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Décisions

CA Riom, 1re ch. civ., 21 février 2008, n° 07-00073

RIOM

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Fouilland (SCI)

Défendeur :

GI Production (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Baudron

Conseillers :

MM. Billy, Nicolas

Avoués :

Mes Mottet, Rahon

Avocats :

Mes Presle, Belluc, Bremens

TGI Cusset, du 13 nov. 2006

13 novembre 2006

Attendu que la SCI Fouilland, exploitant un terrain de camping à Andelaroche, a commandé à la SA GI Production le 20 novembre 2002 six chalets en bois, modèle "Club 6 Montagne", d'un coût total de 101 780,80 euro, lesquels ont été livrés en janvier et février 2003 ;

Qu'elle s'est plainte de désordres relativement à l'isolation, la température intérieure ne parvenant pas à atteindre un niveau suffisant en hiver, et a obtenu la commission d'un expert par ordonnance de référé du 23 juin 2004 ;

Que le Tribunal de grande instance de Cusset, par jugement du 13 novembre 2006, l'a déboutée de ses demandes contre le fournisseur et qu'elle en a interjeté appel par déclaration du 9 janvier 2007 ;

Attendu que, soutenant que tous les chalets présentent des défauts graves de chauffage, la température intérieure ne pouvant excéder 14° quand la température extérieure est négative, que le document commercial faisait apparaître le modèle "Montagne" sous la neige, que ce modèle était vendu 14 080 euro HT alors que le modèle classique valait 11 630 euro, que la différence de prix conduisait nécessairement à penser que le premier disposait d'une isolation ou d'une capacité de chauffage supérieure, que les caractéristiques précises des deux modèles n'ont pas été communiquées par le constructeur, qu'elle avait précisé au vendeur qu'elle entendait utiliser les chalets toute l'année, que le bon de commande ne contient aucune caractéristique, que l'expert a constaté que l'isolation thermique est, en sol et en mur, quasi inexistante, que le produit livré n'est manifestement pas conforme au produit commandé, que la réglementation thermique s'applique à ces habitations, qu'ils sont montés sur des longrines en béton et constituent des bâtiments, que la vendeuse ne l'a jamais avertie de l'utilisation nécessairement restreinte du produit acheté dans la zone géographique de l'implantation, qu'elle a commis une faute en diffusant des plaquettes publicitaires montrant le chalet 'modèle Montagne' sous la neige avec la mention "bien-être en..." en gros caractères, qu'elle ne peut utiliser les chalets et doit les remplacer, leur isolation n'étant pas envisageable, qu'elle a dû faire intervenir une entreprise extérieure pour des travaux d'électricité et d'étanchéité, la SCI Fouilland demande de réformer le jugement, de condamner la SA GI Production à lui payer 165 048 euro au titre de la délivrance conforme des chalets, 1 038,15 euro de reprises effectuées par un tiers, 78 000 euro de manque à gagner, sur le fondement de l' article 1604 du Code civil et subsidiairement de l'article 1382, ainsi que 3 000 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que, expliquant qu'elle commercialise des habitations légères de loisirs, que les spécifications du descriptif technique et les termes du bon de commande ont été observés, que les brochures portent la mention "document sans valeur contractuelle", qu'il ne peut être extrapolé aucun engagement précis d'une simple mise en situation géographique, que la SCI Fouilland ne l'a jamais informée de sa volonté d'exploiter des habitations légères de loisir en période hivernale, que les appellations des produits commercialisés n'ont aucune valeur contractuelle, qu'elle a indiqué qu'il était possible d'augmenter le confort en augmentant la puissance des convecteurs électriques, que l' article R. 111-20 du Code de la construction et de l'habitation est inapplicable aux habitations légères de loisirs, constructions à usage non professionnel, démontables et transportables conformément à l'article R. 111-16, inférieures à 35 m2, que, s'agissant de prétendues non conformités, l'acquéreur ne peut invoquer la responsabilité quasi-délictuelle du fournisseur, que le préjudice allégué n'est pas justifié, la SA GI Production conclut à la confirmation du jugement, et à la condamnation de la SCI Fouilland à lui payer 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que l' article R. 111-16 du Code de la construction et de l'habitation prévoit en son alinéa 1 des exceptions aux règles relatives aux bâtiments d'habitation pour "certaines catégories de logements destinées à l'occupation temporaire ou saisonnière", exception en vertu de laquelle les dispositions relatives à la construction de nouveaux bâtiments, résultant des articles R. 111-1 et suivants du Code de la construction et de l'habitation , dont la réglementation des conditions thermiques, ne leur sont pas applicables ;

Qu'un décret du 27 mars 2001 a institué des "habitations légères de loisirs", "démontables ou transportables" dont les caractéristiques sont définies par les articles R. 444-1 et suivants du Code l'urbanisme, et qui peuvent être implantées "dans les terrains de camping et de caravanage permanents" ;

Que la fiche technique des habitations en litige précise qu'il s'agit d'une habitation légère de loisir, et, que, dans ses détails techniques, la SCI Fouilland ne conteste pas qu'elle ait été respectée ;

Que les affirmations de l'expert Lanquette et de l'ingénieur Audebert selon lesquelles "la réglementation technique RT 200 doit s'appliquer sur ce type de bâtiment", n'est accompagnée d'aucune explication ni démonstration, et que la classification du bureau commun de tarification des assurances n'a pas de force légale ;

Attendu que, si les chalets ont été posés de telle façon qu'ils ne soient ni démontables ni transportables, alors qu'ils avaient été achetés comme tels, le bon de commande se limitant à la désignation du modèle acheté et de la quantité, et qu'il n'est pas soutenu que le fournisseur aurait été averti de cette destination, il appartenait à l'acquéreur, professionnel du camping, de s'assurer de leur adaptabilité aux normes qui résultaient de sa propre décision ;

Attendu que la SCI Fouilland ne justifie pas que l'habitabilité de ses habitations pendant toute l'année ait été une des conditions du contrat ni qu'elle lui ait d'une quelconque façon été promise ;

Que, sachant l'implantation des chalets sur un terrain de camping, le fournisseur ne pouvait pas imaginer une utilisation permanente ;

Que, dans sa lettre du 29 avril 2003, la SCI Fouilland écrit que "notre saison commence normalement à Pâques", d'où il résulte qu'elle n'avait qu'une activité saisonnière excluant l'hiver et les plus basses températures ;

Attendu que la publicité qui montre le modèle "Montagne" sous la neige, compte tenu de son nom et de son prix supérieur au modèle de base, n'autorise pas a priori, sans autre renseignement, à imaginer que ce modèle permet de supporter sans inconvénient à l'intérieur une température extérieure très basse, alors que la notice technique, en précisant qu'il s'agit d'une habitation légère de loisir, indique par cela même qu'elle est destinée à une occupation temporaire ou saisonnière ;

Que les documents publicitaires n'affirment rien de ce que la SCI Fouilland soutient avoir espéré ;

Que, même si les documents publicitaires pouvaient avoir une valeur contractuelle, il en résulte certainement un engagement du vendeur sur le fait que la construction doit pouvoir supporter d'être et de rester couverte d'une importante couche de neige sans être endommagée, mais non qu'elle pourrait être habitée normalement pendant une telle période ;

Attendu que, dès lors que la SCI Fouilland est déboutée de sa demande au titre de l'application de contrat parce que les espoirs nés de la publicité n'ont pas été respectés, elle doit être également déboutée d'une demande de responsabilité quasi-délictuelle sur le fondement du caractère mensonger d'une telle publicité ;

Que, en outre, la SA GI Production n'avait pas spécialement à informer la SCI Fouilland qu'elle ne pourrait pas utiliser les chalets hors de la saison d'ouverture du camping reconnue par elle-même, s'agissant de surcroît d'une zone située, selon un document produit par l'intimée, à une altitude de 400 m ;

Attendu que le jugement qui a débouté la SCI Fouilland ne peut qu'être confirmé ;

Attendu que la demande d'indemnisation de travaux faits par l'entreprise Grange n'est pas contestée ;

Que ces travaux sont manifestement sans rapport avec le litige sur les capacités de chauffage des chalets mais réalisés entre juin 2003 et février 2004 pour remédier à des défauts d'installation (inversion de conducteur et de neutre, vidages lavabo et douche non collés, parois mal fixées, fenêtres non étanches, sections de câbles électriques insuffisantes), tous éléments fournis et posés par le constructeur sur les chalets 1, 2 et 3 ;

Que la pose de ces trois premiers chalets a donné lieu à beaucoup de difficultés (délai de un mois et demi au lieu de 4 jours pour les trois autres) et de courriers de réclamation après la fin de la pose ;

Qu'il convient de faire droit à cette prétention, qui avait été présentée dès l'assignation et à laquelle le premier juge n'a pas répondu ;

Attendu que le jugement a condamné aux dépens la SA GI Production, qui voyait pourtant triompher sa position et qu'il y a lieu de mettre ces dépens à la charge de la demanderesse ;

Que l'appel n'est que partiellement justifié par l'omission de statuer sur un point d'importance mineure et que l'appelante doit supporter les dépens ;

Par ces motifs : Statuant publiquement et contradictoirement, Confirme le jugement déféré, à l'exception de la disposition relative aux dépens, Condamne la SCI Fouilland aux dépens de première instance, Ajoutant et complétant, Condamne la SA GI Production à payer à la SCI Fouilland 1 038,15 euro (mille trente-huit euros quinze), Déboute les parties de leurs prétentions au titre des frais irrépétibles, Condamne la SCI Fouilland aux dépens, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.