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Décisions

CA Nîmes, 2e ch. com. B, 13 septembre 2012, n° 10-05404

NÎMES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Fraismarche (SARL), Vanneste, Peter

Défendeur :

Etablissement Salomon (SAS), Distribution Casino France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Filhouse

Conseillers :

MM. Bertrand, Gagnaux

Avocats :

SCP Laick Isenberg Jullien Saunier, SCP Pericchi Philippe, Selarl Lexi, SCP Marion Guizard Patricia Servais, Mes Ben Soussen, Chazal

T. com. Aubenas, 22 oct. 2010

22 octobre 2010

Vu le jugement rendu le 22/10/2010 par le Tribunal de commerce de Nîmes

Vu l'appel de la SARL Fraismarche, François Vanneste et Laurence Vanneste née Peter en date du 25/11/2010

Vu les dernières conclusions déposées au greffe de la mise en état le 6/04/2012 par la SARL Fraismarche, François Vanneste et Laurence Vanneste et le bordereau de pièces qui y est annexé

Vu les dernières conclusions déposées au greffe de la mise en état le 22/03/2011 par la SAS Salomon et le bordereau de pièces qui y est annexé

Vu les dernières conclusions déposées au greffe de la mise en état le 27/10/2011 par la SAS Distribution Casino France et le bordereau de pièces qui y est annexé

Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 6/04/2012

Faits, procédure et moyens des parties

Il convient de se reporter au jugement entrepris et aux écritures des parties pour plus ample exposé des faits de la cause et le développement de leurs argumentations de fait et de droit et il convient ici de rappeler pour la compréhension autonome du présent arrêt pour l'essentiel :

Au début de l'année 2007, les époux Vanneste, désireux de créer une société commerciale expliquent avoir contacté la société Casino, laquelle leur aurait proposé de créer une "supérette" à l'enseigne Spar sur la commune de Pont de l'Isère (26600) et pour laquelle une étude de marché aurait été réalisée au cours de l'année 2006 avec un compte de résultat prévisionnel sur trois ans, leur demandant alors de collaborer avec la société Salomon, gestionnaire de l'exploitation de cette enseigne du Groupe Casino sur le département de la Drome suite à un contrat de partenariat du 1/12/2005.

Le compte prévisionnel tri- annuel daté de février 2007 parle d'un chiffre d'affaires réalisable dès la première année de 1 100 000 euro, puis les années suivantes 1 211 760 euro et 1 273 080 euro ;

Après divers travaux le 7 juin 2007, la SARL Fraismarche a commencé l'exploitation du magasin ainsi créé mais les époux Vanneste gérants constataient très vite que le chiffre d'affaires atteignait seulement environ 1/3 du chiffre d'affaire prévisionnel escompté la première année 234 117 euro pour les 7 premiers mois pour 672 000 euro prévus avant d'osciller entre 30 % à 50 % du prévisionnel les mois suivants - et un résultat net négatif de 15 617 euro ; le prévisionnel était un revenu positif la première année de 52 430 euro ;

Le déficit était de 2 987 euro en 2008, avec un bénéfice de seulement 7 898 euro en 2009.

Après vaines tentatives d'accord amiable, le 20/05/2008, la SARL Fraismarche, François Vanneste et Laurence Vanneste ont fait assigner la (SAS) Etablissement Salomon et la (SAS) Distribution Casino France pour voir :

-constater le dol commis par les sociétés Distribution Casino France et Etablissement Salomon,

-prononcer l'annulation du contrat de franchise liant la (SAS) Etablissement Salomon à la (SARL) Fraismarche,

-constater la mise en cause de la responsabilité des sociétés Etablissement Salomon et Distribution Casino France, et les condamner in solidum à payer

-à la (SARL) Fraismarche : 3 049,80 euro au titre de la restitution des cotisations d'enseigne versée ; depuis le début de l'exploitation, 155 144 euro en remboursement des frais engagés pour l'agencement du magasin, 15 167 euro en indemnisation des pertes subies au 31 décembre 2007,

-à Monsieur et Madame Vanneste : 35 000 euro en indemnisation de l'investissement initial consenti en pure perte, 15 000 euro au titre du gain manqué en termes de rémunération,

[outre diverses demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et l'exécution provisoire].

En cours de procédure de première instance les demandeurs modifiaient et amplifiaient toutes leurs demandes, la SARL Fraismarche demandant principalement 164 180,96 euro de "pertes éprouvées" et 100 000 euro de "gains manqués", les époux Vanneste demandant 35 000 euro pour la perte de leur "investissement initial" et 65 000 euro de "gain manqué".

Le Tribunal de commerce d'Aubenas par jugement en date du 22/10/2010 a jugé :

Constate l'existence d'un contrat oral de franchise entre les sociétés Fraismarche e Salomon.

Dit que ce contrat s'est terminé le 5 février 2009.

Dit que les sociétés Salomon et Casino Distribution n'ont commis aucun dommage envers la (SARL) Fraismarche et les consorts Vanneste.

Déboute la (SARL) Fraismarche et les époux Vanneste de l'ensemble de leurs demandes.

Dit qu'il n'y a pas lieu à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de leur appel la SARL Fraismarche, François Vanneste et Laurence Vanneste reprennent l'essentiel de leur argumentation de première instance et de leurs prétentions pour demander à la cour in fine de leurs dernières écritures en un dispositif :

Vus les articles 1108, 1109, 1110 et suivants, 1116, 1382 du Code civil Vu l'article 330-3 du Code de commerce : (....)

-Infirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions ; A titre principal :

-Constater les manœuvres commises par les sociétés Casino et Salomon ;

-Prononcer l'annulation du contrat de franchise liant la société Salomon à la société Fraismarche ;

-Condamner Salomon à restituer les redevances perçues soit 10 000 euros sauf à parfaire ;

-Condamner in solidum la société Salomon et la société Casino au paiement des sommes suivantes :

'A la société Fraismarche : 128 204 euros à titre de dommages et intérêts.

'A Monsieur et Madame Vanneste : 102 760 euros.

Débouter la société Salomon de toutes ses demandes. A titre subsidiaire :

'Constater que la responsabilité des sociétés intimées est engagée.

'Les Condamner à verser la somme de 128 204 euros à titre de dommages et intérêts à la société Frais Marché.

'Les Condamner à verser une somme de 102 760 euros aux époux Vanneste à titre de dommages et intérêts.

'Débouter la société Salomon de l'intégralité de ses demandes.'

[ + demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et dépens].

La SAS Distribution Casino France - intimée - conteste à nouveau tout lien de droit avec les appelants et toute responsabilité dans l'échec de l'exploitation de la supérette pour demander in fine à la cour de :

Vu les articles 1116 et 1382 du Code civil,

Rejeter l'appel comme non fondé ;

Confirmer le jugement au moins en ce qu'il a débouté la société Fraismarche et des consorts Vanneste de toutes leurs demandes à l'encontre de la société Distribution Casino France ;

[ + demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et dépens].

La SAS Salomon - intimée et appelante incidente - reprend son argumentation devant les premiers juges pour contester l'existence même d'un contrat de franchise et tout manquement à ses obligations avant de demander in fine à la cour :

Vu les 5 pièces visées au bordereau de pièces ci-après annexé,

Dire et juger recevable mais mal fondé l'appel interjeté par la société Fraismarche et les consorts Vanneste,

A titre d'appel incident,

Réformer le jugement de première instance en ce qu'il a constaté qu'il existerait un contrat oral de franchise conclu entre la société Salomon et la société Fraismarche.

Dire et juger au contraire qu'il n'existe aucun contrat de franchise de la sorte entre les deux sociétés, leurs relations contractuelles se résumant à de la fourniture de produits de marque Casino.

Vu l'article 1116 du Code Civil,

Confirmer le jugement du Tribunal de commerce d'AUBENAS en ce qu'il a dit et jugé que la société Salomon n'avait commis aucune réticence dolosive au préjudice de la société Fraismarche et des époux Vanneste et qu'il les a en conséquence débouté de toutes leurs demandes.

A titre reconventionnel. condamner la société Fraismarche à payer à la société Salomon la somme de 8.788, 54 euro outre intérêts au taux légal à compter de la date d'émission des factures, avec capitalisation.

[ + demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et dépens].

Sur ce

Attendu qu'il ne ressort pas des pièces de la procédure d'irrecevabilité de l'appel que la cour devrait relever d'office, et les parties n'élèvent aucune discussion sur ce point ;

Sur le contrat de franchise entre la SARL Fraismarche et la SAS Salomon

Attendu que les parties s'opposent sur l'existence même d'un contrat de franchise, ses conditions de formation et d'exécution ainsi que sur les conséquences de la rupture des relations contractuelles ;

Attendu qu'en droit si la loi prévoit pour la protection du franchisé et la transparence des obligations contractuelles que le contrat doit être écrit, l'absence de contrat écrit n'est pas déterminante pour considérer que les parties étaient liées par un contrat de franchise, en conséquence oral ;

Que la réalité de leurs relations contractuelles est à cet égard essentielle de même que si elles étaient liées par un contrat portant un autre intitulé ;

Attendu que l'exclusivité d'approvisionnement auprès du franchiseur prétendu n'est pas une composante nécessaire en cette appréciation ;

Attendu que l'article L. 330-3 du Code de commerce dispose notamment, en ses alinéas 1 et 2 :

'Toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause.

Ce document, dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités.

(....)

Le document prévu au premier alinéa ainsi que le projet de contrat sont communiqués vingt jours minimum avant la signature du contrat, ( ...) '

Attendu qu'il est constant que la SAS Salomon est intervenue en cette affaire dans le cadre de l'organisation des réseaux franchisés du groupe Casino et plus précisément dans le cadre d'un partenariat faisant l'objet d'un contrat de partenariat du 1/12/2005, contrat que les intimées se sont refusé à communiquer ;

Attendu qu'il résulte du dossier et est acquis aux débats que la société Salomon a été mise en contact avec les époux Vanneste parce que celle ci avait un réseau de franchise dans la mouvance du groupe Casino qui lui a confié la gestion dans le département de la Drome des commerces de proximité (supérettes) sous l'enseigne Spar ;

Que les appelants produisent au dossier divers documents dont K BIS démontant l'existence d'un réseau Spar encadrant l'activité de plusieurs supérettes dans la même région ;

Attendu qu'il est constant que la SAS Salomon a été directement impliquée dans la création de la superette par la SARL Fraismarche puisqu'elle a apporté une subvention à l'ouverture, participé à la conception du magasin et assisté à l'exécution des travaux en étant présent aux réunions de chantier, imposé un ensemble de signalétique Spar, perçu des droits d'enseigne, participé à l'organisation de la publicité lors de l'ouverture, transité commandes et paiement dans le cadre d'un ensemble contractualisé avec la SAS Distribution Casino France ;

Qu'il sera encore analysé infra à propos de la société Casino les conséquences de cette situation ;

Qu'à juste titre les premiers juges ont considéré qu'était rapportée la preuve d'un contrat de franchise entre la SARL Fraismarche et la SAS Salomon ;

Attendu que la SAS Salomon qui persiste en cause d'appel à demander le paiement de factures de droits d'enseigne est malvenue de continuer à contester l'existence d'un contrat de franchise ;

Sur le rôle de la SAS Distribution Casino France et son éventuelle faute

Attendu que la société Casino est à l'origine des relations Fraismarche/ Salomon, participe au financement de l'installation de la supérette, a comme la société Salomon participé à la conception du magasin et assisté à l'exécution des travaux en étant présent aux réunions de chantier ; qu'elle était mais seulement indirectement impliquée de façon apparente au dossier qu'elle avait donné mission à son partenaire institutionnel de gérer ;

Que les cocontractants de la SARL Fraismarche par exemple pour le matériel mentionne sur les documents contractuels ' Groupe Casino' ; que le dossier publicitaire du magasin est piloté (pièce 100 des appelants) par Franck HUEZ qui a une adresse email Groupe Casino et adresse copie du dossier d'ouverture à d'autres personnes du groupe

Casino : ' gaquilina' ; qu'il gère aussi en direct des commandes spéciales d'ouverture, une loterie publicitaire, la publicité journal et 3000 mailings ;

Que dans une lettre du responsable 'expansion sud est' de la' branche proximité' du groupe Casino en date du 24/09/2007 - Pascal BOUTEILLER- spontanément qualifie la société Salomon de ' partenaire franchiseur' ;

Attendu qu'il n'en demeure pas moins que lorsqu'elle a été contacté par le gérant de la SARL Fraismarche elle a accepté de participer directement à une négociation tripartite avec la SARL Fraismarche et la société Salomon dans des conditions qu'il convient d'analyser précisément ;

Attendu que la négociation est réalisée à la demande de François Vanneste qui a pris contact en ce sens directement avec la société Casino ;que l'interlocuteur est un certain Monsieur P.RIZZO qui a un email groupe Casino comme divers intervenants et dont on a plusieurs correspondances au dossier ;

Attendu que Pierre RIZZO est au sein de la société Casino le directeur d'exploitation de la Branche proximité, à laquelle sont rattachées les supérettes ; qu'à ce titre il mène la négociation en se présentant comme responsable des franchises et met au point un document (pièces 44 et 48) qui après rappel du partenariat des société intimées Salomon Casino propose la poursuite de l'exploitation de l'enseigne Spar ' mais directement avec Casino' dans le cadre d'un contrat de franchise ;

Que ce même document - abandonné seulement quand la société Casino s'est plaint d'une campagne de dénigrement menée parallèlement aux négociation par les appelants - énonçait :

' Lors de l'entrée en relations entre Fraismarche et Salomon un compte provisionnel avait été porté à la connaissance des parties. Il s'avère que le chiffre d'affaire escompté n'a pas été réalisé.'

Attendu que cette mention est la preuve de la part de son auteur habilité que contrairement à ce qu'elle prétend la société Salomon connaissait ce document de compte prévisionnel ; que la société Casino en était l'auteur ; qu'il a servi de base de travail pour la société Salomon et la SARL Fraismarche en leur contrat de franchise ;

Attendu que dans ce même document de la SAS Distribution Casino France celle ci est représentée dans le projet de document contractuel par Pierre RIZZO - déjà mentionné supra - qui est désigné en l'acte comme ' dûment habilité en sa qualité de directeur des réseaux d'exploitation des réseaux franchise de proximité ', étant souligné le pluriel de l'expression ' réseaux' puisqu'il n' est pas responsable apparemment que de la politique du seul réseau Spar ;

Que ce même acte ne se présente pas comme un acte nouveau mais la continuation sans discontinuité du contrat préexistant avec seulement substitution en un contrat de franchise à son partenaire Salomon ;

Que de façon significative le document ne parle pas à un instant de la fin du contrat précédent ;

Attendu que de façon plus significative encore cet acte est en son intitulé qualifié d''avenant ', c'est à dire un document contractuel modifiant les termes d'un contrat antérieur qui en son principe se poursuit ; qu'il est qualifié d'accord tripartite et confirme l'implication permanente sous jacente de la société Casino qui vient ainsi au secours et relais de son partenaire en difficulté ;

Attendu que la SAS Distribution Casino France a certes établi un document non pas optimiste mais irréaliste ; qu'il n'en demeure pas moins que la société Salomon dans le cadre de sa politique commerciale a pris la responsabilité de s'en servir, alors qu'il lui appartenait nécessairement d'en vérifier la pertinence ; qu'étant responsable du secteur géographique pour les supérettes, elle avait non seulement les moyens d'information et d'investigation nécessaires mais l'obligation de rectifier ou de s'opposer aux termes trompeurs du compte prévisionnel ;

Attendu que les appelants expliquent sans être démentis que d'autres magasins Spar à proximité avaient des difficultés pour maintenir un chiffre d'affaires proche du leur et cette réalité ne pouvait être ignorée dans le prévisionnel ;

Attendu que il est excessif de dire que la SAS Distribution Casino France aurait par complicité ou instigation été l'auteur avec la société Casino d'un dol préjudiciable à la SARL Fraismarche et les époux Vanneste ;qu'elle avait tout intérêt personnel au succès de son réseau de partenaire franchiseur et des franchises Spar ;

Attendu que certes la SAS Distribution Casino France n'a pas de relations contractuelles personnelles directes avec la SARL Fraismarche et les époux Vanneste ;

Attendu que par contre elle a joué un rôle déterminant en mettant en relation les époux Vanneste avec la SAS Salomon et par la remise d'un document prévisionnel qui a été déterminant dans la conclusion d'un contrat Spar avant de s'impliquer de façon importante dans la mise en œuvre la supérette Fraismarche dans le cadre du contrat de partenariat avec la SAS Salomon ;

Qu'en ce faisant elle a commis des fautes à l'égard des appelants dont elle doit répondre sur un fondement délictuel en application de l'article 1382 du Code civil ;

Sur le rôle de la SAS Salomon et son éventuelle faute

Attendu que la société Salomon avait en sa qualité de franchiseur l'obligation d'information précontractuelle prévue par l'article L. 330-3 du Code de commerce sur la franchise et cité supra ;

Que certes elle n'avait pas l'obligation d'une étude personnelle de rentabilité de la supérette mais elle ne pouvait par contre pas se servir d'une étude irréaliste qu'elle accréditait en la tenant pour conforme à la réalité dans ses relations avec son franchisé, et ce d'autant qu'elle avait été présentée à celui-ci par le groupe Casino comme le spécialiste mandaté par elle pour les supérettes Spar dans le secteur ;

Qu'ainsi elle a induit en erreur les époux Vanneste qui n'auraient à l'évidence pas contracté s'ils avaient compris que la SARL Fraismarche était vouée à un important échec - comme selon les documents qu'elle produit d'autres société franchises Spar dans la même région ;

Que bien plus ils n'auraient pas engagé sous couvert de leur société la SARL Fraismarche des investissements et des emprunts, tout en se contentant de rémunérations personnelles dérisoires voire inexistantes ;

Attendu que si le franchiseur n'est pas tenu d'établir un prévisionnel, il doit le faire ou se servir, si il en produit un d'un document sincère et sérieux ; que nonobstant tout aléa de ce genre de document non seulement les perspectives de chiffre d'affaires étaient très loin d'être réalistes, mais de plus aucune information n'a été donné sur les autres membres du même réseau dans le même secteur ; qu'enfin à tout le moins il n'a été donné aucune information- voire même il a été occulté - sur l'évolution dans le même secteur géographique du marché compte tenu du développement en cours de l'implantations de concurrents, ensemble d'informations qu'un professionnel d'envergure averti et bien implanté localement la société Salomon ne pouvait objectivement ignorer ;

Attendu que l'insuffisance du chiffre d'affaires pouvait sans doute - mais seulement partiellement - être aussi en relation avec la réalisation de travaux d'agrandissement peu de temps après l'ouverture de leur supérette de deux magasins importants concurrents se trouvant sur les communes proches de Tain L'Hermitage - Intermarché - et de Bourg Les Valence - Leclerc -, situation du marché concurrentiel apparemment là encore oublié ou occulté en l'analyse des prévisions ;

Qu'il faut remarquer l'absence de compétence et savoir-faire de la SAS Salomon qui n'a pu malgré son réseau aider utilement la SARL Fraismarche en difficulté au point que l'intervention de son partenaire Casino s'est avérée indispensable ;

Attendu que la SAS Salomon a commis à leur égard une faute qui doit être sanctionnée tout d'abord par la nullité du contrat de franchise et l'obligation pour elle de rembourser les sommes payées au titre de l'enseigne ; qu'elle doit pareillement être déboutée de ses demandes en paiement de factures d'enseigne non payées ;

Attendu que selon l'attestation non contestée de leur expert-comptable - pièce 58 - en date du 7/12/2009 la SAS Salomon a facturé 6 049,96 euro H.T, dont 4 599,96 euro H.T non payés ; que la demande de remboursement de 10 000 euro "sauf à parfaire" est erronée ; que la somme due à s'en tenir à ce justificatif est de 1 450 euro H.T ;

Attendu que par ailleurs elle doit indemniser la SARL Fraismarche et les époux Vanneste du préjudice qui leur a été causé par le manquement à ses obligations et le préjudice ainsi causé aux appelants qui n'auraient pas contracté si ils avaient été correctement et loyalement informés ; qu'elle le sera in solidum avec la SAS Distribution Casino France à indemnisation ;

Sur le préjudice de la SARL Fraismarche et les époux Vanneste

Attendu que le préjudice causé à la SARL Fraismarche n'est certes pas du chiffre d'affaire non réalisé qui impliquerait en contrepartie et en une importante proportion des acquisitions de marchandises et des frais et peine de manutention et gestion ; que par ailleurs après la rupture des liaisons commerciales de la SARL Fraismarche avec les sociétés Salomon et Casino la SARL Fraismarche a poursuivi l'exploitation de son fonds de commerce dans les mêmes locaux ainsi aménagés, sous apparemment une autre enseigne ;

Attendu qu'il n'en demeure pas moins qu'elle s'est vue imposer des obligations initiales par les sociétés Salomon et Casino tant de configuration des locaux que de frais publicitaires inutilement ;

Attendu qu'en considération de l'ensemble des documents produits l'ensemble du préjudice de la SARL Fraismarche est de 60 000 euro en toutes ses composantes ;

Attendu qu'indépendamment même de leurs peines et soins d'une situation très difficile pendant plusieurs années les époux Vanneste n'ont pas été en mesure de réaliser une rémunération décente, indépendamment même des chiffres irréalistes avancés à cet égard aussi par le prévisionnel, des aléas du commerce et des difficultés inhérentes à une création de magasin ;

Attendu que selon l'attestation non contestée de leur expert-comptable - pièce 57 - en date du 7/12/2009 les époux Vanneste ont reçu chacun 11 620 euro ( 23 240,88 euro à eux deux) du 1/04/2007 au 30/06/2010 ; qu'en fait l'essentiel a retenir en ce même document est que la première année ils n'ont perçu aucune rémunération et ont reçu chacun des sommes sans commune proportion avec une rémunération minimum décente pour un important travail lié à la création de la supérette ; qu'ils ont perçu selon le même document comptable 7 720 euro du 1/07/2008 au 30/06/2009 ;

Attendu que les époux Vanneste sont bien fondés à hauteur chacun de 15 000 euro en leur prétention tant au titre de leur investissement financier personnel justifié pour partie perdu que de leur manque à gagner personnel ;

Que les appelants sont enfin recevables à hauteur de 3000 euro en leur demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, l'ensemble des dépens de première instance et d'appel état à la charge des intimés ;

Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, en dernier ressort Dit recevable l'appel de la SARL Fraismarche, François Vanneste et Laurence Vanneste. Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit qu'il existait un contrat de franchise entre la SAS Salomon et la SARL Fraismarche. Réformant le jugement déféré pour le surplus et statuant à nouveau, Annule le contrat de franchise entre la SAS Salomon et la SARL Fraismarche pour non-respect par le franchiseur de ses obligations. Déboute les sociétés intimées de toutes leurs prétentions. Condamne la SAS Salomon payer à la SARL Fraismarche la somme de 1 450 euro H.T à titre de remboursement de rémunération à franchiseur. Condamne in solidum la SAS Salomon et la SAS Distribution Casino France à payer : - à la SARL Fraismarche la somme de 60 000 euro à titre de dommages et intérêts. - à François Vanneste et Laurence Vanneste chacun la somme de 15 000 euro. - à la SARL Fraismarche, François Vanneste et Laurence Vanneste la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Condamne in solidum la SAS Salomon et la SAS Distribution Casino France aux entiers dépens de première instance et d'appel.