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Décisions

CA Nîmes, 2e ch. com. B, 18 avril 2013, n° 12-05728

NÎMES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

JM & Co (SARL)

Défendeur :

Haladjian Frères (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Filhouse

Conseillers :

MM. Favre, Gagnaux

Avocats :

SCP Curat Jarricot, SCP Guizard Servais, Mes Rossignol, Bertail

T. com. Avignon, du 21 nov. 2011

21 novembre 2011

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 25 janvier 2012 par la SARL "JM & Co", anciennement dénommée "Total Prestations Services", à l'encontre du jugement prononcé le 21 novembre 2011 par le Tribunal de commerce d'Avignon dans l'instance n° 2010-0761.

Vu l'ordonnance prononcée le 27 novembre 2012 par le conseiller de la mise en état, saisi à la requête de la SARL "JM & Co".

Vu la requête déposée le 11 décembre 2012 par la SARL "JM & Co" afin de déférer à la cour ladite ordonnance, ainsi que le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu les dernières conclusions déposées le 19 février 2013 par la SARL "JM & Co", appelante et demanderesse au déféré, ainsi que le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu les dernières conclusions déposées le 19 février 2013 par la SA "Haladjian Frères", intimée et défenderesse au déféré, ainsi que le bordereau de pièces qui y est annexé.

Prétendant avoir été liée à la SA "Haladjian Frères" par un contrat d'agent commercial en succédant à celui antérieurement confié à Maurice Total, qui a fait valoir ses droits à la retraite à la fin de l'année 1995 et a cessé son activité en février 1996, la SARL "Total Prestations Services", par exploit du 21 janvier 2010, a fait assigner celle-là en paiement de diverses indemnités pour rupture brutale du contrat d'agent commercial et pour abus de situation de dépendance devant le Tribunal de commerce d'Avignon qui, par jugement du 21 novembre 2011 a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- dit que les parties n'étaient pas liées par un contrat d'agent commercial et débouté la SARL "JM & Co" de ses demandes d'indemnité de rupture, d'indemnité de préavis, d'indemnité d'abus de rupture pour préjudice moral, et de paiement de factures des mois d'avril à juin 2009 ;

- débouté la SA "Haladjian Frères" de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour préjudice moral ;

- condamné la SARL "Total Prestations Services" à rembourser à la SA "Haladjian Frères" les factures de janvier à mars 2009 indûment encaisséeS par elle pour un montant de 17 115,90 euros ;

- condamné la SARL "Total Prestations Services" aux dépens et à payer 4 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

La SARL "Total Prestations Services" ayant changé de dénomination sociale pour s'appeler désormais "JM & Co", a relevé appel de ce jugement et, renonçant à invoquer le bénéfice d'un contrat d'agent commercial pour revendiquer celui de prestation de service à rémunération forfaitaire, a conclu à la réparation des conséquences dommageables d'une brusque rupture des relations commerciales en application des dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, et au paiement des factures des mois d'avril à juin 2009, ainsi qu'au remboursement des sommes versées au titre du jugement entrepris.

La SA "Haladjian Frères" ayant soulevé, entre autres moyens, l'irrecevabilité des demandes présentées sur le fondement de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, la SARL "JM & Co" a saisi le conseiller de la mise en état d'une requête aux fins de voir déclarer la Cour d'appel de Nîmes incompétente pour connaître de la demande et déclarer en conséquence irrecevables son appel principal et l'appel incident de la SA "Haladjian Frères" ;

Par ordonnance du 27 novembre 2012, le conseiller de la mise en état a, au visa des articles 562, 914 du Code de procédure civile, L. 442-6-1, III et D. 442-3 du Code de commerce :

- déclaré irrecevable l'appel principal de la SARL "JM & Co", mais uniquement du chef du rejet de ses prétentions fondées sur l'application de l'article L. 442-6, I et III du Code de commerce, qui relève de la compétence exclusive de la Cour d'appel de Paris ;

- déclaré recevable l'appel principal des autres chefs de jugement ainsi que l'appel incident interjeté par la SA "Haladjian Frères", non fondés sur les dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce.

La SARL "JM & Co" a déféré cette ordonnance à la cour pour voir :

- déclarer irrecevable son entier appel ;

- déclarer irrecevable l'appel incident de la SA "Haladjian Frères" ;

- condamner la SA "Haladjian Frères" aux dépens et à payer à la SARL "JM & Co" 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

La SA "Haladjian Frères" conclut à la confirmation de l'ordonnance et demande à la cour de :

- déclarer irrecevables les demandes fondées, en application des articles L. 442-6 et D. 442-3 du Code de commerce, sur la brusque rupture des relations commerciales établies ;

- se déclarer compétente pour connaître de l'appel incident, ainsi que de l'appel principal de la SARL "JM & Co", en ce qu'il n'est pas fondé sur l'article L. 442-6 du Code de commerce ;

- condamner la SARL "JM & Co" aux dépens et à lui payer 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé il convient de se référer aux décisions et conclusions visées supra.

DISCUSSION

Attendu que régulière et formée dans le délai de l'article 916 du Code de procédure civile, la requête en déféré est recevable, les parties n'élevant aucune discussion sur ce point ;

Attendu que si le conseiller de la mise en état est jusqu'à son dessaisissement seul compétent pour déclarer l'appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel, il ne lui appartient pas de statuer sur les fins de non-recevoir qui constituent des moyens de défense ressortissant à la compétence de la formation de jugement ;

Attendu qu'en l'espèce, la SA "Haladjian Frères" oppose à la SARL "JM & Co" une fin de non-recevoir tirée de ce que les prétentions fondées sur les dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce sont exclusivement attribuées aux juridictions spécialisées énumérées à l'article D. 442-3 du même Code et dont l'appel des décisions ressortit à la compétence de la Cour d'appel de Paris ;

Attendu que l'examen de cette fin de non-recevoir qui tend au rejet de la demande sans examen de l'affaire au fond, échappe donc à la compétence du conseiller de la mise en état ;

Attendu que pour attraire l'entier litige devant la Cour d'appel de Paris, la SARL "JM & Co" soutient que c'est son appel qui serait lui-même irrecevable et, par voie de conséquence, l'appel incident de la SA "Haladjian Frères", dès lors qu'à la date de cet appel incident, celle-ci aurait été forclose pour relever appel principal, en ce qu'elle a fait signifier le jugement par exploit du 3 février 2012 ;

Attendu que cependant, la cour n'est pas saisie d'un appel dirigé à l'encontre d'une décision prononcée par l'une des juridictions spécialisées visées à l'article D. 442-3 du Code de commerce, quand bien même la demanderesse visait dès son assignation introductive d'instance les dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, mais du jugement d'un tribunal de commerce non spécialisé dépendant du ressort de la Cour d'appel de Nîmes, qui s'est prononcé sur l'existence et la rupture d'un contrat d'agent commercial liant prétendument les parties ;

Et attendu que la Cour d'appel de Nîmes étant donc compétente pour examiner l'appel principal lui déférant l'examen de cette décision, elle l'est également pour examiner l'appel incident régularisé par la SA "Haladjian Frères" selon conclusions déposées et signifiées le 20 juin 2012, sans préjudice de l'appréciation que la cour pourra faire du mérite de la fin de non-recevoir opposée en défense à la demande principale ;

Attendu que la SARL "JM & Co" qui succombe en son exception, devra supporter les dépens de l'incident et payer à la SA "Haladjian Frères" une somme équitablement arbitrée à 1 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ces motifs : LA COUR, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Reçoit le déféré en la forme. Déclare le magistrat de la mise en état incompétent pour statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la SA "Haladjian Frères" à l'examen de la demande au fond présentée par la SARL "JM & Co" au visa de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ; Déclare recevable l'appel principal de la SARL "JM & Co" et par voie de conséquence l'appel incident de la SA "Haladjian Frères" ; Dit que la SARL "JM & Co" supportera les dépens de l'incident et payera à la SA "Haladjian Frères" une somme de 1 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile. Dit que la SCP d'avocats "Guizard/Servais" pourra recouvrer directement contre la partie ci-dessus condamnée, ceux des dépens dont elle aura fait l'avance sans en recevoir provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.