CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 23 janvier 2013, n° 10-13867
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
TYC Europe BV (Sté)
Défendeur :
Valeo Vision (SAS), Valeo Service (SAS), Établissements Aniel (SA), Autodistribution (SA), Commerce Rechange Automobiles (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rajbaut
Conseillers :
Mmes Chokron, Gaber
Avocats :
Mes Fromantin, Borel, Mollet Vieville, Lefort, Teytaud, De Candé,
Exposé du litige
La SAS Valeo Vision fabrique des projecteurs pour véhicules automobiles, notamment de marques BMW série 1 et Fiat Punto et est titulaire des deux brevets français suivants :
- brevet déposé le 19 septembre 1995 sous le numéro 95 10 957 et publié le 21 mars 1997 sous le numéro 2 738 782, délivré avec rapport de recherche le 5 décembre 1997, ayant pour objet un appareil d'éclairage ou de signalisation de véhicule pourvu de moyens de ventilation perfectionnés.
- brevet déposé le 30 janvier 1998 sous le numéro 98 01 054 et publié le 6 août 1999 sous le numéro 2 775 337, délivré avec rapport de recherche le 16 juin 2000, ayant pour objet un projecteur de véhicule automobile comprenant un réflecteur monté sur une partie d'appui par l'intermédiaire d'un élément de fixation intermédiaire.
La SAS Valeo Service est titulaire d'une licence d'exploitation de ces deux brevets et commercialise des projecteurs pour véhicules automobiles, notamment de marques BMW série 1 et Fiat Punto.
La SAS Valeo Vision a fait procéder, suite à un constat d'huissier en date du 18 décembre 2007 dans les locaux de la société Casse Center à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), à un procès-verbal de saisie-contrefaçon le 31 janvier 2008 dans les locaux de la SAS Commerce Rechange Automobiles (ci-après Cora) à Chaponnay (Rhône), au cours de laquelle ont été saisis des catalogues d'éclairages lave-vitres 2007 Cora Automobiles et trois blocs optiques pour véhicules BMW série 1 argués de contrefaçons et fabriqués par la société de droit taiwanais TYC Brother Inc. Co. Ltd.
Ces blocs optiques ont été fournis à la société Cora par la SA Autodistribution qui s'était elle-même approvisionnée auprès de la société de droit néerlandais TYC Europe BV.
Le 13 février 2008, les sociétés Valeo Vision et Valeo Service ont fait assigner la société TYC Europe BV devant le Tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon du brevet n° 98 01 054 et en concurrence déloyale.
Les 11 et 12 mars 2008, un procès-verbal de saisie-contrefaçon était diligenté dans les locaux de la SA Établissements Aniel à La Garde (Var) à la suite de quoi les sociétés Valeo Vision et Valeo Service ont fait assigner le 21 mars 2008 cette société devant le Tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon des brevets n° 98 01 054 et 95 10 957 et en concurrence déloyale.
Le 4 avril 2008, les sociétés Valeo Vision et Valeo Service ont encore fait assigner les sociétés Cora et Autodistribution devant le Tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon du brevet n° 98 01 054 et en concurrence déloyale.
Toutes ces procédures ont été jointes par deux ordonnances du juge de la mise en état du Tribunal de grande instance de Paris en date du 12 novembre 2008.
Vu le jugement rendu contradictoirement le 25 mai 2010 par le Tribunal de grande instance de Paris qui a :
- rejeté comme mal fondés les moyens de nullité pour défaut d'activité inventive des brevets n° 98 01 054 et n° 95 10 957 dont la société Valeo Vision est titulaire,
- dit que les sociétés TYC Europe BV, Établissements Aniel, Cora et Autodistribution ont commis des actes de contrefaçon des brevets n° 98 01 054 et n° 95 10 957 dont la société Valeo Vision est titulaire en important, en offrant à la vente et en commercialisant des projecteurs BMW série 1 reproduisant les revendications 1, 3, 6, 8, 14, 16, 17 et 18 du brevet FR n° 98 01 054 et des projecteurs Fiat Punto reproduisant les revendications 1 à 6 du brevet FR n° 95 10 957,
- dit que ces actes de contrefaçon des brevets n° 98 01 054 et n° 95 10 957 constituent à l'encontre de la société Valeo Service, licenciée, des actes de concurrence déloyale,
- dit que les sociétés TYC Europe BV, Établissements Aniel, Cora et Autodistribution ont commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre des sociétés Valeo Vision et Valeo Service résultant de la copie servile des appareils d'éclairage qu'elles ont conçus,
- interdit en conséquence aux sociétés TYC Europe BV, Établissements Aniel, Cora et Autodistribution la poursuite des actes illicites et ce sous astreinte provisoire de 500 euro par infraction constatée et de 500 euro par jour de retard, l'astreinte prenant effet dans les quinze jours de la signification de sa décision et courant pendant six mois, se réservant la liquidation des astreintes,
- ordonné, en application de l'article L. 615-7-1 du Code de la propriété intellectuelle, que les produits contrefaisants et illicites soient rappelés des circuits commerciaux et confisqués afin d'être détruits et ce aux frais conjoints et solidaires pour les faits qui leur sont communs des sociétés TYC Europe BV, Établissements Aniel, Cora et Autodistribution,
- ordonné la publication dans cinq journaux ou magazines au choix des sociétés Valeo Vision et Valeo Service, et aux frais avancés et solidaires des sociétés TYC Europe BV, Établissements Aniel, Cora et Autodistribution mais dans la limite d'un budget global de 5 000 euro HT, du texte suivant :
'Par jugement du 25 mai 2010, le Tribunal de grande instance de Paris a condamné les sociétés TYC Europe BV, Établissements Aniel, Cora et Autodistribution pour des actes de contrefaçon des appareils d'éclairage BMW Série et Fiat Punto 2003 et pour des actes de concurrence déloyale du fait de la copie servile de ces appareils d'éclairage'.
- condamné in solidum les sociétés Établissements Aniel et TYC Europe BV à payer à chacune des sociétés Valeo Vision et Valeo Service une indemnité à fixer à dire d'expert et par provision à la somme de 100 000 euro au titre des actes de contrefaçon de brevets et celle de 50 000 euro au titre des actes de concurrence déloyale pour copie servile,
- condamné in solidum les sociétés TYC Europe BV, Autodistribution et Cora à payer à chacune des sociétés Valeo Vision et Valeo Service une indemnité à fixer à dire d'expert et par provision à la somme de 100 000 euro au titre des actes de contrefaçon de brevet et 50 000 euro au titre des actes de concurrence déloyale par copie servile,
- avant dire droit sur la demande d'indemnisation définitive du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon, ordonné une mesure d'expertise confiée à Mme Michèle Lewi avec mission de donner tous éléments permettant de déterminer l'étendue et le montant du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon et des actes de concurrence déloyale,
- ordonné l'exécution provisoire de sa décision, sauf en ce qui concerne les mesures de publication et de destruction,
- condamné in solidum les sociétés TYC Europe BV, Établissements Aniel, Cora et Autodistribution à payer à chacune des sociétés Valeo Vision et Valeo Service la somme de 20 000 euro, outre les faits relatifs aux opérations de saisie contrefaçon et de constat, conformément aux dispositions de l'article 700 du "Code de la propriété intellectuelle" (sic, lire Code de procédure civile),
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné in solidum les sociétés TYC Europe BV, Établissements Aniel, Cora et Autodistribution aux entiers dépens de l'instance.
Vu l'appel interjeté le 6 juillet 2010 par la société TYC Europe BV (enregistré sous la référence 10-13867).
Vu l'appel interjeté le 12 juillet 2010 par la SA Autodistribution et la SAS Cora (enregistré sous la référence 10-14400).
Vu l'ordonnance rendue le 7 décembre 2010 par le conseiller de la mise en état, joignant la procédure n° 10-14400 à la procédure n° 10-13867.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 28 février 2011.
Vu les dernières conclusions de la société TYC Europe BV et de la SA Établissements Aniel aux fins notamment de désistement de la SA Établissements Aniel, signifiées le 08 juin 2012.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 13 novembre 2012.
Vu les conclusions de demande de révocation d'ordonnance de clôture aux fins de désistement signifiées le 26 novembre 2012 par la SA Autodistribution et la SAS Cora.
Vu les dernières conclusions de la SAS Valeo Vision et de la SAS Valeo Service signifiées le 26 novembre 2012.
Vu l'acceptation aux débats de ces conclusions par les autres parties.
Vu la révocation de l'ordonnance de clôture afin d'admettre les dites conclusions et la clôture prononcée à l'audience du 26 novembre 2012, aucune des parties ne souhaitant répliquer.
Motifs de l'arrêt
Considérant que, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ;
I : Sur les désistements :
Considérant que par conclusions du 8 juin 2012 la SA Établissements Aniel se désiste de son appel incident suite à un protocole d'accord conclu les 15 mars et 26 juillet 2011 avec les sociétés Valeo Vision et Valeo Service ;
Considérant que par conclusions du 26 novembre 2012 les sociétés Autodistribution et Cora se désistent de leur appel à l'égard des sociétés Valeo Vision et Valeo Service suite à un accord transactionnel ;
Considérant que les sociétés Valeo Vision et Valeo Service acceptent ces désistements d'appel, qu'en conséquence ceux-ci seront déclarés parfaits ;
Considérant que de ce fait la cour constate l'extinction de l'instance à l'égard des sociétés Établissements Aniel, Autodistribution et Cora, celles-ci conservant chacune la charge de leurs propres frais et dépens de la procédure d'appel ;
Considérant que l'instance se poursuit désormais entre la société TYC Europe BV, appelante et les sociétés Valeo Vision et Valeo Service, intimées ;
II : Sur la validité du brevet français N° 95 10 957 :
Le domaine technique de l'invention :
Considérant que l'invention du brevet contesté est intitulée 'Appareil d'éclairage ou de signalisation de véhicule pourvu de moyens de ventilation perfectionnés' ;
Considérant que le breveté rappelle qu'une préoccupation constante lors de la conception de dispositifs de ventilation pour appareils d'éclairage ou de signalisation pour véhicules automobiles est d'assurer une ventilation ou une aération satisfaisante de l'espace intérieur du boîtier ou du socle de l'appareil, tout en évitant le plus efficacement possible la pénétration d'eau, de boue ou de poussière dans cet espace intérieur, notamment en présence d'un jet de lavage sous haute pression du compartiment moteur du véhicule ;
Considérant que l'invention vise à proposer un dispositif dans lequel un trajet sinueux de ventilation soit défini conjointement par le boîtier ou le socle de l'appareil et par un bouchon rapporté sur ce boîtier ou socle, dont les performances soient améliorées sur tous les plans, tout en assurant une aération et une ventilation satisfaisantes ;
Considérant qu'un autre objet de l'invention est de proposer un dispositif facile à monter et qui puisse aisément recevoir si nécessaire un filtre mousse ;
La solution préconisée par l'invention :
Considérant que pour parvenir à l'invention, le brevet propose un appareil d'éclairage ou de signalisation pour véhicule automobile caractérisé en ce que le trajet sinueux comprend une double entrée d'air en partie inférieure comportant deux ouvertures d'entrée en vis-à-vis et un passage d'entrée s'étendant sensiblement transversalement à la direction générale allant d'une entrée d'air à l'autre, une chicane s'étendant sensiblement vers le haut à partir de ladite double entrée d'air et un passage de communication entre la chicane et l'espace intérieur de l'appareil, défini au moins partiellement entre des pattes de montage élastique du bouchon sur le boîtier ;
Considérant que le brevet se compose de sept revendications dont seules sont invoquées les revendications 1 à 6 qui se lisent comme suit :
'1. Appareil d'éclairage ou de signalisation pour véhicule automobile, comportant un dispositif de ventilation défini conjointement par des premiers aménagements formés sur un boîtier (100) de l'appareil et par des seconds aménagements formés sur un bouchon (200) monté sur le boîtier pour définir ensemble un trajet sinueux de ventilation de l'espace intérieur de l'appareil, caractérisé en ce que le trajet sinueux comprend :
- une double entrée d'air en partie inférieure comportant deux ouvertures d'entrée (216a, 216b) en vis-à-vis et un passage d'entrée (T1) s'étendant sensiblement transversalement à la direction générale allant d'une entrée d'air à l'autre,
- une chicane (T1, T2, T3) s'étendant sensiblement vers le haut à partir de ladite double entrée d'air,
- un passage (T3, 1201) de communication entre la chicane et l'espace intérieur de l'appareil, défini au moins partiellement entre des pattes (210a, 210b) de montage élastique du bouchon sur le boîtier.
2. Appareil selon la revendication 1, caractérisé en ce que ledit passage d'entrée de ladite entrée d'air constitue un tronçon inférieur (T1) de la chicane.
3. Appareil selon l'une des revendications 1 et 2, caractérisé en ce que ledit passage de communication constitue un tronçon supérieur (T3) de la chicane.
4. Appareil selon l'une des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que la chicane comporte trois tronçons (T1, T2, T3) définis par des cloisons intermédiaires (208, 110) des premiers et seconds aménagements, situés à des hauteurs différentes.
5. Appareil selon l'une des revendications 1 à 4, caractérisé en ce qu'il comprend deux pattes de montage élastique (210a, 210b) définissant un espace ouvert vers le bas sur la chicane.
6. Appareil selon la revendication 5, caractérisé en ce que lesdites pattes de montage (210a, 210b) comprennent des dents d'accrochage (2101a, 2101b) coopérant avec les bords d'une ouverture traversante (1201) formée dans le boîtier et laissée partiellement dégagée par lesdites pattes traversant ladite ouverture.
La demande de nullité du brevet pour absence d'activité inventive :
Considérant que la société TYC Europe BV soutient que le principe même de la ventilation des phares ou des feux par un dispositif de chicane a été décrit régulièrement dans un très grand nombre de documents antérieurs tels que le brevet allemand n° DE 4 034 258 (Carello) du 09 mai 1981 décrivant un dispositif exactement identique avec la combinaison d'un corps et d'un capot arrière, chacun comportant des pièces qui, en coopération, forment une chicane avec un changement de direction à 180° ;
Considérant qu'elle fait valoir qu'en partant du document Carello, l'homme du métier n'aurait aucun effort intellectuel ou technique à déployer pour parvenir à la solution du brevet contesté en rajoutant une seconde chicane par le biais d'une seconde plaque horizontale au niveau du capot, tout technicien sachant parfaitement que le meilleur moyen pour contrarier une entrée d'eau réside dans le fait de multiplier des chicanes à 180° ;
Considérant qu'elle ajoute que le brevet européen n° EP 0 571 272 (Valeo Vision EP) sous priorité du brevet français 92 06 113 du 20 mai 1992 enseigne, comme le brevet Carello, un dispositif à combinaison d'un corps et d'un capot arrière avec une plaque horizontale définissant deux chambres en chicane à 180° et est donc également pertinent pour contester le défaut d'activité inventive ;
Considérant qu'elle fait encore valoir qu'il en est de même avec le brevet français n° FR 93 11 406 (Valeo Vision FR) du 24 septembre 1993 où l'air frais entre par le bas, passe par une première chambre identique à la chambre T1 puis subit un changement de direction à 180° pour pénétrer dans la seconde chambre identique à la chambre T2 du brevet contesté ; que ce document décrit exactement la même combinaison capot et corps, la même disposition de plaques horizontales de capot et de corps coopérant pour créer trois chambres avec un double changement de direction en chicane à 180° ;
Considérant qu'elle affirme que le seul fait d'ajouter une entrée d'air supplémentaire ne peut pas à lui seul être qualifié d'activité inventive ; qu'elle conclut donc à l'infirmation sur ce point du jugement entrepris et à la nullité de ce brevet pour défaut d'activité inventive ;
Considérant que les sociétés Valeo Service et Valeo Vision répliquent que l'antériorité Valeo Vision FR ne divulgue nullement le bouchon de l'invention dans le brevet contesté avec une double entrée d'air en vis-à-vis et transversale, sa cloison intermédiaire et son nouveau changement de direction dans des pattes creuses et élastiques d'accrochage ;
Considérant qu'elles ajoutent que l'antériorité Carello ne divulgue pas le bouchon de l'invention dans le brevet contesté avec la double entrée en vis-à-vis et transversale, ni la cloison intermédiaire du bouchon pour un nouveau changement de direction dans des pattes creuses et élastiques d'accrochage ;
Considérant qu'elles font enfin valoir que l'antériorité Valeo Vision EP ne fait que divulguer les mêmes moyens que l'antériorité Carello ;
Considérant qu'elles en concluent qu'aucun des documents invoqués ne divulguent l'ensemble des caractéristiques de la revendication 1 du brevet contesté dont l'invention présente donc bien une activité inventive ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 611-14 du Code de la propriété intellectuelle, une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique ; qu'à défaut le brevet est nul en application des dispositions de l'article L. 613-25 ;
Considérant qu'en l'espèce l'homme du métier est un mécanicien du secteur automobile spécialisé dans les projecteurs ;
Considérant que l'état de la technique résulte des brevets Carello de 1981, Valeo Vision EP de 1992 et Valeo Vision FR de 1993 ;
Considérant que le brevet Carello divulgue un phare pour véhicules comprenant un boîtier extérieur muni d'une cavité intérieure, un réflecteur logé à l'intérieur de ladite cavité, un appendice tubulaire s'étendant vers l'extérieur du dit boîtier, et un capuchon pour fermer ledit appendice tubulaire, ce dernier présentant une ouverture latérale et définissant, avec ledit capuchon, un canal formant labyrinthe ;
Considérant qu'à cette fin, l'appendice tubulaire présente une cloison de séparation intérieure transversale formée d'une pièce et définissant deux chambres séparées avec une seule chicane à 180° de façon que l'eau présente dans l'air soit retenue au niveau de ces chambres ;
Considérant que le brevet Valeo Vision EP divulgue un projecteur pour véhicules comprenant un dispositif de ventilation de l'espace intérieur se composant d'une partie généralement cylindrique faisant saillie l'extérieur du boîtier, qui définit conjointement avec un bouchon monté sur son extrémité libre un premier canal et un deuxième canal communiquant entre eux au niveau d'un coude situé dans la région de ladite extrémité libre ;
Considérant qu'à cette fin, une cloison plane et horizontale formant chicane s'étend dans cette partie et définit deux chambres séparées avec une seule chicane à 180° ;
Considérant que le brevet Valeo Vision EP n'est qu'une reprise du brevet Carello auquel il n'apporte aucun élément nouveau puis que tous deux enseignent une seule chicane avec deux chambres et une seule entrée d'air ;
Considérant que l'enseignement de ces deux brevets ne divulgue donc pas toutes les caractéristiques de l'invention (une double entrée d'air en vis-à-vis et transversale ainsi que deux chicanes constituant trois chambres définies par deux cloisons) et ne suggère pas à l'homme du métier de reproduire de manière évidente de telles caractéristiques ;
Considérant que le brevet Valeo Vision FR divulgue un dispositif de ventilation de projecteur pour véhicules comprenant trois chambres avec deux changements de direction mais une seule entrée d'air, la jupe du bouchon couvrant le tube du capot où l'air arrive longitudinalement de manière annulaire ou circulaire autour du fond du bouchon ;
Considérant que l'enseignement de ce brevet ne divulgue donc pas toutes les caractéristiques de l'invention, en particulier la double entrée d'air en vis-à-vis et transversale et ne suggère pas davantage à l'homme du métier de reproduire de manière évidente une telle caractéristique ;
Considérant dès lors que l'invention faisant l'objet de la revendication 1 du brevet litigieux qui résout la difficulté d'assurer une ventilation ou une aération satisfaisante de l'espace intérieur du boîtier d'un dispositif d'appareil d'éclairage ou de signalisation pour véhicules automobiles, tout en évitant le plus efficacement possible la pénétration d'eau, de boue ou de poussière dans cet espace intérieur, nécessitait davantage que le simple exercice par l'homme du métier de ses capacités professionnelles d'exécutant et l'utilisation des enseignements de l'état de la technique ;
Considérant en conséquence que la revendication 1 du brevet contesté présente bien une activité inventive ;
Considérant que les revendications 2 à 5 se trouvent placées sous la dépendance de la revendication 1 à laquelle elles renvoient directement et que la revendication 6 se trouve également sous la dépendance de la revendication 1 à laquelle elle renvoie indirectement ;
Considérant en conséquence que les revendications 2 à 6 tirent leur validité du lien de dépendance les unissant à la revendication 1 elle-même valable ;
Considérant que le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu'il a débouté la société TYC Europe BV de sa demande en nullité de ce brevet pour défaut d'activité inventive ;
III : Sur la validité du brevet français N° 98 01 054 :
Le domaine technique de l'invention :
Considérant que l'invention du brevet contesté est intitulée "Élément de fixation intermédiaire pour le montage d'un réflecteur sur une partie d'appui d'un projecteur" ;
Considérant que le brevet rappelle qu'on connaît déjà des projecteurs de véhicules automobiles avec ou sans boîtier dans lesquels le réflecteur est monté par l'intermédiaire d'une tige de montage dont une extrémité est vissée ou fixée dans une partie fixe du projecteur et dont l'autre extrémité comporte une tête sphérique apte à être encliquetée dans une tourelle de montage du réflecteur ;
Considérant qu'il rappelle qu'on connaît également un projecteur dans lequel le réflecteur est monté par l'intermédiaire d'une douille de montage sur une partie d'appui du projecteur ainsi qu'un dispositif d'éclairage comportant un réflecteur pourvu sur sa partie arrière d'une partie de montage apte à coopérer avec un élément de fixation intermédiaire dont une extrémité se monte sur une patte d'appui du projecteur et dont l'autre extrémité coopère avec ladite partie de montage du réflecteur ;
Considérant qu'il rappelle que dans tous les cas, il est nécessaire de réaliser une partie ou tourelle de montage de forme spécifique permettant sa coopération avec un élément de fixation intermédiaire de forme complexe, ce qui implique des étapes de réalisation du réflecteur plus complexes et finalement un surcoût de fabrication du projecteur ainsi réalisé ;
Considérant que l'invention vise à pallier ces inconvénients en proposant un nouveau projecteur de véhicule automobile dans lequel le système de montage du réflecteur sur une partie d'appui du projecteur est particulièrement simple et économique ;
La solution préconisée par l'invention :
Considérant que le brevet propose une rondelle montée sur la deuxième extrémité de l'élément de fixation intermédiaire de sorte qu'elle s'étend généralement de manière sensiblement transversale à la direction de montage/démontage et qui présente un bord périphérique destiné à venir s'ancrer dans une surface lisse de la partie de montage du réflecteur pour retenir l'élément de fixation intermédiaire sur ladite partie de montage du réflecteur ;
Considérant que le brevet se compose de dix-neuf revendications dont seules sont invoquées les revendications 1, 3, 6, 8, 14, 16, 17 et 18 qui se lisent comme suit :
'1. Projecteur de véhicule automobile comportant un réflecteur monté sur une partie d'appui par l'intermédiaire d'un élément de fixation intermédiaire (10) présentant une première extrémité (12) apte à coopérer avec ladite partie d'appui et une deuxième extrémité (11) apte à coopérer avec une partie de montage (20) du dit réflecteur selon une direction de montage/démontage X, caractérisé en ce qu'il est prévu une rondelle (30) montée sur la deuxième extrémité (11) du dit élément de fixation intermédiaire (10) de sorte qu'elle s'étend généralement de manière sensiblement transversale à ladite direction de montage/démontage X, et qui présente un bord périphérique (31) destiné à venir s'ancrer dans une surface lisse (21) de ladite partie de montage (20) du réflecteur, pour retenir ledit élément de fixation intermédiaire (10) sur ladite partie de montage (20) du réflecteur.
3. Projecteur selon la revendication 1, caractérisé en ce que la rondelle (30) présente un bord périphérique (31) circulaire.
6. Projecteur selon l'une des revendications 1 à 5, caractérisé en ce que l'élément de fixation intermédiaire (10) comprend un corps cylindrique (11) pourvu sur sa surface extérieure (11a) d'une gorge pour le montage de la rondelle (30) qui comprend à cet effet un orifice central (32) ouvert sur le bord périphérique (31) par une partie évasée (33), ladite rondelle (30) étant destinée à être montée sur le corps (11) de l'élément de fixation intermédiaire (10) par cloquage avec un passage d'un point dur au niveau du raccordement entre la partie évasée (33) et l'orifice central (32) de ladite rondelle (30).
8. Projecteur selon l'une des revendications 1 à 6, caractérisé en ce que la rondelle (30) est légèrement cintrée selon un profil en forme d'entonnoir.
14. Projecteur selon l'une des revendications 1 à 13, caractérisé en ce que la première extrémité (12) du dit élément de fixation intermédiaire (10) est agencée de manière à pouvoir être cloquée sur l'extrémité d'une tige de réglage montée à translation dans une partie fixe du projecteur.
16. Projecteur selon l'une des revendications 1 à 15, caractérisé en ce que l'élément de fixation intermédiaire (10) est réalisé en une matière thermoplastique présentant une légère élasticité.
17. Projecteur selon l'une des revendications 1 à 16, caractérisé en ce que la rondelle (30) est réalisée en tôle fine et souple.
18. Élément de fixation intermédiaire (10) destiné au montage d'un réflecteur sur une partie d'appui d'un projecteur de véhicule automobile, présentant une première extrémité (12) apte à coopérer avec ladite partie d'appui et une deuxième extrémité (11) apte à coopérer avec une partie de montage (20) du dit réflecteur selon une direction de montage/démontage (X), caractérisé en ce qu'il porte sur sa deuxième extrémité (11) une rondelle (30) s'étendant généralement de manière sensiblement verticale à ladite direction de montage/démontage (X), et présentant un bord périphérique (31) destiné à s'ancrer dans une surface lisse (21) de ladite partie de montage (20) du réflecteur pour retenir ledit élément de fixation intermédiaire (10) sur ladite partie de montage (20).'
La demande de nullité du brevet pour absence d'activité inventive :
Considérant que la société TYC Europe BV soutient que la caractéristique de ce brevet est une rondelle dont la fonction est de venir s'ancrer de façon permanente sur un bord périphérique et que cette façon de procéder est déjà décrite dans le brevet britannique (Bosch) n° GB 395.321 déposé le 08 octobre 1933 qui enseigne un moyen général de blocage transposable sans aucune difficulté pour l'homme du métier au domaine des projecteurs automobiles ;
Considérant qu'elle produit également une seconde antériorité constitué par le brevet américain (American) n° US 4.471.619 déposé le 14 juin 1988 enseignant un dispositif de fixation par pression d'un feu pour véhicule automobile, reprenant les caractéristiques du brevet contesté ;
Considérant que la société TYC Europe BV conclut donc à l'infirmation sur ce point du jugement entrepris et à la nullité de ce brevet pour défaut d'activité inventive ;
Considérant que les sociétés Valeo Service et Valeo Vision répliquent que le brevet Bosch divulgue un capteur de vis, ou dispositif de retenue apte à rendre imperdable une vis, à l'intérieur de l'alésage d'une structure dans laquelle cette vis ou une autre pièce similaire doit être logée pour fonctionner ; que cette antériorité ne divulgue pas la fonction de la rondelle dans l'invention contestée ni son application ;
Considérant qu'elles font valoir que c'est une pression qui permet lors du montage de la vis de Bosch, la pénétration et l'ancrage de la rondelle dans sa cavité alors que dans l'invention contestée, c'est la traction vers l'extérieur de l'assemblage qui provoque l'ancrage voulu pour rendre indémontable l'assemblage ;
Considérant qu'elles ajoutent que l'antériorité American, qui n'apporte rien de plus par rapport à l'antériorité Bosch, ne décrit nullement l'invention contestée puisqu'elle concerne une vis qui est nécessairement vissée et que l'homme du métier n'utilisera pas cette antériorité pour parvenir à l'invention contestée ;
Considérant qu'elles en concluent qu'aucun des documents invoqués ne divulguent l'ensemble des caractéristiques des revendications du brevet contesté dont l'invention présente donc bien une activité inventive ;
Considérant que, comme pour le précédent brevet, l'homme du métier est un mécanicien du secteur automobile spécialisé dans les projecteurs ;
Considérant que le brevet Bosch de 1933 divulgue un dispositif de retenue apte à rendre imperdable un élément, en l'occurrence pour maintenir en place une vis ou tout autre pièce similaire, à l'intérieur de l'alésage d'une structure dans laquelle la vis ou autre pièce similaire doit être logée pour fonctionner ;
Considérant que l'enseignement de ce brevet ne vise donc pas à atteindre le même objectif que l'invention revendiquée qui est de proposer un élément de fixation d'assemblage d'un réflecteur sur une partie d'appui d'un projecteur de véhicule automobile ;
Considérant par ailleurs que l'invention décrite par le brevet Bosch consiste à créer une vis partiellement filetée d'un diamètre légèrement inférieur au diamètre de l'ouverture centrale de l'élément capteur de forme convexe (disque, rondelle ou autre élément de forme concave-convexe), lequel pourra ainsi remonter facilement le long de la vis jusqu'à la partie non filetée ;
Considérant que lorsque la vis est vissée dans une structure alésée spécialement prévue pour la recevoir, la pression exercée par la tête sur l'élément en provoque l'aplatissement et l'expansion du diamètre extérieur ; l'élément aplati pénètre dans le matériau de la paroi et est solidement retenu à l'intérieur de celui-ci tandis que le diamètre du trou central rétrécit jusqu'à devenir inférieur au diamètre extérieur de la partie filetée de la vis, laquelle devient de ce fait imperdable ;
Considérant que l'aplatissement de la rondelle se fait donc dans le brevet Bosch par pression du fait du vissage de la vis ; que si cette vis devient alors imperdable elle peut néanmoins coulisser le long de sa partie non filetée ainsi que cela ressort notamment de la figure 6 annexée à la description de ce brevet ;
Considérant en revanche que dans le brevet contesté la rondelle est montée sur le corps de l'élément de fixation intermédiaire par cloquage, immobilisant l'assemblage en le rendant indémontable sous peine d'entraîner la rupture de la rondelle et la détérioration de l'élément de fixation intermédiaire ;
Considérant en conséquence que l'enseignement de ce brevet ne divulgue pas toutes les caractéristiques de l'invention revendiquée et ne suggère pas à l'homme du métier de reproduire de manière évidente une telle caractéristique ainsi d'ailleurs que le démontre l'ancienneté de cette antériorité opposée par la société TYC Europe BV ;
Considérant que le brevet American de 1988 divulgue quant à lui un dispositif de fixation ajustable, notamment pour phare automobile, se composant de deux éléments pouvant être déplacés l'un par rapport à l'autre par un effet de glissement pendant une opération d'ajustement du phare, l'un étant fixé au phare et l'autre à la carrosserie de l'automobile ;
Considérant que ce dispositif se compose d'un organe de blocage souple fonctionnant conjointement avec le second élément et avec la vis et se composant d'au moins un bord de serrage ; que le serrage de la vis causant la venue en butée du second élément contre la carrosserie provoque la déformation, grâce à cette butée, de cet organe de blocage et la mise en contact du ou des bords de serrage avec le premier élément en vue d'assurer le calage des deux éléments dans leur position relative ;
Considérant que le montage se réalise en deux temps, un assemblage préliminaire du phare étant d'abord réalisé avant de positionner celui-ci sur la carrosserie de l'automobile par serrage ;
Considérant que l'enseignement de ce brevet qui est de permettre d'ajuster la position du phare par rapport à la carrosserie grâce à un dispositif extérieur au boîtier du dit phare ne vise donc pas à atteindre le même objectif que l'invention revendiquée concernant un dispositif de fixation du réflecteur à l'intérieur du projecteur ;
Considérant par ailleurs que comme dans le brevet Bosch, le montage se fait par vissage d'une vis qui provoque l'aplatissement de l'organe de blocage souple, qu'en outre à la différence de l'invention revendiquée, ce montage est réversible ('dans tous les cas, la fixation obtenue sera démontable par simple dévissage partiel de la vis') ;
Considérant en conséquence que l'enseignement de ce brevet ne divulgue pas davantage toutes les caractéristiques de l'invention revendiquée et ne suggère pas à l'homme du métier de reproduire de manière évidente une telle caractéristique ;
Considérant dès lors que l'invention faisant l'objet de la revendication 1 du brevet litigieux qui résout la difficulté de réaliser un système de montage d'un réflecteur sur une partie d'appui du projecteur qui soit à la fois particulièrement simple et économique, nécessitait davantage que le simple exercice par l'homme du métier de ses capacités professionnelles d'exécutant et l'utilisation des enseignements de l'état de la technique ;
Considérant en conséquence que la revendication 1 du brevet contesté présente bien une activité inventive ;
Considérant que les revendications 3, 6, 8, 14, 16, 17 se trouvent placées sous la dépendance de la revendication 1 à laquelle elles renvoient directement et tirent leur validité du lien de dépendance les unissant à la revendication 1 elle-même valable ;
Considérant que la revendication 18 reprend les mêmes caractéristiques que celles décrites à la revendication 1 relatives à un élément de fixation intermédiaire destiné au montage d'un réflecteur sur une partie d'appui d'un projecteur de véhicule automobile et qu'en conséquence cette revendication, similaire à la revendication 1, présente également une activité inventive ;
Considérant que le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu'il a débouté la société TYC Europe BV de sa demande en nullité de ce brevet pour défaut d'activité inventive ;
IV : Sur les faits de contrefaçon :
Considérant qu'il ressort du procès-verbal de constat d'achat établi le 18 décembre 2007 au magasin Casse Center d'Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) et du procès-verbal de saisie-contrefaçon établi les 11 et 12 mars 2008 dans les locaux de la SA Établissements Aniel à La Garde (Var) que la société TYC Europe BV importe en France des projecteurs pour véhicules BMW série 1 commercialisés par la SA Établissements Aniel sous les références BM 920 et BM 921 et des projecteurs pour véhicules Fiat Punto référencés FT 1920 et FT 1921, lesquels sont fabriqués par la société de droit taiwanais TYC Brother Inc. Co. Ltd.;
Considérant qu'il ressort également du procès-verbal de saisie-contrefaçon établi le 31 janvier 2008 dans les locaux de la SAS Cora à Chaponnay (Rhône), notamment des catalogues et des documents comptables saisis, que cette société commercialise sous les références D 1050301 et G 1050302 pour véhicule BMW série 1 et D 0418301 et G 0418302 pour véhicule Punto Fiat lesdits phares importés par la société TYC Europe BV ;
Considérant que par l'examen des blocs optiques acquis lors du constat d'achat, de ceux saisis lors de la saisie-contrefaçon, des photographies prises et des catalogues, la cour est en mesure de s'assurer que les revendications 1 à 6 du brevet français n° 95 10 957 sont contrefaites par les projecteurs pour véhicule Fiat Punto tandis que les revendications 1, 3, 6, 8, 14, 16, 17 et 18 du brevet français n° 98 01 054 sont contrefaites par les projecteurs pour véhicule Fiat Punto et BMW série 1 ; qu'au demeurant la matérialité des actes de contrefaçon n'est pas sérieusement contestée par la société TYC Europe BV qui, dans ses conclusions, n'articule aucun moyen particulier, se contentant de conclure à la nullité des brevets revendiqués ;
Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a dit qu'en important ces blocs optiques la société TYC Europe BV avait commis des actes de contrefaçon des brevets français n° 95 10 957 et 98 01 054 dont la SAS Valeo Vision est titulaire ;
V : Sur les faits de concurrence déloyale :
Considérant que la société TYC Europe BV conteste l'existence de faits de concurrence déloyale en faisant valoir que ses produits ne sont pas des copies serviles de ceux produits et commercialisés par les sociétés Valeo Vision et Valeo Service, n'ayant fait que reprendre les caractéristiques génériques exigées par les constructeurs automobiles eux-mêmes pour l'installation de ces produits sur leurs véhicules ;
Considérant qu'elle ajoute qu'aucune confusion n'est possible dans la mesure où les références des produits sont tout à fait distinctes et où ses marquages sont également totalement distincts de ceux des sociétés Valeo Vision et Valeo Service, figurant en caractères très apparents sur l'ensemble des produits et des boîtes d'emballage ;
Considérant que les sociétés Valeo Vision et Valeo Service répliquent que les projecteurs importés par la société TYC Europe BV sont des copies serviles de leurs propres projecteurs, notamment par la reproduction d'éléments nullement nécessaires à leur fonction, voire qui se sont avérés inutiles à la fabrication ou à la commercialisation de ces projecteurs ;
Considérant qu'elles précisent que la copie servile de certains organes d'un projecteur lumineux, ensemble complexe et hautement sophistiqué, permet de faire une économie de mise au point et d'abaisser nécessairement le prix de revient en faisant croire à une même qualité ou à une identité des propriétés, indépendamment des signes qui peuvent leur être apposés ;
Considérant qu'il ressort de la comparaison du bloc optique pour véhicule Fiat Punto fabriqué et commercialisé par les sociétés Valeo Vision et Valeo Service avec celui importé en France par la société TYC Europe BV que cette dernière société commercialise des projecteurs automobiles reprenant à l'identique l'aspect de ceux des sociétés Valeo Vision et Valeo Service ;
Considérant ainsi qu'indépendamment des caractéristiques imposées par le constructeur automobile, il apparaît que le projecteur importé par la société TYC Europe BV reprend à l'identique et aux mêmes emplacements les deux centreurs et les quatre clips équipant le projecteur des sociétés Valeo Vision et Valeo Service ;
Considérant que le capot de clignotant, interchangeable avec celui des sociétés Valeo Vision et Valeo Service, reprend sans nécessité fonctionnelle les mêmes nervures ; que les bonnettes arrières sont également interchangeables entre les deux modèles ; que les référentiels primaires, dont le choix de l'emplacement est propre aux sociétés Valeo Vision et Valeo Service, sont positionnés aux mêmes endroits ; que la société TYC Europe BV a repris sans nécessité la forme de la troisième ventilation 'Cybar' que les sociétés Valeo Vision et Valeo Service ont obturée, les deux autres ventilations étant suffisantes ; que les supports des lampes sont strictement identiques (même angle des vis de fixation par rapport au pourtour) ;
Considérant qu'il en est de même avec le bloc optique pour véhicule BMW série 1 importé par la société TYC Europe BV, qui reprend à l'identique l'aspect de celui des sociétés Valeo Vision et Valeo Service ;
Considérant en effet qu'indépendamment des caractéristiques imposées par le constructeur automobile, il apparaît que le projecteur importé par la société TYC Europe BV reprend sans nécessité fonctionnelle les mêmes pattes de fixation du masque à la glace, tant en ce qui concerne leur nombre que leur forme ;
Considérant qu'il en est de même des doigts pour éviter le gondolement, des supports pour ballast et l'alimentation électrique de lampes au xénon (alors surtout que la société TYC Europe BV ne propose que des projecteurs avec lampes halogènes, lesquelles n'ont pas besoin de ce ballast propre aux lampes au xénon) ;
Considérant que le projecteur importé par la société TYC Europe BV reprend également à l'identique et aux mêmes emplacements, sans nécessité fonctionnelle, les trois centreurs et les six clips équipant le projecteur des sociétés Valeo Vision et Valeo Service ; qu'il en est de même du nombre de fixations du joint de carrosserie et de leur emplacement ; que la patte articulée reprend à l'identique les mêmes nervures de raidissement ; que les supports des lampes sont strictement identiques (même angle des deux fixations par rapport au pourtour) ;
Considérant que le projecteur importé par la société TYC Europe BV reprend enfin des organes qui se sont avérés inutiles, tels que la cassette du logement de ventilation (alors que la société TYC Europe BV n'a pas repris la même ventilation), le capot arrière interchangeable sans nécessité, la forme d'une ventilation "Cybar" supplémentaire finalement non utilisée par les sociétés Valeo Vision et Valeo Service ;
Considérant que ces reprises serviles par la société TYC Europe BV de l'apparence des blocs optiques produits et commercialisés par les sociétés Valeo Vision et Valeo Service ne sont en rien imposées par des impératifs techniques ; qu'ainsi est créé un risque de confusion avec les activités des sociétés Valeo Vision et Valeo Service, constitutif d'agissements fautifs de concurrence déloyale engageant la responsabilité civile de la société TYC Europe BV sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du Code civil ;
Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a dit que la société TYC Europe BV avait commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre des sociétés Valeo Vision et Valeo Service ;
VI : Sur les mesures réparatrices :
Considérant que les sociétés Valeo Vision et Valeo Service concluent à la confirmation du jugement entrepris en ce qui concerne la mesure d'interdiction sous astreinte, avec rappel des produits contrefaisants, confiscation et destruction et en ce qui concerne la publication judiciaire, sauf à augmenter le nombre de journaux ou magazines et le coût de publication ; qu'elles demandent en outre à la cour d'évoquer l'indemnisation définitive de leurs préjudices au vu du rapport d'expertise judiciaire déposé le 28 février 2011 ;
Considérant qu'au titre de leur préjudice commercial elles font valoir que les bénéfices indûment réalisés s'élèvent à la somme globale de 4 307,89 euro, que la perte de redevances pour la société Valeo Vision peut être évaluée à 10 000 euro, que les ventes manquées pour la société Valeo Service peuvent être évaluées à 20 000 euro, que l'atteinte aux investissements s'élève à au moins 50 000 euro pour la société Valeo Vision et à 40 000 euro pour Valeo Service ;
Considérant que la société Valeo Vision réclame en outre la somme de 40 000 euro et la société Valeo Service la somme de 20 000 euro au titre des préjudices subis du fait de l'atteinte à leur monopole et du préjudice moral ;
Considérant qu'en ce qui concerne la réparation des actes de concurrence déloyale, chacune des deux sociétés Valeo Vision et Valeo Service réclame la somme de 100 000 euro à titre de dommages et intérêts.
Considérant que la société TYC Europe BV soutient que les sociétés Valeo Vision et Valeo Service ne peuvent justifier d'aucun préjudice réel, les prétendues atteintes au monopole et au préjudice moral n'étant pas établies, le client final souhaitant acheter des produits pour véhicule BMW série 1 ou Fiat Punto mais en aucun cas un produit Valeo ;
Considérant qu'elle conclut au débouté des sociétés Valeo Vision et Valeo Service de l'ensemble de leurs demandes indemnitaires ;
Considérant ceci exposé, que c'est à bon droit que les premiers juges ont prononcé une mesure d'interdiction sous astreinte de la poursuite des actes illicites ainsi que le rappel des produits contrefaisants et illicites aux fins de confiscation et de destruction aux frais de la société TYC Europe BV, conformément aux dispositions de l'article L. 615-7-1 du Code de la propriété intellectuelle, que le jugement entrepris sera confirmé de ce chef ;
Considérant de même que c'est également à bon droit que les premiers juges ont, conformément à l'article L. 615-7-1, deuxième alinéa, ordonné la publication judiciaire dans cinq journaux ou magazines d'un communiqué sans qu'il apparaisse approprié d'augmenter le nombre de journaux ou de magazines ainsi que le coût global de cette publication, que le jugement entrepris sera également confirmé de ce chef et y ajoutant, que ce communiqué mentionnera que le jugement du 25 mai 2010 est confirmé par le présent arrêt ;
Considérant qu'en ce qui concerne l'indemnisation définitive des préjudices subis par les sociétés Valeo Vision et Valeo Service du fait des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale, dans la mesure où l'expert judiciaire a déposé son rapport le 28 février 2011 et où les parties ont conclu au fond sur ce point, il apparaît d'une bonne administration de la justice de donner une solution définitive au litige en évoquant ce point conformément aux dispositions de l'article 568 du Code de procédure civile ;
Considérant que l'expert a accompli sa mission dans le strict respect du principe du contradictoire, qu'il a en particulier annexé et répondu aux dires des parties auxquelles il a adressé le 14 décembre 2010 son pré-rapport ;
Considérant que dans la mesure où l'article 11 du Code de procédure civile prescrit aux parties d'apporter leur concours aux mesures d'instruction sauf au juge à tirer toute conséquence d'une abstention, il ne saurait être reproché à l'expert de prétendus oublis ou insuffisances dans son rapport alors qu'il apparaît que malgré le montant peu significatif des sommes en cause, les parties n'ont pas respecté le planning convenu et n'ont pas adressé à l'expert l'ensemble des pièces demandées, qu'en particulier les sociétés Valeo Vision et Valeo Service n'ont fait connaître que tardivement les chefs et les montants de leurs demandes, postérieurement à l'envoi du pré-rapport ; qu'en tout état de cause le rapport définitif tient compte de l'ensemble des observations des parties ;
Considérant qu'en ce qui concerne la société TYC Europe BV, l'expert a établi des tableaux récapitulant les ventes effectuées par cette dernière à partir du 13 février 2005 (dans les limites de la prescription de l'article L. 615-8 du Code de la propriété intellectuelle ) en retenant une marge déterminée par le calcul de la marge sur la totalité des articles livrés, appliquée par article aux quantités facturées en définitive (hors projecteurs saisis par l'huissier) après avoir sur projecteurs défectueux ;
Considérant que l'expert indique que les montants "ronds" réclamés par les sociétés Valeo Vision et Valeo Service (au titre de l'atteinte au monopole, de l'atteinte aux investissements et au titre des actes de concurrence déloyale) ne reposent sur aucun calcul ;
Considérant qu'au titre de la perte de redevance de la société Valeo Vision l'expert rappelle que le contrat de concession de licence conclu avec la société Valeo Service ne lui a pas été communiqué et retient le taux mentionné de 7 % ;
Considérant qu'au titre des ventes manquées de la société Valeo Service l'expert écarte les articles défectueux et les pièces vendues à l'huissier pour ne tenir compte que du nombre d'articles effectivement vendus ;
Considérant qu'au titre de l'atteinte aux investissements l'expert a estimé à 5,50 % le taux des frais de recherche et de développement à appliquer au chiffre d'affaires connu sur les deux projecteurs chez la société TYC Europe BV correspondant au taux constaté en 2005 et 2006 dans la mesure où les projecteurs ont été conçus avant leur commercialisation ;
Considérant que ce rapport, complet et documenté, n'est pas sérieusement critiquable en ses aspects techniques et sera donc entériné par la cour pour l'évaluation des préjudices subis par les sociétés Valeo Vision et Valeo Service ;
Au titre de la contrefaçon :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 615-7 du Code de la propriété intellectuelle il convient de prendre en considération les conséquences économiques négatives (dont le manque à gagner) subies par les parties lésées, les bénéfices réalisés par le contrefacteur et le préjudice moral subi du fait de l'atteinte ;
Considérant qu'en ce qui concerne le manque à gagner subi par la société Valeo Vision du fait de la perte de redevance sur la base d'un taux de 7 % par rapport au chiffre d'affaires global de 15 355 euro, ce poste de préjudice sera évalué à la somme de 1 075 euro ;
Considérant qu'en ce qui concerne le manque à gagner subi par la société Valeo Service du fait des ventes manquées, ce poste de préjudice sera évalué, en fonction de la marge qu'aurait pu réaliser cette société comparée à la marge déterminée pour les sociétés Cora et Auto Distribution, à la somme globale de 9 913,27 euro ;
Considérant qu'en ce qui concerne les préjudices subis du fait de l'atteinte aux investissements de recherche et développement des sociétés Valeo Vision et Valeo Service relatifs aux produits litigieux, ce poste de préjudice sera évalué à la somme globale de 845 euro (soit 422,50 euro pour chacune des deux sociétés) ;
Considérant que les bénéfices réalisés par le contrefacteur s'élèvent à la somme globale de 4 307,88 euro (soit 2 153,94 euro pour chacune des deux sociétés) ;
Considérant enfin que la contrefaçon constitue en elle-même une atteinte au monopole et au droit privatif résultant du brevet, caractérisant de ce fait l'existence d'un préjudice moral qui doit être réparé ;
Considérant que ce poste de préjudice sera évalué en tenant compte de la banalisation et de la dévalorisation de ces brevets du fait des actes de contrefaçon ; qu'ainsi au vu des éléments de la cause la cour évalue ce préjudice à la somme de 16 000 euro pour la société Valeo Vision et de 8 000 euro pour la société Valeo Service ;
Considérant qu'en conséquence la société TYC Europe BV sera condamnée à payer en réparation des actes de contrefaçon la somme globale de 19 651,44 euro (1 075 + 422,50 + 2 153,94 + 16 000) à la société Valeo Vision et la somme globale de 20 489,71 euro (9 913,27 + 422,50 + 2 153,94 + 8 000) à la société Valeo Service ;
Au titre de la concurrence déloyale :
Considérant que l'expert n'a pas pu apprécier le montant de 100 000 euro réclamé par chacune des deux sociétés Valeo Vision et Valeo Service en l'absence d'éléments objectifs ;
Considérant néanmoins que les actes fautifs de concurrence déloyale, distincts de ceux de contrefaçon tels qu'analysés précédemment, ont causé un préjudice distinct de celui déjà réparé au titre de la contrefaçon du fait de la confusion ainsi créée auprès du public concerné, entraînant un détournement de cette clientèle ;
Considérant que compte tenu des chiffres d'affaire en cause et du fait que ces agissements ne concernent que deux modèles de blocs optiques pour véhicules automobiles, la cour évalue ce préjudice à la somme de 20 000 euro pour chacune des deux sociétés, que la société TYC Europe BV sera condamnée à leur payer ;
VII : Sur les autres demandes :
Considérant qu'il est équitable d'allouer aux sociétés Valeo Vision et Valeo Service la somme globale complémentaire de 40 000 euro au titre des frais par elles exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles de première instance ;
Considérant que la société TYC Europe BV, partie perdante en son appel, ne pourra qu'être déboutée de sa demande en paiement au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Considérant que, pour les mêmes motifs, la société TYC Europe BV sera condamnée au paiement des dépens d'appel, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé en ce qu'il a statué sur la charge des dépens de la procédure de première instance ;
Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Donne acte aux sociétés Établissements Aniel, Autodistribution et Cora de leurs désistements d'appel respectifs. Donne acte aux sociétés Valeo Vision et Valeo Service de leur acceptation des dits désistements. Déclare ces désistements parfaits et constate de ce fait l'extinction de l'instance à l'égard des sociétés Établissements Aniel, Autodistribution et Cora. Dit que chacune de ces sociétés conservera la charge de ses propres frais et dépens de la procédure d'appel. Dit que l'instance se poursuit entre la société TYC Europe BV, partie appelante, et les sociétés Valeo Vision et Valeo Service, parties intimées. Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris. Y ajoutant : Dit que le communiqué faisant l'objet de la mesure de publication judiciaire ordonnée par le jugement entrepris mentionnera que le jugement du 25 mai 2010 a été confirmé par le présent arrêt. Évoquant la liquidation des préjudices subis par les sociétés Valeo Vision et Valeo Service du fait des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale, Entérine le rapport d'expertise judiciaire déposé le 28 février 2011 par Mme Michèle Lewi. Condamne la société TYC Europe BV à payer à la société Valeo Vision la somme globale de dix-neuf mille six cent cinquante et un euros quarante-quatre centimes (19 651,44 euro) à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de contrefaçon et la somme de vingt mille euros (20 000 euro) à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de concurrence déloyale. Condamne la société TYC Europe BV à payer à la société Valeo Service la somme globale de vingt mille quatre cent quatre-vingt-neuf euros soixante et onze centimes (20 489,71 euro ) à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de contrefaçon et la somme de vingt mille euros (20 000 euro) à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de concurrence déloyale. Condamne la société TYC Europe BV à payer aux sociétés Valeo Vision et Valeo Service la somme globale complémentaire de quarante mille euros (40 000 euro) au titre des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens. Déboute la société TYC Europe BV de sa demande en paiement au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Condamne la société TYC Europe BV aux dépens de la procédure d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.