Cass. com., 3 avril 2013, n° 12-17.163
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Emna service (SARL)
Défendeur :
Comité d'entreprise du groupe CRH Ile-de-France distribution
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
Mme Riffault-Silk
Avocat général :
M. Carre-Pierrat
Avocats :
SCP Laugier, Caston, SCP Waquet, Farge, Hazan
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 25 mars 2008, la société Emna service (la société), qui exploitait depuis 1991 le parc de distributeurs automatiques de boissons et denrées du groupe CRH IDF distribution, a conclu avec le comité d'entreprise du groupe (le CE) un protocole d'accord temporaire aux termes duquel ce dernier prenait la responsabilité de la gestion du parc ; qu'il était convenu qu'au terme de ce protocole provisoire fixé au 31 décembre 2008, un nouveau protocole devait être régularisé pour une durée de trois ans ; qu'en exécution d'un avenant du 4 avril 2008, puis de six avenants ultérieurs signés entre juin 2008 et septembre 2008, la société a installé des monnayeurs et des distributeurs dans divers dépôts ; que, par courriers des 22 octobre, 3 et 17 novembre 2008, le CE a informé la société qu'il résiliait tous les protocoles temporaires d'exploitation du parc de distributeurs venant à échéance le 31 décembre 2008 ; que la société a assigné le CE en responsabilité pour rupture abusive de leurs relations commerciales ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable : - Vu l'article L. 442-6-I, 5°, du Code de commerce ; - Attendu que pour condamner le CE à ne payer qu'une certaine somme à la société, l'arrêt retient que celui-ci était en droit de ne pas renouveler le contrat provisoire avec la société en raison d'un désaccord sur le prix des prestations, et ce malgré les relations certes anciennes, mais non pour autant irrévocables qu'entretenaient les parties, et que le seul élément susceptible de caractériser un abus dans la rupture des relations entre les parties tient au fait que le CE ne justifie pas avoir informé la société de l'appel d'offres auquel il avait procédé ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle constatait que la société exploitait depuis 1991 le parc de distributeurs de boissons et denrées du groupe, sans rechercher si le CE avait respecté un délai de préavis suffisant au regard de la durée de ces relations commerciales, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le moyen, pris en sa cinquième branche : - Vu l'article 16 du Code de procédure civile ; - Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient que la société doit être indemnisée sur le fondement d'une perte de chance ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a relevé d'office le moyen tiré de ce que le préjudice allégué par la société consistait en une perte de chance, sans inviter préalablement les parties à s'en expliquer, a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 février 2012, entre les parties, par la Cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Versailles, autrement composée.