CA Paris, Pôle 1 ch. 3, 22 janvier 2013, n° 12-11815
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
SMJ (SARL), Houplain (ès qual.), SCP Moyrand-Bailly (ès qual.)
Défendeur :
Nissan West Europe (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Bourquard
Conseillers :
Mmes Taillandier-Thomas, Pignon
Avocats :
Mes Fisselier, Guillin, Monin, Bricogne
Par acte du 5 juin 2012, la société SMJ SARL a, ainsi qu'elle y avait été autorisée, assigné en référé d'heure à heure, la société Nissan West Europe SAS afin de lui voir ordonner de poursuivre le contrat de réparateur agréé la liant à elle sous astreinte et de rétablir également sous astreinte ses liaisons informatiques devant le président du Tribunal de commerce de Paris qui, par ordonnance rendue le 12 juin 2012 s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de grande instance de Paris.
Appelante de cette décision, la société SMJ, représentée par son gérant, en redressement judiciaire selon jugement du tribunal de commerce du 15 mars 2012, assisté de Maître Houplain ès qualité d'administrateur judiciaire et de la SCP Moirand-Bally, ès qualité de mandataire judiciaire, par conclusions déposées le 4 décembre 2012, demande, vu les articles 872, 873 du Code de procédure civile, L. 442-6-I-5°, L. 442-6-V, D. 442-3 du Code de commerce, de l'infirmer, en tout état de cause, de dire que la Cour d'appel de Paris est juridiction d'appel tant du Tribunal de commerce de Paris que du Tribunal de grande instance de Paris et se déclarer compétente, de dire que la société Nissan n'est pas fondée à se prévaloir de la clause résolutoire pour suspendre les relations commerciales avec elle par lettre du 21 mai 2012, d'ordonner à la société Nissan de poursuivre le contrat de réparateur agréé qui la lie à elle sous astreinte définitive de 5 000 par jour de retard et/ou par infraction constatée à compter du prononcé de l'arrêt et jusqu'à l'intervention d'une décision au fond, d'ordonner à la société Nissan de rétablir les liaisons informatiques sous la même astreinte de 5 000 par jour de retard et/ou par infraction constatée à compter du prononcé de l'arrêt, de la débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et de la condamner aux entiers dépens ainsi qu'à lui payer une indemnité de 7 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par conclusions déposées le 20 novembre 2012, la société Nissan West Europe demande, vu les articles 484, 488, 872 et 873 du Code de procédure civile, 1134 du Code civil, L. 716-1 et L. 713-2 du Code de la propriété intellectuelle, de dire que la résiliation du contrat de réparateur est justifiée et de débouter la société SMJ, subsidiairement de dire que la résiliation du contrat par elle ne présente pas d'irrégularités manifestes de nature à créer un trouble manifestement illicite ou un dommage imminent et de débouter SMJ, plus subsidiairement de dire que la poursuite du contrat ne peut être ordonnée en l'absence de contrat en cours et de terme certain et de débouter SMJ ; reconventionnellement, elle demande de condamner la société SMJ à déposer les enseignes Nissan et à cesser tout usage de la marque sous astreinte de 200 par jour et par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt, de la condamner à lui payer la somme de 30 000 à titre de dommages et intérêts, en tout état de cause de débouter SMJ de l'ensemble de ses demandes, de la condamner aux entiers dépens ainsi qu'à lui payer la somme de 2 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Sur ce, LA COUR,
- Sur la compétence,
Considérant que la société SMJ se fonde sur les articles L. 442-6-I-5, L. 442-V et D. 442-3 du Code de commerce pour estimer que c'est à tort que la juridiction commerciale s'est déclarée incompétente au profit du tribunal de grande instance et ce d'autant qu'une procédure au fond est actuellement pendante devant le Tribunal de commerce de Paris saisi sur le fondement des articles L. 442-6-I-5 et L. 420-7 et que la société Nissan, à cette occasion, n'a pas contesté la compétence de cette juridiction ;
Que la société Nissan fait valoir que l'appelante soulève pour la première fois en cause d'appel le moyen tiré de l'application de ces articles, que l'invocation de moyens nouveaux n'est en conséquence pas de nature à permettre l'infirmation de l'ordonnance et qu'en tout état de cause, le débat est sans intérêt dès lors que la Cour d'appel de Paris est juridiction d'appel tant du tribunal de commerce que du tribunal de grande instance et que sa compétence pour connaître du dossier en appel n'est pas discutée ;
Et considérant que la circonstance selon laquelle la société SMJ n'aurait pas soulevé en première instance le moyen tiré de l'application des articles précités est indifférente dès lors que l'article 563 du Code de procédure civile permet aux parties en cause d'appel pour justifier des prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge d'invoquer des moyens nouveaux ;
Considérant qu'il est constant que le contrat de réparateur agréé, objet du présent litige a été conclu entre les parties le 10 janvier 2012, que sa résiliation a été notifiée par la société Nissan à SMJ par LR AR du 21 mai 2012, qu'il s'ensuit compte tenu de la brièveté de sa durée que la société SMJ ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce pour justifier de la compétence de la juridiction commerciale ; que la circonstance selon laquelle la société SMJ a assigné la société Nissan le 26 mai 2011 devant le tribunal de commerce en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la résiliation prétendument abusive, notifiée le 3 décembre 2009 à effet au 3 décembre 2011, du contrat de concession et de réparateur agréé conclus les 4 novembre 1996 et 1er octobre 2003 ne suffit pas, s'agissant dans le cas présent d'un contrat distinct de seul réparateur agréé, à faire échec à la clause visée à l'article 10.3 du contrat du 10 janvier 2012 attribuant compétence exclusive au Tribunal de grande instance de Paris pour juger de tout litige relatif à celui-ci ;
Que le juge des référés du Tribunal de commerce de Paris s'est donc à juste titre déclaré incompétent au profit du Tribunal de grande instance de Paris ;
Considérant que dès lors que les parties ont conclu au principal, que l'affaire est en état de recevoir une solution, il revient à la cour, juridiction d'appel du tribunal de grande instance et du tribunal de commerce, d'user de son pouvoir d'évocation, ainsi que le prévoit l'article 568 du Code de procédure civile, sur les points non jugés par la juridiction de première instance ainsi que le demandent les parties ;
- Au principal,
Considérant que l'appelante se prévaut de l'existence d'un trouble manifestement illicite et en tout état de cause de l'existence d'un différend sur la validité de la résiliation pour justifier du bien-fondé de ses demandes ;
Qu'elle fait grief à la société Nissan d'avoir invoqué de mauvaise foi la clause résolutoire en ce que cette dernière lui a adressé le 14 mars 2012 un courrier pour l'informer de la mise en demeure qu'elle avait envoyée à une société tierce, la société SDCA, indépendante d'elle-même et qui faisait état de deux griefs, utilisation du nom de domaine concessionissan.com détenu par le dirigeant de SMJ en fonction jusqu'au 17 janvier 2012 et du fait que SMJ continuait à se présenter comme concessionnaire Nissan, qu'en réponse le 6 avril suivant, elle lui a fait observer que les sociétés étaient deux entités distinctes et qu'elle n'avait jamais hébergé SDCA, qu'elle en déduit que Nissan ne pouvait procéder à la résiliation de son contrat le 21 mai 2012,
Qu'elle estime caractériser la mauvaise foi de Nissan par le fait que la mise en demeure du 14 mars 2012 reposait sur deux constats d'huissier du 21 et 23 février 2012 non visés dans sa lettre et qu'elle a prétendument fondé sa résiliation du 21 mai 2012 sur deux constats des 2 avril et 14 mai 2012 qu'elle ne lui a pas davantage communiqués ;
Qu'elle soutient en second lieu que la société Nissan ne démontre pas que les conditions de mise en œuvre de la clause résolutoire étaient remplies dès lors que les griefs invoqués dans sa lettre du 21 mai 2012 ne sont pas suffisamment graves pour justifier de la résiliation du contrat,
- qu'il est en premier lieu faux d'affirmer qu'elle continuerait de se présenter dans les Pages jaunes et sur son site Internet concessionissan.com comme concessionnaire de la marque, que le délai de quinze jours qui lui a été donné dans la lettre du 14 mars 2012 était insuffisant,
- que contrairement à ce qu'affirme Nissan, elle n'héberge pas SDCA,
- que Nissan ne peut lui reprocher l'utilisation pendant quelques jours d'un logo contrefaisant de la marque Nissan, l'imitation de la marque n'étant pas avérée et ce fait n'ayant duré que quelques jours,
- que Nissan ne peut se faire juge de la procédure collective la concernant et utilement lui reprocher une absence de transparence et de loyauté,
Qu'elle ajoute remplir à ce jour toutes les conditions pour être réparateur agréé de la marque et que Nissan n'était pas fondée à mettre fin au contrat en application de l'article 8.3.1 de celui-ci et se prévaloir fallacieusement d'une perte de confiance ; que cette rupture sans préavis lui cause un dommage imminent en ce que son activité de réparateur agréé lui a permis de générer une marge brute de 96 986 sur quatre mois, qu'elle y affecte 4 de ses 8 salariés et que l'absence de poursuite du contrat la conduira à la liquidation judiciaire ;
Considérant que la société Nissan fait valoir que la résiliation du contrat était parfaitement fondée en droit et que c'est de façon tout à fait justifiée que par LR AR du 21 mai 2012, elle a mis fin à celui-ci ; qu'elle rappelle que depuis le 3 décembre 2011, l'appelante n'est plus concessionnaire de sa marque et ne peut plus se présenter comme telle, que la société SMJ et son dirigeant M. Foutissi lui ont menti pour obtenir le 12 janvier 2012 un contrat de réparateur agréé, qu'en février 2012, SMJ continuait à se faire passer pour concessionnaire, qu'elle a fait constater qu'elle se présentait en tant que telle dans les Pages jaunes et sur divers sites Internet ; quelle lui reproche également d'avoir organisé avec son dirigeant l'activité de la société SDCA dont M. Foutissi est également gérant et qui se fait également passer pour son concessionnaire, que M. Foutissi après avoir signé le contrat de réparateur agréé a transféré la gérance faciale de la société SMJ à son père, que la société SMJ lui a caché qu'elle était en cessation de paiement depuis le 28 janvier 2011 pour obtenir le contrat de réparateur agréé ; qu'elle ajoute avoir mis en demeure SMJ le 14 mars 2012 de cesser ses agissements via SDCA en lui impartissant un délai de 15 jours, que cette dernière lui a répondu mensongèrement le 6 avril 2012 et a continué de se présenter sur les Pages jaunes et sur son site mensongèrement comme concessionnaire Nissan ainsi qu'elle le démontre suivant constats d'huissier des 21, 23, 24 février, 2 avril et 14 mai 2012 ;
Qu'elle soutient qu'en raison des fautes graves et multiples (déloyauté lors de la signature du contrat, maintien de l'usage de la marque sans concession pour vendre des véhicules neufs et d'occasion, refus de transfert du nom de domaine concessionnissan.com, mise en ligne d'un logo Nissan contrefait), la société SMJ a perdu sa confiance et rendu tout partenariat impossible, que la résiliation du contrat est justifiée ;
Qu'elle estime que l'appelante ne peut en conséquence pas se prévaloir d'un quelconque trouble manifestement illicite ni davantage d'un dommage imminent étant ajouté que si cette dernière est en procédure collective, c'est sur assignation d'un autre créancier, que l'issue de la procédure collective ne dépend pas de Nissan, un contrat à durée indéterminée étant toujours résiliable par l'une ou l'autre des parties et que de plus SMJ est réparateur agréé pour d'autres marques et concessionnaire Suziki ;
Et considérant qu'aux termes de l'article 809 alinéa 1er du Code de procédure civile, la juridiction des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ;
Que le dommage imminent s'entend du " dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer " et le trouble manifestement illicite résulte de " toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit " ;
Qu'il s'ensuit que pour que la mesure sollicitée soit prononcée, il doit nécessairement être constaté, à la date à laquelle la cour statue et avec l'évidence qui s'impose à la juridiction des référés, l'imminence d'un dommage, d'un préjudice ou la méconnaissance d'un droit, sur le point de se réaliser et dont la survenance et la réalité sont certaines, qu'un dommage purement éventuel ne saurait donc être retenu pour fonder l'intervention du juge des référés ; que la constatation de l'imminence du dommage suffit à caractériser l'urgence afin d'en éviter les effets ;
Considérant qu'il résulte de l'examen des pièces versées aux débats que,
- la société SMJ Park in SARL exerçant sous le sigle SMJ, ayant pour gérant M. Meir Fitoussi et dont le siège social est situé 64 boulevard Marcel Sembat 93200 Saint Denis, correspondant également à l'adresse de son établissement principal a été, selon jugement du Tribunal de commerce de Bobigny du 15 mars 2012, placée en redressement judiciaire, que cette décision a fixé au 28 janvier 2011 sa date de cessation de paiement, ouvert une période d'observation expirant le 15 septembre 2012 et désigné Maître Houplain ès qualité d'administrateur judiciaire pour l'assister pour tous les actes de gestion ou certains d'entre eux et la SCP Moirand-Bally, ès qualité de mandataire judiciaire, que par LR AR du 15 mars 2012, Maître Houplain, ès qualité a notifié à la société Nissan West Europe qu'il entendait à titre purement conservatoire et ce, pour la seule période d'observation, poursuivre le contrat qui liait Nissan à son administrée,
- Suivant LR AR du 21 mai 2012, la société Nissan a notifié à SMJ et M. Meir Fitoussi, la résiliation du contrat de réparateur agréé avec effet immédiat conformément aux stipulations de l'article 8.3.1 du contrat ; que cet article prévoit que " sans préjudice de tous autres droits ou actions, Nissan West Europe pourra résilier le contrat sans préavis et avec effet immédiat par lettre recommandée avec accusé de réception en cas de manquement par le réparateur agréé à l'une de ses obligations essentielles et dans les cas suivants " dont notamment, celui de " fausse déclaration du réparateur agréé ou de l'un de ses représentants, relatives à la propriété, aux capacités commerciales, à la valeur ou au fonds de roulement du réparateur ou des entreprises qui lui sont liées lors de la demande d'agrément du réparateur en tant que réparateur agréé Nissan " ; que dans cette lettre de résiliation à effet immédiat, la société Nissan reproche à SMJ un manque de loyauté et des manquements multiples mettant en cause sa marque, son réseau et sapant le minimum de confiance qui doit exister entre partenaires, qu'elle lui fait plus particulièrement grief en dépit de rappels multiples et de la mise en demeure qu'elle lui a adressée le 14 mars 2012 de continuer à se présenter faussement sur les Pages jaunes et son site Internet concessionsmj.com comme concessionnaire Nissan, en se donnant sur les Pages jaunes comme activités " agents et concessionnaires " Nissan & Renault : vente de véhicules neufs et d'occasions ", en invitant sur son site les clients à visionner une vidéo sur Internet avec en mention concessionnaire Nissan et Renault : vente VN/VO et en commentaire dans la vidéo l'offre de vente " de véhicules neufs de la marque Renault, Nissan ou Suzuki, SMJ est la concession qui répondra le mieux à vos attentes " ; qu'elle lui reproche également dans cet écrit d'avoir utilisé pendant quelques jours dans les Pages jaunes un logo clairement contrefaisant de sa marque, d'héberger la société SDCA laquelle utilise sans droit sa marque et son logo, exploite un site concessionissan.com et dont le mandataire social Meir Fitoussi, qui est gérant de SMJ depuis le 17 janvier 2012 a été également gérant de SCDA jusqu'au 6 février 2012 et de se réfugier derrière l'existence de personnalités juridiques distinctes pour lui manquer de loyauté, qu'elle fait grief également à SMJ d'avoir manqué de transparence et de loyauté élémentaires, ayant en effet postérieurement été informée à la suite du jugement d'ouverture de la procédure collective que SMJ était en cessation de paiement depuis le 28 janvier 2011, date à laquelle, semblait-il, elle avait été condamnée au profit de l'un de ses créanciers et d'avoir ainsi commis une faute grave en faisant de fausses déclarations relatives à sa situation financière lors de sa demande d'agrément comme réparateur agréé ;
- Par LR AR du 14 mars 2012, la société Nissan a mis personnellement [sic] la société SMJ de cesser immédiatement de se présenter sans aucun droit comme concessionnaire ou distributeur de Nissan et l'a informée de la mise en demeure qu'elle adressait à SDCA et par lettre en réponse du 6 avril 2012, la société SMJ a réfuté tout lien avec la société SDCA et affirmé qu'elle se présentait uniquement comme réparateur multimarques puisqu'elle était effectivement réparateur agréé des marques Nissan, Renault et Suziki et qu'elle tenait à respecter ses obligations de loyauté ;
- Les constats établis par huissier à la demande de Nissan les 2 avril, 14 et 15 mai, 24 octobre 2012 confirment ceux réalisés les 21 et 23, 24 février 2012 et démontrent que, contrairement à ce que prétend l'appelante, elle a continué de se présenter sur son site Internet comme concessionnaire Nissan (en tant que vendeur de véhicules neufs de cette marque), continué également d'utiliser au lieu de son principal établissement les éléments d'identification visuelle de cette marque, logo, enseigne, panneau, drapeau alors qu'elle n'est plus membre du réseau ;
Et considérant qu'il est ainsi établi que la société Nissan West Europe dans sa lettre du 21 mai 2012 a notifié la résiliation anticipée du contrat de réparateur pour des motifs étayés par référence au contrat et en invoquant des manquements contractuels précis, que c'est donc à tort que l'appelante se prévaut d'un défaut de justification par Nissan des conditions de mise en œuvre d'une quelconque clause résolutoire pour justifier de l'existence d'un trouble manifestement illicite ;
Que la circonstance selon laquelle Nissan n'a pas, à l'appui de sa lettre du 14 mars puis de celle de résiliation du 21 mai 2012, communiqué ou joint les constats d'huissier qu'elle a fait établir pour démontrer la réalité des manquements qu'elle reprochait à SMJ et que cette dernière contestait n'est pas en soi de nature à caractériser l'illicéité du trouble invoquée par l'appelante dans la résiliation du contrat dès lors qu'elle a été clairement et explicitement informée de l'ensemble des griefs invoqués à l'appui de la résiliation, que ces constats tendent à confirmer la réalité de ces reproches et que la démarche de Nissan visant à se constituer des preuves dans un contexte conflictuel et de dénégation est légitime ;
Que dès lors que Nissan avait des motifs sérieux de présumer, compte tenu de l'ancienneté de la date de cessation de paiement de SMJ, de ce que sa cocontractante ne l'avait pas comme elle s'y était contractuellement engagée loyalement informée de la réalité de sa situation économique et financière lors de la conclusion du contrat, l'appelante ne caractérise pas l'illicéité manifeste du trouble qu'elle invoque en excipant de ce que Nissan se serait fallacieusement prévalue d'une perte de confiance pour résilier le contrat ;
Et considérant que dès lors que l'appelante ne démontre pas que les griefs qui lui étaient reprochés à la date de la résiliation du contrat étaient manifestement infondés et que Nissan a pris la décision de résilier le contrat en enfreignant de façon évidente les stipulations de l'article 8.3.1 du contrat sur lequel elle a fondé cette décision, ses demandes ne sauraient prospérer, faute de justifier de l'existence d'un trouble manifestement illicite résultant de la résiliation du contrat ;
Considérant que de même, la société SMJ dont la cessation de paiement remonte au 28 janvier 2011 et dont l'administrateur a poursuivi le contrat le 27 mars 2012 à titre conservatoire et pour la seule période d'observation venue à expiration, suivant les pièces versées aux débats le 15 septembre 2012, et qui ne justifie pas du caractère manifestement illicite de la résiliation du contrat dont ses manquements sont à l'origine ne démontre pas que la rupture de ses relations contractuelles avec Nissan en tant que réparateur agréé de la marque soit constitutive d'un dommage imminent qu'il conviendrait de prévenir ; que ses demandes sur ce fondement doivent être rejetées ;
Qu'il s'ensuit que l'ensemble des demandes de la société SMJ doivent être, tant sur le fondement du trouble manifestement illicite que sur celui du dommage imminent, écartées, étant en tant que de besoin précisé que cette décision de référé ne saurait présumer du caractère ou non fautif de la résiliation du contrat dont l'appréciation relève de la seule juridiction du fond ;
Considérant que la société SMJ se prévaut également d'un différend tel que prévu à l'article 808 du Code de procédure civile pour justifier du bien-fondé de ses demandes, que dès lors que la société Nissan a résilié le contrat, le différend qui oppose les parties ne peut désormais que tendre éventuellement en cas de rupture estimée fautive qu'à l'allocation de dommages et intérêts et ne peut justifier les mesures réclamées ; qu'étant de plus rappelé que cet article, exclut par ailleurs de son application les mesures qui se heurtent à une contestation sérieuse et étant relevé que la reprise de relations contractuelles entre Nissan et SMJ telle que le demande cette dernière est, à l'évidence sujette à des contestations sérieuses de la part de Nissan, les demandes de SMJ ne sauraient utilement prospérer et doivent être rejetées sur ce fondement ;
Considérant que la société Nissan justifie suivant constat d'huissier établi le 24 octobre 2012 que la société SMJ continue d'utiliser au lieu de son principal établissement les éléments d'identification visuelle de la marque Nissan, logo, enseigne, panneau, drapeau alors qu'elle n'est plus membre du réseau, que la société SMJ ne démontre pas avoir depuis fait retirer ses éléments, qu'il convient de faire droit à la demande reconventionnelle de la société Nissan West Europe visant à enjoindre à la société SMJ de déposer les enseignes Nissan et à cesser tout usage de la marque et ce sous astreinte de 100 par jour et par infraction constatée passé le délai de quinze jours à compter de la signification de l'arrêt ;
Considérant qu'il convient par contre de rejeter la demande de paiement de dommages et intérêts de la société Nissan comme formée devant une juridiction d'appel de référé et en tant que demande en paiement et non de provision comme excédant les pouvoirs de cette juridiction ;
Considérant que l'équité commande d'allouer à la société Nissan une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile d'un montant tel que précisé au dispositif de l'arrêt ; que la société SMJ doit supporter les entiers dépens ;
Par ces motifs : Confirme l'ordonnance déférée du chef de la compétence, Statuant par voie d'évocation, Déboute la société SMJ Park in SARL exerçant sous le sigle SMJ, représentée par son gérant assisté de Maître Houplain ès qualité d'administrateur judiciaire et de la SCP Moirand-Bally, ès qualité de mandataire judiciaire de l'ensemble de ses demandes, Enjoint à la société SMJ Park in SARL exerçant sous le sigle SMJ de de déposer les enseignes Nissan et à cesser tout usage de la marque et ce sous astreinte de 100 par jour et par infraction constatée passé le délai de quinze jours à compter de la signification de l'arrêt, Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande en paiement de dommages et intérêts de la société Nissan West Europe et la rejette, Condamne la société SMJ Park in SARL exerçant sous le sigle SMJ, représentée par son gérant assisté de Maître Houplain ès qualité d'administrateur judiciaire et de la SCP Moirand-Bally, ès qualité de mandataire judiciaire à payer à la société Nissan West Europe SAS une indemnité de 2 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Déboute les parties de toute autre prétention, Condamne la société SMJ Park in SARL exerçant sous le sigle SMJ, représentée par son gérant assisté de Maître Houplain ès qualité d'administrateur judiciaire et de la SCP Moirand- Bally, ès qualité de mandataire judiciaire aux entiers dépens.