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Décisions

Cass. 1re civ., 13 février 2013, n° 11-27.967

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Bouchonnerie Jocondienne (Sté), Maaf assurances (Sté)

Défendeur :

Corticas Lamosel (Sté), Imperio Bonanca Companhia de Seguros (Sté), Sourdais (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pluyette

Avocats :

Me Le Prado, SCP Nicolay, de Lanouvelle, Hannotin

Orléans, du 22 sept. 2011

22 septembre 2011

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, pour les besoins de la mise en bouteille de sa cuvée 2001 de vin de Chinon, la société Sourdais a commandé à la société Bouchonnerie Jocondienne, des bouchons de liège ; qu'une partie de ces bouchons lui avait été livrée par la société de droit portugais Corticas Lamosel ; qu'à la suite de plaintes de clients signalant que le vin avait un goût de moisi, la société Bouchonnerie Jocondienne et son assureur, la société Maaf assurances, ont demandé en référé une expertise judiciaire qui a confirmé le vice des bouchons ; que la société Sourdais a assigné devant le Tribunal de commerce de Tours, le 16 octobre 2008, la société Bouchonnerie Jocondienne et son assureur, lesquels ont appelé en garantie, la société Corticas Lamosel et son assureur, la société Imperio Bonanca Companhia de Seguros ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société Bouchonnerie Jocondienne et la Maaf font grief à l'arrêt infirmatif attaqué de les renvoyer à mieux se pourvoir à l'égard des sociétés Corticas Lamosel et Imperio Bonanca Companhia de Seguros alors, selon le moyen, qu'une convention attributive de juridiction stipulée à l'initiative du vendeur ne s'applique que si elle a été acceptée par l'acheteur ; qu'en affirmant néanmoins, en l'absence de tout document contractuel versé aux débats à l'exception d'une facture comportant au verso les conditions générales de vente de la société Corticas Lamosel, que la société Bouchonnerie Jocondienne avait accepté la clause attributive de juridiction contenue dans ces conditions générales de vente, au motif inopérant que les parties entretenaient des relations commerciales suivies et que la société Bouchonnerie Jocondienne n'avait pas émis de protestation à l'égard de ces conditions de vente, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'acceptation de la clause par l'acheteur, a violé l'article 23 du Règlement (CE) du Conseil n° 44-2001 du 22 décembre 2000 ;

Mais attendu que l'arrêt, faisant application de l'article 23 du Règlement (CE) du 22 décembre 2000 (Bruxelles I) relève d'une part que les deux sociétés entretenaient des relations commerciales suivies bien avant la vente litigieuse, que d'autre part, la société Bouchonnerie Jocondienne avait elle-même versé aux débats les conditions générales de vente dans lesquelles figuraient la clause attributive de juridiction, la cour d'appel a pu en déduire que la clause lui était opposable ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le deuxième moyen : - Attendu que la Maaf fait grief à l'arrêt de la renvoyer à mieux se pourvoir à l'égard des sociétés Corticas Lamosel et Imperio Bonanca Companhia de Seguros alors, selon le moyen : 1°) que la clause attributive de juridiction incluse dans un contrat n'est pas opposable à un tiers qui ne l'a pas acceptée lors de la formation de ce contrat ; qu'en se bornant néanmoins à relever, pour déclarer opposable à la Maaf la clause attributive de juridiction contenue dans le contrat de vente conclu entre la société Bouchonnerie Jocondienne et la société Corticas Lamosel, que la Maaf ne tirait son droit à agir à l'encontre de la société Corticas Lamosel que de ce contrat et de sa subrogation future dans les droits de la société Sourdais, sans constater que la Maaf aurait accepté la clause attributive de juridiction dont se prévalait la société Corticas Lamosel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 23 du Règlement (CE) du Conseil n° 44-2001 du 22 décembre 2000 ; 2°) que la compétence dérivée de l'article 6.1 du Règlement (CE) du Conseil n° 44-2001 du 22 décembre 2000 n'a pas pour effet d'étendre la clause attributive de juridiction au co-défendeur qui ne l'a pas souscrite ; qu'en considérant néanmoins que la Maaf devait être renvoyée devant la juridiction portugaise, dès lors que celle-ci était compétente à l'égard de son assurée en application de la clause attributive de juridiction prévue au contrat de vente, bien que la Maaf n'ait pas accepté cette clause, la cour d'appel a violé les articles 6.1 et 23 du Règlement (CE) du Conseil n° 44-2001 du 22 décembre 2000 ;

Mais attendu que la clause attributive de juridiction contenue dans le contrat de vente passé entre la société Bouchonnerie Jocondienne et la société Corticas Lamosel fait partie de l'économie du contrat et s'impose à l'assureur de la société française ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen : - Vu l'article 1648 du Code civil, dans sa rédaction alors applicable ; - Attendu que, pour déclarer la société Sourdais recevable et bien fondée en son action en garantie des vices cachés à l'encontre de la société Bouchonnerie Jocondienne et son assureur, la cour d'appel a relevé que le nouvel article 1648 aux termes duquel l'action en garantie des vices cachés devait être intentée dans le délai de deux ans à compter de la découverte du vice, avait valeur interprétative du "bref délai" de l'ancien article 1648 et avait vocation à s'appliquer aux procédures en cours, peu important la date de découverte du vice ou la date de la vente ;

qu'en statuant ainsi, alors que le délai de deux ans substitué au bref délai de l'article 1648 du Code civil par l'ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005, n'est pas applicable aux contrats conclus avant son entrée en vigueur, la cour d'appel a violé par fausse application, le texte susvisé ;

Par ces motifs : Casse et annule, sauf en ce qu'il a renvoyé les sociétés Bouchonnerie Jocondienne, Maaf assurances et Sourdais à mieux se pourvoir à l'égard des sociétés Corticas Lamosel et Imperio Bonanca Companhia de Seguros, l'arrêt rendu le 22 septembre 2011, entre les parties, par la Cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Angers.