CA Aix-en-Provence, 8e ch. A, 22 septembre 2011, n° 09-06032
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Construction générale du bâtiment (SARL)
Défendeur :
Cap Janet Automobile (SAS), Nissan West Europe (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Schmitt
Conseillers :
Mmes Durand, Verdeaux
Avoués :
SCP Tollinchi Vigneron Tollinchi, SCP Boissonnet- Rousseau, SCP de Saint Ferreol-Touboul
Avocats :
Mes Arnault, Lo Pinto, Baillet, Serreuille, Bocquet
FAITS PROCÉDURE PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 3 août 2001 Cap Sicie Automobiles, concessionnaire Nissan, établissement secondaire de la société Cap Janet Automobile a vendu à la société Diac un véhicule Nissan Cabstar n° 350 AEX 83, loué à Monsieur Kadiri depuis le 14 septembre 2001 et acquis de la société CGB le 19 janvier 2004.
A la suite de problèmes persistants malgré des réparations effectuées le 21 juin 2004 par le garage Nissan Cap Sicie (problèmes de trous d'air, de freinage et forte odeur de gasoil), le véhicule, tombé en panne le 16 octobre 2004, affichant 59 510 km au compteur, a été pris en charge par la société Nissan Cap Sicie.
Le garage refusant de procéder aux réparations aux motifs que la garantie constructeur était expirée et que les pannes semblaient provenir d'un défaut d'entretien du véhicule, la société CGB a missionné amiablement le cabinet d'expertise Gallo aux fins d'examen du véhicule et de détermination des causes des désordres.
Au vu des conclusions du rapport établi le 29 novembre 2005 imputant les désordres mécaniques constatés "au défaut de fonderie du pignon de la pompe à vide reconnu par Nissan", et préconisant le changement standard du moteur, la société CGB a fait assigner les 8 et 9 août 2007 la société Cap Janet Automobile et la société Nissan France devant le Tribunal de commerce de Toulon en paiement de la somme de 7 221,28 euro au titre des réparations nécessaires, de celle de 18 163,62 euro correspondant au trouble de jouissance et de celle de 8 euro par mois depuis le 24 mai 2005 correspondant aux frais de gardiennage ;
Le 13 septembre 2007 le Tribunal d'instance de Toulon a constaté l'extinction de l'instance et de l'action introduite devant lui le 27 juin 2006 par la société CGB à l'encontre de la société Nissan France et de la société Cap Janet Automobile.
Par jugement du 12 mars 2009 la juridiction consulaire a :
Vu le jugement avant dire droit du 16 octobre 2008,
Vu le certificat délivré le 7 novembre 2008 par la Préfecture du VAR,
Constaté que la mutation administrative de la carte grise du véhicule Nissan 350 AEX 83 n'a été enregistrée en Préfecture du Var que le 28 novembre 2008,
Dit que la SARL CGB avait la jouissance du véhicule et qu'en conséquence elle avait qualité à agir,
Constaté que la société Civis n'est pas présente aux débats,
Rejeté les conclusions du rapport d'expertise du Cabinet Gallo,
Constaté que l'entretien préconisé par le constructeur Nissan n'a pas été effectué par son utilisateur sur le véhicule 350 AEX 83 ni au 30 000 km ni aux 40 000 km ni aux 50 000 km,
Dit que les dommages dont se plaint la société CGB sont en relation directe et exclusive avec ce défaut d'entretien,
Débouté en conséquence la SARL CGB de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées tant vers la SAS Cap Janet Automobile que la SAS Nissan West Europe,
Dit qu'il n'est pas nécessaire d'examiner les autres moyens de droit développés par les parties,
Reconventionnellement,
Ordonné à la SARL CGB d'enlever à ses frais le véhicule Nissan 350 AEX 83 se trouvant dans les locaux du garage Cap Sicie et ce, dans le mois du prononcé du jugement,
Condamné la société CGB à payer à la société Cap Janet Automobile les sommes de 2 000 euro pour procédure abusive, de 1 000 euro de dommages et intérêts, celle de 9.608 euro pour frais de gardiennage du 15 avril 2005 au 31 juillet 2008, outre intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, et celle de 1 500 euro par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamné la société CGB à payer à la société Nissan West Europe la somme de 1 500 euro par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Ordonné l'exécution provisoire du jugement,
Laissé les dépens à la charge de la société CGB.
Par acte du 30 mars 2009 la SARL CGB a interjeté appel de cette décision.
Par ultimes conclusions déposées et notifiées le 22 novembre 2010, tenues pour intégralement reprises, la société CGB demande à la cour de :
La recevoir en son appel,
La déclarer bien fondée,
Infirmer le jugement attaqué,
Statuant à nouveau,
Vu les dispositions de l'article 6-1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme,
Vu les articles 122, 395 et suivants du Code de procédure civile,
Vu les articles 1641,1604, 1787 du Code civil,
Vu le rapport d'expertise de Monsieur Gallo,
Vu les pièces versées aux débats,
Sur les fins de non-recevoir soulevées par la société Cap Janet,
Sur l'autorité de la chose jugée,
A titre principal,
et juger que le désistement d'action, qui emporte renonciation unilatérale au droit que l'action avait pour objet de mettre en œuvre entraîne ipso facto l'extinction de ce droit, doit résulter de la volonté claire et non équivoque de celui qui l'exprime de renoncer à l'action, et que tel n'est pas le cas du désistement de la société CGB qui s'était pourvue devant une juridiction incompétente, désistement notifié postérieurement à l'action aux mêmes fins engagée devant la juridiction matériellement compétente, ce désistement n'affectant que l'instance engagée et non l'action,
Rejeter la fin de non-recevoir tirée de l'opposabilité de la chose jugée,
A titre subsidiaire,
Dire et juger que les défendeurs ayant acquiescé au désistement ne pouvaient formuler de demandes reconventionnelles sur la base de la demande de la société CGB irrecevable ab initio,
Dire et juger qu'en effet le désistement produit immédiatement son effet extinctif de sorte que la juridiction saisie ne peut statuer sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts formée postérieurement au désistement,
Dire et juger que dans ces conditions c'est de manière injustifiée que les sociétés Nissan West Europe et Cap Janet se sont vues allouer des sommes à titre de réparation,
Condamner la société Cap Janet et la société Nissan West Europe à lui rembourser l'intégralité des sommes versées en exécution des causes du jugement querellé,
Dire et juger qu'en tout état de cause l'attitude de la société Cap Janet qui s'est gardée de soulever devant les premiers juges cette fin de non-recevoir et qui fait état d'un moyen nouveau pour la première fois en appel, doit être qualifiée de dilatoire et ouvre droit à dommages et intérêts,
La condamner à payer à la société CGB la somme de 5 000 euro à titre de dommages et intérêts,
Sur le défaut de qualité à agir,
Constater que l'intégralité des pièces versées aux débats et notamment le certificat de cession démontrent que la société CGB est propriétaire du véhicule Nissan objet du litige depuis le 19 janvier 2004, pour l'avoir acquis de la Diac,
Dire et juger que la société CGB justifie de sa qualité à agir,
Rejeter la fin de non-recevoir soulevée par la société Cap Janet,
Sur le fond,
Constater que la motivation du jugement est entachée d'un parti pris évident et que la formulation employée revêt un caractère injurieux et diffamant pour la SARL CGB,
Dire et juger qu'une telle motivation contraire à l'exigence d'impartialité édictée par l'article 6-1 de la CEDH équivaut à une absence de motivation de nature à justifier la censure du jugement,
Dire et juger que l'action diligentée par la SARL CGB ne revêt aucun caractère abusif ni préjudiciable de sorte que c'est de manière injustifiée que les premiers juges l'ont condamnée à payer les sommes de 2 000 euro pour recours abusif et celle de 1 000 euro à titre de dommages et intérêts,
Infirmer le jugement sur ces points,
Débouter la société Cap Janet de sa demande d'amende civile,
A titre principal, sur le fondement de l'article 1641 du Code civil,
Dire et juger que l'action en garantie des vices cachés a été diligentée à bref délai,
Dire et juger qu'en l'état de la reconnaissance implicite de responsabilité de la société Nissan West Europe la question de la recevabilité de l'action est sans objet,
Déclarer la société CGB recevable en son action en garantie des vices cachés,
Constater que la société Nissan West Europe et la société Cap Janet ont participé activement aux opérations d'expertise auxquelles elles ont été régulièrement convoquées de sorte que le rapport Gallo leur est opposable,
Constater que la cause du dysfonctionnement du véhicule de la SARL CGB est due à un défaut de plomberie du pignon de la pompe à vide,
Dire et juger que ce désordre est constitutif d'un vice caché,
Dire et juger que les conditions légales de la garantie des vices cachés sont réunies,
Constater que la société Nissan West Europe est responsable en qualité de constructeur,
Constater que le garage Cap Janet, représentant le garage Sicie, a manqué à son obligation de résultat en procédant à des réparations inutiles et en ne diagnostiquant pas l'origine des désordres,
Les condamner solidairement au paiement de la somme de 7 221,28 euro au titre des réparations nécessaires,
Les condamner solidairement à rembourser à la société CGB les frais de gardiennage courus du 24 mai 2005 au 6 avril 2009 ainsi que les frais de location d'un véhicule de remplacement s'élevant au 31 décembre 2006 à la somme de 18.163,62 euro,
Subsidiairement, si la cour estime l'action en garantie des vices cachés irrecevable et mal fondée,
Constater que le garage Cap Janet représentant le garage Cap Sicie a manqué à son obligation de résultat telle que prévue à l'article 1787 du Code civil,
Constater que la société Nissan West Europe a proposé de prendre en charge 50 % des frais de réparation,
Condamner solidairement la société Nissan West Europe et la société Cap Janet à payer à la société CGB la somme de 7 221,28 euro au titre des réparations nécessaires,
Les condamner solidairement à rembourser à la société CGB les frais de gardiennage courus du 24 mai 2005 au 6 avril 2009 ainsi que les frais de location d'un véhicule de remplacement s'élevant au 31 décembre 2006 à la somme de 18 163,62 euro,
A titre infiniment subsidiaire, si la cour estimait que l'action ne peut prospérer à l'encontre de la société Nissan West Europe,
Constater que la société Nissan Cap Janet représentant le garage Cap Sicie a manqué à son obligation de résultat telle que prévue à l'article 1787 du Code civil,
Condamner la société Nissan Cap Janet à payer à la société CGB la somme de 7 221,28 euro au titre des réparations nécessaires,
La condamner à rembourser à la société CGB les frais de gardiennage courus du 24 mai 2005 au 6 avril 2009 ainsi que les frais de location d'un véhicule de remplacement s'élevant au 31 décembre 2006 à la somme de 18 163,62 euro,
En tout état de cause,
Condamner tout succombant à lui payer la somme de 5 000 euro par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions responsives et récapitulatives déposées et notifiées le 10 novembre 2010, tenues pour intégralement reprises, la société Nissan West Europe, venant aux droits de la société Nissan France, demande à la cour de :
Vu les articles 1641 et suivants du Code civil,
Vu les articles 1648 et 1147 du Code civil,
Vu les articles L. 211-1 et suivants du Code de la consommation,
Confirmer le jugement en ce qu'il a dit :
que le document établi par le cabinet Gallo ne présentait pas toutes les conditions d'objectivité et d'impartialité et était de surcroît techniquement erroné,
que le véhicule en cause n'avait pas bénéficié d'un entretien conforme aux prescriptions du constructeur,
que la panne procédait directement du défaut d'entretien patent du véhicule conformément aux prescriptions du constructeur,
débouté par voie de conséquence la société CGB de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées contre la société Nissan West Europe,
reconventionnellement a condamné la société CGB au paiement de la somme de 1 500 euro par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Statuant à nouveau,
A titre principal,
Constater que la notion de bref délai s'applique en l'espèce,
Constater que l'acte interruptif à l'encontre de Nissan West Europe est constitué par l'assignation du 9 août 2007, la société CGB s'étant préalablement désistée de son instance et son action devant le tribunal d'instance, ce qui replace les parties dans la situation telle qu'elles étaient avant le procès et a pour conséquence que la prescription n'a jamais été interrompue,
Dire irrecevable l'action de la société CGB dirigée à l'encontre de la société Nissan West Europe, comme étant tardive au regard de l'article 1648 du Code civil,
En conséquence,
Débouter la société CGB de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Nissan West Europe,
Débouter la société Nissan Cap Janet de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la société Nissan West Europe,
A titre subsidiaire,
Considérer que la société CGB ne rapporte pas la preuve que la panne trouve son origine dans un prétendu défaut caché,
Dire que le rapport Gallo ne présente pas toutes les conditions d'objectivité et d'impartialité que doit revêtir un document susceptible de constituer une preuve judiciaire et est de surcroît lapidaire et techniquement infondé,
Dire que n'est pas rapportée la preuve de l'existence d'un défaut antérieur à la première mise en circulation du 14 septembre 2001 à l'origine de la panne présentant une gravité extrême ne pouvant être réparé,
En conséquence,
Débouter la société CGB de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Nissan West Europe,
Débouter la société Nissan Cap Janet de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la société Nissan West Europe,
Considérer que la garantie légale de conformité est insusceptible de s'appliquer le contrat ayant été conclu avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 17 février 2005,
Considérer que l'obligation de délivrance conforme est insusceptible de s'appliquer le véhicule livré correspondant à celui commandé,
Prendre acte que la société CGB dans ses dernières écritures n'entend plus se prévaloir de tels fondements juridiques,
Dire que les dispositions de l'article 1147 du Code civil ne concernent pas Nissan West Europe qui n'a pas la qualité de réparateur de véhicules, alors même que la garantie contractuelle constructeur est insusceptible de s'appliquer en l'espèce,
En conséquence,
Débouter la société CGB de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Nissan West Europe,
Débouter la société Nissan Cap Janet de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la société Nissan West Europe,
Dire que la société CGB est seule à l'origine des prétendus préjudices dont elle réclame l'indemnisation, auxquels la société Nissan West Europe est étrangère,
Dire que la société CGB bénéficie d'un contrat de protection juridique souscrit auprès de la société Civis, qui a à ce titre assumé les frais de la présente procédure et n'est pas présente aux débats,
En conséquence,
Débouter la société CGB de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Nissan West Europe,
Débouter la société Nissan Cap Janet de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la société Nissan West Europe,
En toute hypothèse,
Condamner la société CGB à lui payer une somme de 4 000 euro par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions avec appel incident, déposées et notifiées le 10 novembre 2010, tenues pour intégralement reprises, la SAS Cap Janet Automobile demande à la cour de :
Vu le jugement de désistement d'instance et d'action du Tribunal d'instance de Toulon du 13 septembre 2007,
Vu les articles 1641 et suivants du Code civil,
Vu les articles 16, 32-1, 122, 696 et 700 du Code de procédure civile,
Sur son appel incident,
Faire droit à l'ensemble de ses conclusions en ce compris ses nouvelles demandes reconventionnelles,
Infirmer le jugement mais uniquement dans les dispositions suivantes :
Déclarer irrecevable l'action de CGB,
Prononcer en conséquence une fin de non-recevoir à son encontre
Condamner CGB à lui payer les frais de gardiennage à hauteur de 8 euro par jour entre le 6 octobre 2004 et le 9 avril 2009, majorés des intérêts au taux légal à compter de la reddition du jugement,
Condamner la société CGB au paiement de la somme de 5 000 euro à titre de dommages et intérêts pour recours abusif devant la cour, ainsi que la somme de 3 000 euro au titre d'amende civile et celle de 5 000 euro par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Sur le fond,
Confirmer partiellement le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les conclusions du rapport d'expertise Gallo et débouté la SARL CGB de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées envers la SAS Cap Janet Automobile,
En tout état de cause,
Débouter les sociétés CGB et Nissan France de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre,
Condamner la société CGB au paiement d'une somme de 7 000 euro à titre de dommages et intérêts pour recours abusif, incluant celle de 2 000 euro déjà allouée en première instance,
La condamner à une amende civile de 3 000 euro,
Condamner CGB à lui payer les frais de gardiennage à hauteur de 8 euro par jour entre le 6 octobre 2004 et le 9 avril 2009, majorés des intérêts au taux légal à compter de la reddition du jugement,
La condamner au paiement de la somme de 5 000 euro par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
La condamner aux entiers dépens,
Condamner tout contestant aux dépens.
Par jugement du 12 avril 2011 le Tribunal de commerce de Toulon a rétracté le jugement du 17 janvier 2011 ayant prononcé le redressement judiciaire de la société CGB après avoir constaté qu'elle n'était pas en état de cessation des paiements et l'a remise in bonis.
L'affaire a été clôturée en l'état le 1er juin 2011.
MOTIFS
Sur les fins de non-recevoir opposées par les intimées :
En ce qui concerne la qualité à agir de la société CGB :
Attendu que la société CGB est propriétaire depuis le 19 janvier 2004 du véhicule Nissan Cabstar objet du litige, pour l'avoir régulièrement acquis de la société Diac comme en attestent les pièces produites, (duplicata produit en original du certificat de cession signé de la Diac et comportant son timbre humide, photocopie du chèque de paiement établi par la société CGB à la Diac, attestations d'assurance du véhicule), et ce, nonobstant la circonstance que le transfert au nom de la société CGB de la carte grise, document administratif, n'ait été réalisé qu'en 2008 ;
Attendu que la société CGB, propriétaire du véhicule, avait en conséquence qualité à agir en garantie des vices cachés à l'encontre des distributeurs, vendeurs dudit véhicule ;
En ce qui concerne l'autorité de la chose jugée :
Attendu que la société CGB s'est désistée à l'audience du 13 septembre 2007 de l'instance en garantie des vices cachés introduite devant le Tribunal d'instance de Toulon le 27 juin 2006 à l'encontre de la société Nissan France ;
Attendu que ce désistement est survenu après qu'elle ait saisi les 8 et 9 août 2007 le Tribunal de commerce de Toulon, juridiction compétente, des mêmes demandes à l'encontre des mêmes parties ;
Attendu qu'ayant ainsi clairement manifesté, de manière non équivoque son intention de poursuivre l'action en garantie des vices cachés à l'encontre des mêmes parties devant la juridiction compétente, ce désistement formulé à l'audience ne pouvait être qu'un désistement d'instance, et non d'action comme noté dans le jugement ;
Attendu qu'à tout le moins celui-ci est entaché d'équivoque faisant obstacle à l'autorité de la chose jugée revendiquée par la société Cap Janet ;
Attendu que la société Cap Janet ne s'y était d'ailleurs pas trompée, n'ayant soulevé cette fin de non-recevoir pour la première fois qu'en cause d'appel ;
Attendu qu'il s'ensuit que cette fin de non-recevoir sera écartée ;
En ce qui concerne la prescription de l'action en garantie des vices cachés :
Attendu que l'action en garantie des vices cachés de la société CGB est soumise à l'exigence du "bref délai" de l'article 1648 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 17 février 2005, le contrat de cession ayant été conclu en 2001 avant l'entrée en vigueur de ce texte ;
Attendu que le point de départ de ce délai ne court qu'à compter de la découverte par l'acheteur du vice et de ses conséquences, se situant en l'espèce au jour de la remise du rapport Gallo soit du 29 novembre 2005, au vu duquel la société CGB a connu de manière certaine le vice affectant le véhicule nécessitant de remplacer le moteur ;
Attendu qu'en vertu de l'ancien article 2244 du Code civil alors en vigueur, la citation en justice signifiée à celui que l'on veut empêcher de prescrire interrompt la prescription ainsi que les délais pour agir ;
Attendu qu'en application de l'ancien article 2247 du Code civil alors applicable, si l'assignation est nulle pour vice de forme ou si le demandeur se désiste de sa demande, l'interruption est regardée comme non avenue ;
Attendu en premier lieu que la société CGB ne s'étant désistée de l'instance introduite devant le Tribunal d'instance de Toulon qu'après avoir saisi le Tribunal de commerce de Toulon des mêmes demandes, ce désistement intervenu en raison de l'incompétence de la juridiction civile ne permet pas de regarder l'interruption de la prescription comme non avenue ;
Attendu en second lieu que l'assignation à comparaître devant le tribunal d'instance a été délivrée à la requête de la CGB à la société Nissan France, dont le siège social est à Trappes 78194, "représentée par son agent local la société Nissan Cap Sicie dont le siège social est à Toulon cedex" c'est-à-dire à une adresse qui n'était pas celle de son siège social ou de l'un de ses établissements mais celle d'un tiers concessionnaire qui ne la représentait pas dans la procédure ;
Attendu que la nullité des notifications est régie par les dispositions des articles 112 et suivants du Code de procédure civile ;
Attendu que l'irrégularité affectant l'assignation du 27 juin 2006 constitue un vice de forme dont la société Nissan France, qui a constitué avocat et a disposé du temps suffisant pour faire valoir ses droits, ne démontre pas qu'il lui ait causé de grief, étant relevé que devant le Tribunal de commerce de Toulon la société Nissan France ne s'est pas prévalue de la nullité de l'assignation ;
Attendu au surplus que la société CGB a dénoncé la procédure à la société Nissan France le 28 décembre 2006 régularisant ainsi le vice de forme affectant l'assignation initiale ;
Attendu que la nullité de l'assignation pour vice de forme ne pouvant être retenue, l'assignation du 27 juin 2006 a interrompu le bref délai de l'article 1648 du Code civil ;
Attendu que la société CGB a agi dans les 7 mois de la découverte du vice, après avoir saisi son assurance défense recours du problème, soit dans le bref délai alors exigé ;
Attendu en conséquence que la fin de non-recevoir tiré de la tardiveté de l'action sera écartée comme non fondée ;
Sur le rapport du Cabinet Gallo :
Attendu que le Cabinet Gallo a été missionné amiablement par la société CGB pour examiner le véhicule en panne déposé depuis octobre 2004 dans les ateliers du garage Cap Sicie Automobiles ;
Attendu que si le rapport établi par l'expert amiable ne peut avoir valeur d'expertise, le juge peut s'y référer à titre d'élément d'information et de comparaison avec les autres éléments éventuellement produits, dès lors qu'il a été versé régulièrement aux débats, soumis à la libre discussion des parties et contradictoirement débattu ;
Attendu que lors de la première réunion d'expertise étaient présents Monsieur Kadiri pour la société CGB, Monsieur Lhuissier pour la société Nissan France, Monsieur Ciotti chef d'atelier du garage Cap Sicie et Monsieur Gensollen expert, du cabinet Gallo ;
Attendu que la société Nissan a proposé de prendre en charge le contrôle de la pompe à vide et des injecteurs ainsi que la dépose de la culasse pour qu'un diagnostic puisse être posé ;
Attendu qu'il a été procédé par l'expert aux opérations de démontage de la culasse le 1er août 2005 en présence de Monsieur Martin, chef d'atelier du garage Cap Sicie, puis le 25 août 2005 a été effectué un prélèvement d'huile moteur afin de vérifier sa teneur en limaille pour démontrer son pouvoir abrasif ;
Attendu que ces opérations ont été effectuées notamment au regard des explications de Nissan qui avait évoqué le 22 juillet 2005 un problème de suivi des réparations et des entretiens du véhicule ;
Attendu que la société Nissan France a été informée le 19 septembre 2005 par Monsieur Gallo des résultats des analyses de l'huile moteur et de ses conclusions sur la cause de la panne, à savoir : la pollution du circuit de lubrification suite à la détérioration du pignon de la pompe à vide, ainsi que sur la nature de la réparation préconisée, à savoir, le remplacement du moteur par échange standard ;
Attendu que la société Nissan France a répondu à l'expert par courrier du 15 novembre 2005 dans lequel elle déclarait contester ses conclusions considérant que la concentration de particules métalliques dans l'huile était "la conséquence d'un manque d'entretien, plus que d'une pollution due à l'usure de la pompe à vide" mais offrait, à titre commercial, une prise en charge de 50 % des pièces et main d'œuvre de la réfection du moteur ;
Attendu que les constatations quant à l'état du véhicule n'ont pas été critiquées par Nissan France ;
Attendu que la circonstance qu'elles aient été faites par Monsieur Gensollen, expert, membre de la SARL M G Expertises Auto Cabinet Michel Gallo et le rapport signé de Monsieur Gallo est sans incidence sur la régularité du rapport ;
Attendu que le "rapport Gallo" produit régulièrement aux débats, discuté entre les parties, leur est opposable ; qu'il sera en conséquence retenu comme élément d'information, et le jugement l'ayant rejeté pour cause d'impartialité du technicien, non établie, réformé ;
Sur la garantie du vendeur pour vice caché :
Attendu qu'il est constant et non contesté que le véhicule litigieux Nissan Cabstar était également concerné par le rappel effectué par la société Nissan France le 15 janvier 2003 au regard d'une "potentialité de vieillissement prématuré du tube d'alimentation en huile de la pompe à vide" pouvant provoquer la rupture de la pompe à vide et une fuite d'huile détériorant le moteur et que le pignon de la pompe à vide de ce véhicule a été changé par le garage Nissan à deux reprises dans le cadre de la garantie constructeur après ce rappel ;
Attendu que ni le lubrifiant, ni le filtre à lubrifiant n'ont été changés lors des rappels constructeur ;
Attendu que Monsieur Lhuissier, qui a assisté aux constatations du cabinet Gallo le 22 juillet 2005, écrivait à la société CGB que Monsieur Martin du garage Cap Sicie avait constaté une perte de compression sur l'ensemble des cylindres "laissant présager une usure prématurée du moteur" ;
Attendu que lors du démontage de la culasse moteur il est apparu que la poulie de la pompe à injection et la poulie de la pompe à vide étaient endommagées ;
Attendu que les résultats des prélèvements de l'huile moteur du véhicule mettent en évidence une présence métallique "sensible" constituée d'aluminium, de fer, de plomb, de molybdène, matières présentes dans les parties mobiles du moteur ;
Attendu que l'expert expose que le défaut de fonderie de la pompe à vide, reconnu par Nissan, entraîne une désagrégation du pignon de cette pompe et des dépôts métalliques abrasifs dans le carter d'huile moteur, les fines particules circulant via la pompe à huile, le filtre surchargé et le circuit de lubrification, détériorant les paliers d'arbre et l'étanchéité des cylindrées et entraînant une perte de compression ;
Attendu que ces conclusions ne sont pas formellement contestées par le constructeur qui soutient que les désordres sont la conséquence d'un défaut d'entretien du véhicule par la société CGB, "plus que d'une pollution due à l'usure de la pompe à vide" aux motifs que depuis 2002, celle-ci n'aurait plus confié au réseau Nissan l'entretien du véhicule ;
Attendu cependant que depuis janvier 2003 le véhicule, rappelé par le constructeur, a été confié au réseau Nissan a plusieurs reprises, (au moins deux), et que les travaux portant sur le changement du pignon de la pompe à vide pouvant détériorer le moteur, il lui appartenait de vérifier l'huile moteur ;
Attendu en outre que la société CGB affirme avoir effectué elle-même les vidanges de ses véhicules, et la société Nissan ne produit aucune étude des résultats des examens effectués par l'IESPM sur les prélèvements d'huile moteur établissant que ce lubrifiant ait été hors d'usage, inapte à sa fonction, ou ait présenté une mauvaise viscosité ;
Attendu qu'il s'ensuit que c'est à tort que les premiers juges ont imputé la cause des désordres affectant le véhicule à un défaut d'entretien du véhicule par la société CGT, alors qu'ils trouvent leur origine dans la malfaçon affectant la pompe à vide remplacée deux fois ;
Attendu que ce vice de construction existait antérieurement à la vente du véhicule ;
Attendu qu'il rend le véhicule impropre à sa destination, le changement standard du moteur étant indispensable à sa remise en route ;
Attendu que la responsabilité de la société Nissan West Europe, venant aux droits de la société Nissan France, distributeur vendeur, sera retenue en application de l'article 1641 du Code civil et cette société condamnée à en réparer les conséquences dommageables pour la société CGB ;
Sur l'obligation de résultat du garagiste réparateur :
Attendu que la responsabilité de la société Cap Janet Automobile est recherchée sur le seul fondement de l'article 1787 du Code civil en sa qualité de garagiste réparateur ;
Attendu que la responsabilité de la société Cap Janet Automobile ne sera pas retenue dès lors que la cause des désordres réside dans le vice caché affectant la pompe à vide et qu'il n'est pas démontré que dans le cadre de sa dernière intervention de juin 2004 il ait inspecté ou réparé cet organe défaillant ;
Sur la réparation des préjudices :
Attendu que le remplacement du moteur par échange standard a été chiffré à la somme de 7 221,28 euro ;
Attendu que la société Nissan West Europe sera condamnée au paiement de cette somme ;
Attendu que le véhicule ayant été immobilisé par suite de la résistance du vendeur à prendre en charge les réparations indispensables à la remise en état du véhicule remis au concessionnaire Cap Janet Automobile, la société Nissan West France sera condamnée à rembourser à la société CGB les frais de gardiennage réclamés par Cap Janet Automobile, sur justification du paiement par CGB des factures émises par la société Cap Janet Automobile à ce titre du 15 avril 2005 au 6 avril 2009, date de la reprise du véhicule ;
Attendu par ailleurs que la société CGB indique avoir été dans l'obligation de louer un véhicule de remplacement ;
Attendu qu'il lui sera alloué à ce titre la somme de 9.021,88 euro justifiée par les factures versées aux débats ;
Attendu que le contrat de crédit-bail souscrit pour les besoins de son activité un autre véhicule à compter de mai 2005, sans lien direct avec le litige, ne sera pas pris en compte ;
Attendu que les intérêts au taux légal seront dus à compter du 9 août 2007 date de l'assignation devant le tribunal de commerce, en application de l'article 1153-1 du Code civil ;
Attendu que les sociétés intimées seront condamnées à restituer à la société CGB les sommes reçues en exécution du jugement réformé, les intérêts au taux l égal courant à compter de la notification de la présente décision ouvrant droit à restitution ;
Sur les appels incidents :
Attendu que la société CGB sera condamnée à verser à la société Cap Janet les frais de gardiennage du 15 avril 2005 au 9 avril 2009 s'élevant à 8 euro par jour ;
Attendu que les demandes de la société CGB ne revêtant aucun caractère abusif la société Cap Janet Automobile sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts présentée de ce chef, ainsi que de celle en condamnation de l'appelante à une amende civile ;
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Attendu qu'il n'est pas contraire à l'équité que les sociétés Cap Janet Automobile et Nissan West Europe conservent la charge de leurs frais irrépétibles ;
Attendu que la société Nissan West Europe sera condamnée à verser à la société CGB une indemnité de 4 000 euro par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Attendu que la société Nissan West Europe, partie perdante, sera condamnée aux entiers dépens ;
Attendu que le jugement querellé sera réformé en toutes ses dispositions ;
Par ces motifs : LA COUR statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière commerciale, Réforme le jugement attaqué, Statuant à nouveau, Rejette l'intégralité des fins de non-recevoir opposées par la société Nissan West Europe, venant aux droits de la société Nissan France, et la société Cap Janet Automobile, Retient le rapport Gallo, régulièrement versé aux débats et discuté contradictoirement par l'intégralité des parties, en tant qu'élément d'information, Déclare l'action en garantie des vices cachés intentée à bref délai par la société CGB, propriétaire du véhicule litigieux recevable et bien fondée, Déclare la société Nissan West Europe, venant aux droits de Nissan France, distributeur vendeur, responsable du vice caché rendant le véhicule Nissan Cabstar n° 350 AEX 83 impropre à sa destination normale, Condamne en conséquence la société Nissan West Europe à payer à la société CGB la somme de 7 221,28 euro, coût du remplacement standard du moteur, ainsi que celle de 9.021,88 euro en réparation du préjudice de jouissance, outre intérêts au taux légal à compter du 9 août 2007, date de l'assignation, en application de l'article 1153-1 du Code civil, Condamne la société Nissan West Europe à rembourser à la société CGB les frais de gardiennage réclamés par Cap Janet Automobile, sur justification du paiement par CGB des factures émises par la société Cap Janet Automobile à ce titre du 15 avril 2005 au 6 avril 2009, date de la reprise du véhicule, Condamne les sociétés intimées à restituer à la société CGB les sommes reçues en exécution du jugement réformé, les intérêts au taux légal courant à compter de la notification de la présente décision ouvrant droit à restitution, Condamne la société Nissan West Europe à verser à la société CGB une indemnité de 4 000 euro par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Déboute la société CGB du surplus de ses demandes, fins et conclusions, Condamne la société CGB à verser à la société Cap Janet les frais de gardiennage de 8 euro par jour du 15 avril 2005 au 9 avril 2009 sur présentation de factures, Déboute la société Cap Janet Automobile de ses demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive, paiement d'une amende civile et frais irrépétibles, Déboute la société Nissan West Europe de ses demandes, fins et conclusions, Condamne la société Nissan West Europe aux entiers dépens, ceux d'appel étant distraits au profit de la SCP Tollinchi, Perret-Vigneron, Baradat-Bujoli-Tollinchi et de la SCP Boissonnet-Rousseau, avoués, sur leurs affirmations d'en avoir fait l'avance sans avoir reçu provision.