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Décisions

TUE, 7e ch., 26 janvier 2012, n° T-90/09

TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE

Ordonnance

PARTIES

Demandeur :

Mojo Concerts BV, Amsterdam Music Dome Exploitatie BV

Défendeur :

Commission européenne, Royaume des Pays-Bas, Gemeente Rotterdam (Pays-Bas), Ahoy' Rotterdam NV

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dittrich

Juges :

Mme Wiszniewska-Bialecka (rapporteur), M. Prek

Avocats :

Mes Beeston, Feenstra, Fanoy, van der Woude, Offers, Maas-Cooymans

TUE n° T-90/09

26 janvier 2012

LE TRIBUNAL (septième chambre),

Antécédents du litige

1 Les requérantes sont Mojo Concerts BV et Amsterdam Music Dome Exploitatie BV. Mojo Concerts est une entreprise, créée en 1968, exerçant des activités d'organisatrice de concerts et de festivals, de programmation d'artistes ainsi que de conception et d'organisation d'évènements. Amsterdam Music Dome Exploitatie est une entreprise créée en 2006 pour assurer l'exploitation d'une salle de concerts d'une capacité de 15 600 personnes, le " Ziggo Dome ", qui doit être construite à Amsterdam (Pays-Bas).

2 Par lettre du 22 février 2007, les autorités néerlandaises ont notifié à la Commission une mesure relative à un investissement réalisé par la Gemeente Rotterdam (la commune de Rotterdam) dans la rénovation et la modernisation/l'agrandissement du complexe Ahoy'.

3 Le complexe Ahoy', situé à Rotterdam, est constitué d'un palais des sports (le Sportpaleis), de six halls d'exposition et d'un grand centre de réunion et de congrès. Il est destiné à héberger un grand nombre d'évènements différents tels que des expositions, des conférences, des salons professionnels, des représentations, des concerts, des évènements sportifs et sociaux. L'exploitant du complexe, Ahoy' Rotterdam NV, intervient également sur le marché international et exporte ses propres salons.

4 Jusqu'au 1er juillet 2006, le complexe Ahoy' était géré par Ahoy' Rotterdam, dont l'actionnaire unique était la Gemeente Rotterdam. La Gemeente Rotterdam, ayant décidé de dissocier la propriété de l'exploitation, est restée propriétaire du complexe et a vendu l'entreprise exploitante, Ahoy' Rotterdam, à ses salariés pour la somme de 1,7 million d'euros. Le prix de vente a été directement fixé à partir de la valeur de marché déterminée par un expert indépendant (ci-après le " premier expert ").

5 Dans le même temps, la Gemeente Rotterdam a loué le complexe Ahoy' à partir du 1er juillet 2006 à l'entreprise privatisée Ahoy' Rotterdam pour une période de quinze ans, avec une possibilité de prolongation. Le contrat de location imposait au locataire des obligations strictes en termes de maintien et de promotion du caractère multifonctionnel du complexe Ahoy'. Le loyer de départ de 2,6 millions d'euros par an qui avait été fixé dans le contrat était directement basé sur la valeur de marché du complexe Ahoy' calculée par le premier expert.

6 Dans le cadre du contrat de location, la Gemeente Rotterdam a consenti à investir un maximum de 42 millions d'euros dans la rénovation et la modernisation/l'agrandissement du Sportpaleis. Cet investissement est l'objet du projet notifié par les autorités néerlandaises.

7 Le 22 mars 2007, Mojo Concerts et Amsterdam Music Dome Exploitatie ont transmis une plainte à la Commission concernant l'investissement envisagé par la Gemeente Rotterdam dans le complexe Ahoy' ainsi que d'autres mesures prises par la Gemeente Rotterdam, à savoir la privatisation d'Ahoy' Rotterdam et la location du complexe Ahoy'.

8 Par lettre du 30 janvier 2008, la Commission a notifié au Royaume des Pays-Bas sa décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen prévue à l'article 88, paragraphe 2, CE concernant la mesure en cause (JO C 68, p. 14).

9 Le Royaume des Pays-Bas a présenté ses observations par lettre du 1er avril 2008.

10 En tant que parties intéressées, Ahoy' Rotterdam, les requérantes et un particulier ont présenté leurs observations à la Commission. Les requérantes ont soumis conjointement leurs observations à la Commission le 21 avril 2008.

11 Dans le cadre de la procédure formelle d'examen, la Commission a examiné si le régime de répartition des gains inscrit dans le contrat de location conclu entre Ahoy' Rotterdam et la Gemeente Rotterdam était à même d'empêcher l'exploitant du complexe Ahoy' de bénéficier, du fait de l'investissement notifié, d'un avantage économique excédant les conditions normales de marché. La Commission a également examiné si la vente d'Ahoy' Rotterdam et la location du complexe Ahoy' à l'exploitant privatisé, qui n'ont pas été notifiées par les autorités néerlandaises mais qui étaient des transactions présentant un lien étroit avec l'investissement notifié, pouvaient constituer d'éventuelles aides d'État.

12 Dans le cadre de cette procédure, la Commission a désigné un expert indépendant (ci-après le " second expert ") pour procéder à l'étude des rapports d'évaluation du premier expert, rapports sur lesquels la Gemeente Rotterdam s'était fondée pour réaliser la vente d'Ahoy' Rotterdam et la location du complexe Ahoy'. Selon le second expert, la méthode appliquée par le premier expert dans ses rapports relatifs à l'évaluation des actions d'Ahoy' Rotterdam et à la détermination de la valeur locative du complexe Ahoy' était correcte. En ce qui concerne l'examen du régime de répartition des gains, le second expert a conclu que ce régime garantissait une augmentation raisonnable du loyer conforme aux conditions du marché au regard de l'investissement prévu par la Gemeente Rotterdam.

13 Le 21 octobre 2008, la Commission a adopté la décision C (2008) 6018 final concernant l'investissement réalisé par la Gemeente Rotterdam dans le complexe Ahoy' [aide d'État C 4-2008 (ex N 97-2007, ex CP 91-2007)] (ci-après la " décision attaquée ").

14 Concernant l'existence d'un avantage économique, la Commission a considéré, premièrement, que " les rapports d'estimation [du premier expert] constituent une base fiable pour les prix fixés en vue de la vente par la Gemeente Rotterdam de [...] Ahoy' Rotterdam [...] et de la location du complexe Ahoy'. La Commission parvient par conséquent à la conclusion que ces transactions, compte tenu des obligations imposées dans ce cadre par la Gemeente Rotterdam, ont été conclues conformément aux conditions du marché et n'ont pas procuré à l'exploitant du complexe un avantage économique illégitime " (considérant 51 de la décision attaquée).

15 Deuxièmement, la Commission a estimé que, " en tenant compte du fait qu'il n'est pas sûr que la modernisation/l'agrandissement du Sportpaleis procure un avantage à l'exploitant, et vu que le régime de répartition des gains mis en place par la Gemeente Rotterdam offre une garantie efficace, la Commission conclut que l'investissement envisagé ne confère pas à l'exploitant un avantage économique qui excède les conditions normales du marché " (considérant 63 de la décision attaquée).

16 La Commission a ainsi considéré que " ni l'investissement envisagé dans le complexe Ahoy', ni la vente de l'exploitation ou la location du complexe Ahoy' par la Gemeente Rotterdam, lesquelles transactions sont liées à l'investissement, n'offrent à l'exploitant ou à d'autres entreprises éventuelles un avantage économique qui excède les conditions normales du marché. En outre, la Commission conclut que l'investissement n'est pas non plus sélectif en ce qu'il favoriserait des entreprises ou des activités économiques spécifiques " (considérant 69 de la décision attaquée).

17 En conséquence, la Commission a conclu, au considérant 71 de la décision attaquée, que " ni l'investissement notifié dans la rénovation et la modernisation/l'agrandissement du complexe Ahoy', ni la vente de [...] Ahoy' [Rotterdam] et la location du complexe, qui sont liées à l'investissement, ne constituent une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, [...] CE ".

18 Le dispositif de la décision attaquée prévoit :

" Article 1er

L'investissement de la Gemeente Rotterdam dans le complexe Ahoy' qui a été notifié à la Commission par lettre du 22 février 2007, y compris ses modifications ultérieures, ne constitue pas une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, [...] CE.

Cette mesure peut par conséquent être mise en œuvre.

Article 2

Les Pays-Bas sont destinataires de la présente décision. "

Procédure et conclusions des parties

19 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 février 2009, les requérantes ont introduit le présent recours.

20 Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement le 27 mai, le 11 juin et le 18 juin 2009, Ahoy' Rotterdam, la Gemeente Rotterdam et le Royaume des Pays-Bas ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la Commission. Par ordonnances du 22 octobre 2009, le président de la première chambre du Tribunal a admis ces interventions.

21 Ahoy' Rotterdam et la Gemeente Rotterdam ont déposé leurs mémoires en intervention le 8 janvier 2010. Le Royaume des Pays-Bas a déposé son mémoire en intervention le 11 janvier 2010. Les requérantes ont déposé leurs observations sur ces mémoires le 15 mars 2010.

22 La composition des chambres ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la septième chambre, à laquelle la présente affaire a donc été attribuée.

23 Les requérantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal :

- annuler la décision attaquée ;

- condamner la Commission aux dépens.

24 La Commission et les intervenantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal :

- rejeter le recours comme irrecevable ou, à tout le moins, comme non fondé ;

- condamner les requérantes aux dépens.

En droit

25 Aux termes de l'article 113 du règlement de procédure du Tribunal, ce dernier, statuant dans les conditions prévues à l'article 114, paragraphes 3 et 4, du même règlement, peut à tout moment, d'office, examiner les fins de non-recevoir d'ordre public.

26 En l'espèce, le Tribunal s'estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et, en conséquence, décide de statuer sans ouvrir la procédure orale.

27 La Commission, sans formellement soulever une exception d'irrecevabilité, conteste, dans le mémoire en défense et la duplique, la recevabilité de la demande d'annulation. Elle fait valoir des arguments selon lesquels les requérantes ne sont pas individuellement concernées par la décision attaquée au sens de l'article 230 CE, auxquels les requérantes ont répliqué.

28 Conformément à l'article 230, quatrième alinéa, CE, une personne physique ou morale ne peut former un recours contre une décision adressée à une autre personne que si cette décision la concerne directement et individuellement.

29 En l'espèce, il est constant que la décision attaquée a pour unique destinataire le Royaume des Pays-Bas.

30 Selon une jurisprudence constante, les sujets autres que les destinataires d'une décision ne sauraient prétendre être individuellement concernés que si cette décision les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d'une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d'une manière analogue à celle dont le destinataire d'une décision le serait (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25-62, Rec. p. 197, 223, et du 22 novembre 2007, Espagne/Lenzing, C-525-04 P, Rec. p. I-9947, point 30).

31 En matière d'aides d'État, ont été reconnues comme individuellement concernées par une décision de la Commission qui clôt la procédure ouverte au titre de l'article 88, paragraphe 2, CE, à l'égard d'une mesure d'aide, outre l'entreprise bénéficiaire, les entreprises concurrentes de cette dernière ayant joué un rôle actif dans le cadre de cette procédure, pour autant que leur position sur le marché soit substantiellement affectée par la mesure d'aide faisant l'objet de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 28 janvier 1986, Cofaz e.a./Commission, 169-84, Rec. p. 391, point 25 ; arrêt du Tribunal du 12 décembre 2006, Asociación de Estaciones de Servicio de Madrid et Federación Catalana de Estaciones de Servicio/Commission, T-146-03, non publié au Recueil, point 46, et ordonnance du Tribunal du 21 janvier 2011, Vtesse Networks/Commission, T-54-07, non publiée au Recueil, point 89).

32 Une entreprise ne saurait donc se prévaloir uniquement de sa qualité de concurrente par rapport à l'entreprise bénéficiaire, mais doit établir en outre, compte tenu de son degré de participation éventuelle à la procédure et de l'importance de l'atteinte à sa position sur le marché, qu'elle est dans une situation de fait qui l'individualise d'une manière analogue à celle dont le destinataire d'une décision le serait (arrêt de la Cour du 23 mai 2000, Comité d'entreprise de la Société française de production e.a./Commission, C-106-98 P, Rec. p. I-3659, point 41 ; arrêts du Tribunal du 21 octobre 2004, Lenzing/Commission, T-36-99, Rec. p. II-3597, point 75 ; Asociación de Estaciones de Servicio de Madrid et Federación Catalana de Estaciones de Servicio/Commission, point 31 supra, point 47, et ordonnance Vtesse Networks/Commission, point 31 supra, point 90).

33 Il ne saurait être inféré de la seule participation d'une requérante à la procédure administrative qu'elle a qualité pour agir. Une requérante doit, en tout état de cause, démontrer que la mesure faisant l'objet de la décision attaquée était susceptible d'affecter substantiellement sa position sur le marché (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 22 novembre 2007, Sniace/Commission, C-260-05 P, Rec. p. I-10005, point 60 ; arrêt Asociación de Estaciones de Servicio de Madrid et Federación Catalana de Estaciones de Servicio/Commission, point 31 supra, points 47, 48 et 50, et ordonnance Vtesse Networks/Commission, point 31 supra, point 92).

34 Quant à la détermination d'une " affectation substantielle de la position " d'une requérante sur le marché concerné, la Cour a eu l'occasion de préciser que la seule circonstance qu'un acte est susceptible d'exercer une certaine influence sur les rapports de concurrence existant dans le marché pertinent et que l'entreprise concernée se trouvait dans une quelconque relation de concurrence avec le bénéficiaire de cet acte ne saurait en tout état de cause suffire pour que ladite entreprise puisse être considérée comme individuellement concernée par ledit acte (arrêt Espagne/Lenzing, point 30 supra, point 32, et arrêt de la Cour du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C-487-06 P, Rec. p. I-10515, point 47).

35 En l'espèce, s'agissant du degré de participation des requérantes à la procédure administrative, il convient de relever qu'elles ont déposé une plainte auprès de la Commission, laquelle a été enregistrée le 22 mars 2007, avant l'ouverture de la procédure formelle d'examen. La plainte déposée par les requérantes portait à la fois sur l'investissement de la Gemeente Rotterdam dans le complexe Ahoy', qui avait déjà fait l'objet d'une notification par les autorités néerlandaises, et sur d'autres mesures, à savoir la vente d'Ahoy' Rotterdam et la location du complexe Ahoy' à un exploitant privé. En outre, les requérantes ont présenté leurs observations, en tant que parties intéressées, dans le cadre de cette procédure formelle.

36 Il convient donc de constater que les requérantes ont joué un rôle actif dans le déroulement de la procédure administrative, ce que ne conteste d'ailleurs pas la Commission.

37 La Commission fait valoir que les requérantes n'ont pas démontré que leur position concurrentielle était substantiellement affectée. Elles n'auraient pas démontré que les mesures visées dans la décision attaquée les affectent différemment des autres concurrents d'Ahoy' Rotterdam ni qu'elles sont dans une situation particulière par rapport à ces autres concurrents.

38 Les requérantes soutiennent que les mesures visées dans la décision attaquée ont eu des effets sur leur position concurrentielle en distinguant deux marchés distincts, le marché de l'exploitation de salles et le marché de la promotion de concerts.

39 En ce qui concerne, en premier lieu, le marché de l'exploitation de salles, les requérantes font valoir qu'Amsterdam Music Dome Exploitatie, en qualité d'exploitante d'une salle de concerts, le " Ziggo Dome ", qui doit être construite à Amsterdam, et Mojo Concerts, en qualité de copropriétaire du " Ziggo Dome ", voient leur position concurrentielle substantiellement affectée par l'investissement dans le complexe Ahoy' visé dans la décision attaquée. Elles seraient plus affectées que les autres exploitants de salles, au motif que le complexe Ahoy', à la suite de cet investissement, aura plus ou moins la même capacité en termes de spectateurs que le " Ziggo Dome " et qu'aucune autre salle de concerts aux Pays-Bas n'a la même capacité.

40 Tout d'abord, s'agissant de la position concurrentielle de Mojo Concerts sur le marché de l'exploitation de salles, il y a lieu de relever que les requérantes indiquent seulement qu'elle exerce des activités d'organisatrice de concerts et d'autres évènements. Il ressort effectivement des statuts de Mojo Concerts, annexés à la requête, que son activité consiste uniquement en l'organisation de concerts.

41 Il y a donc lieu de considérer que Mojo Concerts n'est pas active sur le marché de l'exploitation de salles. Le fait que les requérantes indiquent, dans la requête, que Mojo Concerts fait partie du groupe Live Nation, qui exploite des salles aux Pays-Bas, ne signifie pas que Mojo Concerts exerce elle-même cette activité.

42 De même, l'argument des requérantes selon lequel la position concurrentielle de Mojo Concerts, sur le marché de l'exploitation de salles, est substantiellement affectée en raison de sa qualité de future copropriétaire du " Ziggo Dome " ne saurait prospérer. En effet, les requérantes n'ont pas établi que, en qualité de copropriétaire du " Ziggo Dome ", Mojo Concerts sera également exploitant de cette salle.

43 Ensuite, il y a lieu de relever que les requérantes n'ont pas apporté d'éléments concrets et précis établissant que leur position concurrentielle sur le marché de l'exploitation de salles, à la supposer établie, serait affectée de façon substantielle par les mesures visées dans la décision attaquée.

44 Ainsi, premièrement, la Commission a relevé à juste titre que le complexe Ahoy' n'est pas uniquement une salle de concerts mais également un hall d'exposition et de foire et une salle de sport. Particulièrement, il y a lieu de relever que l'investissement visé dans la décision attaquée est consacré notamment à l'agrandissement du Sportpaleis, qui, comme le souligne la Gemeente Rotterdam dans son mémoire en intervention, ne sert pas uniquement à la tenue de concerts mais également à des évènements sportifs. Ainsi, contrairement à ce que prétendent les requérantes, sur le marché de l'exploitation de salles, les concurrents du complexe Ahoy' ne se limitent pas aux salles de concerts.

45 Deuxièmement, l'argument des requérantes selon lequel le " Ziggo Dome ", qui n'est pas encore construit, aura environ la même capacité en nombre de spectateurs que le complexe Ahoy' et selon lequel aucune autre salle de concerts aux Pays-Bas n'a la même capacité n'est pas suffisant pour individualiser les requérantes. En effet, comme le relève la Commission, d'une part, il n'y a pas lieu de limiter le marché à l'exploitation des seules salles de concerts, des concerts étant susceptibles d'être organisés dans d'autres salles, comme des stades, qui ont une capacité équivalente à celle du complexe Ahoy'. D'autre part, même dans l'hypothèse où le critère de la capacité des salles serait pertinent, il n'y a pas lieu de limiter le marché de l'exploitation de salles au seul territoire des Pays-Bas.

46 Troisièmement, l'argument des requérantes selon lequel il ressortirait du rapport du premier expert que l'arrivée du " Ziggo Dome " accroîtra la concurrence pour le Sportpaleis ne permet pas non plus d'individualiser les requérantes. En effet, comme le relève la Commission, ce rapport mentionne expressément d'autres salles de concerts comme étant les principaux concurrents du complexe Ahoy'. Les requérantes n'indiquent pas en quoi leur position concurrentielle serait différemment affectée par rapport à celle de ces autres concurrents qui, contrairement aux requérantes, sont déjà présents sur le marché de l'exploitation de salles.

47 Quatrièmement, les requérantes font valoir que l'investissement dans le complexe Ahoy' aura un " effet direct " ou une " incidence directe " sur leur position concurrentielle. À cet égard, il suffit de constater que la condition qu'une mesure affecte directement les requérantes est distincte de la condition relative à leur affectation individuelle.

48 En ce qui concerne, en second lieu, le marché de la promotion de concerts, les requérantes affirment qu'Ahoy' Rotterdam, exerçant une activité de promotion de concerts, est un concurrent d'une des requérantes, Mojo Concerts, sur ce marché. Les requérantes soutiennent que les mesures visées dans la décision attaquée pourraient permettre à Ahoy' Rotterdam de promouvoir elle-même tous les évènements se déroulant dans le complexe Ahoy' et d'offrir des conditions avantageuses aux agents et aux artistes.

49 Tout d'abord, il y a lieu de relever que les requérantes ne prétendent pas qu'Amsterdam Music Dome Exploitatie serait active sur le marché de la promotion de concerts et n'établissent donc pas qu'elle serait une concurrente d'Ahoy' Rotterdam sur ce marché.

50 Ensuite, s'agissant de la prétendue affectation de la position concurrentielle de Mojo Concerts, les arguments soulevés par les requérantes reposent sur de simples conjectures quant aux intentions d'Ahoy' Rotterdam de promouvoir elle-même tous les concerts se déroulant dans le complexe Ahoy' et quant au fait qu'Ahoy' Rotterdam proposerait des conditions plus avantageuses aux agents et aux artistes.

51 Il en ressort que les arguments des requérantes reposent sur de simples suppositions qui sont insuffisantes à démontrer que la position concurrentielle de Mojo Concerts, sur le marché de la promotion de concerts, serait substantiellement affectée par les mesures visées dans la décision attaquée.

52 Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes ne peuvent pas être considérées comme individuellement concernées par la décision attaquée.

53 Par conséquent, le recours doit être rejeté comme irrecevable.

Sur les dépens

54 En vertu de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Les parties requérantes ayant succombé, il y a lieu de décider qu'elles supporteront, outre leurs propres dépens, ceux de la Commission, de la Gemeente Rotterdam et d'Ahoy' Rotterdam, conformément aux conclusions de ces dernières.

55 Le Royaume des Pays-Bas supportera ses propres dépens, conformément à l'article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

ordonne :

1) Le recours est rejeté comme irrecevable.

2) Mojo Concerts BV et Amsterdam Music Dome Exploitatie BV supporteront leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne, par la Gemeente Rotterdam et par Ahoy' Rotterdam NV.

3) Le Royaume des Pays-Bas supportera ses propres dépens.