Cass. com., 12 février 2013, n° 12-11.860
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
NDT expert (GIE)
Défendeur :
Visuol technologies (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
Mme Mouillard
Avocat général :
M. Carre-Pierrat
Avocat :
Me Le Prado
LA COUR : Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 15 novembre 2011), que la société Techlab, devenue par la suite la société Visuol technologies, ayant pour activité la métrologie optique de champ, soit la science de la mesure sans contact avec les surfaces, a développé une technologie portable d'analyse de forme par stéréo-corrélation, permettant la mesure des formes tridimensionnelles d'un objet à partir d'une paire d'images stéréoscopiques ; qu'en août 2003, elle a réalisé pour le compte du GIE NDT expert (ci-après le GIE), qui s'était déclaré intéressé par son produit dans le cadre de la détection des défauts sur les carlingues d'avion, une étude de faisabilité d'un système de mesure 3D portable par stéréocorrélation d'images, pour laquelle elle a conçu un prototype qu'elle lui a remis aux fins d'essais ; qu'ayant constaté la faisabilité technique du projet, le GIE a rédigé un cahier des charges des spécifications attendues, à la suite de quoi la société Visuol technologies lui a adressé une "offre technique et commerciale" pour l'acquisition d'un autre prototype, qu'il a acceptée et qui lui a été facturée le 5 août 2004 ; qu'après une réunion qui s'est tenue le 19 octobre 2004 afin de définir les conditions de finalisation du produit et d'envisager les termes d'une coopération pour sa commercialisation, le GIE a établi en novembre suivant une convention intitulée "principes de partenariat et contrat de recherche", qui devait encadrer les futures négociations contractuelles sur l'exploitation commune de l'appareil et fixer les droits et obligations respectifs des parties quant à la communication de l'exploitation des recherches menées par la société Visuol technologies pour son compte ; que cette convention n'a pas été signée ; qu'ayant découvert ultérieurement que le GIE avait mis sur le marché, sous la dénomination de "Shapeview", un produit voisin de celui qu'elle avait conçu, la société Visuol technologies l'a fait assigner en concurrence déloyale par imitation d'un produit et pillage de technologie ;
Attendu que le GIE fait grief à l'arrêt de retenir qu'il a commis des actes constitutifs de parasitisme et de lui faire interdiction en conséquence de commercialiser le produit alors, selon le moyen : 1°) qu'est seule constitutive d'un acte de parasitisme la volonté de se placer dans le sillage d'autrui afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire ; qu'il est constant qu'ont été régulièrement cédés par la société Visuol technologies, sans stipulation plus précise, deux prototypes réalisés à la demande et suivant un cahier des charges établi par le GIE ; qu'à cette occasion ont été nécessairement transmises les informations confidentielles relatives aux caractéristiques initiales du produit ; que par suite, ne saurait constituer un acte de concurrence déloyale le développement, sur la base de prototypes ainsi acquis, d'un instrument commercialisable ; qu'en retenant néanmoins un acte de parasitisme, sans préciser dans quelle mesure le savoir-faire invoqué par la société Visuol technologies était resté confidentiel, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 2°) que le défaut de réponse à conclusion équivaut à un défaut de motif ; que le GIE faisait valoir dans ses écritures que les contrats de cession de prototype devaient être qualifiés de contrats de recherche impliquant nécessairement le transfert d'informations confidentielles ; qu'en se contentant d'affirmer que le savoir-faire de la société Visuol technologies n'avait pas été cédé avec les prototypes, sans se prononcer sur la qualification de ces contrats et sans répondre aux écritures du GIE, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; 3°) que le parasitisme, qui consiste à se placer dans le sillage d'autrui pour tirer un profit parasitaire de son activité, suppose l'établissement d'un acte de déloyauté constitutif d'une faute ; que le GIE, qui s'était porté acquéreur des deux prototypes réalisés à sa demande, avait souligné dans ses écritures que la rupture des relations contractuelles entre les parties ne lui était pas imputable, ce que la cour d'appel a expressément admis ; qu'en estimant toutefois que le GIE avait commis un acte de parasitisme sans constater l'existence d'un comportement déloyal qui lui aurait permis d'exploiter ce savoir-faire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.
Mais attendu que l'arrêt relève que, selon l'expert, la société Visuol technologies a réalisé deux prototypes, pour parvenir à intégrer dans un appareil de mesure le système de stéréo-corrélation tout en l'adaptant à des contraintes techniques transversales à plusieurs disciplines (optique, calibration, acquisition, synchronisation), de sorte que son travail ne peut être assimilé à la simple mise en œuvre d'un principe technique public, et que le "Shapeview" est une évolution directe des prototypes ainsi mis au point, se situant dans la continuité des améliorations que la société Visuol technologies avait apportées entre le premier et le second, et dont elle avait vérifié la faisabilité ; qu'il ajoute, répondant par là-même aux conclusions prétendument omises, que le GIE, qui n'avait acquis que ces deux prototypes, n'était pas en droit, à ce stade des rapports contractuels, de revendiquer la propriété du savoir-faire développé par la société Visuol technologies, dont la réalité n'est pas contestable ; qu'il en déduit qu'en utilisant les plans ou le projet que cette dernière avait établis à l'occasion de leurs relations contractuelles ou précontractuelles, le GIE a commis des actes de parasitisme ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont il ressort que le GIE a indûment tiré profit des efforts et du savoir-faire développé par la société Visuol technologies, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.