Cass. 1re civ., 20 mai 2010, n° 09-10.086
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Alupharm (SAS)
Défendeur :
Axa France Iard (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Charruault
Rapporteur :
Mme Kamara
Avocat général :
M. Sarcelet
Avocats :
Me Odent, SCP Baraduc, Duhamel, SCP Delaporte, Briard, Trichet, SCP Gatineau, Fattaccini
LA COUR : - Met hors de cause, sur sa demande, la société Axa France Iard ; - Attendu que la société Alupharm, spécialisée dans la fabrication de produits chimiques destinés à l'industrie pharmaceutique, a acheté des conteneurs d'occasion en inox 316 L auprès de la société Bonnet matériel, spécialisée dans le négoce de matériel industriel, qui les avait acquis sous la même spécification de la société Méditerranéenne et internationale de conteneurs et citernes (MI2C) ; qu'alléguant qu'ils étaient en réalité composés d'inox 304, incompatible avec son activité chimique, la société Alupharm a assigné aux fins de résolution du contrat de vente et d'indemnisation, la société Bonnet matériel et la société MI2C ; que la société Bonnet matériel, qui a fait l'objet d'une procédure collective, et ses mandataires judiciaires ont sollicité la résolution de la vente consentie par la société MI2C et la garantie de cette dernière ainsi que celle de la société Axa France Iard, assureur de la société Bonnet matériel ; que la cour d'appel a, par arrêt du 3 juillet 2008, renvoyé l'affaire pour plaidoiries, puis, par arrêt du 9 octobre 2008, prononcé la résolution de la vente intervenue entre la société Bonnet matériel et la société Alupharm, fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société Bonnet matériel les créances de la société Alupharm, ordonné à cette dernière de restituer les conteneurs, débouté la société Alupharm et M. X., mandataire à la liquidation judiciaire de la société Bonnet matériel, de leurs demandes dirigées contre la compagnie Axa, prononcé la résolution de la vente intervenue entre la société MI2C et la société Bonnet matériel, et débouté la société Alupharm de ses demandes dirigées contre la société MI2C ;
Sur le pourvoi principal de la société Alupharm en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 3 juillet 2008 : - Attendu que l'arrêt, qui s'est borné à ordonner un renvoi de l'affaire à une audience ultérieure, n'est pas susceptible d'être frappé de pourvoi ;
Que le pourvoi est irrecevable en ce qu'il est dirigé contre cette décision ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 9 octobre 2008, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe au présent arrêt : - Attendu qu'ayant relevé que la société Alupharm était un professionnel de l'industrie pharmaceutique qui ne pouvait pas ignorer les spécificités chimiques des différentes qualités d'inox, qu'elle savait parfaitement qu'elle achetait des conteneurs d'occasion et dont l'origine lui était mal connue, et que les conteneurs d'occasion livrés ne portaient aucune plaque permettant de connaître les spécificités de l'inox ayant servi à leur fabrication, la cour d'appel a pu déduire de ces constatations que, même en l'absence de défaut de conformité apparent, la société Alupharm avait commis une faute de négligence en acceptant sans réserve ni contrôle technique lesdits conteneurs, tandis que la qualité de l'inox était déterminante et qu'il était techniquement possible de la vérifier rapidement ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal : - Vu les articles 1604, 1610 et 1611 du Code civil ; - Attendu que l'action résolutoire résultant d'un même défaut de conformité se transmet avec la chose livrée, de sorte que lorsque, comme en l'espèce, elle est exercée, d'une part, par le sous-acquéreur à la fois contre le vendeur intermédiaire et contre le vendeur originaire, à l'égard duquel le sous-acquéreur dispose d'une action directe contractuelle, d'autre part, par le vendeur intermédiaire contre le vendeur originaire, seule peut être accueillie l'action formée par le sous-acquéreur contre le vendeur intermédiaire et contre le vendeur originaire, le vendeur intermédiaire pouvant seulement agir en ce cas contre le vendeur originaire aux fins de garantie des condamnations prononcées contre lui en faveur du sous-acquéreur ; qu'en outre, le vendeur originaire ne peut être tenu de restituer davantage qu'il n'a reçu, sauf à devoir des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé tant au sous-acquéreur qu'au vendeur intermédiaire ;
Attendu que, pour débouter la société Alupharm de ses demandes formées contre la société MI2C, l'arrêt retient que la première n'a jamais eu le moindre lien contractuel avec la seconde et qu'il est fait droit aux demandes présentées par le liquidateur à la liquidation judiciaire du vendeur intermédiaire à l'encontre du vendeur initial ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le sous-acquéreur avait agi à la fois contre le vendeur intermédiaire et contre le vendeur originaire, à l'égard duquel il disposait d'une action directe, de sorte que devait être accueillie l'action résolutoire par lui formée contre le vendeur originaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Par ces motifs : et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres griefs : Déclare le pourvoi irrecevable en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 3 juillet 2008 ; Casse et Annule, sauf en ce qu'il déclare recevables l'appel interjeté par la société Alupharm et l'intervention volontaire de M. X., ès qualités, prononce la résolution judiciaire de la vente des 70 conteneurs intervenue entre la société Bonnet matériel et la société Alupharm, fixe au passif de la société Bonnet matériel la créance de la société Alupharm d'un montant de 60 780,72 euros TTC au titre de la restitution du prix de vente, fixe au passif de la société Bonnet matériel la créance de la société Alupharm à un montant de 57 000 euros au titre des dommages-intérêts, déboute la société Alupharm et M. X., ès qualités, de leurs demandes contre la société Axa France, l'arrêt rendu le 9 octobre 2008, entre les parties, par la Cour d'appel de Nîmes ; remet sur les autres points la cause et les parties concernées dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Montpellier.