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Décisions

CA Aix-en-Provence, 17e ch., 25 juin 2007, n° 06-15155

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

R&B Products (SA)

Défendeur :

Arnaldi

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Cuttat

Conseillers :

Mmes Verhaeghe, Poirine

Avocat :

Mes Courtille

Cons. Prud'h Menton, du 14 août 2006

14 août 2006

La SA R&B Products et Monsieur Bernard Alain X. ont signé pour les saisons 2001/2002, 2002/2003, pour 2004 et 2005 des contrats de "sponsorisation".

Soutenant avoir été embauché dans le cadre d'un contrat de travail depuis janvier 2001 et sollicitant la requalification de sa démission du 28 avril 2005 en un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse Monsieur Bernard Alain X. a saisi le 19 août 2005 le Conseil de prud'hommes de Menton, lequel, par jugement du 14 août 2006 a dit que Monsieur Bernard Alain X. était en CDI depuis le mois de janvier 2001, a dit que la rupture était une démission au 28 avril 2005, dit que la rémunération mensuelle était de 640 euros, condamné la SA R&B Products à remettre à Monsieur Bernard Alain X. son bulletin de salaire final et l'attestation Assedic conformes aux dispositions du jugement sous astreinte de 25 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification, le conseil se réservant la liquidation de ladite astreinte, ainsi qu'à lui payer la somme de 650 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, a débouté les parties de leurs autres demandes et condamné la SA R&B Products aux dépens.

Ayant le 25 août 2006 régulièrement relevé appel de cette décision la SA R&B Products en sollicite la réformation aux fins de voir débouter Monsieur Bernard Alain X. de toutes ses demandes et le condamner à lui payer la somme de 5 000 euros pour procédure abusive et celle de 3 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle fait valoir au visa de l'article 9 du nouveau Code de procédure civile que le contrat est clair et précis et constitue un contrat de parrainage par lequel Monsieur Bernard Alain X. entendait améliorer sa carrière sportive et la SA R&B Products obtenir une exposition suffisante en vue de la promotion de ses produits dans le cadre des compétitions amateurs organisées par la fédération française de véhicules radio commandés ; qu'en l'absence de tout lien financier et au contraire en présence de clauses par lesquelles le pilote doit acheter une partie non négligeable de son matériel, il ne saurait s'évincer de son engagement d'avoir à participer à 5 manches dominicales du championnat de France un lien de subordination caractérisant l'existence d'un contrat de travail ; que le fait de participer aux compétitions avec le matériel remis à titre gratuit ou fourni à des conditions préférentielles ne constitue par davantage la caractérisation d'un lien de subordination dès lors qu'il s'agit du seul moyen pour elle de s'assurer que le pilote ne se servira pas du matériel à d'autres fins que celles en vue desquelles il a sollicité cette fourniture ; que le contrat n'est pas un contrat de travail mais de parrainage ; que l'action intentée par Monsieur Bernard Alain X., en réponse à l'action civile que la société envisagerait d'introduire consécutivement à la rupture par ce dernier du contrat de sponsoring, est abusive ;

Monsieur Bernard Alain X. conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que le contrat était à durée indéterminée depuis janvier 2001 ; il demande de dire la rupture imputable à l'employeur et de condamner la SA R&B Products à lui payer les sommes de :

- 52 374 euros à titre de rappel de salaires,

- 5 237 euros au titre des congés payés y afférents,

- 7 300 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 218 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

- 7 300 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- 800 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

et ce avec intérêt légal, moratoire et capitalisation des intérêts,

ainsi qu'à lui remettre le certificat de travail, l'attestation Assedic et le bulletin de salaire final sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Il fait valoir que le contrat s'est exercé dans le cadre d'un lien de subordination puisqu'il devait utiliser les produits de la SA R&B Products, être présent à toutes compétitions, et avait l'interdiction d'apporter des modifications aux moteurs ; qu'il est fondé à réclamer paiement de ses salaires depuis 2002 ; qu'il n'a pas abandonné son poste ; que c'est au contraire l'employeur qui n'a pas répondu à ses obligations contractuelles et l'a contraint à rompre le contrat ; que cette rupture s'analyse en un licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse ; qu'il y a eu travail dissimulé ; qu'il a subi un préjudice moral.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il y a lieu de se référer au jugement du Conseil des prud'hommes et aux écritures déposées, oralement reprises.

Sur ce :

Attendu que l'existence d'un contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions réelles dans lesquelles la prestation de travail s'est exécutée et à celui qui se prévaut de l'existence d'une relation salariale de rapporter la preuve d'un contrat de travail qui se définit comme la convention par laquelle une personne s'engage à mettre son activité à la disposition d'une autre sous la subordination de laquelle elle se place moyennant rémunération et qui a le pouvoir de lui donner des ordres et des directives et de sanctionner leur défaut d'exécution ;

Attendu qu'en l'espèce les contrats de sponsorisations signés entre les parties prévoient la remise de matériel à titre gratuit ou à des conditions financières intéressantes à Monsieur Bernard Alain Arnaldi, l'entretien par la société des moteurs, le prêt des moteurs et un certain nombre de prestations en échange de l'engagement par ce dernier d'être présent à toutes les manches de championnat et coupe de France, d'assurer une assistance et un conseil auprès des pilotes et clients des produits R&B Products, de promotionner les marques R&B Products, de ne pas modifier les moteurs, de porter les vêtements publicitaires de la marque et d'utiliser les autocollants et tous les produits distribués par R&B Products, la SA R&B Products se réservant en cas de non-respect du contrat de facturer le montant des produits mis à disposition et des remises accordées ;

Attendu que ces contrats ne prévoient aucune rémunération au profit de Monsieur Bernard Alain Arnaldi de sorte que c'est à tort que le Conseil de prud'hommes a fait état de "rémunération en nature" alors qu'au contraire il s'agit de la mise à disposition de matériel à des conditions avantageuses en contrepartie d'une participation minimum à quelques épreuves destinée à promouvoir les produits de la société ;

Attendu que Monsieur Bernard Alain X. participait à quelques courses ou à des championnats non organisés par la SA R&B Products, menait ces courses sans recevoir aucune directive de la part de cette dernière, conservait toute liberté dans l'organisation de sa vie professionnelle puisque le contrat de sponsoring et ces quelques contraintes ne concernait que certains aspect très partiels et ponctuels de sa vie professionnelle, participait à ces courses dans son intérêt personnel lié à sa passion pour ce type de sport sans avoir à en assumer l'investissement ;

Attendu qu'en échange du concours matériel apporté par la SA R&B Products le contrat de sponsoring ou de parrainage impose au sportif un certain nombre de contraintes tout en reconnaissant à la société le droit exclusif d'utiliser son nom ou son image pour la publicité de ses produits ;

Attendu que Monsieur Bernard Alain X. ne rapporte donc pas la preuve d'un lien de subordination, ni la preuve d'une rémunération, ni la preuve que la SA R&B Products avait le pouvoir de lui donner des ordres ou de le sanctionner de sorte que le contrat les liant, avec ses obligations réciproques, est de nature purement commerciale et n'a d'autre objet en ce qui le concerne que la gestion de sa carrière sportive et pour la SA R&B Products la promotion publicitaire de ses produits ;

Attendu que Monsieur Bernard Alain X. doit donc être débouté de toutes ses demandes et le jugement réformé ;

Attendu que la SA R&B Products ne rapportant pas la preuve que l'action de Monsieur Bernard Alain Arnaldi ne serait qu'une riposte de circonstance à l'action civile qu'elle envisage d'introduire à son encontre elle ne peut prétendre obtenir des dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Attendu qu'il y a lieu de condamner Monsieur Bernard Alain X. à payer à la SA R&B Products la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS : LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en matière prud'homale, Réforme le jugement déféré, Dit que le contrat liant les parties n'est pas un contrat de travail mais un contrat de parrainage publicitaire, Déboute Monsieur Bernard Alain X. de l'ensemble de ses demandes, Rejette toute demande contraire, Condamne Monsieur Bernard Alain X. aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à payer à la SA R&B Products la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.