CA Montpellier, 4e ch. soc., 6 février 2013, n° 11-06936
MONTPELLIER
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Mas Narbonne (SARL)
Défendeur :
Benavent
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme de Talance
Conseillers :
Mmes Coutou, Bresdin
Avocats :
Mes Fernandez, Garrigue
EXPOSE DU LITIGE
Carole Rocamora, devenue par la suite Mme Benavent a été embauchée par la société Mastempo France, agence de Narbonne, devenue SARL Mas Narbonne, société de travail temporaire, (la société), en qualité "d'assistante d'agence" suivant un premier contrat à durée déterminée pour la période du 7 juin au 6 septembre 2004, puis par un second contrat à durée déterminée, à compter du 7 septembre jusqu'au 6 décembre 2004.
Elle a été ensuite embauchée par cette même société pour y accomplir les mêmes fonctions de "assistante d'agence" par un contrat à durée indéterminée signé le 3 décembre 2004.
Ce contrat comportait une clause de non-concurrence limitée au département du Gard et aux départements limitrophes, pour une durée de deux ans.
Le 21 juin 2010 était signé un avenant au contrat de travail, modifiant la clause de non-concurrence, désormais ainsi rédigée :
"(...) En cas de rupture du présent contrat pour quelque cause que ce soit, par l'une quelconque des parties, Madame Carine Benavent s'interdit expressément pour une durée de deux ans, dans le département de l'Aude et les départements limitrophes, de s'intéresser directement ou indirectement, en qualité de salarié ou non, à quelque titre que ce soit, à une entreprise de travail temporaire concurrente.
Cette obligation de non-concurrence s'appliquera quels que soient la nature et le motif de la rupture du contrat y compris en cas de rupture de la période d'essai.
La société Mas Narbonne s'engage à payer pendant la durée de ladite clause une indemnité égale à 20 % (vingt pour cent) de la moyenne mensuelle de la rémunération du salarié au cours de ses 3 derniers mois de présence pour la première année, et de 10 % (dix pour cent) pour la seconde année. Toute prime ou gratification de caractère annuel exceptionnel n'étant prise en compte que prorata temporis (...)."
Par lettre du 11 janvier 2011, Mme Benavent était convoquée à un entretien préalable à son licenciement pour motif économique, le 21 janvier 2011.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 3 février 2011, il lui était notifié son licenciement pour motif économique.
La lettre de licenciement était ainsi rédigée :
" (...) A la suite de l'entretien préalable que nous avons eu le 21 janvier 2011, je vous informe que je suis contraint de vous licencier pour le motif économique suivant :
Depuis la crise financière, suivie immédiatement de la crise économique, la société connaît de graves difficultés.
L'activité du travail temporaire est particulièrement menacée par le fléchissement de l'activité économique.
Le marché de l'immobilier qui constitue un de nos plus importants domaines d'activité s'est effondré de telle sorte que le recours à l'intérim dans ce secteur a chuté de plus de 30 %.
Avec l'apparition de cette baisse d'activité, le déficit de l'entreprise se creuse si aucune disposition de restructuration n'est prise rapidement.
Les résultats de l'entreprise réalisés depuis la clôture de l'exercice du 30 juin 2010 sont liés pour partie aux chantiers déjà en cours.
Nos clients ont de plus en plus de difficulté à régler les factures dans des délais raisonnables et les organismes d'affacturage commencent à diminuer leur concours. En matière de découvert bancaire, nous sommes au maximum des accords pris avec les organismes financiers.
Face à cette situation économique, je suis obligé de prendre des mesures de réduction des charges d'exploitation.
Je vous ai déjà fait part lors de nos différentes réunions des difficultés de la société et notamment du ralentissement des marchés que nous développons depuis la création de l'entreprise.
L'exercice clos le 30 juin 2010 laisse apparaître une baisse de chiffre d'affaires de 27 % (2.308 659 euro au lieu de 3 165 440 euro pour l'exercice précédent). Le résultat de cet exercice est réduit de moitié.
Les chiffres de l'exercice ouvert depuis le 30 juin 2010 ne sont pas de nature à rattraper cette baisse.
Cette baisse de l'activité de l'entreprise a des répercussions directes sur votre poste.
La balance des comptes fait apparaître des charges d'exploitation et notamment des charges sociales qui ne me permettent pas de poursuivre l'activité sans éprouver des difficultés financières. Les comptes sont déséquilibrés notamment du fait des charges sociales trop importantes.
Compte tenu de la situation économique de l'entreprise, je suis donc obligé en ma qualité de dirigeant de prendre des mesures de diminution des charges afin de soulager au mieux la trésorerie de l'entreprise et de restructurer celle-ci en réduisant les postes de travail.
Il m'est donc impossible de maintenir l'ensemble des emplois actuels et je me trouve ainsi dans l'obligation de supprimer votre poste afin de conserver la compétitivité de l'entreprise.
Comme je vous l'ai indiqué depuis l'entretien préalable, je n'ai aucune possibilité de vous reclasser, car je suis contraint de procéder aux mêmes mesures de restructuration dans les autres sociétés de travail temporaire qui sont les filiales de la société Masgroup.
Comme nous vous l'avons indiqué lors de l'entretien préalable, vous avez la possibilité d'adhérer à une convention de reclassement personnalisé qui vous a été présentée le 21 janvier 2011 (...)".
Puis, par lettre du 9 février 2011, la société indiquait à Mme Benavent qu'elle entendait appliquer la clause de non-concurrence figurant au contrat de travail en réglant l'indemnité prévue (20 % de la moyenne mensuelle de la rémunération du salarié au cours de ses trois derniers mois de présence la première année, puis 10 % la seconde année).
Par lettre du 27 mai 2011, Mme Benavent saisissait le Conseil de prud'hommes de Narbonne d'une demande portant sur une indemnité de requalification de ses deux contrats de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, en dommages intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, et sollicitait également qu'il soit constaté la nullité de sa clause de non-concurrence et qu'il lui soit alloué 12 000 euro à ce titre.
Par jugement du 14 septembre 2011, le Conseil de prud'hommes de Narbonne requalifiait le contrat de travail à durée déterminée du 7 juin 2004 en contrat à durée indéterminée, disait le licenciement dépourvu de cause économique et abusif, et condamnait la société en conséquence à lui payer 1 743,04 euro au titre de l'indemnité de requalification, 10 500 euro au titre de dommages intérêts pour licenciement abusif, ordonnait l'exécution provisoire de la décision, fixait le salaire moyen à la somme de 1 743,04 euro, et allouait 1 500 euro à Mme Benavent au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le conseil de prud'hommes déboutait les parties de leurs autres demandes, et notamment celle de Mme Benavent portant sur l'annulation de la clause de non-concurrence.
Par lettre recommandée en date du 4 octobre 2011, la société Mas Narbonne interjetait appel de cette décision.
La société Mas Narbonne conclut à l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement de Mme Benavent dépourvu de motif économique et abusif, et l'a en conséquence condamné à lui payer 10 500 euro de dommages intérêts pour licenciement abusif, à la réformation du jugement entrepris s'agissant de l'indemnité de requalification, dont elle sollicite qu'elle soit fixée à 283, 08 euro et à sa confirmation en ce qu'il a constaté que la clause de non-concurrence était applicable, et débouté Mme Benavent de ses demandes à ce titre.
Elle sollicite également 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle fait essentiellement valoir que :
-la société Mas Narbonne est une des sociétés filiales de la société Masgroup, et exerce une activité de travail temporaire sous l'enseigne "Mastempo", tout comme les autres filiales, chacune employant 2 à 3 assistantes d'agences.
La société Masgroup exerce des activités de support comptable qu'elle facture à chacune de ses filiales.
Chacune de ces sociétés, pour exercer son activité, doit détenir une garantir financière d'un établissement habilité représentant au moins 8 % du chiffre d'affaire, en garantie des salaires et charges sociales.
Cette garantie pourrait lui être retirée si sa situation économique et financière devait s'aggraver, lui interdisant de ce fait toute activité.
A partir de 2009, les sociétés du groupe "Mastempo", et notamment la société Mas Narbonne ont connu des difficultés financières, comme en font foi les documents comptables présentés, notamment en raison de l'effondrement du marché de la construction. Elles ont été obligées de procéder à des restructurations, notamment sous la forme de licenciement économiques.
- le licenciement économique, qui doit s'apprécier en tenant compte uniquement des sociétés du groupe exerçant l'activité d'intérim, est justifié par les difficultés économiques réelles rencontrées tant par la société elle-même que par les autres filiales du groupe, et par la nécessité de préserver la compétitivité de ce secteur d'activité au sein du groupe.
- Au cours du mois de janvier 2011 elle a procédé à des recherches de reclassement au sein des sociétés du groupe exerçant des activités d'entreprises de travail temporaire. Aucun poste d'assistante d'agence n'était disponible au sein de la société Mas Narbonne, qui ne comportait que deux postes de ce type, ni au sein du groupe.
Mme Benavent a à plusieurs reprises exprimé son refus de travailler dans les autres sociétés Mastempo, en raison de leur éloignement de Narbonne et de son absence d'affinité avec les membres des agences en place.
Quant aux autres sociétés qu'elle cite (Mas Invest, Mascarelle, Mouton carrelages, Rhône Danube et Mas Finance), même si elles ont le même gérant, M. Mascarel, elles ne font pas partie du groupe, et ont des activités différentes du travail intérimaire, qui exigent des compétences particulières.
Enfin l'agence de travail temporaire Mas Barcelone et la société Mas Finance auraient imposé une formation initiale en langue espagnole.
L'obligation de reclassement s'étendait donc aux seules sociétés dans lesquelles une permutation des salariés était possible, c'est à dire les agences exerçant sous l'enseigne "Mastempo", et les lettres circulaires adressées à chacune d'entre elle démontrent le sérieux des recherches effectuées, puisqu'elles désignaient nommément la salariée et le poste qu'elle occupait.
Mme Bénavent a refusé des postes qui lui étaient proposés par l'employeur chez des clients de la société.
- l'indemnité de requalification qui ne peut être inférieure au dernier salaire mensuel perçu avant la saisine de la juridiction, doit être limitée à la somme de 283,08 euro, montant de l'indemnité versée au mois d'avril 2011 en contrepartie du respect de la clause de non-concurrence, cette indemnité ayant la nature d'une indemnité compensatrice de salaire.
- la clause de non-concurrence peut être modifiée au cours du contrat de travail, et même dans le cadre d'un accord transactionnel.
Cette clause de non-concurrence, limitée dans le temps et l'espace, était justifiée par la nécessité de protéger l'intérêt légitime de la société de limiter le risque de concurrence déloyale de la part du salarié ou de son nouvel employeur, dans le marché du travail intérimaire, qui est concurrentiel. Mme Benavent était en contact direct avec la clientèle et a développé un lien important tant avec les intérimaires que les potentiels employeurs.
Il s'agit d'un secteur très concurrentiel puisqu'il y avait en 2011 17 agences de travail temporaire sur Narbonne.
La contrepartie financière correspond aux prescriptions de l'accord national collectif applicable, et n'est donc pas dérisoire.
Mme Benavent conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a requalifié le contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, mais sollicite que l'indemnité qui lui est allouée à ce titre soit portée à 3 000 euro, à la confirmation du jugement s'agissant de son licenciement économique, mais à sa réformation sur le montant des dommages intérêts, et à ce qu'il lui soit alloué 20 000 euro de dommages intérêts de ce chef, à l'infirmation du jugement entrepris, s'agissant la clause de non-concurrence et sollicite 12 000 euro à titre de dommages intérêts pour nullité de la clause de non-concurrence.
Elle fait essentiellement valoir que :
- le jugement doit être confirmé en ce qui concerne la requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, en l'absence d'indication de tout motif de recours à ce type de contrat, le salaire de référence à prendre en considération étant le dernier salaire perçu avant la fin de la relation contractuelle. Il y a lieu de lui allouer une indemnité de 3 000 euro à ce titre.
- son licenciement était abusif, l'employeur, qui n'a proposé aucune offre de reclassement de quelque nature que ce soit au sein du groupe, ni des autres sociétés dont il dispose n'ayant pas respecté son obligation de reclassement.
En outre le motif indiqué dans la lettre de licenciement est erroné, la diminution du chiffre d'affaire indiquée n'étant pas conforme à la réalité, plusieurs des sociétés du groupe ayant vu au contraire leur chiffre d'affaire augmenter, la volonté de faire des économies ne constituant pas en elle-même un motif de licenciement économique.
- la clause de licenciement, signée à peine six mois avant la mise en place de la procédure de licenciement, n'était pas nécessaire à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, Mme Benavent étant une simple assistante d'agence.
En outre elle ne respecte pas l'article 7.4 de la convention collective en ce qu'elle ne précise pas les modalités de versement de la contrepartie financière, mais seulement leur montant.
Enfin l'employeur n'en a payé que partiellement le montant, sans préciser les modalités de calcul, et sans tenir compte des congés payés.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives des parties, la cour se réfère au jugement du conseil de prud'hommes et aux conclusions écrites auxquelles elles se sont expressément rapportées lors des débats.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la requalification des contrats de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée
Les deux contrats de travail à durée déterminée en date du 1er juin 2004, puis du 25 août 2004 ne comportent pas les motifs pour lesquels l'employeur a eu recours à cette mesure.
Il y a donc lieu de requalifier ces deux contrats successifs en contrat à durée indéterminée.
Aux termes de l'article L. 1245-2 du Code du travail, Mme Benavent est de ce fait en droit de prétendre à une indemnité ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.
Cette disposition, fixant une limite impérative, s'entend du salaire lui-même, et non des indemnités compensatrices de salaire, telles que la contrepartie financière d'une clause de non-concurrence.
Par ailleurs, Mme Benavent ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à allouer une indemnité d'un montant supérieur à un mois de salaire.
Le jugement du Conseil de prud'hommes de Narbonne sera donc confirmé en ce qu'il a alloué à Mme Benavent à ce titre une indemnité égale à un mois de salaire, soit 1 743,04 euro.
Sur le licenciement
Lorsque l'employeur invoque un motif économique pour rompre le contrat de travail, la lettre de licenciement doit énoncer à la fois la raison économique qui fonde sa décision et ses conséquences précises sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié.
Celui-ci ne peut au surplus intervenir que si le reclassement du salarié dans l'entreprise ou, le cas échéant, dans le groupe auquel appartient l'entreprise, est impossible.
Les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l'intérieur du groupe parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.
En l'espèce, le gérant de la société Mas Narbonne, M. Mascarell, s'est borné à adresser aux seules sociétés qui, au sein de son groupe exerçaient également dans le secteur du travail temporaire une lettre circulaire en date du 17 janvier 2011, rédigée en des termes identiques pour chacune des sociétés consultées, et signé de son nom, dans laquelle il précisait le nom de la salariée, et sa qualification.
Ces sociétés, dont il était également le gérant, lui ont répondu entre le 20 et le 31 janvier qu'il n'y avait aucun poste disponible, étant observé que l'ensemble de ces lettres de réponses étaient également signées par M. Mascarell, qui en était également le gérant.
Aucune offre de reclassement n'a été formalisée, l'allégation selon laquelle Mme Benavent aurait refusé de travailler ailleurs qu'à Narbonne ou chez un client de la société reposant seulement sur des conversations qui auraient été tenues au sein de l'agence, rapportées par des salariées.
En outre l'employeur ne justifie d'aucune démarche envers les autres sociétés du groupe dont il était également le gérant, en indiquant que leurs activités étaient très différentes de celle de la société Mas Narbonne et exigeaient - des compétences très différentes de celles exigées d'une assistante d'agence temporaire - (conclusions, page 23), sans préciser en quoi il n'y aurait pas eu dans ces sociétés des postes similaires, compte tenu que le poste d'assistante d'agence représente, selon lui "l'échelon de base au sein de la hiérarchie de la société" (conclusions, page 21).
Il en résulte que, peu important que le motif économique allégué soit ou non établi, l'employeur n'ayant pas exécuté de manière loyale son obligation de reclassement, le licenciement économique doit être considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse, et donc abusif.
Le jugement du Conseil de prud'hommes de Narbonne sera donc confirmé en ce qu'il a dit ce licenciement abusif.
Il sera par contre réformé en ce qui concerne le préjudice, autrement évalué.
Compte tenu de son ancienneté, de son âge (32 ans) au moment du licenciement, et des circonstances de cette rupture, Mme Benavent est en droit de prétendre à des dommages intérêts qu'il y a lieu de fixer à la somme de 20 000 euro.
Sur la clause de non-concurrence
Une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives.
L'exigence de contrepartie financière à la clause de non-concurrence répond à l'impérieuse nécessité d'assurer la sauvegarde de l'effectivité de la liberté fondamentale d'exercer une activité professionnelle.
Le respect par un salarié d'une clause de non-concurrence illicite lui cause nécessairement un préjudice dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue.
En l'espèce le contrat de travail de Mme Benavent, qui n'était que l'une des deux assistantes de l'agence de Narbonne, indique seulement qu'elle exercera les fonctions d'assistante d'agence, mais comprend une annexe "Définition de poste" de laquelle il résulte qu'il lui était notamment dévolu une action commerciale ainsi définie :
- 1) ACTION COMMERCIALE
Participation au développement et à la fidélisation de la clientèle de l'agence, notamment par :
- la qualité de l'accueil et des contacts téléphoniques ; la réalisation d'actions de prospection ; suivi clientèle ;
- la prise de commandes ;
- les relances de règlement ou autres tâches décidées par le chef d'agence ; le placement en entreprise (...).
Il était également prévu des tâches de "gestion du personnel", et des tâches de "gestion administratives et comptables".
Si les tâches ainsi définies impliquaient, comme le fait valoir l'employeur des relations avec les clients, employeurs de main d'œuvre d'intérim, celle-ci se limitaient ainsi pour l'essentiel à des fonctions d'exécution et de suivi.
L'employeur fait lui-même valoir que les fonctions d'assistante d'agence "représente[ent] l'échelon de base dans la hiérarchie au sein de la société" (conclusions, page 21), et que "un employeur qui envisage le licenciement d'une assistante d'agence ne peut se voir reprocher de ne pas lui avoir proposé un poste vacant de conseiller aux demandeurs d'emploi, ou de responsable d'agence, par exemple, qui sont des postes de catégories supérieure à celui d'assistante d'agence" (conclusions, page 19).
En outre, la rémunération modeste de Benavent qui percevait en dernier lieu un salaire horaire de 1 395,36 euro brut, hors heures supplémentaires et prime d'ancienneté, démontre le caractère subalterne des tâches qui lui étaient dévolues.
Dès lors, compte tenu de la spécificité de cet emploi, une clause qui lui interdisait, comme précédemment indiqué "de s'intéresser directement ou indirectement, en qualité de salarié ou non, à quelque titre que ce soit, à une entreprise de travail temporaire concurrente", non seulement dans l'Aude mais également dans les départements limitrophes, même pour une durée limitée à deux ans, l'empêchait par l'étendue de l'interdiction ainsi formulée de retrouver un emploi conforme à son expérience professionnelle.
Une telle clause n'était pas indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise Mas Narbonne et était donc nulle.
Le respect par la salariée de cette clause nulle l'a limitée dans sa recherche d'emploi et lui a causé un préjudice qu'il y a lieu de réparer par l'attribution d'une somme de 5 000 euro à titre de dommages intérêts.
Par ces motifs : LA COUR, Confirme le jugement rendu le 14 septembre 2011 par le Conseil de prud'hommes de Narbonne en ce qu'il a requalifié les contrats de travail à durée déterminée du 7 juin 2004 puis du 6 décembre 2004 en contrat à durée indéterminée et alloué à Mme Benavent la somme de 1 743,04 euro au titre de l'indemnité de requalification, Dit le licenciement économique de Mme Bénavent abusif, ainsi que sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens, L'Infirme pour le surplus, et statuant à nouveau : Condamne la société Mas Narbonne, prise en la personne de son représentant légal à payer à Mme Benavent : - 20 000 euro de dommages intérêts pour licenciement abusif, - 5 000 euro de dommages intérêts, au titre de la clause de non-concurrence nulle, - 1 500 euro en cause d'appel, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Déboute les parties de toute autre demande, Condamne la société Mas Narbonne aux dépens.