Livv
Décisions

CA Colmar, 2e ch. civ. A, 10 janvier 2013, n° 11-04732

COLMAR

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Petcherista

Défendeur :

Soares

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Leiber

Conseillers :

Mmes Conte, Diepenbroek

Avocats :

Mes Crovisier & Makowski, Wetzel & Frick

TGI Colmar, du 12 sept. 2011

12 septembre 2011

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 13 mai 2010 Monsieur Petcherista vendait à Monsieur Soares un véhicule break Mercedes classe E Diesel, dont la première mise en circulation datait du 7 juillet 1998 et le compteur kilométrique affichait 139 000 kilomètres, pour le prix de 6 700 euro.

Le 13 juillet 2010 l'avant gauche de ce véhicule s'affaissait et il apparaissait d'une expertise extrajudiciaire, organisée à l'initiative de l'acheteur mais contradictoire envers le vendeur, que le kilométrage réellement parcouru par ledit véhicule s'avérait très supérieur (plus de 300 000 kilomètres) et que ce dernier présentait un état de corrosion très avancé.

Le 31 mai 2011 Monsieur Soares, sur le fondement de la garantie des vices cachés par un vendeur de mauvaise foi, faisait citer Monsieur Petcherista en résolution de la vente dont s'agit et restitution du prix ainsi qu'en paiement outre intérêts et frais, des indemnités suivantes :

- 9 007 euro frais de gardiennage,

- 387,99 euro frais de transport,

- 1 568,47 euro coût du prêt souscrit,

- 339,24 euro assurance du véhicule,

- 282,18 euro frais d'expertise demeurés à sa charge,

- 2 026,17 euro frais de maintien en circulation de son ancien véhicule.

Par jugement du 12 septembre 2011 le Tribunal de grande instance de Colmar a accueilli la demande de résolution de la vente et de restitution du prix ainsi que celle au titre des dommages et intérêts dans les limites suivantes :

- 180,50 euro carte grise

- 9 007,46 euro frais de gardiennage

- 200 euro frais de transport

- 339,24 euro assurance du véhicule

- 282,18 euro frais d'expertise,

et il a rejeté le surplus des prétentions.

Le 19 septembre 2011 Monsieur Petcherista a interjeté appel général de ce jugement.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 18 octobre 2012.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Pour un plus ample exposé la cour se réfère expressément aux dernières conclusions déposées :

- le 12 avril 2012 par l'appelant,

- le 15 juin 2012 par l'intimé.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 18 octobre 2012.

Monsieur Petcherista - à l'instar de ce qu'il avait exprimé dès la première instance - admet qu'il est débiteur de l'obligation de garantie du vendeur au titre des vices cachés et que partant il est tenu de rembourser le prix du véhicule litigieux (6 700 euro) ainsi que les frais de carte grise (180,50 euro) sauf à solliciter l'autorisation de se libérer de cette dette en réglant un capital de 5 000 euro et le solde par échéances mensuelles de 300 euro. Pour le surplus, par voie de réformation du jugement déféré Monsieur Petcherista réclame le débouté de toutes les demandes de dommages et intérêts au motif que Monsieur Soares n'établit pas qu'il a été vendeur de mauvaise foi, de sorte que l'article 1645 du Code civil n'a pas vocation à s'appliquer.

Relevant appel incident Monsieur Soares réitère l'ensemble de ses demandes initiales.

MOTIFS :

Attendu que pas plus qu'en première instance Monsieur Petcherista ne remet en cause le constat que le véhicule cédé se trouvait affecté d'un vice caché le soumettant consécutivement à l'obligation de garantie prévue par l'article 1641 du Code civil ;

que de ce chef le jugement ne s'avère donc pas critiqué ;

Attendu qu'en application du texte précité Monsieur Petcherista rappelle à bon droit qu'il ne peut être tenu qu'à la restitution du prix de vente ainsi qu'au règlement des dépenses directement liées à la conclusion du contrat de vente qui en l'espèce ne sont constituées que par les frais de carte grise ;

Attendu que l'appelant souligne encore exactement - et du reste ce principe a été admis de concert par Monsieur Soares et le premier Juge - que le surplus des réclamations de l'acheteur sont constitutives de dommages-intérêts de sorte que le succès de ces demandes, qui sont fondées sur l'article 1645 du Code civil - alors qu'il est acquis aux débats que le vendeur n'était pas un professionnel de l'automobile, son activité étant l'exploitation d'un restaurant - se trouve subordonné à l'administration par Monsieur Soares de la preuve que Monsieur Petcherista aurait connu le vice lors de la vente et que de mauvaise foi il aurait tu son existence ;

Attendu qu'à cet égard - et au contraire de l'opinion du premier juge - l'appelant soutient avec pertinence que les moyens dont excipe Monsieur Soares sont dépourvus de valeur probante suffisante ;

qu'en effet la mauvaise foi du vendeur ne saurait sans conteste résulter - comme a cru pouvoir le retenir le tribunal - de la circonstance que celui-là s'était abstenu de faire figurer sur le certificat de cession du véhicule la mention "non garanti" à côté de l'indication du kilométrage, alors qu'il ne s'évince d'aucun autre élément qu'il avait des motifs sérieux de douter de l'exactitude du chiffre apparaissant au compteur d'autant que simultanément il avait remis à l'acquéreur un compte rendu de contrôle technique effectué le 6 janvier 2010, soit quelques mois avant la vente, concluant "au bon état général apparent du véhicule intérieur et extérieur" et que lui-même avait acquis ce véhicule le 29 septembre 2009 avec un kilométrage déclaré de 130 000 kilomètres ainsi que cela apparaît du certificat d'acquisition ;

que ne s'avère pas déterminant au regard de l'âge du véhicule et des cessions successives dont il avait été l'objet, circonstances connues de l'acquéreur, le fait que le vendeur n'avait pas été en mesure de remettre le carnet d'entretien ;

que ces constats ne sont pas remis en cause par le témoignage du père de Monsieur Soares qui avait assisté à la vente dont il appert seulement que le fils de Monsieur Petcherista serait intervenu, ce qui ne suffit pas davantage à caractériser la mauvaise foi de celui-ci ;

Attendu que partant, les conditions d'application de l'article 1645 du Code civil ne sont pas réunies, ce qui impose, en réformant le jugement déféré, de débouter Monsieur Soares de toutes ses demandes de dommages et intérêts ;

Attendu que le jugement ne sera donc confirmé qu'en ce qui concerne la condamnation de l'appelant à restituer le prix de vente et à payer les frais de carte grise, ainsi qu'en ses dispositions afférentes aux dépens et frais irrépétibles ;

qu'il en sera de même du rejet de la demande de délais de paiement émise par Monsieur Petcherista ;

qu'en effet celle-ci n'est pas justifiée par des difficultés financières mais seulement par la circonstance que l'appelant a lui-même été victime de son propre vendeur, ce qui est étranger à Monsieur Soares ;

que par ailleurs Monsieur Petcherista bien qu'il avait toujours admis devoir restituer le prix de vente ne justifie pas avoir entamé des paiements pour s'acquitter de cette dette ;

Attendu que Monsieur Soares, qui succombe principalement en appel, supportera les dépens de cette instance ;

qu'en revanche l'issue du litige justifie en équité de rejeter toutes les demandes de frais irrépétibles d'appel ;

Par ces motifs : Confirme le jugement déféré seulement en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente pour vice caché et condamné Monsieur Petcherista à payer au titre de la restitution du prix la somme de 6 700 euro (six mille sept cents euros) avec intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2011, ainsi que la somme de 180,50 euro (cent quatre-vingt euros et cinquante centimes) (frais de carte grise) et celle de 1 500 euro (mille cinq cents euros) pour frais irrépétibles ainsi que les dépens, et en ce qu'il a débouté le défendeur de sa demande de délais de paiement ; Infirme pour le surplus le jugement entrepris ; Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant : Déboute Monsieur Soares de toutes ses demandes de dommages et intérêts fondées sur l'article 1645 du Code civil ; Rejette les demandes de frais irrépétibles d'appel ; Condamne Monsieur Soares aux dépens d'appel ; Rappelle que l'arrêt vaut titre de restitution des sommes qui auraient été payées en exécution provisoire du jugement au titre des condamnations infirmées, et qu'elles produiront intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt valant sommation de restituer.