CA Paris, Pôle 1 ch. 3, 19 février 2013, n° 12-13415
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Delta Airlines Inc. (Sté)
Défendeur :
Go Voyages (SAS), Go Voyages Trade (SAS), Edreams France (EURL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Bourquard
Conseillers :
Mmes Taillandier-Thomas, Maunand
Avocats :
Mes Boccon-Gibod, Meslay-Caloni, Régnier, Teissonnière
Le 19 avril 2012, la société Delta Airlines Inc., société de droit américain, a procédé au retrait de la nomination du groupe d'agences de voyage Odigeo dont font partie les sociétés Go Voyages, Go Voyages Trade et Edreams France.
Par ordonnance réputée contradictoire du 29 juin 2012, le juge des référés du Tribunal de commerce de Paris a dit que l'annonce du retrait par la société Delta Airlines Inc. des agréments des sociétés Go Voyages, Go Voyages Trade et Edreams France constituait un dommage imminent qu'il convenait de prévenir, en conséquence, lui a ordonné de maintenir les agréments des sociétés Go Voyages et Go Voyages Trade pour vendre des produits et services Delta Airlines jusqu'au 31 décembre 2012, sous astreinte de 2 000 euro par jour de retard à compter de la signification de la décision pendant 30 jours, passé lequel délai, il serait à nouveau fait droit, lui a ordonné de maintenir l'agrément de la société Edreams France pour vendre des produits et services Delta Airlines jusqu'au 31 octobre 2012, sous astreinte de 2 000 euro par jour de retard à compter de la signification de la décision pendant 30 jours, passé lequel délai, il serait à nouveau fait droit, a dit que la décision serait caduque si les demanderesses n'avaient pas placé d'assignation au fond avant le 30 septembre 2012 et a condamné la défenderesse au paiement de la somme de 4 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions reçues par la cour le 14 janvier 2013, la société Delta Airlines Inc., appelante de cette décision, demande, in limine litis, de dire et juger l'assignation introductive d'instance nulle, de prononcer la nullité de l'ordonnance entreprise, à titre subsidiaire, de dire n'y avoir lieu à référé, d'infirmer l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau, de débouter les intimées de toutes leurs demandes nouvelles par rapport à celles formulées en première instance et de les condamner solidairement à lui payer la somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions reçues par la cour le 8 janvier 2013, les sociétés Go Voyages, Go Voyages Trade et Edreams France demandent de débouter l'appelante de sa demande de nullité de l'acte introductif d'instance et de l'ordonnance entreprise, de lui ordonner de rétablir leurs agréments jusqu'à ce que le Tribunal de commerce de Paris, saisi le 26 septembre 2012, se prononce au fond et ce, sous astreinte, de 2 000 euro par jour de retard à compter de la signification de l'"ordonnance à intervenir", sauf décision contraire des juges du fond ou accord différent des parties, et de condamner la société Delta Airlines Inc. à leur payer la somme respective de 9 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
SUR CE, LA COUR
Sur le rejet des conclusions de l'appelante :
Considérant que par conclusions de procédure reçues par la cour le 15 janvier 2013, les intimées sollicitent le rejet des conclusions de l'appelante régularisées le 14 janvier 2013 ainsi que des pièces n° 28 à 31 communiquées le même jour au motif qu'elles ont été dans l'impossibilité d'y répondre avant l'ordonnance de clôture prononcée le 15 janvier 2013 ;
Considérant que par conclusions en réponse sur l'incident reçues par la cour le 18 janvier 2013, l'appelante conclut au débouté de cette demande ;
Considérant qu'il résulte de la comparaison des termes des conclusions du 14 janvier 2013 de la société Delta Airlines Inc. avec ceux de ces précédentes en date du 8 janvier 2013 qu'elle n'y fait que répondre aux écritures des intimées en date du 8 janvier 2013 sans formuler de demande nouvelle ou de moyen nouveau ; qu'il n'y a pas lieu, en conséquence, de les rejeter ; que les nouvelles pièces n° 28 à 31 qu'elles a communiquées le même jour seront, en revanche, écartées des débats faute d'avoir pu faire l'objet d'un débat contradictoire ;
Sur la nullité de l'assignation :
Considérant que la société Delta Airlines Inc. fait valoir que la signification le 26 juin 2012 de l'assignation introductive d'instance pour l'audience du 29 juin 2012 effectuée à l'adresse de sa succursale en France, laquelle ne constitue pas son lieu d'établissement, est irrégulière, que le déférencement des intimées a été décidé par sa direction située <adresse> où se trouve son siège social, que la lettre du 19 avril 2012 a été adressée depuis ce siège comme toutes les correspondances qui ont suivi, que c'est à cette adresse que le groupe Odigeo lui a écrit pour contester sa décision, que le litige est sans lien avec sa succursale de Roissy, que la signification n'a pas été effectuée, en outre, entre les mains d'un des représentants de celle-ci figurant sur son Kbis, qu'elle n'a été ni présente ni représentée à l'audience, qu'elle n'a eu connaissance de la procédure que postérieurement au prononcé de la décision, que le personnel de la succursale n'a pu mesurer en temps utile les conséquences d'un retard dans la transmission de l'assignation au siège, qu'en toute hypothèse, l'acte n'étant accompagné d'aucune traduction en anglais, ce dernier n'aurait pu en comprendre la teneur avant l'audience, qu'il y a eu violation du principe du contradictoire et que cet acte est nul ;
Considérant que les intimées répondent que l'assignation a été délivrée auprès de l'établissement principal mentionné sur l'extrait Kbis et doté d'une activité commerciale, qu'il importe peu que ce litige se rattache à cet établissement ou non, que l'assignation a été délivrée à une personne habilitée à cet effet, que l'appelante ne peut se prévaloir d'une communication tardive de l'assignation à sa direction due au manque de diligence du personnel de son établissement français et qu'elles n'auraient jamais pu l'assigner aux États-Unis dans un délai de quelques jours pourtant justifié par l'imminence de leur dommage ;
Considérant qu'aux termes de l'article 690 du Code de procédure civile, la notification destinée à une personne morale de droit privé est faite au lieu de son établissement ;
Considérant qu'il résulte de l'extrait Kbis délivré, le 7 juin 2012, par le greffe du Tribunal de commerce de Bobigny que la société de droit étranger Delta Airlines Inc., ayant son siège <adresse>, est immatriculée en France au registre du commerce et des sociétés avec pour activité la fourniture de services relatifs à l'exploitation de lignes aériennes et pour adresse de son établissement principal <adresse> ;
Considérant que c'est à cette adresse de son établissement principal français que l'acte introductif d'instance lui a été signifié, le 26 juin 2012, pour l'audience du 29 suivant ; que cet acte est, en conséquence, régulier au regard des dispositions réglementaires susvisées, peu important qu'elle ait son siège social aux Etats-Unis et que la décision litigieuse, destinée à s'appliquer en France à des sociétés y ayant leur siège et dont l'activité d'agences de voyage est en rapport avec les services visés dans son objet social, ait été prise par sa direction américaine ;
Considérant que l'article 654 alinéa 2 prévoit que la signification à une personne morale est faite à personne lorsque l'acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier, ou à toute autre personne habilitée à cet effet ;
Considérant, en l'espèce, que l'acte a été remis à Mme Christine Dieuzade, superviseur, ayant déclaré être habilitée à recevoir l'acte ; que l'huissier n'avait pas à vérifier l'exactitude de cette déclaration ; que la signification est dès lors régulière ;
Considérant que l'exception de nullité de l'assignation du 26 juin 2012 sera, en conséquence, rejetée ;
Sur la nullité de l'ordonnance entreprise :
Considérant que l'appelante soulève la nullité de l'ordonnance entreprise pour défaut de motivation ;
Considérant que l'article 455 du Code de procédure civile énonce que le jugement doit être motivé ;
Considérant, en l'espèce, que l'ordonnance est ainsi motivée :
"Nous relevons que la société défenderesse ne comparaît pas ni ne se fait représenter lors de l'appel de l'affaire à 12 h 30. Que dès lors elle ne présente aucune contestation ou remarque alors qu'elle a reçu l'assignation.
En conséquence, il apparaît de l'examen des pièces versées aux débats et des explications fournies à la barre, que l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; il convient, en conséquence, de faire doit à la demande, en statuant ainsi qu'il suit.
Nous dirons néanmoins que la présente décision sera caduque si les demanderesses n'ont pas placé d'assignation au fond avant le 30 septembre 2012." ;
Considérant qu'en se déterminant ainsi au seul motif que la défenderesse ne comparaissait pas et au seul visa de pièces dont il n'a pas fait l'analyse, le premier juge n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 susvisé ; que sa décision doit, en conséquence, être annulée ; qu'en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, la cour doit néanmoins statuer au principal ;
Au principal :
Considérant que l'appelante fait valoir que les conditions de l'article 873 du Code de procédure civile ne sont pas réunies, qu'en première instance, les intimées ont demandé la prolongation du préavis ce qui constitue un acquiescement au principe de la résiliation, qu'elles ne se prévalent plus d'un dommage imminent devant la cour, qu'il n'y a pas non plus de trouble manifestement illicite en l'absence de référencement sélectif, que le déférencement est permis à tout moment, conformément aux usages applicables dans le secteur du transport aérien qui sont de surcroît codifiés et reconnus mondialement, que le préavis respecté en l'espèce est conforme à ces usages, que la part de chiffre d'affaires réalisée avec elle par les intimées est infime (1 %) et qu'elles ne peuvent se prévaloir, en conséquence, d'une perte de clientèle ;
Considérant que les intimées répondent qu'il existe un trouble manifestement illicite résultant du caractère discriminatoire de la décision de l'appelante, qu'elles sont des agents accrédités par l'International Air Transport Association (Iata), que celle-ci a mis en place un système de distribution sélective, que l'appelante a agréé l'ensemble des agents accrédités Iata, qu'elles sont les seules agences opérant sur la marché français à avoir été déférencées, que cette décision est de nature, en outre, à leur causer un dommage imminent, qu'elles sont privées de tous les vols commercialisés sous le nom de Delta Airlines, qu'elle vont subir une perte irrémédiable de clientèle, qu'il existe également un risque conséquent quant aux contrats de partenariat conclus avec Go Voyage et de dépréciation de leur image, qu'il y a subsidiairement un trouble illicite lié à la rupture brutale des relations commerciales établies, que la durée de celles-ci justifiait un préavis plus long que celui de deux mois qui leur a été accordé et qu'enfin, en ne notifiant pas à la société Edreams France un nouveau préavis de résiliation au 31 octobre 2012, l'appelante a violé l'article 13.2 du contrat d'agence Iata ;
Considérant qu'aux termes de l'article 873 alinéa 1er du Code de procédure civile, sur lesquels les intimées fondent leur demande, la juridiction des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ;
Considérant que le trouble manifestement illicite désigne toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit ;
Que le dommage imminent s'entend du "dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer" et le trouble manifestement illicite résulte de "toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit" ;
Qu'il s'ensuit que pour que la mesure sollicitée soit prononcée, il doit nécessairement être constaté, avec l'évidence qui s'impose à la juridiction des référés, l'imminence d'un dommage, d'un préjudice ou la méconnaissance d'un droit, sur le point de se réaliser et dont la survenance et la réalité sont certaines, qu'un dommage purement éventuel ne saurait donc être retenu pour fonder l'intervention du juge des référés ; que la constatation de l'imminence du dommage suffit à caractériser l'urgence afin d'en éviter les effets ;
Considérant, en l'espèce, que par courrier du 19 avril 2012 adressé au groupe Odigeo, la société Delta Airlines Inc. a signifié la résiliation, à compter du 31 mai 2012, de l'agrément du siège social et de toutes les succursales d'Edreams et Go Voyages de vendre des produits et services Delta et ce en application de l'article 13 de la Résolution 824 du Contrat d'Agence de Vente de Passages Iata ;
Considérant que par courrier du 16 mai 2012, la directrice juridique du groupe Odigeo lui a répondu en contestant tant la résiliation que le délai de préavis appliqué ;
Considérant que par lettre du 29 mai 2012, la société Delta Airlines Inc. a informé le groupe "qu'en raison de défaillances techniques et administratives du GDS Amadeus qui ont échappé au contrôle de Delta et qui ont limité Edreams et Go Voyages dans l'émission de billets Delta pendant une certaine période à compter du courrier du 19 avril 2012", elle reportait la date de prise d'effet de la résiliation au 30 juin 2012 ;
Considérant que c'est dans ces conditions, que les agences françaises d'Edream et de Go Voyages ont introduit leur procédure en référé aux fins d'obtenir le maintien de leurs agréments pour vendre les produits et services Delta Airlines jusqu'au 30 avril 2013 pour les sociétés Go Voyages et jusqu'au 31 octobre 2012 pour la société Edream, sauf décision contraire des juges du fond ou accord différend des parties, et que l'ordonnance entreprise a fait droit à leur demande la limitant toutefois, s'agissant des sociétés Go Voyages, au 31 décembre 2012 ;
Considérant que suite à cette décision, par lettre du 25 septembre 2012, la directrice juridique du groupe Odigeo a demandé à la société Delta Airlines Inc. si elle entendait maintenir sa décision de résilier les agréments des intimées ;
Considérant que par acte d'huissier du même jour, les sociétés Go Voyages, Go Voyages Trade et Edreams France ont fait assigner la société Delta Airlines Inc., au fond, devant le Tribunal de commerce de Paris aux fins de voir déclarer la décision de retrait de leurs agréments nulle et subsidiairement réparer leurs préjudices avec désignation d'un expert pour évaluer ceux-ci ;
Considérant que la société Delta Airlines Inc. a répondu, le 9 octobre 2012, au groupe Odigeo qu'elle avait fait appel de l'ordonnance et qu'elle expliquerait sa position sur la résiliation des agréments devant la cour ainsi que dans le cadre de cette procédure au fond parallèlement intentée ;
Considérant que par courrier du 31 octobre 2012, la société Delta Airlines Inc. a confirmé au groupe Odigeo qu'elle avait respecté l'ordonnance entreprise et que conformément à celle-ci, elle confirmait le retrait de l'agrément d'Edreams France et la résiliation du contrat Iata au 31 octobre 2012 ;
Considérant qu'en appel, aux termes du dispositif de leurs conclusions qui seul détermine les prétentions des parties et au vu duquel la cour doit statuer, les intimées modifient leurs demandes initiales en sollicitant cette fois-ci le rétablissement de leurs agréments jusqu'à ce que le Tribunal de commerce de Paris se prononce sur le caractère qu'elles qualifient de "discriminatoire" de la décision de retrait prise par l'appelante ;
Considérant qu'elles prétendent que ce caractère discriminatoire constituerait un trouble manifestement illicite ; que la discrimination résulterait du fait que la société Delta Airlines Inc. a déposé une déclaration d'agrément général Europe Moyen-Orient Afrique de l'ensemble des agents accrédités Iata et qu'elles seules, opérant sur le marché français, ont fait l'objet d'un déférencement pour des raisons qui ne lui ont été fournies par l'appelante que dans ses écritures devant la cour et qui n'apparaissent pas - selon elles - justifiées ;
Considérant, toutefois, que les contrats d'agence de vente de passages Iata signés par les intimées prévoient en leur article 13 qu'ils seront résiliés en conformité avec la réglementation des agences de vente si notamment le transporteur procède au retrait de la nomination de l'agent ; que l'article 13.2 du contrat énonce que l'avis de résiliation du contrat peut être notifié en tout temps, que sauf indication contraire, telle que spécifiée dans la réglementation des agences de vente, la résiliation prendra effet au plus tôt le dernier jour du mois suivant celui où elle aura été notifiée et que cette notification devra mentionner la date à laquelle la résiliation prendra effet, sous réserve de l'exécution par chacune des parties de la totalité des obligations leur incombant avant la date de résiliation ;
Considérant que le droit du transporteur aérien de procéder au retrait de la nomination d'un agent accrédité Iata est donc prévu contractuellement dans le système de distribution sélective Iata ; que les intimées ne contestent pas la conformité de ce système au droit européen mais font valoir que ce dernier exigeant une procédure d'accréditation non discriminatoire, le retrait de leur agrément par l'appelante les discrimine ; qu'il ne serait être procédé, cependant, à un tel raccourci entre la procédure d'accréditation Iata, d'une part, et la nomination appelée encore agrément par le transporteur, d'autre part, sauf à interdire à ce dernier de revenir sur sa décision nonobstant la prohibition de tout engagement perpétuel et les dispositions prévues par le système Iata lui-même ou à exiger de lui qu'il déférence l'ensemble des agents accrédités Iata de la même zone ; que la cour ne peut considérer, dans ces conditions, avec l'évidence exigée en référé que le retrait de l'agrément est en soi discriminatoire ; qu'il appartiendra aux seuls juges du fond de se prononcer sur ce point ainsi que sur la caractère prétendument injustifié des raisons invoquées par l'appelante à l'appui de sa décision, à savoir l'intérêt économique moindre des intimées compte tenu des coûts qu'elles lui imputent et qui figurent parmi les plus élevés et leur opacité tarifaire ; que l'appréciation de cette motivation requiert une appréciation excédant les pouvoirs du juge des référés ; que le trouble allégué de ce chef n'est pas manifestement illicite ;
Considérant que les intimées prétendent encore que le retrait de leur agrément est de nature à leur causer une perte irrémédiable de clientèle puisqu'elles ne peuvent plus vendre les vols directement commercialisés sous le nom de Delta Airlines, qu'elles vont avec leurs sites partenaires perdre automatiquement la clientèle intéressée par le prix le moins cher lorsque celui-ci sera proposé par l'appelante, la clientèle privilégiant les vols directs lorsque l'appelante sera la seule compagnie à les proposer, la clientèle portant une attention particulière aux horaires de vols lorsque l'appelante proposera les plus adaptés ainsi que la clientèle qui privilégie la société Delta Airlines Inc. et qu'elles vont également subir une perte de partenariat et un préjudice d'image ;
Considérant, toutefois, qu'outre le fait qu'il n'est pas démontré, ainsi qu'il a été dit plus haut, que le dommage imminent allégué est illégitime et réparable comme procédant d'un comportement fautif de l'appelante, il n'est pas non plus établi ; que les intimées ne versent, en effet, aux débats aucune pièce propre à en établir la réalité et la certitude ; qu'elles produisent bien un document établi par elles-mêmes sur le nombre de billets d'avion Delta Airlines Inc. qu'elles ont vendus et le chiffres d'affaires en résultant depuis 2009 ; que le dossier de l'appelante comporte, cependant, de son côté une pièce (n° 17) dont il résulte que les intimées font moins de 1 % de leur chiffre d'affaires en vendant ses produits ; que ces dernières ne le contestent pas ; que le dommage allégué n'est, en conséquence, aucunement significatif ; que les intimées admettent elles-mêmes, par ailleurs, qu'il leur est impossible de quantifier de manière certaine l'impact de la décision en termes de pertes de parts de marché ; que le dommage n'est, en conséquence, de ce chef qu'hypothétique ; qu'il n'y a pas, en conséquence, de dommage imminent justifiant l'intervention du juge des référés ;
Considérant que les intimées invoquent, à titre subsidiaire, un trouble manifestement illicite lié à la rupture brutale des relations commerciales établies avec l'appelante ; qu'elles invoquent les dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce selon lesquelles engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au registre du commerce de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels ; qu'elles prétendent que les sociétés Go Voyages et Go Voyages Trade entretiennent des relations commerciales avec la société Delta Airlines Inc. depuis plus de 20 ans et la société Edreams France depuis 12 ans, que la résolution Iata 824 ne prévoit qu'un préavis minimum d'un mois sous réserve d'une durée plus longue prévue par le droit applicable et que le droit français prévoit un préavis plus long devant tenir compte de la durée des relations commerciales ; qu'elles soutiennent qu'en l'espèce, le délai aurait dû être au minimum de 12 mois pour les sociétés Go Voyages et de 6 mois pour la société Edreams France ;
Considérant, toutefois, que les intimées ne tirent pas la conséquence juridique qui s'impose de cette argumentation puisqu'elles ne demandent pas, à titre subsidiaire en appel, le maintien de leurs agréments jusqu'au 30 avril 2013 pour les sociétés Go Voyages et 31 octobre 2012 pour la société Edreams France ; qu'il sera observé, au demeurant, que la durée de préavis prévu par l'article 13.2 du contrat d'agence de vente de passages Iata a été respecté puisque la décision notifiée le 19 avril 2012 a pris effet le dernier jour du mois suivant, soit le 31 mai 2012 ; que ce délai a, ensuite, été prolongé, même si c'est pour des raisons techniques, au 30 juin 2012 ; que de facto, suite à la décision entreprise, la société Edreams France a bénéficié du délai de préavis de 6 mois qu'elle réclame jusqu'au 31 octobre 2012 et les sociétés Go Voyage d'un délai de 8 mois jusqu'au 31 décembre 2012 ; qu'il appartiendra aux juges du fond d'ores et déjà saisis d'apprécier, le cas échéant, alors que les contrats d'agence de vente de passages Iata remontent au 14 janvier 1998 pour la société Go Voyages, au 15 mars 2012 pour la société Go Voyages Trade et au 1er avril 2009 pour la société Edreams France, si la durée des relations contractuelles exigeait un préavis plus long que celui dont elles ont bénéficié ; que là-encore le trouble manifestement illicite allégué pour rupture brutale des relations commerciales n'est pas caractérisé ;
Considérant que les intimées font encore valoir que la société Delta Airlines Inc., en maintenant l'agrément de la société Edreams France jusqu'au 31 octobre 2012, a renoncé de ce fait au préavis qu'elle lui avait notifié en avril 2012 et que sa nouvelle notification de résiliation en date du 31 octobre 2012 ne respecte pas le délai de préavis minimum prévu par l'article 13.2 de la Résolution Iata 824 ;
Considérant, toutefois, que l'exécution provisoire de l'ordonnance entreprise étant de droit, aucune renonciation de la part l'appelante à la résiliation notifiée le 19 avril 2012 ne saurait être déduite de son exécution ;
Considérant que c'est encore vainement que les intimées invoquent in fine les dispositions de l'article 873 alinéa 2 du Code de procédure civile aux termes duquel dans tous les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ; qu'en effet, aucune obligation de la société Delta Airlines Inc. non sérieusement contestable de maintenir ou rétablir l'agrément des intimées n'est démontrée ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, en conséquence, à référé ;
Considérant que les intimées qui succombent supporteront les entiers dépens et verseront à l'appelante la somme précisée au dispositif du présent arrêt au titre des frais irrépétibles ;
Par ces motifs : Reçoit les conclusions de l'appelante en date du 14 janvier 2013 ; Écarte, en revanche, les pièces n° 28 à 31 communiquées par l'appelante ; Rejette l'exception de nullité de l'assignation introductive d'instance ; Annule l'ordonnance entreprise ; Statuant en vertu de l'effet dévolutif de l'appel : Dit n'y avoir lieu à référé ; Condamne les sociétés Go Voyages, Go Voyages Trade et Edreams France à verser à la société Delta Airlines Inc. la somme de 6 000 (six mille) euros au titre de l'application de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne la société Delta Airlines Inc. aux entiers dépens.