Cass. crim., 5 novembre 1985, n° 84-93.318
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bruneau
Rapporteur :
M. Bonneau
Avocat général :
M. Dontenwille
Avocat :
Me Vuitton
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par X Ingmar contre un arrêt de la Cour d'appel de Reims, chambre correctionnelle, en date du 8 juin 1984 qui, pour envoi d'objet sans demande préalable, l'a condamné à 1 mois d'emprisonnement avec sursis et 3 000 francs d'amende ; - Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles R. 40, 12e du Code pénal, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné X à un mois d'emprisonnement avec sursis et 3 000 francs d'amende pour infraction à l'article R. 40-12 réprimant les ventes par envoi forcé ;
"aux motifs que d'une part l'article R. 40, 12e du Code pénal concerne tous ceux qui auront fait parvenir un objet quelconque à un destinataire sans qu'une distinction soit faite entre un particulier et une société ou une autre entreprise ; que d'autre part adopter la position de X qui - pour soutenir que le troisième élément indispensable de l'infraction n'existerait pas - invoque le défaut de lettre proposant au destinataire, soit l'acceptation du colis, soit son renvoi à l'expéditeur, reviendrait à ne pas sanctionner celui qui réalise pire que l'envoi forcé accompagné d'une lettre, savoir un envoi dont le destinataire ignorera tout jusqu'au moment où il aura payé ;
"alors que d'une part le droit pénal étant d'interprétation stricte, l'arrêt attaqué ne pouvait déclarer l'infraction réalisée après avoir constaté que le troisième élément constitutif imposé par le Code pénal, à savoir la lettre offrant une option à l'acquéreur, n'était pas réalisé en l'espèce ;
"alors que d'autre part l'article R. 40-12 réprime la vente par envoi forcé, c'est-à-dire l'envoi d'un objet non commandé et proposé pour acquisition au destinataire qui peut soit accepter et payer soit refuser et renvoyer l'objet ; que ce texte ne vise nullement l'envoi d'échantillons par un fabricant à d'autres entreprises sans la moindre obligation à la charge de ces dernières, pour faire connaitre sa production et éventuellement susciter des commandes ;
"alors enfin que l'arrêt attaqué a omis de répondre aux conclusions du demandeur qui soulignait que les bénéficiaires de ses envois lui avaient été indiqués par les services postaux étrangers dans le cadre d'abonnements souscrits par eux pour des parutions annuelles concernant la publicité par correspondance, ce qui impliquait un état de demande permanente exclusive des dispositions de l'article R. 40-12e ;
" sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles R. 40-12° du Code pénal, 3 alinéa 1 du Code civil, 485, 593 et 693 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné X à un mois d'emprisonnement avec sursis et 3 000 francs d'amende pour contravention à l'article R. 40-12° interdisant la vente par envoi forcé ;
"aux motifs que cet article concerne tous ceux qui auront fait parvenir un objet quelconque à un destinataire, sans qu'une distinction soit faite entre un particulier et une société ou autre entreprise ;
"alors que la cour ne pouvait, au regard de la territorialité des lois pénales et de la protection du destinataire recherchée par l'article R. 40-12°, s'abstenir de répondre aux conclusions rappelant que les sociétés destinataires étaient situées à l'étranger dans des pays où de tels envois étaient autorisés ;
Les moyens étant réunis ; - Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que X, commerçant, a adressé à une société commerciale établie aux Pays-Bas, contre remboursement, sans demande préalable de cette entreprise, un colis de parfums ; que le colis a été délivré, contre paiement, à la société destinataire ;
Attendu que sur plainte de celle-ci, X a été poursuivi du chef d'envoi d'objet sans demande préalable ; que pour écarter le moyen de défense présenté par le prévenu, selon lequel à ce colis, n'était jointe aucune lettre offrant au destinataire la possibilité d'opter pour l'acceptation ou le renvoi du colis, et qu'ainsi faisait défaut l'un des éléments constitutifs de la contravention prévue par l'article R. 40-12° du Code pénal, la cour d'appel énonce qu'adopter cette position reviendrait à ne pas sanctionner un comportement plus répréhensible que l'envoi forcé accompagné d'une lettre et déclare X coupable de l'infraction reprochée ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a nullement encouru les griefs allègués ; qu'en effet, les documents remplis, sur le territoire français, par l'expéditeur d'un envoi contre remboursement, remis ensuite par lui aux services postaux en même temps que l'objet, puis présentés au destinataire en vue de lui permettre d'exercer son choix entre la remise contre paiement, ou le refus, constituent la correspondance, définie à l'article précité, indiquant que l'objet peut être accepté contre versement du prix ou renvoyé à son expéditeur ;
Qu'il n'importe au surplus, en raison de la généralité des termes de ce texte, que le destinataire soit un particulier, ou une société commerciale ; d'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Rejette le pourvoi