caractérisés ;

Considérant qu'elle conclut donc au débouté de la société P. & CSpA de toutes ses demandes ;

Considérant que la société P. & CSpA réplique que l'épuisement du droit, dont la preuve repose sur l'appelante, n'est pas caractérisé en l'espèce faute de justifier d'une part de l'existence de son consentement à la première mise en circulation des matelas litigieux et d'autre part que chaque matelas mis en vente par la SAS Alinéa correspond effectivement à des matelas de la marque P., mis en vente avec son consentement ;

Considérant qu'elle fait valoir que l'avenant au contrat de licence prouve seulement qu'elle a eu des relations contractuelles avec la société Sealy Corporation plus d'un an avant la constatation des faits incriminés et que n'est rapportée la preuve ni du lien entre les sociétés Sealy Corporation et P. & CSpA aux dates concernées par le présent litige, ni du lien entre la SAS Sapsa Bedding et la société Sealy Corporation, rien ne démontrant que la première serait une filiale à 100 % de la seconde, ni enfin du lien entre la SAS Sapsa Bedding et la SAS Alinéa ;

Considérant, à titre subsidiaire, qu'elle fait valoir que les produits en cause ne sont pas des matelas

authentiques mis sur le marché avec son autorisation et, à titre infiniment subsidiaire, que si l'épuisement du droit devait être reconnu, elle invoque des motifs légitimes, au sens du second alinéa de l'article L. 713-4 susvisé, pour s'opposer à la commercialisation de ces matelas, laquelle est de nature à porter atteinte à l'image de la marque et donne à penser que les deux entreprises sont liées ;

Considérant qu'elle conclut donc à la confirmation du jugement entrepris qui a dit que la SAS Alinéa ne pouvait se prévaloir de l'épuisement du droit ;

Considérant ceci exposé, que l'article L. 713-4 du Code de la propriété intellectuelle dispose que le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d'interdire l'usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis dans le commerce dans la communauté économique européenne ou de l'espace économique européen sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement ;

Considérant que l'épuisement du droit est soumis à la double condition que le produit ait été mis dans le commerce sur le territoire de l'espace économique européen et que ce soit par le titulaire de la marque ou avec son consentement ; que la preuve en incombe à celui qui invoque l'épuisement du droit ;

Considérant qu'il ressort des éléments de la cause que les matelas vendus sur Internet par la SAS Alinéa sous la marque P. et référencés Enzo, A. et Olly, lui ont été livrés par la SAS Sapsa Bedding ;

Considérant par ailleurs que jusqu'au 31 décembre 2009 la société de droit américain Sealy Corporation était la licenciée de la marque P. en France pour les matelas ; que la SAS Cauval Industries lui a succédé à compter du 1er janvier 2010 ;

Considérant que par un avenant en date du 29 octobre 2009 au contrat de licence de marque passé entre les sociétés P. & CSpa et Sealy Corporation, cette dernière conservait le droit de vendre certains produits portant la marque P. pour une période n'excédant pas six mois, à compter du 1er janvier 2010, à condition que la société Sealy Corporation veille à ce qu'ils ne soient vendus que dans les magasins de Mobilier Européen, Atlas et Fly en France ;

Considérant - outre le fait que cette autorisation temporaire ne concernait pas la vente sur Internet et qu'en tout état de cause elle a pris fin le 30 juin 2010 alors que les faits incriminés de contrefaçon sont postérieurs pour avoir été constatés au mois de novembre 2010 - qu'il n'est justifié d'aucun lien contractuel entre la société Sealy Corporation et la SAS Sapsa Bedding quant à la vente de matelas de la marque P. ; qu il n'est pas davantage justifié de liens de nature capitalistique entre ces deux sociétés ;

Considérant en effet que l'attestation établie le 14 octobre 2011 par le président de la SAS Sapsa Bedding selon lequel cette société appartiendrait à 100 % à la SAS Matress Holding, elle-même détenue à 100 % du 5 avril 2001 au 18 novembre 2010 par la société Matress Holdings International BV, laquelle appartiendrait à la SAS Sealy Corporation n'est pas de nature à entraîner la conviction de la cour dans la mesure où, outre le fait que n'y est joint aucun document justificatif de l'identité de son auteur, elle n'est accompagnée d'aucun document objectif confirmant ces affirmations ;

Concernant que les autres documents produits (un article de presse du 10 mai 2001, un traité de fusion conclu le 30 mars 1998 avec une société Financière Sapsa et une fiche d'inscription à la conservation des hypothèques dont les indications ne sont pas postérieures à 1998) sont tous antérieurs de plusieurs années à la période concernée par le présent litige (novembre 2010) et ne sont pas de nature à justifier, pendant cette période, du lien pouvant exister entre les sociétés Sapsa Bedding et Sealy Corporation ;

Considérant enfin que la société P. & CSpA conteste formellement que les matelas vendus par la SAS Alinéa sous sa marque P. et portant les références Enzo, A. et Olly soient de sa fabrication ;

Considérant que dans la mesure où l'origine des produits est indéterminée, il incombe à la partie poursuivie en contrefaçon de démontrer l'authenticité de ces produits revêtus de la marque dont il lui est reproché de faire usage sans autorisation ;

Considérant que les listings de commandes et de livraison de ces matelas par la SAS Sapsa Bedding à la SAS Alinéa, produits aux débats par cette dernière, ne mentionnent que les références Enzo, A. et Olly en ne précisant, pour chaque produit, que ses dimensions et sa nature (matelas, sommier, futon) sans jamais indiquer qu'il s'agirait bien de produits fabriqués et commercialisés par la société P. & CSpA sous sa marque P. ;

Considérant que les courriels émanant de la SAS Sapsa Bedding n'apportent aucune justification objective de l'origine des produits Enzo, A. et Olly ;

Considérant en conséquence que la SAS Alinéa ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, que la société P. & CSpA aurait autorisé la SAS Sapsa Bedding à mettre sur le commerce dans l'espace économique européen des matelas authentiques de la marque P. ;

La preuve des actes de contrefaçon :

Considérant que la société P. & CSpA conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit que la SAS Alinéa avait commis des actes de contrefaçon par reproduction des marques semi figurative et verbale P. ;

Considérant que la SAS Alinéa n'énonce pas de moyen particulier en réponse à cette demande, se contentant de conclure au débouté de la société P. & CSpA de l'ensemble de ses demandes sur le seul fondement juridique de l'épuisement du droit ;

Considérant qu'il ressort du procès-verbal de constat d'huissier dressé le 4 et 16 novembre 2010 que sur son site Internet <alinea. fr&gt ; la SAS Alinéa reproduit les marques verbale et semi figurative P. pour désigner des matelas et sommiers proposés à la vente sous les références Enzo, A. et Olly ainsi qu'en font foi les copies d'écran annexés à ce procès-verbal dont l'authenticité n'est pas contestée ;

Considérant que ce faisant, la SAS Alinéa s'est bien rendue coupable d'actes de contrefaçon par reproduction de marque à l'identique au sens de l'article L. 713-2 a) du Code de la propriété intellectuelle ; que le jugement entrepris sera confirmé de ce chef ;

II : SUR LES MESURES RÉPARATRICES DE LA CONTREFAÇON :

Considérant que la société P. & CSpA conclut à la confirmation du jugement entrepris sur les mesures d'interdiction sauf à porter l'astreinte à 10 000 euros par infraction constatée mais forme appel incident sur le quantum des dommages et intérêts alloués au titre de la contrefaçon, réclamant la somme de 100 000 euros en réparation du détournement de clientèle, la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi résultant des bénéfices réalisés par la SAS Alinéa en utilisant ses marques et la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral pour l'atteinte à l'image de ses marques et à sa réputation commerciale ;

Considérant que la société P. & CSpA conclut également à la confirmation du jugement entrepris en ce qui concerne les mesures de publication ordonnées tant dans la presse que sur le site Internet de la SAS Alinéa sauf à porter le nombre de journaux à trois et à porter à 10 000 euros HT le coût maximum de chaque publication et à porter à 90 jours consécutif la durée de la publication sur le site Internet de la SAS Alinéa ;

Considérant que la SAS Alinéa n'énonce pas de moyens particuliers en réponse à ces demandes ;

Considérant que c'est à bon droit que les premiers juges ont interdit à la SAS Alinéa, sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée, de faire usage des marques verbale et semi figurative P. à quelque titre que ce soit en se réservant la liquidation de cette astreinte ; qu'il n y a pas lieu à augmenter le montant de cette astreinte ;

Considérant que les premiers juges ont, par application des dispositions de l'article L. 716-14 du Code de la propriété intellectuelle, fait une correcte évaluation à la somme globale de 45 000 euros des préjudices subis par la société P. & CSpA du fait des actes de contrefaçon ;

Considérant en effet que c'est à juste titre qu'ils ont évalué le préjudice économique (comprenant à la fois le détournement de clientèle et les bénéfices réalisés par la SAS Alinéa) à la somme de 30 000 euros au vu du nombre de matelas, de leur prix public de vente et de leur prix d'achat au fournisseur, les sommes respectives de 100 000 euros et de 50 000 euros réclamées forfaitairement par la société P. & CSpA n'étant justifiées par aucun document comptable ;

Considérant que c'est également à juste titre qu'ils ont évalué le préjudice moral à la somme de 15 000 euros en tenant compte de l'atteinte portée à la valeur distinctive des marques verbale et semi figurative P. du fait de leur contrefaçon, étant rappelé que le jugement entrepris ne leur a pas reconnu en France la qualification de marques de renommée ;

Considérant que c'est à bon droit que les premiers juges ont, à titre de réparation complémentaire, ordonné la publication d'extraits de leur décision dans deux journaux français au choix de la société P. & CSpA et aux frais de la SAS Alinéa sans que le coût de chaque insertion n'excède la somme de 5 000 euros HT ; qu'il n'y a pas lieu à augmenter le nombre de journaux ni le coût de chaque insertion ;

Concernant enfin que c'est à bon droit que les premiers juges ont également ordonné la publication d'un texte particulier sur la page d'accueil du site Internet <alinea. fr&gt ; pendant une durée d'un mois dans les formes prescrites au dispositif du jugement entrepris ; qu'il n'y a pas lieu à porter à 90 jours la durée de cette publication ;

Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs ;

III : SUR LES PRATIQUES COMMERCIALES TROMPEUSES :

Considérant que la société P. & CSpA forme un appel incident des chefs du jugement entrepris l'ayant déboutée de ses demandes fondées sur l'usurpation de son nom et de sa raison commerciale, au titre des pratiques commerciales déloyales et au titre de l'usage de mauvaise foi de ses marques dans un texte publicitaire en faisant valoir que la SAS Alinéa a violé les dispositions de l'article L. 121-1 du Code de la consommation en trompant le consommateur sur l'origine et la qualité des produits qu'elle commercialise ;

Considérant qu'elle ajoute que le fait de tromper le consommateur en lui fournissant une information faussée sur l'origine du produit est un fait distinct de la contrefaçon, qui doit être indemnisé comme tel ;

Considérant qu'en réparation du préjudice subi du fait de la violation des dispositions du Code de la consommation, elle réclame à la SAS Alinéa la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Considérant que si la SAS Alinéa ne critique pas les chefs du dispositif du jugement entrepris ayant débouté la société P. & CSpA de ces demandes, elle n'énonce pas de nouveaux moyens à ce titre et, en application des dispositions du dernier alinéa de l'article 954 du Code de procédure civile, doit donc être réputée s'approprier les motifs du jugement qui a débouté la société P. & CSpA de ses demandes indemnitaires à ce titre en considérant que ces faits ne sont pas différents de ceux retenus au titre de la contrefaçon et que la société P. & CSpA ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui indemnisé à ce titre ;

L'usurpation du nom et de la raison commerciale :

Considérant que si la SAS Alinéa, en reproduisant sur son site Internet, les marques P., a également reproduit de ce fait le nom et la raison sociale de la société P. & CSpA en infraction aux dispositions de l'article L. 217-1 du Code de la consommation, force est de constater que cette dernière, qui a protégé sa raison sociale à titre de marque, ne justifie pas autrement que par ses affirmations péremptoires sur l'ancienneté de l'entreprise, de l'existence d'un préjudice distinct de celui déjà réparé au titre de la contrefaçon ;

Les pratiques commerciales déloyales et l'usage de mauvaise foi des marques dans un texte publicitaire :

Considérant que si, en reproduisant sur son site Internet, les marques P. au regard de matelas ou de sommiers qu'elle commercialise, la SAS Alinéa s'est également rendue coupable de pratiques commerciales trompeuses au sens des articles L. 121-1 et L. 121-1-1 du Code de la consommation en créant une confusion avec une marque d'un concurrent, en reposant sur des allégations fausses portant sur l'origine des produits litigieux et en incitant le consommateur à penser que ces produits proviennent de la société Pirelli & CSpA alors que tel n'est pas le cas, force est également de constater que ces faits ne sont pas distincts de ceux retenus au titre des actes de contrefaçons, ceux-ci ayant en effet pour but et pour résultat de tromper le consommateur sur l'origine des produits contrefaisants ;

Considérant dès lors que la société Pirelli & CSpA ne justifie pas davantage de l'existence d'un préjudice distinct de celui déjà réparé au titre de la contrefaçon ;

Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs ;

IV : SUR LES DEMANDES RECONVENTIONNELLES DE LA SAS ALINEA :

Considérant que la SAS Alinéa soutient que la mauvaise foi de la société Pirelli & CSpA est caractérisée, rappelant que cette société est l'ancien actionnaire de la société Sapsa Bedding qui l'a vendue elle-même à la société Sealy Corporation et réclame à ce titre la somme de 500 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et dilatoire ainsi que la publication de la décision à intervenir dans tels quotidiens qu'il plaira à la concluante de choisir, et pour une somme maximum dont le montant sera fixé par la cour (sic) ;

Considérant qu'elle demande enfin à la cour de statuer ce que de droit sur une éventuelle amende civile ;

Considérant que la société Pirelli & CSpA conclut au débouté de la SAS Alinéa de ses demandes reconventionnelles, aucune faute ne pouvant lui être reprochée dans l'exercice de son droit d'agir en justice et que la SAS Alinéa ne poursuit aucun but réparateur mais un but essentiellement malveillant ;

Considérant que dans la mesure où la SAS Alinéa est reconnue coupable d'actes de contrefaçon et est condamnée à ce titre, elle ne peut qu'être déboutée de ses demandes reconventionnelles en dommages et intérêts et en publication judiciaire pour procédure abusive et dilatoire ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes reconventionnelles ;

Considérant que pour les mêmes motifs la demande de la SAS Alinéa relative au prononcé d'une amende civile, outre qu'elle est irrecevable à former une demande à ce titre, est sans objet ;

V : SUR LES AUTRES DEMANDES :

Considérant qu'il est équitable d'allouer à la société Pirelli & CSpA la somme complémentaire de 15 000 euros au titre des frais par elle exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles de première instance ;

Considérant que la SAS Alinéa, partie perdante en son appel principal, ne pourra qu'être déboutée de sa demande en paiement au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Considérant que pour les mêmes motifs la SAS Alinéa sera condamnée au paiement des dépens d'appel, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé en ce qu'il a statué sur la charge des dépens de la procédure de première instance ;

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement. Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris. Déclare sans objet et en tout état de cause irrecevable la demande de la SAS Alinéa relative au prononcé d'une amende civile. Condamne la SAS Alinéa à payer à la société Pirelli & CSpA la somme complémentaire de quinze mille euros (15 000 euros ) au titre des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens. Déboute la SAS Alinéa de sa demande en paiement au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Condamne la SAS Alinéa aux dépens de la procédure d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.