CA Reims, ch. civ. sect. 1, 2 octobre 2012, n° 10-03398
REIMS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Marcandier (SA)
Défendeur :
Renault (SAS), Losch
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Hascher
Conseillers :
Mmes Hussenet, Dias Da Silva Jarry
Avocats :
SCP Delvincourt, Caulier Richard, SCP Genet Braibant, Mes Manni, Nakache, Six, Raffin
La société Marcandier a fait appel le 20 décembre 2010 d'un jugement rendu le 22 juin 2010 par le Tribunal de grande instance de Reims qui a prononcé la résolution de la vente du véhicule Renault acquis d'occasion auprès d'elle par Mme Corinne Losch qui doit le lui remettre contre restitution du prix outre intérêts au taux légal à compter du 17 juin 2009, a condamné l'appelante à verser à Mme Corinne Losch la somme de 7 641,70 euros à titre de dommages et intérêts outre intérêts au taux légal à compter du jugement, dont à déduire les sommes déjà versées à titre provisionnel, condamné la société Renault à garantir la société Marcandier pour les dommages et intérêts. Par conclusions du 28 avril 2011, la société Marcandier demande d'infirmer le jugement, de dire que la société Renault devra la garantir de toutes condamnations et payer à Mme Corinne Losch une somme de 14 156 euros outre intérêts au taux légal à compter du 17 juin 2009, de condamner la société Renault aux dépens et à lui verser une somme de 4 000 euros au titre de l' article 700 du Code de procédure civile.
Dans ses conclusions du 22 novembre 2011, la société Renault demande de débouter la société Marcandier et Mme Corinne Losch de leurs prétentions, de condamner solidairement celles-ci à lui payer la somme de 3 000 euros en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Madame Corinne Losch a conclu le 5 septembre 2011 à la restitution du véhicule à la société Renault, à la condamnation de cette dernière et de la société Marcandier à lui payer une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu'elle subit du fait de la privation de jouissance et de la perte d'usage du véhicule, une somme de 1 017,53 euros, outre le coût d'une batterie, soit 175,17 euros, au titre des sommes engagées pour les interventions successives des garages, une somme de 449,58 euros au titre du remboursement des frais de garage, enfin la somme de 6 350,29 euros au titre des frais d'immobilisation. Elle conclut encore à la condamnation in solidum de la société Renault et de la société Marcandier à lui payer une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
SUR CE LA COUR :
Considérant que Mme Corinne Losch a acquis le 2 août 2006 un véhicule Renault ayant un kilométrage de 85 946 Kms auprès de la société Marcandier moyennant un prix de 14 156 euros et a souscrit une garantie contractuelle de six mois, que suite à divers incidents entre août et mars 2007, une expertise amiable a eu lieu, puis une expertise judiciaire ordonnée en référé ;
Considérant que la société Renault dit que lorsque le bien est facilement réparable, comme en l'espèce, où selon une note technique diffusée en 2005, le remplacement simultané des injecteurs du véhicule suffit, il n'y a pas de vice caché, le bien n'étant pas impropre à l'usage auquel il est destiné, elle ajoute que les garagistes qui sont intervenus sur le véhicule de Mme Corinne Losch n'ont pas appliqué la méthodologie prescrite et sont seuls responsables ;
Considérant que le rapport d'expertise judiciaire conclut que "les désordres affectant le véhicule existaient en germe et n'étaient pas apparents au moment de la vente susvisée. Ils concernent le défaut de fabrication des injecteurs connu du constructeur" (p.26 du rapport), "antérieurement à juin 2005, date à laquelle la note technique confidentielle 4557 A a été éditée" (p.22 du rapport) et établit que "la coupure moteur qui survient sans signe avant-coureur provoque des arrêts intempestifs et rend bien évidement le véhicule impropre à un usage en sécurité" (p.19 du rapport) ;
Considérant que la garantie des vices cachés, constitue un prolongement de l'obligation de délivrance du vendeur d'un bien apte à l'usage auquel l'acheteur le destine, que tel n'était pas le cas du véhicule acquis par Mme Corinne Losch en août 2006, le rapport d'expertise amiable soulignant encore qu''il est affecté d'un vice caché dont la teneur n'est à ce jour pas définie mais serait situé au niveau des injecteurs (p.3 du rapport) ;
Que la garantie ne joue toutefois pas si les conséquences du vice sont facilement réparables comme le soutient la société Renault, mais que le défaut affectant le véhicule acheté par Mme Corinne Losch avait des conséquences suffisamment graves qui troublent l'usage normal de la voiture achetée, celle-ci ayant alors la possibilité de rendre le véhicule et de se faire restituer le prix, la vente entre la société Marcandier et Mme Corinne Losch étant ainsi anéantie ;
Considérant que Mme Corinne Losch déclare disposer d'une action directe contre la société Renault en tant que fabricant de son véhicule qui est affecté d'un vice caché résultant d'un défaut de construction, qu'elle ne peut obtenir restitution du prix par la société Marcandier ensuite de sa dissolution, et elle demande la condamnation in solidum de cette dernière avec la société Renault à lui restituer la somme de 14 156 euros contre remise au constructeur du véhicule ;
Considérant que lorsque la résolution de la vente est demandée, plusieurs vendeurs ne peuvent pas être condamnés in solidum à la restitution du prix, car celle-ci doit avoir pour contrepartie la remise de la chose, ce qui ne peut être effectué qu'entre les mains d'un seul, que le jugement ayant condamné la société Marcandier à restituer le prix à Mme Corinne Losch contre remise du véhicule est confirmé ;
Considérant que Mme Corinne Losch demande de réparer intégralement son préjudice, fixant à la somme de 15 000 euros son préjudice moral, la privation de jouissance et la perte d'usage de son véhicule, le remboursement des frais de garage pour 449,58 euros et les frais d'immobilisation du véhicule pour 6 359,29 euros qu'elle ne rapporte toutefois pas la preuve d'un préjudice plus important que celui réparé par les premiers juges qui, avec les interventions successives des garages pour 1 017,03 euros et le coût d'une batterie pour 175,17 euros, a été fixé à la somme totale de 7 641,75 euros ;
Considérant que la société Marcandier soutient que la défaillance est due à un défaut de construction du véhicule dont elle n'était pas informée au moment de la vente car elle ne fait pas partie du réseau Renault, mais dont le constructeur en revanche avait bien conscience ;
Considérant qu'il n'est pas sérieusement contesté que la société Marcandier ne fait pas partie du réseau du constructeur Renault et n'avait pas connaissance de la note du constructeur de juin 2005 "n° 4557A confidentiel Renault", qu'elle ne pouvait donc informer au moment de la vente en août 2006 Mme Corinne Losch de l'existence du vice de construction révélé par l'expertise, mais que s'agissant d'un vendeur professionnel, elle est néanmoins censée connaître tous les vices de la chose et doit donc réparer le préjudice subi par Mme Corinne Losch ;
Considérant que la société Marcandier demande à bénéficier de la garantie de la société Renault, que le vendeur qui a garanti son acheteur peut à son tour se retourner contre les vendeurs successifs initiaux au regard d'une action récursoire, les sociétés Marcandier et Renault étant condamnées in solidum à payer à Mme Corinne Losch une somme de 7 641,75 euros, le jugement étant confirmé ;
Considérant que les sociétés Marcandier et Renault sont condamnée in solidum aux dépens et à verser à Mme Corinne Losch une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, leurs demandes à ce titre étant rejetées ;
Par ces motifs : Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Reims du 20 juin 2010, Condamne in solidum la société Marcandier et la société Renault à payer à Mme Corinne Losch une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette toute autre demande, Condamne in solidum la société Marcandier et la société Renault aux dépens avec application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.