CA Poitiers, 1re ch. civ., 18 janvier 2013, n° 11-04294
POITIERS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Lairoux Automobile (SARL)
Défendeur :
Lambert, Nontron Automobiles (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Martin-Pigalle
Conseillers :
Mmes Contal, Salducci
Avocats :
SCP Musereau Mazaudon Provost-Cuif, SCP Tapon Michot, Mes Caumeau, Thibault Bourdeix
Faits et procédure :
Le 29 juillet 2009, M. Patrick Lambert a acheté à la SARL Lairoux Automobile un véhicule d'occasion de marque Land Rover de type 4X4, affichant 97 000 km au compteur, pour le prix de 9 850 euro.
Arguant de vices cachés, M. Lambert a, par acte d'huissier du 9 avril 2010, fait assigner la SARL Lairoux Automobile sur le fondement des articles 1641 et 1147 du Code civil, aux fins de voir prononcer la résolution de la vente et le paiement de diverses indemnités.
Par acte d'huissier du 10 décembre 2010, la SARL Lairoux a fait appeler en garantie la SARL Nontron, société ayant effectué des réparations sur le véhicule.
Par jugement du 12 juillet 2011, le Tribunal de grande instance de La-Roche-Sur-Yon a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, prononcé la résolution de la vente, condamné la SARL Lairoux Automobile à restituer le prix de vente à M. Lambert, à lui payer les sommes de 745 euro au titre des préjudices subis, outre 1 200 euro au titre de l'article 700 du Code procédure civile et a mis hors de cause la SARL Nontron.
La Cour :
Vu l'appel interjeté par la SARL Lairoux Automobile le 3 octobre 2011,
Vu les dernières écritures déposées par l'appelante le 2 avril 2012 suivant lesquelles, poursuivant l'infirmation du jugement déféré, elle fait valoir que les conditions de la garantie des vices cachés ne sont pas réunies, que le vice n'est pas démontré et qu'il appartenait en tout état de cause à M. Lambert de faire réparer son véhicule par la Société Lairoux dans le cadre de la garantie contractuelle et non pas par la Société Nontron. Elle demande à titre subsidiaire qu'une mesure d'expertise soit ordonnée et à titre plus subsidiaire que la SARL Nontron soit condamnée à la relever de toute éventuelle condamnation.
Vu les conclusions déposées par M. Lambert le 21 juin 2012 concluant à la confirmation du jugement et sollicitant en outre 937,36 euro au titre des frais d'assurance, 6.000 euro au titre de son préjudice moral et 2 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Il soutient que la preuve du vice caché est suffisamment rapportée dès lors que l'expertise amiable a permis de déceler une fissure du joint de culasse qui constitue un vice suffisamment grave, dont l'antériorité est établie.
Vu les dernière conclusions déposées par la SARL Nontron le 5 mars 2012 aux termes desquelles, sollicitant la confirmation du jugement, elle réclame 4.000 euro au titre de ses frais irrépétibles. L'intimée soutient que la SARL Lairoux n'est pas fondée à rechercher sa garantie sur le fondement de l'article 1147 du Code civil, les parties n'ayant aucun lien contractuel et aucune faute ne pouvant lui être reprochée.
Motifs et décision :
Le véhicule vendu le 29 juillet 2009 par la SARL Lairoux à M. Lambert a fait l'objet, suivant la facture produite, d'une révision et d'un contrôle technique faisant état notamment d'un défaut d'étanchéité du pont et de la boîte de transfert, défauts à corriger sans obligation de contre visite. La facture fait également mention d'une garantie contractuelle de 12 mois, ainsi que de la prise en charge par la SARL Lairoux de diverses réparations, dont la vidange, le filtre, les pneus avant et le joint du pont arrière.
Les reprises relatives au filtre et au joint de pont n'ont toutefois pas été effectuées par la SARL Lairoux, ce dont la Société Nontron, garagiste habituel de M. Lambert, a pu s'apercevoir lorsque ce dernier, après avoir circulé plusieurs semaines avec le véhicule litigieux, lui en a confié la réparation aux fins de remédier à des difficultés persistantes au démarrage se manifestant notamment par le dégagement d'une fumée blanche.
Les réparations effectuées par la SARL Nontron n'ayant toutefois pas permis de remédier aux problèmes décrits ci-dessus, cette dernière a confié le véhicule à un concessionnaire Land Rover situé à Périgueux, lequel a diagnostiqué une fuite d'eau au niveau du joint de culasse et a préconisé son remplacement.
Il résulte par ailleurs des pièces produites que la SARL Lairoux ayant refusé la prise en charge de cette réparation, une expertise amiable a été effectuée à la diligence de l'assureur de M. Lambert, dont il ressort que la présence de dioxyde de carbone ou de gaz d'échappement dans le circuit de refroidissement est le signe évident d'un défaut d'étanchéité du joint de culasse.
Le défaut d'étanchéité du joint de culasse a donc été constaté à la fois par un technicien Land Rover et par un expert qui a mené ses travaux en présence des parties si bien que le vice dont le véhicule litigieux est atteint résulte non pas seulement d'une expertise amiable mais également d'un autre avis technique, ce qui suffit à établir son existence dès lors qu'il s'agit d'avis concordants et justifiés techniquement, ainsi que son antériorité dans la mesure où, selon les constations de l'expert Delamare, la consommation de liquide de refroidissement a été telle que le dysfonctionnement remonte nécessairement à la date de l'achat du véhicule. Les éléments techniques produits aux débats suffisent en conséquence à démontrer l'existence d'un vice caché sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une mesure d'expertise si bien que cette demande, non justifiée, doit être rejetée.
La nature du défaut dont le véhicule est atteint est d'une gravité suffisante pour considérer que s'il en avait eu connaissance, M. Lambert se serait abstenu de l'acheter. L'action menée par M. Lambert sur le fondement des vices rédhibitoires est en conséquence fondée et le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente et condamné la SARL Lairoux à restituer à M. Lambert le prix de vente de 9 850, étant observé, comme l'a justement relevé le premier juge, que le fait que le dysfonctionnement du véhicule soit intervenu en cours de garantie contractuelle ne fait pas obstacle à ce que l'acquéreur poursuive la résolution de la vente.
L'appel en garantie formé par la SARL Lairoux contre la SARL Nontron, avec laquelle elle n'a aucun lien contractuel et contre laquelle aucune faute à l'origine du vice caché n'est établie, ne saurait prospérer. Cette dernière s'est en effet contentée de prendre en charge certaines réparations dont il n'est pas démontré qu'elles ont pu contribuer à l'apparition du vice ni à son aggravation.
Concernant les préjudices annexes subis par l'acquéreur, il convient de faire application des dispositions de l'article 1645 du Code civil eu égard à la qualité de vendeur professionnel de la SARL Lairoux, et de confirmer en conséquence la somme allouée au titre des frais de mutation de carte grise, soit la somme de 246 euro, ainsi que la somme allouée par le premier juge au titre des frais d'assurance exposés par M. Lambert, soit 499 euro. Ce dernier réclame en outre 438,36 euro au titre des frais d'assurance des années 2010-2011 et 2011-2012. Or suivant les pièces produites, les frais d'assurance du véhicule s'élèvent en moyenne à environ 220 euro par an, et les relevés d'assurances produits s'arrêtent en juillet 2012. Le véhicule ayant été acquis en juillet 2009, l'intimé ne saurait donc réclamer plus de trois années de frais d'assurance, en conséquence de quoi seule une somme supplémentaire de 160 euros lui sera octroyée à ce titre.
La demande en paiement d'une indemnité de 6 000 euro au titre d'un préjudice moral que M. Lambert prétend avoir subi sans en démontrer la réalité ne saurait prospérer si bien que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement, sur appel en matière civile et en dernier ressort, Confirme le jugement entrepris, Y Ajoutant, Condamne la SARL Lairoux Automobile à payer à M. Patrick Lambert la somme complémentaire de 160 euro au titre des frais d'assurance, Rejette toute plus ample demande, Condamne la Lairoux Automobile à payer à M. Patrick Lambert la somme complémentaire de 2 000 euro et à la SARL Nontron la somme de 2 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la SARL Lairoux Automobile aux dépens d'appel, dont distraction au profit de la SCP Paille-Thibault-Clerc et de la SCP Tapon-Michot pour ceux dont elles ont fait l'avance sans en avoir reçu provision.