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Décisions

CA Bordeaux, 1re ch. civ. A, 20 décembre 2012, n° 11-02193

BORDEAUX

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Allianz Iard (SA)

Défendeur :

Degail, Villeregnier, Gil, Auto Bilan Foyen (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Lafon

Conseillers :

MM. Sabron, Lippmann

Avocats :

SCP Delavallade - Gelibert - Delavoye, SCP Annie Taillard & Valérie Janoueix, SCP Le Barazer, D'Amiens, ASS Ciliento, SCP Gautier Fonrouge, Selarl Magret- Janoueix, SCP Michel Puybaraud, Mes Combeaud, Gallego, Picard, Robedat

TI Libourne, du 2 mars 2011

2 mars 2011

Exposé du litige

Par jugement du 2 mars 2011, auquel le présent arrêt se réfère pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, le Tribunal d'instance de Libourne a prononcé la résolution de la vente du véhicule Peugeot 406 immatriculé 7570 SD 33 intervenue entre Monsieur Villeregnier et Monsieur Degail le 1er mars 2007, a condamné Monsieur Villeregnier à payer à Monsieur Degail la somme de 5 500 euro assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement, a dit que contre paiement de cette somme, le véhicule devrait être restitué par Monsieur Degail à Monsieur Villeregnier, a condamné Monsieur Villeregnier à payer à Monsieur Degail la somme de 2 000 euro à titre de dommages et intérêts, a condamné la société Allianz à garantir Monsieur Degail de la totalité des sommes mises à sa charge, y compris celle relative à l'article 700 du Code de procédure civile, sous déduction de la franchise contractuelle de 1 500 euro, a condamné solidairement la société Allianz et Monsieur Villeregnier à payer à Monsieur Degail la somme de 1 500 euro, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, a rejeté les demandes plus amples ou contraires et a condamné la société Allianz et Monsieur Villeregnier aux dépens.

La société Allianz a relevé appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délais qui ne sont pas discutées.

Par dernières conclusions elle soutient à titre principal qu'elle ne garantit pas les conséquences de la résolution de la vente pour vices cachés ni de son annulation pour dol.

Elle demande en conséquence à la cour d'infirmer le jugement déféré, de débouter les parties de leurs demandes à son encontre et de condamner toute partie qui succombera à lui payer la somme de 4 000 euro, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle soutient à titre subsidiaire que le véhicule litigieux n'était pas affecté de vices cachés le rendant impropre à sa destination et qu'au surplus Monsieur Degail avait connaissance des traces de l'accident que le véhicule avait subi, de sorte que le défaut n'était pas caché.

Elle demande en conséquence à la cour de débouter Monsieur Degail de ses demandes, de prononcer sa mise hors de cause et de condamner toute partie succombant à lui payer la somme de 4 000 euro, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

A titre plus subsidiaire elle demande à la cour de condamner la société Auto Bilan Foyen, dont le contrôle technique était insuffisant, et Monsieur Gil, qui a vendu le véhicule litigieux à son assuré tout en connaissant le vice dont il était affecté, à la relever indemne de toute condamnation et de dire et juger qu'elle est en droit d'opposer à son assuré le montant des franchises contractuelles dans les conditions suivantes :

Dommages survenus après livraison du produit : 20 % de l'indemnité due avec :

- Dommages matériels et immatériels consécutifs : minimum 500 euro maximum 5 000 euro

- Dommages immatériels et frais de dépose - repose non consécutifs : minimum 1 500 euro maximum 8 000 euro'

Par dernières conclusions Monsieur Degail demande à la cour de confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions et de condamner en outre la société Allianz à lui payer la somme de 2 000 euro, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

A titre subsidiaire il demande à la cour de prononcer la nullité de la vente pour dol, d'ordonner la restitution du prix et de condamner Monsieur Villeregnier à lui payer la somme de 2 000 euro à titre de dommages et intérêts.

A titre plus subsidiaire il demande à la cour de condamner Monsieur Villeregnier à lui payer la somme de 3 000 euro au titre de son préjudice économique et des réparations devant être effectuées sur son véhicule.

A l'appui de ses prétentions Monsieur Degail soutient que le véhicule qu'il a acheté était déjà affecté d'un vice caché justifiant la résolution de la vente et la restitution consécutive du prix.

Monsieur Degail soutient qu'il a subi en outre un préjudice de jouissance du fait de l'immobilisation du véhicule et, faisant valoir que son vendeur était un professionnel, en déduit que celui-ci est tenu de réparer ce dommage par le versement d'une indemnité de 2 000 euro.

Monsieur Degail soutient à titre subsidiaire que son vendeur lui a caché l'importance des défauts du véhicule, se rendant ainsi coupable de dol, et en déduit que la vente doit être annulée.

A défaut de résolution de la vente, Monsieur Degail soutient qu'il serait néanmoins fondé à demander l'indemnisation, à hauteur de 3 000 euro, du préjudice économique résultant de la nécessité de réparer les défauts dont le véhicule était affecté avant la vente.

Par dernières conclusions Monsieur Villeregnier demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, de déclarer Monsieur Degail irrecevable en ses prétentions à son encontre, de le débouter de toutes ses demandes et de le condamner en outre à lui payer la somme de 3 000 euro, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

A titre subsidiaire il demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a mis Monsieur Gil hors de cause, de prononcer la résolution du contrat qu'il a conclu avec celui-ci, de le condamner à le garantir de toutes les condamnations prononcées à son encontre, ainsi qu'à lui payer la somme de 3 000 euro, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

A titre plus subsidiaire il demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Allianz à le garantir des sommes mises à sa charge, sous déduction de la franchise de 1 500 euro, d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la mise hors de cause de la société Auto Bilan Foyen, de condamner celle-ci à le relever indemne de toute condamnation prononcée à son encontre et de condamner enfin solidairement la société Allianz et la société Auto Bilan Foyen à lui payer la somme de 3 000 euro, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions Monsieur Villeregnier soutient qu'il n'est intervenu dans la vente litigieuse qu'en qualité de mandataire et en déduit que Monsieur Degail est irrecevable à agir à son encontre sur le fondement de la garantie légale contre les vices cachés.

Il soutient en outre que le véhicule n'était pas affecté d'un vice le rendant impropre à l'usage auquel il était destiné et que le défaut dont il était affecté était apparent, de sorte que Monsieur Degail ne peut prétendre à la garantie des vices cachés.

Il soutient encore qu'il ne peut lui être reproché une quelconque manœuvre dolosive, de sorte que Monsieur Degail doit être débouté de ses demandes de ce chef.

Il soutient par ailleurs que l'immobilisation du véhicule n'est pas lié au défaut, au demeurant apparent, dont le véhicule était affecté lors de la vente, de sorte que Monsieur Degail n'est pas fondé à demander l'indemnisation d'un trouble de jouissance pour vice caché, une telle indemnisation ne pouvant, en tout état de cause, porter sur une somme de plus de 2 000 euro.

Il soutient encore que Monsieur Gil connaissait lui-même le défaut dont le véhicule était affecté, de sorte que dans l'hypothèse où ce défaut serait considéré comme un vice caché entraînant la résolution du contrat de vente au profit de Monsieur Degail, le contrat qu'il a lui-même conclu avec Monsieur Gil devrait être résolu et celui-ci devrait alors être condamné à le garantir de toutes les sommes mises à sa charge.

A défaut, Monsieur Villeregnier soutient qu'il devrait être garanti par la société Allianz ainsi que par la société Auto Bilan Foyen qui n'a pas relevé les défauts du véhicule à l'issue du contrôle technique qu'elle était chargée d'effectuer.

Par dernières conclusions Monsieur Gil demande à la cour de confirmer le jugement déféré, de débouter la société Allianz et Monsieur Villeregnier de leurs demandes à son encontre et de les condamner chacun à lui payer la somme de 5000 euro, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions Monsieur Gil soutient qu'il n'a commis aucune faute et qu'il appartenait, le cas échéant, à Monsieur Villeregnier, professionnel, d'effectuer un examen approfondi du véhicule avant de le revendre, sachant qu'il connaissait lui-même la trace d'accident.

Par dernières conclusions la société Auto Bilan Foyen demande à la cour de confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions et de débouter la société Allianz de ses demandes à son encontre.

A l'appui de ses prétentions, la société soutient que le véhicule n'était pas affecté d'un vice caché le rendant impropre à son usage, qu'aucune manœuvre dolosive n'a été commise à l'encontre de Monsieur Degail et qu'elle n'a commis elle-même aucune faute de nature à justifier la mise en cause de sa responsabilité.

Motifs de la décision.

L'article 1641 du Code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

En l'espèce, selon les constatations de l'expert judiciaire, le véhicule avait subi, avant la vente du 1er mars 2007, un "violent choc sur le latéral gauche" (rapport p.7) qui avait fait l'objet d'une réparation sommaire.

Cependant, l'expert a estimé que ce défaut "n'était pas de nature à rendre la voiture impropre à son usage, ou en diminuer son usage, car Monsieur Degail a parcouru 20 650 km environ depuis son achat et (...) a déclaré être très satisfait de son utilisation jusqu'à son sinistre du 5 octobre 2007 (événement qui a suscité la découverte de la malfaçon)".

Il résulte de ces constatations techniques que le défaut dont le véhicule était affecté lors de la vente à Monsieur Degail ne le rendait pas impropre à l'usage auquel il est destiné.

Il ne diminuait pas davantage cet usage, dès lors qu'il a permis à son acquéreur de parcourir plus de 20 000 km dans des conditions que Monsieur Degail a jugé lui-même satisfaisantes.

Le fait qu'un nouvel accident ait rendu nécessaire de réparer les conséquences d'un premier accident réparé de façon sommaire ne saurait conduire à considérer que le défaut qui existait antérieurement à la vente rendait le véhicule impropre à l'usage auquel il était destiné, ou qu'il diminuait cet usage, dès lors qu'il résulte de l'expertise que ce seul défaut ne nuisait pas à l'usage normal du véhicule, qu'il n'avait d'ailleurs pas empêché Monsieur Degail de parcourir normalement plus de 20 000 km, qu'il n'est ni démontré ni même soutenu que ce défaut aurait dû être obligatoirement réparé à terme, de sorte qu'il est possible d'en déduire que si ce véhicule n'avait pas subi un nouvel accident, Monsieur Degail ne se serait pas trouvé dans l'obligation de remédier au défaut initial pour continuer d'user normalement du véhicule litigieux.

Il s'ensuit que le défaut dont le véhicule était affecté avant la vente ne justifie pas la résolution de cette vente pour vice caché ni, partant, l'indemnisation de Monsieur Degail pour trouble de jouissance.

Monsieur Degail ne saurait davantage conclure à la nullité de la vente pour dol, dès lors qu'il ne démontre pas que Monsieur Villeregnier, qui lui avait signalé les traces d'accident sur le latéral gauche, savait que le véhicule avait été réparé de façon sommaire, ce fait n'ayant pas été signalé dans le procès-verbal de contrôle technique du 27 février 2007 et n'ayant été révélé que par un examen approfondi effectué par l'expert judiciaire.

Monsieur Villeregnier qui a vendu à Monsieur Degail un véhicule d'occasion en l'état, n'a commis aucune faute et n'est tenu à aucune garantie du fait qu'un nouvel accident oblige à présent l'acquéreur de procéder à des réparations importantes de sorte que Monsieur Degail ne saurait davantage demander une indemnisation au titre du coût de ces réparations.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions et de débouter Monsieur Degail de toutes ses demandes.

Il n'y a pas lieu en l'espèce de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Infirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions, Déboute Monsieur Degail de toutes ses demandes, Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, Condamne Monsieur Degail aux dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.