ADLC, 16 décembre 2011, n° 11-A-21
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
Avis
concernant un projet de décret relatif aux conditions et à la procédure de classement d'un réseau de distribution d'énergie thermique
L'Autorité de la concurrence (commission permanente),
Vu la lettre en date du 11 juillet 2011, enregistrée sous le numéro 11/0055A, par laquelle le Gouvernement a saisi l'Autorité de la concurrence pour avis, sur le fondement de l'article L. 462-2 du Code de commerce ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence ; Vu la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement ; Vu le Code général des collectivités territoriales ; Vu le Code de l'énergie ; Vu le Code de la construction et de l'habitation ; Vu la directive 2010-31-UE du 19 mai 2010 sur la performance énergétique des bâtiments ; Vu le Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE) ; Le rapporteur, le rapporteur général adjoint, le commissaire du Gouvernement et les représentants de la Direction Générale de l'Énergie et du Climat (DGEC), entendus lors de la séance du 6 décembre 2011 ; Les représentants de l'Union Sociale pour l'Habitat (USH) et du groupe GDF Suez, entendus sur le fondement de l'article L. 463-7 du Code de commerce ; Est d'avis de répondre à la demande présentée dans le sens des observations qui suivent :
1. Par courrier du 11 juillet 2011, enregistré sous le numéro 11/0055A, le Gouvernement a transmis à l'Autorité de la concurrence une demande d'avis concernant un projet de décret relatif aux conditions et à la procédure de classement d'un réseau de distribution d'énergie thermique, pris en application de l'article 85 de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement.
I. Constatations
A. DESCRIPTION DU MARCHÉ DES RÉSEAUX DE CHALEUR ET DES RÉSEAUX DE FROID
2. Les réseaux de chaleur sont des installations composées d'une unité de production de chaleur (chaufferie) qui fournit de la chaleur à un certain nombre de clients par l'intermédiaire de canalisations de transport de chaleur.
3. Cette chaleur qui est produite par l'unité de production est ensuite acheminée par le biais d'un fluide caloporteur (le plus souvent de la vapeur d'eau sous pression) vers divers lieux de consommation (bâtiments municipaux, installations industrielles, hôpitaux, immeubles d'habitation ).
4. Les unités de production de chaleur peuvent être alimentées par divers combustibles : combustibles fossiles (gaz, fioul, charbon), récupération de chaleur industrielle, énergies renouvelables (géothermie et biomasse notamment) et incinération de déchets ménagers. De même, certaines centrales de production d'électricité fonctionnent en cogénération : elles produisent à la fois de l'électricité et de la chaleur qui peut alimenter un réseau de chaleur.
5. Les réseaux de froid, quant à eux, sont composés, comme les réseaux de chaleur, d'une unité de production de froid et d'un réseau de canalisation qui achemine le froid vers les lieux de consommation. L'eau glacée va de la centrale vers le client, y prélève la chaleur et revient plus chaude à son point de départ. La centrale évacue cette chaleur vers l'extérieur : dans l'air, par des tours de refroidissement, ou dans la rivière ou la mer, par rejet d'eau.
6. Selon le Syndicat National du Chauffage Urbain (SNCU), on dénombre, en 2009, 432 réseaux (418 réseaux de chaleur et 14 réseaux de froid) en France, répartis sur plus de 350 villes et s'étendant sur 3 373 km. De nouveaux réseaux ont été créés ces dernières années (28 nouveaux réseaux entre 2007 et 2010). Dans la suite de cet avis, le terme " réseau de chaleur " sera utilisé indifféremment pour les réseaux de chaleur et les réseaux de froid.
7. La distribution publique de chaleur relève de la compétence des collectivités territoriales qui peuvent soit en assurer elles-mêmes la gestion directe (régie), soit déléguer cette gestion à un opérateur public ou privé dans le cadre d'une délégation de service public (ci après " DSP "). Les régies n'occupent pas une place prépondérante dans la mesure où elles représentent moins de 10% des réseaux de chaleur français.
8. En ce qui concerne les DSP, le délégataire (commune ou le groupement de communes) confie la gestion et la réalisation des investissements dans le réseau à un opérateur dont la rémunération est substantiellement liée au résultat d'exploitation du service. En fonction des investissements requis, la durée des contrats de DSP de réseaux de chaleur varie en pratique entre 12 et 24 ans. Il doit être souligné qu'un certain nombre de contrats actuellement en vigueur ont été conclus pour une durée nettement plus longue (pouvant aller jusqu'à 97 ans)1.
9. En France, le marché de la gestion déléguée de réseaux de chaleur est dominé par trois acteurs : Dalkia France (filiale détenue à 66% par Véolia Environnement et à 34% par EDF), Cofely (filiale à 100% de GDF Suez) et le groupe Idex. Dalkia France et Cofely détiennent chacun 30 à 40% du marché français en volume de chaleur produite.
B. CADRE RÉGLEMENTAIRE RELATIF AU CLASSEMENT DES RÉSEAUX DE CHALEUR ET DE FROID
1) Evolution du cadre règlementaire relatif au classement des réseaux de chaleur
10. Le classement des réseaux de chaleur a été institué par la loi du 15 juillet 1980 relative aux économies d'énergie et à l'utilisation de la chaleur ainsi que par son décret d'application n° 81-542 du 13 mai 1981. Le classement des réseaux de chaleur avait à l'époque été mis en place dans un contexte de crise énergétique, à la suite du second choc pétrolier de 1979, et avait pour objectif à la fois la promotion de l'utilisation de la chaleur fatale (énergie issue des processus industriels, d'usines d'incinération d'ordures ménagères notamment) et l'utilisation de combustibles nationaux.
11. La loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie, ainsi que son décret d'application du 5 mai 1999 ont apporté des modifications à ce dispositif de classement afin de promouvoir les énergies renouvelables ainsi que la cogénération (production conjointe d'électricité et de chaleur).
12. En application de ce dispositif, le classement d'un réseau était prononcé par arrêté préfectoral. Cette décision constatait que les caractéristiques énergétiques et économiques du réseau considéré étaient conformes aux critères et exigences posés par la réglementation.
13. Le classement d'un réseau de chaleur a pour conséquence la fixation, à l'intérieur de la zone de desserte de ce réseau, d'un ou plusieurs périmètres de développement prioritaire à l'intérieur desquels le raccordement des consommateurs au réseau de chaleur peut être imposé.
14. Au cours des vingt années écoulées depuis la mise en place du dispositif de classement, il s'avère que la procédure n'a pas rencontré le succès escompté en raison notamment de la lourdeur de la procédure de classement. Un seul réseau a en effet fait l'objet d'un classement en vingt ans (celui de Fresnes).
2) Cadre réglementaire actuel relatif au classement des réseaux de chaleur
15. Dans le cadre du Grenelle de l'Environnement et de l'engagement européen de la France selon lequel 23% de la consommation d'énergie doit être issue d'énergies renouvelables à l'horizon 2020, les pouvoirs publics souhaitent encourager le développement des réseaux de chaleur alimentés par des énergies renouvelables ou fatales. En effet, ces énergies (et notamment la biomasse, la géothermie et l'incinération de déchets) sont particulièrement adaptées aux réseaux de chaleur alors qu'elles se prêtent plus difficilement à un usage individuel.
16. Dans le cadre de l'objectif de promotion des réseaux de chaleur utilisant des énergies renouvelables ou fatales, l'article 85 - III de la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement a modifié les articles 5 à 7 de la loi du 15 juillet 1980 codifiés aux articles L.712-1 et suivants du Code de l'énergie, en simplifiant la procédure de classement et en la réservant aux réseaux utilisant majoritairement des énergies fatales ou renouvelables.
17. Selon les dispositions actuelles du Code de l'énergie (articles L. 712-1 et suivants), afin de favoriser le développement des énergies renouvelables, une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales peut classer un réseau de distribution de chaleur et de froid existant ou à créer situé sur son territoire, lorsqu'il est alimenté à plus de 50 % par une énergie renouvelable ou de récupération, lorsqu'un comptage des quantités d'énergie livrées par point de livraison est assuré et que l'équilibre financier de l'opération pendant la période d'amortissement des installations est assuré au vu des besoins à satisfaire, de la pérennité de la ressource en énergie renouvelable ou de récupération et compte tenu des conditions tarifaires prévisibles. Les réseaux existants pour lesquels une demande de classement est déposée font l'objet d'un audit énergétique examinant les possibilités d'amélioration de leur efficacité énergétique.
18. La décision de classement précise la zone de desserte du réseau et définit, sur tout ou partie de la zone de desserte du réseau, un ou plusieurs périmètres de développement prioritaire. Ces périmètres doivent être compatibles avec les dispositions des documents d'urbanisme en vigueur. La collectivité ou le groupement de collectivités compétent veille, en liaison avec les autorités organisatrices de la distribution d'électricité et de gaz, à la bonne coordination entre les différents plans de développement des réseaux d'énergie.
19. Dans les zones délimitées par le ou les périmètres de développement prioritaire, toute installation d'un bâtiment neuf ou faisant l'objet de travaux de rénovation importants, qu'il s'agisse d'installations industrielles ou d'installations de chauffage de locaux, de climatisation ou de production d'eau chaude excédant un niveau de puissance de 30 kilowatts, doit être raccordée au réseau concerné. Cette obligation de raccordement ne fait pas obstacle à l'utilisation d'installations de secours ou de complément. Il peut être dérogé à cette obligation par une décision de la collectivité ou du groupement de collectivités, le cas échéant, après avis du délégataire du réseau.
20. Est puni d'une amende de 300 000 euros le fait de contrevenir à l'obligation de raccordement prévue à l'article L. 712-3.
21. Le Gouvernement estime que 111 réseaux de chaleur sont actuellement alimentés à plus de 50% par des énergies renouvelables (soit environ le quart du parc français des réseaux de chaleur) et sont susceptibles, par conséquent, d'être potentiellement concernés par une procédure de classement. Il est également probable que le nombre de réseaux de chaleur alimentés à plus de 50% par des énergies renouvelables tendra, au cours des prochaines années, à augmenter du fait notamment du souhait de nombreuses collectivités publiques de promouvoir les énergies renouvelables dans le mix énergétique des réseaux de chaleur qu'elles détiennent.
22. L'article 85 - III de la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 précité prévoit que les conditions d'application de cette procédure de classement sont déterminées par un décret en Conseil d'Etat, après avis de l'Autorité de la concurrence.
C. LES DISPOSITIONS RÉGLEMENTAIRES FAISANT L'OBJET DE LA DEMANDE D'AVIS
23. Le projet de décret faisant l'objet de la demande d'avis précise les modalités du contrôle de l'alimentation majoritaire du réseau par une énergie renouvelable ou de récupération, les modalités de justification et d'appréciation de la condition de l'équilibre financier, les exigences en matière de comptage des quantités d'énergie livrées et de réalisation de l'audit énergétique, le ou les seuils des décisions de dérogation à l'obligation de raccordement, ainsi que les notions de bâtiment neuf ou faisant l'objet de travaux de rénovation importants.
1) Les caractéristiques techniques du réseau de chaleur susceptible de faire l'objet d'une demande de classement
24. Selon l'article 1er du projet de décret, le classement d'un réseau ne pourra être accordé que pour les réseaux alimentés à 50% par des énergies renouvelables (définies comme les énergies éolienne, solaire, géothermique, aérothermique, hydrothermique, marine et hydraulique, ainsi que l'énergie issue de la biomasse, du gaz de décharge, du gaz de stations d'épuration d'eaux usées et du biogaz) ainsi que les énergies de récupération (la fraction non biodégradable des déchets ménagers ou assimilés, les déchets des collectivités, les déchets industriels, les résidus de papeterie et de raffinerie, les gaz de récupération industriel, la récupération de chaleur sur eaux usées et la chaleur fatale à l'exclusion de la chaleur produite par une installation de cogénération pour la part issue d'énergie fossile).
25. Le seuil de 50% s'apprécie de manière globale en considérant l'énergie injectée sur le réseau. Lorsque l'énergie délivrée sur un même réseau est issue de plusieurs sites de production, il est fait masse de l'ensemble des sources d'énergie utilisées pour apprécier le seuil de 50%. Lorsque l'exploitation du réseau est confiée à un prestataire extérieur ou est effectuée en régie, le seuil de 50% s'apprécie sur le périmètre d'exécution du contrat ou le périmètre de la régie. La période de référence pour l'appréciation du seuil de 50% est définie par un arrêté du ministre chargé de l'énergie.
2) Le contenu de la demande de classement
26. Toujours selon l'article 1er du projet de décret, la demande de classement est déposée par le propriétaire du réseau, le maître d'ouvrage en cas de réseau à créer, ou son mandataire.
27. Parmi les éléments de cette demande de classement d'un réseau existant figurent notamment :
- le mode de gestion du réseau ;
- l'identité du propriétaire du réseau et le cas échéant de la société à qui la gestion de ce réseau est confiée ;
- un synoptique présentant les rôles et relations de l'ensemble des intervenants sur le réseau ;
- les principales caractéristiques du réseau, ainsi que celles des sources d'énergie utilisées ;
- les quantités de chaleur ou de froid injectées sur le réseau pour chacune de ces sources au cours d'une année civile ;
- la justification de la pérennité des sources d'énergies renouvelables ou de chaleur de récupération utilisées ;
- la justification du comptage effectif des quantités d'énergie livrées aux points de livraison ;
- le nombre d'usagers raccordés au réseau au moment de la demande de classement et son évolution prévisible jusqu'au terme du classement, ainsi qu'une estimation des quantités d'énergie distribuées ;
- une proposition de durée de classement ;
- la proposition d'un ou de plusieurs périmètres de développement prioritaire ;
- un plan de situation, un schéma du réseau de distribution, un plan faisant apparaître la zone de desserte du réseau, ainsi que les parties de cette zone où sont proposés un ou plusieurs périmètres de développement prioritaire ;
- une notice explicative justifiant la compatibilité de ces périmètres de développement prioritaire avec les dispositions des documents d'urbanisme en vigueur ;
- un état prévisionnel des recettes et des dépenses échelonnées dans le temps, justifiant l'équilibre financier de l'opération pendant la période d'amortissement des installations compte tenu des besoins à satisfaire ;
- les conditions tarifaires consenties aux différentes catégories d'abonnés raccordés au réseau définies au moment de la décision de classement et les principales conditions de leur évolution: droits et frais de raccordement, prix des abonnements et des kilowattheures fournis, formules de révision ;
- pour les réseaux existants, un audit énergétique de moins de trois ans dont le contenu et la procédure sont prévus par un arrêté du ministre chargé de l' énergie.
28. Le dossier de demande de classement d'un réseau à créer comprend une étude de faisabilité comportant l'ensemble des éléments précédents, à l'exception de l'audit énergétique.
3) La décision de classement
29. Selon l'article 1er du projet de décret, le classement d'un réseau de distribution de chaleur ou de froid, existant ou à créer, est prononcé par délibération de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales.
30. La décision de classement indique ou comprend les éléments suivants:
- l'identité du propriétaire du réseau et le cas échéant de la société à qui la gestion de ce réseau a été confiée ;
- la durée du classement ;
- la définition d'un ou de plusieurs périmètres de développement prioritaire ;
- pour chaque périmètre de développement prioritaire, les conditions économiques de raccordement et de tarif au-delà desquelles une dérogation à l'obligation de raccordement peut être accordée.
31. A la suite de la décision de classement, les bâtiments concernés situés dans les périmètres de développement prioritaire devront être obligatoirement raccordés au réseau de chaleur.
4) Les caractéristiques des bâtiments soumis à l'obligation de raccordement au réseau de chaleur pour lequel une décision de classement a été accordée
32. D'après l'article L. 712-3 du Code de l'énergie précité, dans les zones délimitées par un périmètre de développement prioritaire, toute installation d'un bâtiment neuf ou faisant l'objet de travaux de rénovation importants, qu'il s'agisse d'installations industrielles ou d'installations de chauffage de locaux, de climatisation ou de production d'eau chaude excédant un niveau de puissance de 30 kilowatts, doit être raccordée au réseau concerné.
33. Le projet de décret précise les notions de " bâtiments neufs " et de " bâtiments faisant l'objet de travaux de rénovation importants ".
34. Sont considérées comme un bâtiment neuf :
- une construction dont la demande de permis de construire a été déposée postérieurement à la décision de classement ;
- une partie nouvelle d'un bâtiment ou une surélévation excédant 150 m2 ou 30 % de la surface hors œuvre nette au sens de la réglementation thermique des locaux existants en application des dispositions du Code de la construction et de l'habitation.
35. Sont considérés comme bâtiments faisant l'objet de travaux de rénovation importants :
- un bâtiment ou partie de bâtiment soumis aux articles R. 131-25 et R. 131-26 du Code de la construction et de l'habitation (bâtiments assujettis à des travaux de rénovation significatifs avec un certain nombre d'exceptions) ;
- un bâtiment pourvu d'un chauffage ou d'une climatisation en commun dans lequel est remplacée l'installation de chauffage ou de refroidissement d'une puissance supérieure à 30 kilowatts ;
- un bâtiment dans lequel est remplacée une installation industrielle de production de chaleur ou de froid d'une puissance supérieure à 30 kilowatts.
5) Les dérogations à l'obligation de raccordement à un réseau de chaleur ayant fait l'objet d'un classement
36. Selon l'article 1er du projet de décret, une demande justifiée de dérogation à l'obligation de raccordement peut être adressée par le propriétaire de l'installation concernée ou son mandataire, à la collectivité ou au groupement de collectivités qui a créé le ou les périmètres de développement prioritaire.
37. Une dérogation à l'obligation de raccordement à un réseau de chaleur ou de froid ne peut être accordée que lorsque l'installation concernée :
- soit est alimentée pour satisfaire ses besoins de chauffage, de climatisation ou de production d'eau chaude à plus de 50 % sur l'ensemble d'une année calendaire par de l'énergie produite à partir d'énergies renouvelables disponibles localement et ne pouvant être exploitées par le réseau ;
- soit présente une demande de chaleur ou de froid dont les caractéristiques techniques sont incompatibles avec celles du réseau ;
- soit ne peut être alimentée en énergie par le réseau concerné dans les délais nécessaires à la satisfaction principale des besoins de chauffage ou d'eau chaude sanitaire ou dans le cas des réseaux de froid de climatisation de l'usager, sauf si l'exploitant met en place une solution transitoire de nature à permettre l'alimentation des usagers en chaleur ou en froid ;
- soit ne peut être raccordée au réseau dans des conditions économiques de raccordement et de tarif inférieures aux seuils fixés dans la décision de classement pour la zone de développement prioritaire considérée.
6) Le suivi de la décision de classement et son éventuelle abrogation
38. Afin de tenir compte de circonstances particulières affectant la composition habituelle du bouquet énergétique du réseau, la collectivité ou le groupement de collectivités concerné abroge la décision de classement si la condition relative à l'alimentation à plus de 50 % par une énergie renouvelable ou de récupération n'a pas été justifiée en moyenne pendant trois années consécutives. Lorsqu'une décision de classement est abrogée, les périmètres de développement prioritaire institués cessent de recevoir application.
39. La collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales qui a décidé du classement rend public chaque année un rapport relatif à l'exploitation de l'année précédente du réseau classé, le cas échéant après avoir recueilli l'avis de la commission consultative des services publics locaux prévue à l'article L. 1413-1 du code général des collectivités territoriales, qui comprend :
- le bilan annuel des énergies utilisées selon leur origine ;
- les performances énergétiques du ou des générateurs et du réseau primaire de distribution ;
- l'état des conditions tarifaires consenties aux différentes catégories d'abonnés indiquant la décomposition des coûts ; les émissions de gaz à effet de serre de la chaleur livrée par le réseau.
7) Le caractère non-obligatoire de l'étude de faisabilité technique et économique des diverses solutions d'approvisionnement en énergie pour les bâtiments assujettis à l'obligation de raccordement à un réseau de chaleur ayant fait l'objet d'un classement
40. Selon l'article R.111-22-1 du Code de la construction et de l'habitation, la règle générale est que, préalablement au dépôt de la demande de permis de construire, le maître d'ouvrage réalise une étude de faisabilité technique et économique des diverses solutions d'approvisionnement en énergie pour le chauffage, la ventilation, le refroidissement, la production d'eau chaude sanitaire et l'éclairage des locaux.
41. Cette étude examine notamment : - le recours à l'énergie solaire et aux autres énergies renouvelables mentionnées par l'article 29 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 ; - le raccordement à un réseau de chauffage ou de refroidissement collectif ou urbain, s'il existe à proximité du terrain d'implantation de l'immeuble ou de l'opération ; - l'utilisation de pompes à chaleur et de chaudières à condensation ; - le recours à la production combinée de chaleur et d'électricité (cogénération).
42. Elle présente les avantages et les inconvénients de chacune des solutions étudiées, quant aux conditions de gestion du dispositif, aux coûts d'investissement et d'exploitation, à la durée d'amortissement de l'investissement et à l'impact attendu sur les émissions de gaz à effet de serre. Elle tient compte pour l'extension d'un bâtiment des modes d'approvisionnement en énergie de celui-ci.
43. Cette étude précise les raisons pour lesquelles le maître d'ouvrage a retenu la solution d'approvisionnement choisie.
44. De même, selon l'article R. 131-27 du Code de la construction et de l'habitat, pour les bâtiments faisant l'objet de travaux de rénovation importants (cas prévus à l'article R. 131-26 du même code), le maître d'ouvrage réalise une étude de faisabilité technique et économique des différentes solutions d'approvisionnement en énergie du bâtiment. Cette étude doit être faite préalablement au dépôt de la demande de permis de construire ou, si les travaux ne sont pas soumis à ce permis, préalablement à l'acceptation des devis ou à la passation des marchés relatifs à ces travaux. Toutefois, dans le cas où les travaux portent uniquement sur l'enveloppe du bâtiment, seule la solution d'approvisionnement en énergie solaire est étudiée.
45. En résumé, selon le Code de la construction et de l'habitation, la règle générale est donc que tout bâtiment neuf ou faisant l'objet de travaux de rénovation importants doit obligatoirement faire l'objet d'une étude de faisabilité technique, économique et environnementale analysant notamment les différentes solutions énergétiques vertueuses à la disposition du consommateur.
46. Par rapport à cette règle générale, le projet de décret (article 2) dispense de l'obligation de réaliser cette étude de faisabilité pour les bâtiments assujettis à l'obligation de raccordement à un réseau de chaleur.
II. Discussion
47. Il est utile d'abord de résumer brièvement l'économie générale des différentes dispositions relatives au classement d'un réseau de chaleur, déjà évoquées aux paragraphes précédents.
48. Selon les dispositions actuellement en vigueur (articles L. 712-1 et suivants du Code de l'énergie), une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales peut décider de classer un réseau de chaleur, lorsqu'il est alimenté à plus de 50% par une énergie renouvelable ou de récupération. Cette décision de classement définit, sur tout ou partie de la zone de desserte du réseau, un ou plusieurs périmètres de développement prioritaire.
49. Dans les zones délimitées par un périmètre de développement prioritaire, toute installation d'un bâtiment neuf ou faisant l'objet de travaux de rénovation importants doit être raccordée au réseau concerné.
50. Le projet de décret faisant l'objet de la demande d'avis précise les éléments qui devront figurer dans la décision de classement. De plus, il détaille les dérogations à l'obligation de raccordement. Enfin, il exonère les bâtiments assujettis à l'obligation de raccordement de l'étude de faisabilité des différentes solutions énergétiques qui doit normalement être conduite préalablement à toute construction de bâtiment neuf ou devant faire l'objet d'une rénovation importante.
A. SUR LA RESTRICTION DE CONCURRENCE ENTRE LES DIFFÉRENTES ÉNERGIES DE CHAUFFAGE
51. Le chauffage d'un bâtiment et la fourniture d'eau chaude sanitaire peuvent être fournis par différents types d'énergie : électrique, gaz, fioul, réseau de chaleur ou solution basée sur une énergie renouvelable comme le solaire.
52. Comme le rappelle la décision n° 99-D-51 du Conseil de la concurrence en date du 20 juillet 1999 relative à des pratiques constatées dans le secteur des applications thermiques de l'énergie, le choix de la solution énergétique va déterminer à la fois le choix d'une installation de chauffage spécifique (raccordement du bâtiment à un réseau de gaz ou de chaleur, chaudière et convecteurs spécifiques par exemple), mais également le choix d'une énergie spécifique pour alimenter l'installation de chauffage (électricité, gaz, fioul, énergie renouvelable par exemple). Le choix entre ces différentes solutions de chauffage est effectué par le consommateur (dans le cas d'une habitation isolée) ou le bailleur (dans le cas d'un bâtiment contenant plusieurs appartements par exemple).
53. La loi a mis en place, pour certaines habitations situées dans les zones de développement prioritaires d'un réseau de chaleur ayant fait l'objet d'une procédure de classement, une obligation de raccordement de ces habitations au réseau de chaleur. Comme l'obligation de raccordement au réseau de chaleur va contraindre le consommateur à acheter l'énergie acheminée par ce réseau de chaleur, la loi va de facto restreindre la liberté de choix de la solution de chauffage pour ces habitations. Ce verrouillage des clients au profit des réseaux de chaleur classés va se prolonger tout au long de la durée de classement du réseau mais aura également une incidence au-delà de cette période du fait notamment des coûts prohibitifs de changement de solution de chauffage.
54. En effet, le coût de changement de solution de chauffage est particulièrement élevé pour les consommateurs raccordés à un réseau de chaleur, notamment en raison de pénalités contractuelles élevées s'appliquant en cas de déraccordement au réseau de chaleur. Ces pénalités trouvent leur justification dans le fait que l'équilibre économique de l'exploitation d'un réseau de chaleur doit être assuré tout au long d'une DSP et que l'exploitant du réseau doit s'assurer qu'il y a un nombre suffisant de clients raccordés au réseau de chaleur. Il peut être également mentionné que, dans le cadre de certains contrats de DSP, il n'est pas prévu que le consommateur ait même la possibilité de se déraccorder du réseau de chaleur en choisissant une autre source d'énergie.
55. Cette restriction de choix pour les consommateurs va avoir une incidence sur les marchés des solutions énergétiques concurrentes aux réseaux de chaleur (gaz, électricité et fioul notamment).
56. Concernant le marché de la distribution de gaz, si on considère par exemple la construction d'un nouveau lotissement dans une agglomération où un réseau de chaleur serait classé, le gestionnaire de distribution de gaz n'aura pas intérêt à construire des canalisations permettant d'acheminer du gaz dans les quartiers où sont localisées les habitations assujetties à l'obligation de raccordement au réseau de chaleur. Les habitations concernées ne pourront donc pas opter pour des chaudières à gaz comme moyen de chauffage, ce qui aura un effet sur l'activité des entreprises qui commercialisent et qui assurent la pose de ces chaudières à gaz, ainsi que sur l'activité des fournisseurs de gaz.
57. Pour ce qui est de l'électricité, les entreprises commercialisant et assurant la pose de convecteurs électriques se retrouveront, de fait, exclues des bâtiments assujettis à l'obligation de raccordement. De même, les fournisseurs d'électricité ne pourront plus commercialiser leur électricité pour le chauffage de ces bâtiments.
58. Pour ce qui est du fioul, les entreprises commercialisant et assurant la pose de chaudières au fioul, ainsi que les fournisseurs de fioul ne pourront, de fait, servir les bâtiments assujettis à l'obligation de raccordement.
59. Par ailleurs, il peut être évoqué également un risque de ventes liées qui affaiblirait l'intensité de la concurrence sur des marchés connexes comme le marché de la fourniture d'électricité par exemple. Ainsi, les exploitants de réseaux de chaleur sont parfois également fournisseurs d'électricité (par exemple certaines ELD - entreprises locales de distribution -). Une entreprise présente sur ces deux marchés pourrait profiter de l'obligation de raccordement rendant captifs un certain nombre de consommateurs pour leur proposer un contrat global de fourniture d'énergie incluant à la fois la fourniture de chaleur et la fourniture d'électricité. Ces contrats pourraient avoir pour objet ou pour effet de restreindre l'intensité concurrentielle sur le marché de la fourniture d'électricité, ce qui pourrait être contraire à l'article 102 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE) et/ou à l'article L.420-2 du Code de commerce (voir notamment l'avis n° 06-A-08 du Conseil de la concurrence en date du 30 mars 2006 relatif à une demande du parquet du tribunal de grande instance de Metz à propos de pratiques de l'Usine d'Électricité de Metz).
60. En résumé, il apparaît que la décision prise par une collectivité de classer un réseau de chaleur va rendre captifs certains consommateurs (localisés dans les zones de développement prioritaires) au profit du réseau de chaleur ayant fait l'objet d'une demande de classement et aux dépens des fournisseurs de solutions énergétiques concurrentes.
61. La restriction de concurrence ainsi décrite, qui découle de l'obligation de raccordement, peut néanmoins trouver certaines justifications dans la poursuite des objectifs de politique environnementale. En effet, la France s'est engagée, au plan européen, à ce que la part des énergies renouvelables soit portée à au moins 23% de la consommation d'énergie finale d'ici 2020. Selon l'ADEME, il semble que l'utilisation de réseaux de chaleur alimentés en majorité par des énergies renouvelables soit un vecteur efficace pour atteindre les engagements européens dans la mesure où elle permet de valoriser des énergies renouvelables locales comme la biomasse ou la géothermie de manière plus efficace.
62. Une restriction de concurrence peut être acceptable si elle est proportionnée à l'objectif à atteindre, c'est-à-dire si elle ne va pas au-delà de ce qui est strictement nécessaire par rapport à l'objectif à atteindre (la promotion des énergies renouvelables). Aussi est-il important que le projet de décret, qui précise les conditions de la procédure de classement, mentionne les éléments permettant de garantir que l'obligation de raccordement est strictement proportionnée à la promotion des énergies renouvelables.
63. Dans le cadre de l'examen de la demande d'avis, plusieurs enjeux concurrentiels peuvent être identifiés :
- la décision de classement d'un réseau de chaleur par une collectivité ;
- le suivi de cette décision de classement au cours du temps ;
- l'exonération de l'étude de faisabilité permettant de garantir le meilleur choix énergétique ;
- les dérogations à l'obligation de raccordement.
B. SUR LA DÉCISION DE CLASSEMENT PRONONCÉE PAR LA COLLECTIVITÉ
64. Il convient d'abord de souligner que le prix de la fourniture de chaleur est très variable parmi les réseaux de chaleur alimentés à 50% en énergies renouvelables. L'Union Sociale pour l'Habitat (USH) (qui représente 800 organismes HLM et est le premier client en France des exploitants de réseaux de chaleur) a conduit une enquête en 2010 montrant qu'il existait de fortes disparités entre les tarifs appliqués par les différents exploitants de réseaux de chaleur en France. L'étude montre que, si l'on considère uniquement les réseaux de chaleur alimentés à 50% en énergies renouvelables (réseaux éligibles à une demande de classement), le coût de la fourniture de chaleur varie de 1 à 4 selon les réseaux.
65. Ensuite, il est probable que les collectivités n'aient pas nécessairement conscience de la compétitivité du réseau de chaleur qu'elles détiennent. En effet, alors que le coût des énergies concurrentes (électricité, gaz, fioul) est publié et est aisément accessible aux consommateurs depuis les sites Internet des fournisseurs par exemple, il n'existe aucune publication de la part des exploitants de réseaux de chaleur dans laquelle les tarifs des différents réseaux de chaleur et leur formule d'évolution sont répertoriés. La FEDENE (la Fédération des Services Energie-Environnement regroupant les exploitants de réseaux de chaleur) publie seulement un document (" Via Seva ") répertoriant le mix énergétique des différents réseaux de chaleur en France. Il est donc très difficile pour une collectivité d'évaluer la compétitivité relative de son réseau de chaleur par rapport aux autres réseaux de chaleur.
66. En outre, il existe, dans le cas des DSP, une asymétrie d'information certaine entre la collectivité et l'exploitant du réseau. Cette asymétrie d'information est notamment évoquée dans un dossier de l'AMORCE (association nationale des collectivités, des associations et des entreprises pour la gestion des déchets, de l'énergie et des réseaux de chaleur) consacré aux réseaux de chaleur2. Selon l'AMORCE, il y aurait souvent " une absence d'implication de la collectivité délégante, et une insuffisance du contrôle effectif du délégataire ". La collectivité est donc dépendante des informations communiquées par l'exploitant du réseau.
67. Dans le cadre d'une discussion sur l'opportunité de classer un réseau de chaleur, la collectivité ne pourra baser sa décision que sur les informations communiquées par l'exploitant, informations qui seront susceptibles de ne pas être totalement objectives, dans la mesure où l'exploitant du réseau de chaleur a un intérêt à ce que le réseau soit classé afin d'accroître automatiquement le nombre de ses clients.
68. Il n'est donc pas à exclure que, sous l'impulsion des exploitants de réseaux de chaleur, certaines collectivités prononcent des décisions de classement pour des réseaux qui, certes, satisfont à l'obligation de 50% d'énergies renouvelables, mais qui sont également peu compétitifs. Dès lors, certains consommateurs se retrouveraient raccordés à des réseaux qui seraient vertueux sur le plan environnemental, mais dont le coût de fourniture pourrait être très élevé par rapport à des solutions alternatives.
69. Il est donc crucial qu'avant de prendre la décision de classement, la collectivité puisse s'appuyer sur des indicateurs objectifs quant à la performance de son propre réseau de chaleur. Une analyse basée sur ces indicateurs lui permettrait de comparer la compétitivité de son réseau par rapport aux énergies concurrentes, mais également par rapport aux autres réseaux de chaleur français. Sur la base de cette analyse, la collectivité pourrait soit décider de ne pas classer le réseau (car les solutions alternatives permettraient une baisse des coûts telle que celle-ci ferait plus que compenser les avantages environnementaux offerts par le réseau de chaleur), soit conditionner le classement à ce que l'exploitant du réseau modifie le mix énergétique ou renforce l'isolation thermique du réseau afin de rendre le coût de la fourniture d'énergie moins onéreux, tout en respectant le seuil de 50% d'énergies renouvelables.
70. Début 2009, des indicateurs de performance de la gestion des réseaux de chaleur ont été établis en concertation avec les différentes parties prenantes, sous l'égide de l'IGD (Institut de la Gestion Déléguée). Ces indicateurs recouvrent notamment des indicateurs de performance énergétique du réseau, d'émissions de dioxyde de carbone ou de prix moyen du MWh de chaleur. Ces indicateurs ne sont pas utilisés actuellement.
71. Ainsi, il est recommandé au Gouvernement de rendre obligatoire la publication, chaque année, d'indicateurs de performance par les exploitants des réseaux de chaleur, les indicateurs de l'IGD mentionnés au paragraphe précédent constituant un exemple parmi d'autres possibles.
72. Dotées de ces indicateurs de performance multicritères, les collectivités seraient susceptibles de mieux analyser les caractéristiques de leurs propres réseaux et de ne mettre en œuvre une démarche de classement que pour les réseaux réellement compétitifs. Cette batterie d'indicateurs leur permettrait par ailleurs d'instiller davantage de compétition dans les procédures de mise en concurrence pour renouveler les DSP.
73. Il est à noter qu'une démarche similaire a été entreprise pour la gestion déléguée de l'eau potable dans la mesure où, depuis le 1er janvier 2008, le Gouvernement a rendu obligatoire pour les exploitants des réseaux d'eau potable le suivi d'un certain nombre d'indicateurs de performance des réseaux3. D'ailleurs, des pays comme la Suède et le Danemark ont déjà mis en place ce suivi obligatoire d'indicateurs de performance assorti d'une publication annuelle pour chaque réseau de chaleur.
74. Sur la base de ces indicateurs, il est recommandé aux collectivités territoriales que, préalablement à la délimitation d'un périmètre de développement prioritaire (imposant l'obligation de raccordement au réseau de chaleur sur cette zone), une étude d'impact soit conduite afin de comparer les solutions alternatives à l'obligation de raccordement au réseau de chaleur sur les plans financier, technique et environnemental. Cette étude d'impact permettra de mieux éclairer les différentes alternatives dont dispose la collectivité.
75. A la suite de cette étude, il serait souhaitable qu'un débat soit organisé au sein de la collectivité afin qu'elle n'opte pour la délimitation d'un périmètre de développement prioritaire que dans le cas où les avantages offerts par les solutions alternatives ne compensent pas strictement les avantages offerts par l'obligation de raccordement notamment sur le plan environnemental.
76. Par exemple, si l'étude montre que, pour un quartier donné, le raccordement au gaz est moins onéreux que le raccordement au réseau de chaleur, la décision de classement ne serait prise que si les avantages environnementaux (par exemple, la valorisation d'une filière bois présente à côté de la commune) compensent la différence de compétitivité entre les réseaux.
77. Enfin, il est important que la durée du classement d'un réseau de chaleur (qui devra être explicitement mentionnée dans la décision de classement) soit strictement encadrée.
78. A l'article 5 de la loi n°80-531 du 15 juillet 1980 relative aux économies d'énergie et à l'utilisation de la chaleur (modifié par l'article 4 de l'ordonnance n°2011-504 du 9 mai 2011), il est fait mention du fait que le classement peut être prononcé pour une durée déterminée maximale de trente ans. Cette durée de trente ans apparaît longue, alors même que les priorités politiques peuvent changer (par exemple l'objectif de 23% d'énergie renouvelable dans la consommation nationale à l'horizon 2020) et il n'est pas bénéfique, au plan concurrentiel, qu'une restriction de concurrence se prolonge sur le long terme, alors même que l'évolution des technologies de production d'énergie est susceptible de modifier les équilibres économiques actuellement en place.
79. Par ailleurs, il convient que la délégation de service public soit remise en cause à intervalles réguliers pour éviter les situations acquises. La durée de la délégation n'a donc pas à être alignée sur la durée maximale possible de classement.
80. Cependant, il est nécessaire de donner les bonnes incitations à l'investissement aux exploitants des réseaux de chaleur qui souhaiteraient investir dans des installations d'énergies renouvelables pour alimenter leur réseau de chaleur.
81. Afin de concilier ces deux contraintes, il est recommandé aux collectivités territoriales de prévoir que la durée de classement mentionnée dans la décision de classement n'excède pas la durée nécessaire pour l'amortissement des installations du réseau de chaleur ayant fait l'objet du classement4.
C. SUR LE SUIVI DE LA DÉCISION DE CLASSEMEMENT DANS LE CADRE D'UNE DÉLÉGATION DE SERVICE PUBLIC
82. Comme il a été décrit ci-dessus, la décision de classement et plus précisément la désignation par la collectivité de périmètres de développement prioritaire va entraîner une restriction de concurrence. Si celle-ci doit être encadrée au moment où la collectivité prend sa décision, il est également crucial que cette décision de classement fasse l'objet d'un suivi particulier tout au long de la DSP.
83. En effet, un réseau peut faire l'objet d'une procédure de classement et, à la suite de cette décision, un ou plusieurs périmètres de développement prioritaires peuvent être délimités déclenchant l'obligation de raccordement pour les habitations de ces quartiers. Quelques années après (lorsque les habitations ont été raccordées au réseau de chaleur), il ne peut être exclu que l'exploitant du réseau puisse modifier le mix énergétique du réseau de chaleur en abaissant notamment la part d'énergie renouvelable à moins de 50%, via une augmentation de l'utilisation des énergies fossiles comme le gaz ou le fioul. Cela pourrait notamment être le cas si le coût de ces énergies devenait plus compétitif que celui des énergies renouvelables utilisées.
84. Dans ce cas, la restriction de concurrence liée à l'obligation de raccordement ne serait plus compensée par le respect d'un objectif environnemental.
85. Certes, il doit être mentionné que le projet de décret a prévu plusieurs garde-fous permettant de limiter ce comportement opportuniste (dit de " free riding "), à la fois ex ante et ex post à la décision de classement. Selon le projet de décret en effet, le dossier de demande de classement devra contenir " la justification de la pérennité des sources d'énergies renouvelables ou de chaleur de récupération utilisées ". De plus, le projet de décret a également prévu que la collectivité ayant pris la décision de classement pourrait abroger celle-ci " si la condition relative à l'alimentation à plus de 50% par une énergie renouvelable ou de récupération n'a pas été justifiée en moyenne pendant trois années consécutives " , l'abrogation de la décision de classement ayant pour effet de mettre fin aux périmètres de développement prioritaire et donc de l'obligation de raccordement. Le contrôle du respect du seuil des 50% d'énergies renouvelables serait rendu possible, selon le projet de décret, grâce au rapport annuel publié par la collectivité ayant décidé le classement qui comporterait notamment " le bilan annuel des énergies utilisées selon leur origine ". Par ailleurs, en présence d'une DSP, l'article L. 1411-3 du code général des collectivités territoriales dispose que le délégataire doit, chaque année, " produire à l'autorité délégante un rapport comportant notamment les comptes retraçant la totalité des opérations afférentes à l'exécution de la délégation de service public et une analyse de la qualité de service ".
86. Néanmoins, il n'est pas certain que ces éléments soient suffisants pour empêcher l'éventuel comportement opportuniste décrit ci-dessus.
87. Ainsi, malgré ces éléments, dans le cadre d'un réseau classé exploité en DSP, il ne peut être totalement exclu qu'un exploitant d'un réseau chaleur décide de ne plus respecter ses obligations en matière de seuil de 50% d'énergies renouvelables, une fois par exemple qu'un nouveau lotissement a été créé dans une agglomération et a été délimité comme zone de développement prioritaire et que les habitations localisées dans cette zone ont fait l'objet d'un raccordement obligatoire. Certes, la décision de classement serait abrogée, à la suite des rapports annuels montrant que l'exploitant ne respecte plus le seuil de 50%. Mais cette abrogation aurait peu d'incidence dans la mesure où l'ensemble des habitations seraient déjà raccordées et que les consommateurs se retrouveraient de facto captifs, alors même qu'aucun objectif environnemental n'aurait été atteint.
88. Il n'est pas certain que le Gouvernement puisse, dans l'exercice de son pouvoir réglementaire, mettre en place un système permettant aux collectivités territoriales de sanctionner ex post ces comportements " opportunistes ", par exemple via des pénalités financières s'appliquant en cas de non-respect du seuil de 50% d'énergies renouvelables par l'exploitant du réseau de chaleur. Un tel mécanisme de sanction semble, en effet, relever a priori de la compétence du législateur.
89. Néanmoins, il peut être rappelé aux collectivités que rien ne s'oppose à ce qu'elles introduisent un tel mécanisme de sanction dans les contrats de DSP afin de prévenir ces comportements " opportunistes ".
D. SUR L'EXONÉRATION DE L'ETUDE DE FAISABILITÉ PERMETTANT DE GARANTIR LE MEILLEUR CHOIX ÉNERGÉTIQUE
90. Selon les articles R. 111-22-1 et R. 131-27 du Code de la construction et de l'habitation, dans le cas de nouveaux bâtiments ou de bâtiments faisant l'objet de travaux de rénovation significatifs, le maître d'ouvrage réalise une étude de faisabilité technique et économique des diverses solutions d'approvisionnement en énergie pour le chauffage, la ventilation, le refroidissement, la production d'eau chaude sanitaire et l'éclairage des locaux.
91. Cette étude examine notamment le recours à l'énergie solaire et aux autres énergies renouvelables, le raccordement à un réseau de chauffage ou de refroidissement collectif ou urbain, l'utilisation de pompes à chaleur et de chaudières à condensation, le recours à la production combinée de chaleur et d'électricité (cogénération).
92. L'objectif de l'étude de faisabilité technique est d'analyser et de comparer, sur le plan technique, économique et environnemental, différentes solutions énergétiques vertueuses.
93. Le projet de décret propose, à son article 2, de supprimer le caractère obligatoire de cette étude pour le système de chauffage et d'eau chaude sanitaire pour les bâtiments situés à l'intérieur des périmètres de développement prioritaire d'un réseau de chaleur ayant fait l'objet d'une procédure de classement. Cette suppression procède de l'idée que ces bâtiments seront soumis à l'obligation de raccordement au réseau de chaleur et qu'il ne serait donc pas pertinent d'étudier les solutions alternatives au raccordement au réseau de chaleur (énergies renouvelables décentralisées, pompes à chaleur, chaudières à condensation, cogénération).
94. Il n'est pourtant pas souhaitable de supprimer le caractère obligatoire de cette étude concernant les habitations situées dans les zones de développement prioritaires. En effet, cette étude est un moyen de mettre en évidence les avantages et inconvénients économiques et techniques de différentes solutions vertueuses que ce soit sur le plan de l'efficacité énergétique ou de celui de la promotion des énergies renouvelables. Elle peut se révéler utile (notamment pour le consommateur) pour comparer entre elles des solutions énergétiques aussi vertueuses sur le plan environnemental que le raccordement à un réseau de chaleur dont le mix énergétique est composé à 50% par des énergies renouvelables.
95. Ainsi, une telle étude permettrait de mettre en évidence qu'une solution énergétique basée sur des pompes à chaleur par exemple serait beaucoup moins onéreuse pour le consommateur et plus vertueuse sur le plan de l'environnement que le raccordement à un réseau de chaleur dont le mix énergétique serait, certes, composé à 50% d'énergie renouvelable mais qui serait d'une efficacité énergétique contestable (par exemple du fait d'une mauvaise isolation thermique des canalisations) et qui ferait partie des réseaux de chaleur dont le coût de la fourniture de chaleur est très élevé (comme l'a montré l'étude de l'USH citée précédemment). Cette étude apparaît d'autant plus indispensable à mener que des progrès techniques significatifs sont observables quant au rendement de ces solutions alternatives.
96. Par ailleurs, il convient de souligner que la directive 2010-31-UE du 19 mai 2010 sur la performance énergétique des bâtiments dispose, à son article 9, que " les Etats membres veillent à ce que, d'ici au 31 décembre 2020, tous les nouveaux bâtiments soient à consommation d'énergie quasi-nulle ". Selon cette directive, de nombreux bâtiments neufs au cours des années à venir auront une consommation d'énergie quasi-nulle via la conception bioclimatique des bâtiments (orientation des façades par exemple), l'isolement thermique, l'étanchéité par rapport à l'air et un fonctionnement des équipements très performant. L'ADEME a évalué que la consommation unitaire de tels bâtiments pourrait être de l'ordre de celle d'un réfrigérateur (500-600 kWh/an). Dès lors, il peut être utile de se demander s'il est pertinent, sur le plan économique, d'obliger de tels bâtiments à se raccorder à un réseau de chaleur classé dont les coûts fixes se révèlent particulièrement importants du fait de la nécessité d'amortir l'investissement dans le réseau, alors même qu'une solution décentralisée (pompes à chaleur ou même chauffage électrique) serait plus adaptée. Là encore, l'étude de faisabilité pourrait permettre de mettre en évidence que le raccordement à un réseau de chaleur n'est peut-être pas la solution optimale sur le plan économique, technique et environnemental.
97. A la lumière de ces arguments, il y a lieu de recommander au Gouvernement de supprimer l'article 2 du projet de décret afin de ne pas exonérer les bâtiments situés sur les zones de développement prioritaires de conduire l'étude de faisabilité mentionnée dans le Code de la construction et de l'habitat.
98. D'ailleurs, cette recommandation est conforme aux dispositions des articles 6 et 7 de la directive 2010-31-UE précitée qui mentionnent qu'une étude de faisabilité technique, environnementale et économique portant sur différentes solutions énergétiques vertueuses (cogénération, pompes à chaleur, énergies renouvelables décentralisées et réseaux de chaleur) devra être obligatoirement conduite pour tout bâtiment neuf ou faisant l'objet de rénovation importante. Ces articles de la directive ne mentionnent pas d'exception particulière : il n'y a donc pas lieu d'exonérer les maîtres d'ouvrage de réaliser l'étude de faisabilité concernant les bâtiments situés sur des zones de développement prioritaire5.
E. SUR LES DÉROGATIONS À L'OBLIGATION DE RACCORDEMENT
99. Le projet de décret a prévu un certain nombre de dérogations à l'obligation de raccordement au réseau de chaleur pour ce qui est de certaines habitations localisées dans une zone prioritaire de développement.
100. Selon le projet de décret, une dérogation à l'obligation de raccordement à un réseau de chaleur ou de froid ne peut être accordée que lorsque l'installation concernée :
- soit est alimentée pour satisfaire ses besoins de chauffage, de climatisation ou de production d'eau chaude à plus de 50 % sur l'ensemble d'une année calendaire par de l'énergie produite à partir d'énergies renouvelables disponibles localement et ne pouvant être exploitées par le réseau ;
- soit présente une demande de chaleur ou de froid dont les caractéristiques techniques sont incompatibles avec celles du réseau ;
- soit ne peut être alimentée en énergie par le réseau concerné dans les délais nécessaires à la satisfaction principale des besoins de chauffage ou d'eau chaude sanitaire ou, dans le cas des réseaux de froid, de climatisation de l'usager, sauf si l'exploitant met en place une solution transitoire de nature à permettre l'alimentation des usagers en chaleur ou en froid ;
- soit ne peut être raccordée au réseau dans des conditions économiques de raccordement et de tarif inférieures aux seuils fixés dans la décision de classement pour la zone de développement prioritaire considérée.
101. Juridiquement, la décision d'accorder de telles dérogations est du ressort de la collectivité publique.
102. Néanmoins, il peut être également souligné que, dans un certain nombre de cas, il est probable que l'entité qui examinera techniquement le bien fondé des dérogations demandées sera l'exploitant du réseau de chaleur. Ce dernier ayant un intérêt objectif à limiter les dérogations, les personnes souhaitant obtenir une dérogation seraient susceptibles de se voir opposer une fin de non-recevoir, de manière non-justifiée.
103. Ce risque pourrait être circonscrit si les dérogations étaient précisément détaillées dans le projet de décret, ne laissant ainsi aucune marge d'interprétation. Or, il s'avère que ces dérogations, telles qu'elles apparaissent dans le projet de décret, ne sont pas précises, ce que le représentant de la Direction Générale de l'Énergie et du Climat (DGEC) a d'ailleurs reconnu en séance.
104. Ainsi, il sera difficile de déterminer ce qu'est une énergie renouvelable disponible " localement " (s'agit-il de la commune, du département, de la région dans le cas d'une filière bois par exemple ?) et une source d'énergie " ne pouvant être exploitée par le réseau ". Le représentant de la DGEC a indiqué en séance que cette dernière source d'énergie regroupait les installations de type chauffe-eau solaire, qui ne peuvent être techniquement utilisées par le réseau. Néanmoins, cela ne semble pas être l'avis de l'USH qui a mentionné que certaines installations de chauffe-eau solaire installées par des organismes HLM pourraient être techniquement utilisées par les exploitants de réseau de chaleur, ce qui viderait de son contenu la première dérogation mentionnée puisque, potentiellement, toute énergie renouvelable, même décentralisée, pourrait être exploitée par le réseau.
105. De même, il peut être évoqué que, selon le projet de décret, un consommateur sera en droit d'obtenir une dérogation si le coût de raccordement au réseau de chaleur excède un seuil particulier, seuil qui sera mentionné dans la décision de classement du réseau. Là encore, il est prévisible que, dans certains cas, la collectivité territoriale s'appuie sur l'expertise de l'exploitant pour fixer ce seuil dans la décision de classement. Il est possible que l'exploitant lui conseille un seuil suffisamment élevé pour dissuader toute demande de dérogation.
106. Afin de prendre en compte ces remarques, il pourrait être conseillé aux collectivités de clarifier avec leur exploitant l'étendue de chacune des dérogations mentionnées. En ce qui concerne plus particulièrement l'enjeu relatif au seuil de raccordement, il est également conseillé aux collectivités de faire appel à un bureau d'étude extérieur afin de s'assurer que le seuil mentionné dans la décision de classement ne soit pas fixé à un niveau trop élevé.
107. Enfin, il est recommandé au Gouvernement de permettre des dérogations à l'obligation de raccordement basées sur les conclusions de l'étude de faisabilité qui a été mentionnée aux paragraphes 99 et suivants. En effet, dans la mesure où elle est réalisée par une partie tierce, cette étude offrirait un gage d'indépendance par rapport à l'examen des autres dérogations.
108. Ainsi, en complément des dérogations déjà prévues dans le projet de décret, il y a lieu de prévoir que des dérogations à l'obligation de raccordement puissent être également accordées aux consommateurs pouvant prouver, sur la base de l'étude de faisabilité prévue dans le Code de la construction et de l'habitation, que des solutions énergétiques vertueuses alternatives sont plus intéressantes que le raccordement au réseau de chaleur sur le plan technique, économique et environnemental.
109. Cette recommandation semble conforme aux dispositions des articles 6 et 7 de la directive 2010-31-UE précitée qui indiquent qu'il doit être tenu compte des conclusions de l'étude de faisabilité technique mentionnée précédemment.
III. Conclusion
110. L'obligation de raccordement à un réseau de chaleur entraînera mécaniquement, pour les consommateurs, une restriction significative de la liberté de choisir leur solution énergétique de chauffage et d'eau chaude sanitaire. Cela aura un impact sur différents marchés tels que la fourniture de gaz, d'électricité, de fioul ou la fourniture de services liés (chauffagistes et distribution de gaz par exemple). Une telle restriction de concurrence ne peut, dans ces conditions, être admise que si elle s'appuie sur de solides justifications d'intérêt général, liées aux engagements européens que la France a pris en matière de promotion des énergies renouvelables.
111. Le projet de décret soumis à l'avis de l'Autorité de la concurrence fixe les conditions dans lesquelles la procédure de classement peut être mise en œuvre par une collectivité territoriale. Il est donc important que les règles soient précises afin que la restriction de concurrence identifiée n'aille pas au-delà de ce qui est strictement nécessaire à l'objectif déclaré de promotion des énergies renouvelables.
112. A la lumière de ce raisonnement, l'Autorité fait les recommandations suivantes.
113. Premièrement, il est recommandé au Gouvernement de rendre obligatoire la publication annuelle d'indicateurs de performance portant sur chacun des réseaux de chaleur français.
114. Deuxièmement, il est recommandé aux collectivités publiques souhaitant classer un réseau de chaleur de conduire, préalablement à la définition d'un périmètre de développement prioritaire, une étude pour comparer les avantages et inconvénients sur le plan économique, technique et environnemental de l'obligation de raccordement de la zone d'habitation par rapport aux autres solutions alternatives.
115. Troisièmement, il est recommandé aux collectivités de déterminer la durée de classement d'un réseau de chaleur de manière à ce que celle-ci n'excède pas la durée d'amortissement des installations du réseau.
116. Quatrièmement, afin de limiter, dans le cas des DSP, les risques potentiels de comportement " opportuniste " de la part des exploitants de réseaux de chaleur, il est recommandé aux collectivités qui souhaitent classer un réseau de chaleur d'introduire, dans les contrats de DSP, un mécanisme de pénalités financières qui serait appliqué dans le cas où l'exploitant ne respecterait plus, durant la période de classement, les obligations liées à la part " environnementale " du mix énergétique.
117. Cinquièmement, il est recommandé au gouvernement de supprimer l'article 2 du projet de décret afin de ne pas exonérer les maîtres d'ouvrage de réaliser l'étude de faisabilité mentionnée dans le Code de la construction et de l'habitation pour les bâtiments situés dans les périmètres de développement prioritaire.
118. Sixièmement, il est recommandé aux collectivités de clarifier avec l'exploitant le contenu des dérogations à l'obligation de raccordement et de s'appuyer sur l'expertise d'un bureau d'étude indépendant pour évaluer le seuil au-delà duquel le raccordement ne sera plus obligatoire.
119. Enfin, il est recommandé au Gouvernement de mentionner dans le projet de décret que la collectivité territoriale pourra accorder une dérogation à l'obligation de raccordement aux consommateurs pouvant prouver, sur la base de l'étude mentionnée au paragraphe précédent, qu'une solution énergétique vertueuse alternative est supérieure au raccordement au réseau de chaleur sur le plan technique, économique et environnemental.
Délibéré sur le rapport oral de M. Edouard Leduc et l'intervention de M. Pierre Debrock, rapporteur général adjoint, par M. Bruno Lasserre, président, Mmes Françoise Aubert et Elisabeth Flüry-Hérard, vice-présidentes.
NOTES :
1 Ces contrats ont été conclus avant l'entrée en vigueur de la loi du 29 janvier 1993, dite loi Sapin. Cette loi a pour objectif, entre autre, d'accroître la transparence des procédures de passation des délégations de service public (DSP), notamment pour le renouvellement périodique de ces contrats impliquant une remise en concurrence des opérateurs. L'article 40 de cette loi prévoit que "les conventions de délégation de service public doivent être limitées dans leur durée".
2 Voir notamment le dossier accessible à l'adresse suivante : http://www.ofme.org/bois-energie/documents/Projet/Amorce_guide_delegation.pdf
3 Voir notamment l'arrêté du 2 mai 2007 relatif aux rapports annuels sur le prix et la qualité des services publics d'eau potable et d'assainissement
4 A titre de comparaison, l'article L-1411-2 du code général des collectivités territoriales dispose que, dans le domaine de l'eau potable, de l'assainissement, des ordures ménagères et autres déchets, les délégations de service public ne peuvent amortir leurs installations sur des durées supérieures à vingt ans, sauf examen préalable par le directeur départemental des finances publiques.
5 Les dispositions des articles 6 et 7 de la directive 2010-31-UE doivent être transposées, selon l'article 28, au plus tard le 9 juillet 2013.