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Décisions

Commission, 27 juin 2012, n° 2013-198

COMMISSION EUROPÉENNE

Décision

Concernant l'aide d'État n° SA.28356 (C 37-09, ex N 226-09) - Habidite Alonsotegi

Commission n° 2013-198

27 juin 2012

LA COMMISSION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et notamment son article 108, paragraphe 2, premier alinéa (1),

vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 62, paragraphe 1, point a),

vu la décision de la Commission d'ouvrir la procédure prévue à l'article 108, paragraphe 2, du TFUE à l'égard de l'aide C 37-09 (ex N 226-09) (2),

après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations conformément auxdits articles, et compte tenu de ces observations,

considérant ce qui suit :

I. PROCÉDURE

(1) Le 15 avril 2009, les autorités espagnoles ont notifié, pour des motifs de sécurité juridique, deux contrats conclus le 15 décembre 2006, entre, d'une part, Bizkailur S.A. (ci-après "Bizkailur") et la Diputación Foral de Bizkaia (ci-après la "Diputación") et, d'autre part, les entreprises privées Habidite Technologies País Vasco S.A. (ci-après "Habidite"), Grupo Empresarial Afer S.L. (ci-après le "groupe Afer") et le groupe Habidite.

(2) Le 2 décembre 2009, la Commission a ouvert en vertu de l'article 108, paragraphe 2, du traité une procédure formelle d'examen concernant les contrats notifiés (ci- après la "décision d'ouvrir la procédure") (3). La décision d'ouvrir la procédure a été publiée au Journal officiel de l'Union européenne le 12 mars 2010 (4).

(3) Les autorités espagnoles n'ont pas présenté d'observations sur la décision d'ouvrir la procédure. Habidite a présenté, par lettre du 9 avril 2010, des observations sur cette décision. Celles-ci ont été transmises par lettre du 15 avril 2010 aux autorités espagnoles, qui ont répondu par lettre du 12 mai 2010. Aucune partie tierce n'a présenté d'observations au sujet de la décision d'ouvrir la procédure.

(4) Le 6 septembre 2010, Habidite a demandé, en vertu du règlement (CE) n° 1049-2001 (5), l'accès aux documents du dossier fournis par les autorités espagnoles. La Commission a consulté les autorités espagnoles à propos de cette demande le 10 septembre 2010. Le 13 septembre, celles-ci ont répondu qu'elles ne s'opposaient pas à ce que Habidite se voie octroyer l'accès aux documents demandés, qui lui ont été transmis le 7 octobre 2010.

(5) La Commission a demandé des renseignements complémentaires aux autorités espagnoles par lettres du 28 juin 2010 et du 8 décembre 2010, auxquelles les autorités espagnoles ont répondu les 26 juillet 2010 et 14 janvier 2011 respectivement.

(6) Habidite a présenté des observations supplémentaires et fourni de nouvelles informations le 27 juillet 2010 (réponse des autorités espagnoles le 3 novembre 2011), le 6 avril 2011 (observations enregistrées le 13 avril 2011 et réponse des autorités espagnoles le 30 mai 2011, enregistrée le 6 juin 2011) et le 7 juillet 2011. Les services de la Commission se sont réunis le 3 février 2011 à Bruxelles avec des représentants de Habidite, à la demande de cette dernière.

II. HISTORIQUE DU DOSSIER

Parties contractantes

(7) Les deux contrats qui font l'objet de la présente décision ont été conclus le 15 décembre 2006 entre, d'une part, Bizkailur et la Diputación, et d'autre part, Habidite, le groupe Afer et le groupe Habidite.

(8) Bizkaildur est une entreprise détenue à 100 % par la Diputación et dont l'objectif social est l'acquisition et l'aménagement de terrains pour la promotion de projets industriels et de logements sociaux dans la province de Biscaye. En juin 2010, Bizkailur a fusionné avec d'autres entreprises publiques ayant des domaines d'activité semblables pour former l'actuelle Aspiegiturak S.A.U., entreprise détenue à 100 % par la Diputación et qui a conservé le même domaine d'activité (6).

(9) Habidite fait partie, avec d'autres entreprises liées du groupe Habidite, du groupe privé Afer, dont le siège se trouve à Ortuella (Biscaye) (7). À la date de la notification, le groupe Afer était constitué au total de treize entreprises du secteur de la construction et de secteurs analogues (8). À cette époque, toutes les entreprises du groupe Afer étaient détenues majoritairement par [...] (*). Selon la Diputación et Habidite, lorsque les deux contrats ont été conclus, ni Habidite ni le groupe Afer n'étaient des entreprises en difficulté au sens des points 9, 10 et 11 des lignes directrices communautaires concernant les aides d'État au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté (9) (ci-après les "lignes directrices relatives au sauvetage et à la restructuration").

Le projet Habidite

(10) Les contrats notifiés ont été conclus pour appuyer un nouveau projet d'investissement que devait développer Habidite : la création d'une usine de fabrication de modules de construction (ci-après l'"usine Habidite") à Alonsotegi, localité située dans la région du grand Bilbao qui, lors de la conclusion des contrats notifiés, était une région assistée au titre de l'article 107, paragraphe 3, point c), du traité (10). L'usine Habidite devait créer 1 100 nouveaux postes de travail dans cette région assistée.

(11) La nouvelle usine devait produire les "modules Habidite", c'est-à-dire des modules de construction préfabriqués qui seraient utilisés dans l'assemblage direct de logements et de bâtiments. Les modules Habidite devaient être fabriqués à l'aide d'une ligne de montage similaire à celle qui est utilisée dans l'industrie automobile pour ensuite être transportés et assemblés directement sur place. Le produit était considéré comme novateur, non seulement en raison de la technologie particulière utilisée pour la production, mais également en raison du gain de temps et de ressources dans l'assemblage du produit final (bâtiments et logements) et de l'utilisation de matériaux permettant des économies d'énergie. L'entreprise avait présenté différentes demandes de brevets concernant ce produit (11).

(12) D'après les informations fournies par la Diputación, au moment de la signature des deux contrats notifiés, les coûts de ce projet d'investissement à Alonsotegi avaient été estimés à 55 millions d'EUR, ventilés comme suit :

Terrains / 4,8 Mio EUR

Construction industrielle / 22,5 Mio EUR

Travaux de viabilisation / 4,04 Mio EUR

Installations / 24,0 Mio EUR

Total / 55,34 Mio EUR

(13) Selon les estimations, la production annuelle de la future usine Habidite devait être de 3 500 maisons au cours des premières années de fonctionnement de l'usine et de 4 500 maisons lorsque l'usine aurait atteint sa pleine capacité de production.

Cadre juridique relative au logement social au Pays basque

(14) Pour comprendre le contexte dans lequel les contrats notifiés ont été conclus le 15 décembre 2006, il convient de décrire brièvement le cadre juridique régissant l'octroi de logements sociaux au Pays basque.

(15) Les prix moyens du marché immobilier dans cette communauté autonome étaient plus élevés que dans le reste de l'Espagne avant l'éclatement de la crise en 2008 et continuent de l'être à la date de la présente décision. Les autorités du Pays basque cherchent à garantir l'accès au logement pour les plus défavorisés en proposant des logements sociaux qui bénéficient d'un régime de protection (logements protégés) ou de semi-protection (logements conventionnés). Ces deux catégories de logements sociaux sont définies aux considérants (16) à (19).

(16) La "Ley 2/2006 de Suelo y Urbanismo" (loi 2-2006 relative à l'occupation des sols et à l'urbanisme (12), ci-après "loi 2-2006 de la communauté autonome") dispose que :

a) 40 % des terrains constructibles à usage résidentiel sont destinés à des logements protégés ou conventionnés, à raison de 20 % pour chaque catégorie (article 80, paragraphe 2, de la loi 2-2006 de la communauté autonome) ;

b) dans chaque zone de terrain constructible à usage préférablement résidentiel, 55 % du terrain sera réservé à des logements protégés et 20 % à des logements conventionnés (article 80, paragraphe 3, de la loi 2-2006 de la communauté autonome).

(17) Les logements relevant du régime officiel de semi-protection (logements conventionnés) font partie d'une catégorie intermédiaire entre les logements bénéficiant d'une protection officielle et les logements vendus librement sur le marché. Les prix des logements conventionnés sont plafonnés par la loi 2-2006 de la communauté autonome à un maximum de 1,7 fois les prix maximums des logements protégés. Dans la province de Biscaye, ces derniers sont fixés en vertu de l'"Orden de 1.8.2004 del Departamento de Vivienda y Asuntos Sociales (13)" (arrêté du 1.8.2004 du département du logement et des affaires sociales), qui établit un prix initial réglementé qui est actualisé chaque année sur la base de l'indice des prix à la consommation, tel que déterminé par l'Institut espagnol des statistiques.

(18) D'après la Diputación, en 2006, lorsque les contrats notifiés ont été conclus, les prix maximums applicables aux logements protégés étaient les suivants :

- 1 351,86 EUR/m 2 dans les communes énumérées à l'annexe I de l'arrêté du 1.8.2004 ;

- 1 307,94 EUR/m 2 dans les communes énumérées à l'annexe II de l'arrêté du 1.8.2004 ;

- 1 181,54 EUR/m 2 dans les communes restantes ;

- 472,40 EUR/m 2 pour les annexes (garage/cagibi, etc.).

Les prix des logements conventionnés étaient plafonnés à un montant maximum de 1,7 fois les prix indiqués ci- dessus.

(19) La Diputación précise que lorsque Bizkailur a conclu avec Habidite les contrats notifiés, elle a agi en vertu de la Ley 7-1985, de 2 de abril de 1985, reguladora de las Bases del Regímen Local (loi-cadre 7-1985 du 2 avril 1985 régissant les autorités locales, ci-après la "loi 7-1985") (14), qui donne aux municipalités compétence pour gérer les affaires d'intérêt local, et notamment l'offre de logements sociaux (article 25). En vertu de l'article 109, paragraphe 2, du Real Decreto 1372-1986 (décret royal 1372-1986) et de l'article 79 de la loi 7-1985 (version consolidée), les municipalités transféraient à Bizkailur, à titre onéreux ou gratuit, les actifs nécessaires pour qu'elle puisse se conformer aux objectifs concernant les logements sociaux. Au moment de la conclusion des contrats notifiés (15 décembre 2006), ces objectifs étaient définis dans un plan, adopté par la Diputación en 2004, portant sur l'offre de logements sociaux en Biscaye pour la période 2004-2007 : il s'agissait du Plan Foral de actuación en materia de vivienda 2004-2007 (plan régional 2004-2007 relatif aux logements, ci-après le "Plan Foral"). D'après la Diputación, le Plan Foral prévoyait que Bizkailur fabrique au cours de la période 2004-2007 un total de 3 000 logements relevant du régime de protection.

Les contrats notifiés

(20) Selon le premier contrat, dénommé "mesure 1" dans la décision d'ouvrir la procédure (ci-après le "contrat relatif aux terrains"), la Diputación et Bizkailur ont convenu que Bizkailur acquerrait et aménagerait en vue d'un usage industriel une parcelle de 101 430 m 2 (81 600 m 2 en vue d'un usage industriel pour l'usine, 5 300 m 2 pour des bureaux et 14 300 m 2 pour d'autres usages industriels) dans la zone industrielle de Montealegre, située sur la commune de Alonsotegi, dans un délai maximal de 24 mois à partir de la date de la signature du contrat [deuxième partie, article premier, point ii), du contrat]. Bizkailur devait transmettre à Habidite la propriété du terrain aménagé, dans un délai de 12 mois à compter de la date de la signature du contrat [deuxième partie, article premier, point iii), du contrat], "libre de toute charge, dépense ou contribution", pour un prix équivalent au "prix effectif payé par Bizkailur lors de l'acquisition" [deuxième partie, article premier, point vi), du contrat]. Habidite paierait ce prix en quatre tranches d'un montant équivalent à 25 %, à l'échéance de la quatrième, cinquième, sixième et septième années à compter de la signature de l'acte de mutation.

(21) En vertu du deuxième contrat, dénommé "mesure 2" dans la décision d'ouvrir la procédure (ci-après le "contrat relatif aux logements"), la Diputación devait acheter à Habidite, soit directement soit en passant par Bizkailur, un total de 1 500 logements dont 750 d'une superficie inférieure à 75 m 2 . La Diputación ou Bizkailur devait passer commande de 1 500 logements entre mai 2007 et fin juin 2010 pour pouvoir livrer l'ensemble de ceux-ci en mai 2011.

(22) Les logements ayant fait l'objet d'un contrat devaient être construits sur des terrains mis à disposition de Habidite par Bizkailur, puis vendus comme logements conventionnés, soit directement par la Diputación ou Bizkailur, soit par Habidite même, en respectant les dispositions relatives aux prix maximums applicables [voir les considérants (14) à (19)]. Si la Diputación ou Bizkailur se chargeait de vendre les logements pour lesquels une commande avait été passée, il était prévu que Habidite n'acquerrait pas la propriété des terrains sur lesquels les logements étaient construits. Dans ce cas, la tâche de Habidite se limiterait exclusivement à la construction des logements.

(23) Le contrat permettait aussi, à titre exceptionnel, à Habidite ou au groupe Afer d'agir également comme promoteurs [article A, point f), du contrat relatif aux logements], pour certains logements sur lesquels portait ledit contrat. Il était prévu que, dans ces cas exceptionnels, Habidite ou Afer reçoivent d'abord la propriété des terrains nécessaires pour la construction des logements, réalisent ensuite les travaux de construction et se chargent enfin de vendre les logements comme logements conventionnés. Dans ces cas, Habidite ou Afer n'aurait conservé que le prix fixé pour les logements, conformément au considérant 24, alors que la part du prix correspondant au terrain aurait été reversée à la Diputación et/ou à Bizkailur.

(24) Conformément à l'article A, point e), du contrat relatif aux logements, le prix obtenu par Habidite pour les 1 500 logements était le suivant :

a) logements de plus de 75 m 2 de superficie utile : 83 % du prix appliqué par Bizkailur, auquel s'ajoutait 100 % du prix obtenu pour les annexes (garages, cagibis) ;

b) logements de moins de 75 m 2 de superficie utile : 83,30 % du prix appliqué par Bizkailur, auquel s'ajoutait 100 % du prix obtenu pour les annexes (garages, cagibis) ;

(25) Bizkailur aurait ainsi conservé respectivement 17 % ou 16,70 % du prix obtenu pour les logements (à l'exception des annexes, garages, cagibis, etc. dont le prix de vente total reviendrait à Habidite).

(26) Selon un exemple fourni par la Diputación, Habidite aurait obtenu, pour un logement de 75 m 2 vendue comme logement conventionné en 2006, les montant suivants : 143 060,58 EUR (83 % de 75 m 2 × 1,351 EUR × 1,7), auxquels il convenait d'ajouter 28 107,6 EUR pour les annexes (100 % de 35 m 2 × 472,4 EUR), sur un prix total de 200 459,5 EUR auquel Bizkailur aurait vendu le logement conventionné.

(27) Conformément à l'article A, point g), du contrat relatif aux logements, la Diputación ou Bizkailur auraient pu, à titre exceptionnel, vendre au prix du marché une partie des 1 500 logements commandés à Habidite. Dans ce cas, cette dernière aurait obtenu les mêmes pourcentages du prix de vente indiqués à l'article A, point e), et mentionnés ci-dessus au considérant (22).

(28) La Diputación et Bizkailur n'ont pas publié un avis de marché avant de conclure avec Habidite le contrat relatif aux logements.

Abandon du projet Habidite

(29) Le projet Habidite a finalement été abandonné de facto. D'après la Diputación, cet abandon est dû principalement au fait que Bizkailur avait engagé des dépenses supérieures à celles qui étaient prévues initialement pour l'acquisition et l'aménagement, en vue d'un usage industriel, des terrains sur lesquels l'usine Habidite devait être construite.

(30) La Diputación a indiqué (15) qu'entre mai 2007 et avril 2008, Bizkailur avait acheté 205 487,73 m 2 de terrain pour ce projet, pour lequel elle avait payé un montant total de 4,7 millions d'EUR. D'après elle, il était nécessaire d'acquérir 95 000 m 2 supplémentaires, dont le coût additionnel était évalué à 2,6 millions d'EUR environ. En ce qui concerne les coûts d'aménagement des terrains en vue d'un usage industriel, ils avaient été évalués, en mars 2009, à 28,5 millions d'EUR.

(31) La propriété des terrains déjà acquis par Bizkailur pour ce projet n'a pas été transmise à Habidite.

III. LA DÉCISION D'OUVRIR LA PROCÉDURE

(32) Dans la décision d'ouvrir la procédure du 2 décembre 2009 (16), la Commission a considéré que le contrat relatif aux terrains et le contrat relatif aux logements semblaient impliquer l'existence d'aides d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, du traité. Par ailleurs, les aides ne semblaient pas compatibles avec le traité en ce qui concerne les règles applicables en matière d'aides d'État.

Existence d'une aide

(33) En ce qui concerne le contrat relatif aux terrains, la Commission a conclu à titre préliminaire que les conditions fixées pour le remboursement, par le bénéficiaire, de la somme versée pour l'acquisition et l'aménagement des terrains étaient assimilables à un prêt sans intérêts, ce qui conférait à Habidite un avantage qu'elle n'aurait pas pu obtenir sur le marché.

(34) Pour ce qui est du contrat relatif aux logements, la décision d'ouvrir la procédure indiquait que le prix que Bizkailur devait payer pour les 1 500 logements ne semblait pas conforme aux prix du marché puisque le bénéficiaire avait calculé, dans son propre plan d'entreprise, que le prix moyen qu'il obtiendrait de Bizkailur serait de 2 012,19 EUR/m 2 , alors que le prix moyen escompté sur le marché était de 1 762,6 EUR/m 2 .

(35) La Commission a mis également en évidence une série d'indices relatifs à l'existence d'un avantage en faveur de Habidite à la lumière de l'arrêt du Tribunal dans l'affaire P&O Ferries (17) : a) le contrat relatif aux logements n'avait pas été conclu au moyen d'un appel d'offres ; b) la Diputación Foral de Bizkaia et Bizkailur n'ont pas fait valoir ni démontré la nécessité de proposer des logements sociaux ; et c) le contrat relatif aux logements mentionnait la possibilité qu'une partie des 1 500 logements achetés à Habidite soit vendue sur le marché. Par ailleurs, la Commission a fait observer que l'achat d'une partie considérable de la production de la nouvelle usine au cours de ses premières années de fonctionnement réduisait les risques habituellement liés à un nouveau projet d'investissement. En ce qui concerne le critère d'utilisation de ressources d'État et d'imputabilité à l'État, la commission a indiqué, en ce qui concerne l'existence d'une aide éventuelle contenue dans les deux contrats, que Bizkailur était une entreprise détenue à 100 % par les autorités publiques et contrôlée par ces dernières, qui réalisait les tâches qui lui étaient confiées par l'État. Quant à la question de la sélectivité, la Commission a constaté que les contrats bénéficiaient clairement et exclusivement à Habidite et au groupe Afer. Pour ce qui est des distorsions de concurrence et de l'incidence sur les échanges commerciaux, la Commission a souligné que Habidite exerçait ses activités dans le secteur de la construction, dans lequel la concurrence est très intense et où une aide à une entreprise risque de porter préjudice aux entreprises d'autres États membres.

Compatibilité

(36) Dans la décision d'ouvrir la procédure, la Commission a émis des doutes sur la compatibilité, avec le traité, de l'aide éventuelle que comportent les contrats notifiés, compte tenu des critères de compatibilité établis dans les lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale pour la période 2007-2013 (18), dans le règlement (CE) n° 800-2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (19) et dans le cadre communautaire temporaire pour les aides d'État destinées à favoriser l'accès au financement dans le contexte de la crise économique et financière actuelle (20).

IV. OBSERVATIONS FORMULÉES PAR LES AUTORITÉS ESPAGNOLES

(37) Les autorités espagnoles n'ont pas présenté d'observations concernant la décision d'ouvrir la procédure [voir le considérant (3)], mais elles ont fourni des informations complémentaires en réponse aux demandes que leur a adressées la Commission après la décision d'ouvrir la procédure et ont également répondu à certains des arguments avancés par Habidite. Ces réponses et ces informations complémentaires sont résumées dans les considérants (48) à (54).

V. OBSERVATIONS FORMULÉES PAR DES TIERS

(38) Comme indiqué aux considérants (3) et (6), Habidite a présenté, le 9 avril 2010, des observations sur la décision d'ouvrir la procédure et a transmis des informations complémentaires et des observations les 27 juillet 2010, 6 avril 2011 et 7 juillet 2011. Dans ces documents, Habidite a présenté, d'une part, des faits que la Commission ignorait lorsqu'elle a adopté la décision d'ouvrir la procédure et, d'autre part, des arguments pour réfuter l'existence d'une aide dans les contrats notifiés. Ces arguments et les éléments de fait supplémentaires présentés par Habidite sont résumés aux considérants (39) à (47).

Contexte factuel

(39) Premièrement, Habidite a fait savoir qu'un troisième contrat avait été conclu à la même date que les contrats relatifs aux terrains et aux logements (15 décembre 2006). Dans celui-ci (ci-après le "contrat relatif aux aides à la formation"), la Diputación s'engageait à fournir à Habidite une aide à la formation pour les 1 100 nouveaux employés embauchés dans l'usine Habidite. Elle s'engageait notamment à couvrir les coûts de formation des 1 100 salariés, alors que Habidite s'engageait à maintenir les 1 100 nouveaux emplois pendant 5 ans au moins. Le contrat relatif aux aides à la formation a également été abandonné de facto en raison de l'échec du projet Habidite [voir les considérants (29) à (31)].

(40) Deuxièmement, Habidite a fourni des documents indiquant qu'une aide régionale avait été accordée au projet Habidite, par décision du gouvernement basque du 30 décembre 2008, pour un montant total de 6 millions d'EUR, au titre du régime d'aide régionale XR 175/2007, bénéficiant d'une exemption par catégorie (21).

(41) Troisièmement, Habidite a indiqué qu'après l'abandon du projet Habidite, une procédure contentieuse administrative avait été engagée par lettres du 6 février et du 17 septembre 2009 pour non-respect, de la part de la Diputación et de Bizkailur, des obligations qui leur incombaient en vertu des trois contrats. Habidite a précisé également qu'elle avait l'intention de poursuivre son action devant les juridictions espagnoles compétentes.

Existence d'une aide et compatibilité

(42) Habidite allègue que les contrats relatifs aux terrains et aux logements ne satisfont pas aux critères cumulatifs permettant d'établir l'existence d'une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, du traité.

(43) Pour ce qui concerne les éléments d'aide d'État distincts du critère de l'avantage, Habidite a présenté les arguments suivants, qui sont communs aux deux contrats notifiés :

a) aucun des deux contrats n'entraîne de transfert de ressources d'État puisqu'ils portent sur des transactions réalisées dans les conditions du marché et qu'il n'en résulte donc pas une perte de ressources publiques (arrêt de la Cour dans l'affaire PreussenElektra (22)) ;

b) le fait que le contrat relatif aux logements n'ait pas été conclu après publication d'un avis de marché ne signifie pas que le critère de sélectivité soit rempli. Conformément au "Real Decreto Legislativo n° 781-1986, de 18 de abril de 1986, por el que se aprueba el texto refundido de las disposiciones legales vigentes en materia de Régimen Local" (23) (décret-loi royal n° 781-1986, du 18 avril 1986, portant approbation de la refonte des dispositions juridiques en vigueur en matière de régime local), et à l'article 31 de la directive 2004-18-CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services (24), ces contrats peuvent également être conclus directement, c'est-à-dire sans publication d'un avis de marché, lorsque la nature technique du projet ou la protection de droits d'exclusivité le justifie ;

c) le caractère unique des modules préfabriqués de Habidite, vu sous l'angle des caractéristiques du produit et de la technique d'assemblage, exclut toute possibilité de fausser la concurrence ou d'affecter les échanges entre États membres. Dans les affaires N-09084 Ristretto Group/Williams Scottsman et N-04059 TDR Capital/Agelco, les autorités espagnoles de la concurrence ont défini les marchés de référence comme étant ceux de "la fabrication, la vente et la location de constructions modulaires". Selon cette définition, le caractère unique des modules de Habidite signifie que cette dernière n'a pas de concurrents directs qui puissent être lésés par ces deux contrats. Par ailleurs, dans la décision qu'elle a rendue dans l'affaire M.2473 Finnforest/Moelven Industrier (25), la Commission a défini le marché de constructions modulaires comme étant local ou régional puisque les coûts de transport rendent la concurrence sur de longues distances insoutenable. En tout état de cause, les prix de Habidite étaient très compétitifs compte tenu des caractéristiques technologiques du produit.

(44) Habidite a également présenté des arguments détaillés spécifiques pour contester le fait que l'un des deux contrats notifiés lui aurait conféré un avantage.

(45) En ce qui concerne le contrat relatif aux logements, Habidite fait valoir, en substance, qu'elle n'aurait pas pu bénéficier d'un quelconque avantage étant donné que les prix de vente stipulés n'étaient pas supérieurs aux niveaux du marché, mais plutôt inférieurs. En particulier :

a) les prix que Habidite aurait obtenu pour les logements sur la base du contrat étaient, par définition, inférieurs aux niveaux du marché, étant donné que Bizkailur aurait vendu les logements aux niveaux de prix réglementés, inférieurs à ceux du marché, et fixés par la loi pour les logements conventionnés [voir les considérants (14)à (19)] ;

b) le prix moyen de 2 010,19 EUR/m 2 que Bizkailur aurait obtenu pour les logements construits par Habidite était comparable aux prix moyens que Bizkailur payait à cette époque sur la base de contrats analogues relatifs à la construction de logements protégés ou conventionnés. Par exemple, d'après Habidite, Bizkailur a payé, en 2007, 2 277 EUR/m 2 pour la construction de logements sociaux à Lemoiz, 1 964 EUR/m 2 à Ziérbana, et 2 021 EUR/m 2 à Areatza. En 2007, le prix moyen des logements de 84 m 2 vendus en tant que logements protégés ou conventionnés était de 1 808,69 EUR/m 2 dans quatre communes de Biscaye (26) ;

c) en tout état de cause, sur la base du contrat relatif aux logements [voir les considérants (24) et (25)], Habidite aurait obtenu 83 % (pour les logements de plus de 75 m 2) et 83,30 % (pour les logements de moins de 75 m 2) du prix moyen de 2 010,19 EUR/m 2 . À cet égard, il convient de signaler que la décision d'ouvrir la procédure indiquait, à tort, que le chiffre de 2 010,19 EUR/m 2 était le prix que Habidite aurait obtenu en vertu de ce contrat ;

d) le prix moyen que Bizkailur aurait obtenu pour les logements construits par Habidite était largement inférieur aux niveaux de prix des logements similaires vendus librement sur le marché dans la province. En 2007, le prix moyen du marché dans la province de Biscaye était de 2 921,9 EUR/m 2 (27).

(46) Pour ce qui est du contrat relatif aux terrains, Habidite fait valoir qu'elle n'aurait obtenu aucun avantage étant donné qu'elle aurait dû, selon elle, rembourser à Bizkailur non seulement les coûts réels supportés lors de l'acquisition et de l'aménagement des terrains comme stipulé dans le contrat, mais aussi les coûts de financement liés à cette opération.

(47) En outre, Habidite conteste les coûts estimés par la Diputación pour l'acquisition et l'aménagement des terrains. D'après le contrat relatif aux terrains, Bizkailur devait uniquement acquérir 101 403 m 2 pour ce projet, et non 205 000 m 2 , comme l'indique la Diputación. Par ailleurs, l'estimation des coûts d'aménagement de 254 785 m 2 de terrain en vue d'un usage industriel, qui s'élèvent selon la Diputación à 28,5 millions d'EUR, est erronée. Ces coûts semblaient correspondre davantage aux coûts supportés par la Diputación pour un autre projet, à savoir la construction du tronçon autoroutier Kastrexana-Arbuio-Sodupe du Corredor del Kadagua. Habidite soutient par ailleurs que les terrains acquis pour le projet Habidite ont été utilisés illégalement pour y déverser des déchets, comme l'a indiqué également le tribunal de première instance de Barakaldo dans son arrêt n° 148-2010 du 1 er septembre 2010.

VI. INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES ET RÉPONSES DES AUTORITÉS ESPAGNOLES AUX OBSERVATIONS DE HABIDITE

(48) En réponse aux questions de la Commission, la Diputación a confirmé que le projet Habidite avait été abandonné et que les engagements contractuels pris à l'égard de Habidite dans les contrats relatifs aux terrains et aux logements n'avaient pas été exécutés.

(49) Pour ce qui est du contrat relatif aux aides à la formation [voir le considérant (39)], la Diputación souligne que son engagement à fournir une aide à la formation aux 1 100 salariés de l'usine Habidite était subordonné, selon l'article 10 du contrat, au respect de la législation applicable, ce qui impliquait par conséquent implicitement une éventuelle notification à la Commission ou une autorisation accordée au titre des règles relatives aux aides d'État. La Diputación a confirmé que les aides à la formation évoquées n'ont pas été versées.

(50) Lorsque la Diputación a été invitée à expliquer la relation entre les contrats notifiés et les aides régionales accordées en 2008 par le gouvernement basque et qu'il lui a été demandé si les deux trains de mesures portaient sur le même projet d'investissement, celle-ci n'a pas exclu qu'il pouvait s'agir du même projet d'investissement, mais elle a fait remarquer que cela ne signifiait pas nécessairement que les coûts d'investissement éligibles que le gouvernement basque avait pris en compte en 2008 pour l'aide de 6 millions d'EUR étaient les mêmes coûts éligibles que ceux du projet tel qu'il se présentait en 2006, lorsque les contrats notifiés ont été signés. À cet égard, la Diputación renvoie aux informations fournies par le gouvernement basque et par Habidite.

(51) En ce qui concerne le remboursement de la somme due par Habidite en vertu du contrat relatif aux terrains et, en particulier, l'allégation de Habidite selon laquelle ses obligations de remboursement incluaient les coûts de financement liés à l'acquisition et à l'aménagement des sols, la Diputación renvoie à l'article premier, point vi), du contrat relatif aux terrains, libellé comme suit : "le prix à payer par [Habidite] est équivalent au coût effectif supporté par Bizkailur S.A. [...] lors de l'acquisition des terrains décrits à [...]".

(52) Enfin, d'après les informations dont dispose la Diputación, lorsque les deux contrats notifiés ont été conclus, ni Habidite ni le groupe Afer n'étaient considérés comme des entreprises en difficulté au sens des points 9, 10 et 11 des lignes directrices relatives au sauvetage et à la restructuration.

(53) Quant au gouvernement basque, il a fourni des informations sur l'aide régionale de 6 millions d'EUR accordée à Habidite le 30 décembre 2008, y compris les dépenses éligibles prises en compte pour l'octroi de cette aide. Le tableau suivant présente la ventilation des dépenses éligibles par catégorie :

Investissement total (en millions d'EUR) / 90,42

Frais de R + D / 13,71

Dépenses éligibles, dont : / 76,71

TI / 2,85

Terrains / 5,5

Constructions / 34,76

Équipements techniques / 19,14

Machines / 11,94

Autres installations / 0,737

Équipement informatique / 0,965

Terrains et constructions excédentaires / 3,9

Dépenses éligibles totales : / 72,8

Aide accordée / 6

(54) Cette aide n'a pas été décaissée. Conformément au point 65 des lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale pour la période 2007-2013 (28), les autorités espagnoles ont présenté à la Commission, le 19 février 2009, la fiche informative relative aux aides accordées en faveur de grands projets d'investissement non notifiables au titre d'un régime d'aide régionale autorisé (29).

VII. APPRÉCIATION

Mesures non couvertes par la présente décision

(55) La présente décision ne couvre pas : a) le contrat relatif aux aides à la formation conclu par la Diputación et Habidite le 15 décembre 2006 et b) l'aide régionale de 6 millions d'EUR accordée au groupe Habidite par le gouvernement basque le 30 décembre 2008, pour les raisons exposées aux considérants (56) à (59).

(56) En ce qui concerne le contrat relatif aux aides à la formation conclu par la Diputación et Habidite à la même date que les contrats notifiés [voir les considérants (39) et (49)], la Commission fait remarquer que cette mesure n'a pas été notifiée par les autorités espagnoles et qu'elle n'était pas visée dans la décision d'ouvrir la procédure. Conformément à une pratique établie, on considère que l'aide d'État est octroyée à partir du moment où il existe une décision juridiquement contraignante et non soumise à conditions concernant son décaissement (30). L'article 10 du contrat relatif aux aides à la formation [voir le considérant (49)] subordonne l'engagement de verser l'aide à la formation au respect de la législation applicable, et notamment des règles de l'Union en matière d'aides d'État. Par conséquent, on ne saurait considérer que l'engagement d'octroi de l'aide à la formation établi dans ce contrat n'était pas soumis à condition au moment de la conclusion du contrat. Par ailleurs, les autorités espagnoles ont confirmé que l'aide à la formation en question n'avait pas été décaissée. En tout état de cause, étant donné que le projet Habidite de Alonsotegi n'a pas vu le jour, il est improbable que cette aide soit versée à l'avenir.

(57) La présente décision ne couvre pas non plus l'aide régionale de 6 millions d'EUR accordée par le gouvernement basque à Habidite le 30 décembre 2008 [voir les considérants (40) et (50)]. Cependant, il convient de signaler que tant les deux contrats notifiés analysés dans la présente décision que l'aide régionale accordée en 2008 concernent le même projet d'investissement, à savoir la création d'une usine de modules de Habidite à Alonsotegi. Cette allégation n'a pas été contestée spécifiquement ni par le gouvernement basque ni par la Diputación [voir à cet effet le considérant (50)].

(58) En vertu du point 66 des lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale pour la période 2007- 2013 (31), les autorités espagnoles doivent veiller au respect des dispositions relatives à l'accumulation d'aides applicables à l'aide régionale accordée en 2008.

(59) Par ailleurs, il convient de rappeler que conformément aux informations fournies par la Diputación [voir le considérant (30)], l'achat des terrains nécessaires à ce projet d'investissement a débuté en mai 2007 et plusieurs parcelles ont été acquises à cet effet par la suite jusqu'en avril 2008. Par conséquent, la mise en œuvre du projet avait déjà commencé en mai 2007. En vertu du point 38 des lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale pour la période 2007-2013 (32), une aide ne peut être accordée au titre de régimes d'aides que si le bénéficiaire a présenté une demande à cet effet et si l'autorité responsable de l'administration du régime a ensuite confirmé par écrit que, sous réserve de vérifications plus détaillées, le projet en principe remplissait les conditions d'admissibilité fixées dans le régime avant le début des travaux, et ce pour garantir que l'aide aura un effet incitatif sur la réalisation des investissements.

Législation applicable

(60) Avant d'évaluer l'existence d'une aide et sa compatibilité avec le traité, la Commission doit définir les règles d'aide d'État applicables ratione temporis.

(61) Les contrats relatifs aux terrains et aux logements ont été signés le 15 décembre 2006, mais n'ont pas été notifiés à la Commission pour examen avant avril 2009. Comme indiqué au considérant (56), conformément à une pratique établie (33), on considère que l'aide d'État est octroyée à partir du moment où il existe une décision juridiquement contraignante et non soumise à conditions relative à son décaissement. Dans le cas des deux contrats notifiés, cet engagement juridiquement contraignant et non soumis à conditions a été adopté le 15 décembre 2006, au moment de sa signature par la Diputación et Bizkailur. Par conséquent, toute aide que comporteraient les deux contrats est illégale étant donné qu'elle a été accordée en violation de l'obligation de notification établie à l'article 108, paragraphe 3, du traité.

(62) D'après la jurisprudence CELF/SIDE (34), une notification ou déclaration de compatibilité postérieure ne fait pas disparaître le caractère illégal des aides accordées en violation des obligations de notification ou de suspension. Comme indiqué dans la communication de la Commission sur la détermination des règles applicables à l'appréciation des aides d'État illégales (35), les règles applicables aux aides illégales sont celles qui sont en vigueur à la date d'octroi de l'aide, c'est-à-dire en l'espèce le 15 décembre 2006. Ces principes sont confirmés également aux points 63 et 105 des lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale pour la période 2007-2013 (36). Au moment d'apprécier l'existence d'une aide et sa compatibilité, la Commission doit donc se fonder sur les règles relatives aux aides d'État en vigueur le 15 décembre 2006, date de signature des deux contrats notifiés.

VII.1 Existence d'une aide

(63) En vue de déterminer si les mesures en question constituent une aide d'État, la Commission doit évaluer si les conditions cumulatives établies à l'article 107, paragraphe 1, du traité sont remplies. Il ressort de cette disposition que "[s]auf dérogations prévues par les traités, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions". Ces critères cumulatifs sont examinés aux considérants 64 à 107 pour chacun des deux contrats notifiés.

VII.1.1 Mesure 1 : contrat relatif aux terrains

Utilisation de ressources d'État et imputabilité à l'État

(64) L'un des critères servant à déterminer si une mesure est constitutive d'une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, du traité, est l'utilisation de ressources d'État, qu'elle prenne la forme d'un décaissement ou de recettes non perçues par l'État. Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, les ressources d'entreprises publiques ou privées sur lesquelles les autorités publiques peuvent exercer un contrôle direct ou indirect sont également considérées comme des ressources d'État dans la mesure où celles-ci restent sous contrôle public, et donc à la disposition des autorités nationales compétentes (37). À cet égard, la Commission observe ce qui suit dans les considérants (65) et (66).

(65) En premier lieu, le contrat relatif aux terrains a été conclu conjointement par la Diputación et Bizkailur. Il contient différents indices qui montrent clairement que Bizkailur agissait, dans le cadre de ce contrat, comme "relais" de la Diputación. Le contrat relatif aux terrains a été signé, au nom de la Diputación et de Bizkailur, par le Diputado General (président) de Biscaye. Le point 2 du préambule de ce contrat établit que la Diputación, en tant que détentrice à 100 % de Bizkailur, s'est notamment fixé comme objectifs de politique publique la promotion de nouveaux projets d'investissement novateurs, la création d'emplois et l'encouragement de l'accès au logement social pour les citoyens de la province de Biscaye. Le point 5 du préambule indique que le contrat a été conclu pour mieux atteindre les objectifs de politique économique et sociale mentionnés au point 2 du préambule, que ce soit directement ou par l'entremise d'entreprises publiques telles que Bizkailur.

(66) En second lieu, les ressources que Bizkailur comptait utiliser pour remplir ses obligations relatives à l'acquisition et à l'aménagement des terrains en vue d'un usage industriel, et plus précisément de l'installation de l'usine Habidite à Alonsotegi étaient sous le contrôle de la Diputación. À partir de 1999, Bizkailur était détenue à 100 % par la Diputación et contrôlée par cette dernière (38). Les critères "organiques" et "structurels" suivants, établis par la jurisprudence Stardust Marine et qui servent à déterminer si les activités de Bizkailur dans le cadre du contrat relatif aux terrains étaient imputables à l'État, sont remplis (39) :

a) la Diputación avait défini le champ d'activités de Bizkailur dans le cadre du contrat relatif aux terrains ;

b) aux fins du contrat, Bizkailur agissait expressément au nom de la Diputación ;

c) la nature spécifique des activités de Bizkailur, qui visaient exclusivement à atteindre des objectifs de politique publique, montre clairement que cette entreprise n'était pas un opérateur privé normal du marché exerçant ses activités dans des conditions de marché normales.

(67) Au vu des indices exposés aux considérants (65)et (66), il y a lieu de conclure que dans le cas du contrat relatif aux terrains, le critère d'utilisation des ressources d'État et d'imputabilité à l'État est rempli.

Avantage sélectif

(68) La Commission a examiné les modalités et les conditions relatives au remboursement des terrains que la Diputación et Bizkailur devaient fournir pour le projet Habidite à Alonsotegi, exposées dans la deuxième partie, article premier, points vi) et vii), du contrat relatif aux terrains [voir également le considérant (20)], et, sur la base de celles-ci, fait les observations suivantes aux considérants (69) à (83) :

(69) En vertu de la deuxième partie, article premier, point vi), du contrat relatif aux terrains, le prix que devait payer Habidite pour l'acquisition et l'aménagement des terrains en vue d'un usage industriel par Bizkailur correspondait au "coût effectif supporté par Bizkailur [...] pour l'acquisition des terrains [...]". Habidite a allégué [voir le considérant (46)] que, à son sens, cela comprenait également les coûts de financement. Or une telle interprétation ne peut être acceptée. La mention du "coût effectif supporté pour l'acquisition des terrains" est suffisamment claire et ne nécessite aucune interprétation supplémentaire : cette définition couvre uniquement le prix effectif payé par Bizkailur pour l'acquisition des terrains.

(70) Par conséquent, il convient de conclure en premier lieu que ce libellé exclut clairement les coûts effectifs supportés par Bizkailur lors de l'aménagement des terrains en vue d'un usage industriel.

(71) En second lieu, les modalités de remboursement définies dans la deuxième partie, article premier, point vi), du contrat relatif aux terrains, qui concernent une "période de carence" de quatre ans et le remboursement ultérieur fractionné en quatre échéances à raison de 25 % du prix effectif payé par Bizkailur pour l'achat des terrains, sont équivalentes, dans la pratique, à un prêt sans intérêt. Les termes de l'article premier, point vii), du contrat relatif aux terrains ne sauraient être interprétés comme comprenant également les coûts de financement d'un prêt équivalent, c'est-à-dire les intérêts qu'un créancier privé aurait fait payer à Habidite pour un prêt similaire. De fait, il est improbable qu'un opérateur privé dans une situation similaire à celle de Bizkailur aurait accepté, d'une part, de ne pas facturer à Habidite les coûts d'aménagement des terrains et, d'autre part, d'accorder un délai de carence de quatre ans pour le remboursement du prix versé pour l'achat des terrains ainsi qu'un délai de sept ans à compter de la date de mutation des terrains à Habidite pour le remboursement total, et ce sans toucher aucun intérêt pour ce financement.

(72) Au vu des considérants (69) à (71), il y a lieu de conclure que Habidite a bénéficié, grâce au contrat relatif aux terrains, d'un avantage qu'elle n'aurait pas pu obtenir dans des conditions normales de marché. Cet avantage se compose de deux éléments :

a) les intérêts non perçus sur un prêt équivalent au total des coûts supportés par Bizkailur pour l'acquisition du terrain conformément au contrat précité, c'est-à-dire un prêt d'une durée de sept ans, une période de carence de quatre ans et quatre échéances équivalentes de remboursement annuel (de 25 % du montant remboursé chacune) ; et

b) les coûts supportés par Bizkailur pour l'aménagement, en vue d'un usage industriel, de la parcelle de terrain d'une superficie totale minimale de 101 403 m 2 nécessaire pour ce projet, selon les dispositions de l'article premier, point ii), du contrat relatif aux terrains (à savoir un minimum de 81 600 m 2 pour l'usine, 5 300 m 2 pour les bureaux et les annexes, et 14 300 m 2 pour un usage industriel).

(73) Pour ce qui est du premier élément, c'est-à-dire les intérêts non perçus en rapport avec le remboursement du prix d'achat des terrains, la Commission calcule que ceux- ci se seraient élevés à un équivalent-subvention net (ESN) de 13,21 % du prix payé pour l'acquisition de terrains par Bizkailur. Cet ESN a été calculé comme indiqué aux considérants (74) à (77).

(74) Dans un premier temps, le taux d'intérêt applicable à un prêt similaire a été défini sur la base du taux de référence de 4,36 % applicable en Espagne en décembre 2006, tel qu'indiqué dans la communication de la Commission sur les taux de référence (40).

(75) Dans un second temps, il a été établi, sur la base de la communication de la Commission de 1997 concernant la méthode de fixation des taux de référence et d'actualisation (41) (ci-après la "communication de la Commission de 1997"), qui était en vigueur au moment de la conclusion du contrat relatif aux terrains, qu'il n'était pas nécessaire d'ajouter un complément à ce taux de référence en vue de refléter le profil de risque de crédit de Habidite. Selon la communication de la Commission de 1997, les taux de référence étaient considérés comme reflétant le niveau moyen des taux d'intérêt appliqués dans les différents États membres aux prêts à moyen et long terme (de cinq à dix ans) assortis de garanties normales. Le règlement (CE) n° 794-2004 de la Commission n'a pas modifié spécifiquement ce principe général (42). En l'absence d'informations directes sur le rating du risque de crédit de Habidite ou du groupe Afer à cette époque, la Commission considère qu'il y a lieu de présumer qu'Habidite était alors une entreprise normale présentant un niveau de sûretés normal. De fait, la Diputación et Habidite étaient tous deux d'avis que Habidite et le groupe Afer n'étaient pas, à l'époque, des entreprises en difficulté au sens des points 9, 10 et 11 des lignes directrices relatives au sauvetage et à la restructuration [voir le considérant (52)].

(76) Dans un troisième temps, l'équivalent-subvention brut de l'aide prévu par l'accord de remboursement a été ajusté pour tenir compte de l'impôt sur les sociétés que le bénéficiaire aurait dû payer et qui s'élevait, à l'époque, en Espagne, à 35 %.

(77) Sur la base des éléments mentionnés aux considérants (74) à (76), l'ESN de ce prêt bonifié est établi comme suit dans le tableau suivant :

Montant du prêt / 100 %

Durée du prêt / 7 ans

Période de carence du remboursement / 4 ans

Taux de référence / 4,36 %

Marge/complément / --

Taux d'intérêt total applicable / 4,36 %

Équivalent-subvention brut de l'aide / 20,33 %

Impôt sur les sociétés / 35 %

Équivalent-subvention net (après impôts) / 13,21 %

(78) Par ailleurs, la Commission fait observer que le coût effectif de l'acquisition des terrains pour ce projet, qui constitue la base à laquelle il convient d'appliquer l'ESN aux fins de déterminer le montant de l'aide, fait l'objet d'une controverse entre les parties. Comme indiqué au considérant (30), la Diputación allègue que jusqu'à septembre 2009, Bizkailur avait payé 4,7 millions d'EUR pour l'achat de 205 000 m 2 de terrain, et qu'elle estimait à 2,6 millions d'EUR supplémentaires le montant requis pour acheter les 95 000 m 2 restants nécessaires pour ce projet. Quant à Habidite, elle affirme que Bizkailur n'avait pas besoin d'acheter une parcelle aussi grande pour ce projet puisque le contrat relatif aux terrains prévoyait un total de 101 403 m 2 seulement [voir le considérant (47)].

(79) En ce qui concerne cette controverse, la Commission fait valoir en premier lieu que, conformément à l'article premier, point ii), du contrat relatif aux terrains, la superficie destinée au projet devait être d'"au moins" 101 403 m 2 au total. En second lieu, sur la base des informations fournies par les parties au cours de la procédure formelle d'examen, la Commission ne peut se forger une opinion correcte sur cette question. Cependant, étant donné que l'aide contenue dans le contrat relatif aux terrains n'a pas été décaissée et qu'il n'est donc pas nécessaire d'ordonner son recouvrement, la question du montant exact que Habidite aurait dû rembourser pour l'acquisition des terrains peut rester ouverte. Aux fins de la présente décision, il suffit de définir l'élément d'aide qui découle des conditions de remboursement établies dans le contrat relatif aux terrains.

(80) Cet élément d'aide se définit donc comme les 13,21 % des coûts qui doivent être remboursés à Bizkailur pour l'achat des terrains nécessaires au projet Habidite en vertu de la deuxième partie, article premier, point ii), du contrat relatif aux terrains. Le montant ainsi déterminé correspond aux intérêts non perçus par Bizkailur et qu'un opérateur privé du marché aurait appliqué pour un prêt d'une durée de sept ans, une période de carence de quatre ans et quatre tranches équivalentes de remboursement annuel (de 25 % du montant remboursé chacune). La base de calcul de cet élément d'aide est le coût effectif qu'aurait dû supporter Bizkailur pour l'acquisition du terrain, tel qu'il est fixé dans la deuxième partie, article premier, point ii), du contrat relatif aux terrains.

(81) Il convient d'appliquer des considérations similaires au second élément d'aide du contrat relatif aux terrains, c'est-à-dire aux coûts d'aménagement du terrain en vue d'un usage industriel qui, selon le contrat précité, ne devaient pas être remboursés à Bizkailur (voir à cet effet les considérants (69) et (70)]. Dans ce cas également, les parties sont en désaccord sur les montants. D'après la Diputación, en mars 2009, ces coûts étaient évalués à 28,5 millions d'EUR [voir le considérant (30)]. Habidite considère cependant que ce chiffre est surestimé [voir le considérant (47)], en partie parce que Bizkailur a acheté une plus grande superficie que ce que le contrat relatif aux terrains estimait nécessaire pour ce projet et en partie parce cette entreprise a utilisé certains terrains déjà acquis pour le projet à d'autres fins, telles que, par exemple, le déversement de déchets.

(82) Une fois de plus, étant donné que l'aide n'a pas été décaissée et qu'il n'est pas nécessaire de la récupérer, il suffit, aux fins de la présente décision, de définir cet élément d'aide que comporte le contrat relatif aux terrains : il correspond aux coûts totaux que Bizkailur aurait supportés pour aménager la parcelle du projet en vue d'un usage industriel, conformément aux dispositions de la deuxième partie, article premier, point iii), du contrat relatif aux terrains ; selon les termes de la deuxième partie, article premier, point vi), de ce contrat, ces coûts ne devaient pas être remboursés par Habidite à Bizkailur.

(83) La Commission conclut également que l'avantage décrit aux considérants (68) à (77), qui se compose des deux éléments décrits aux considérants (80) et (82) doit être considéré comme un avantage sélectif, dans la mesure où il a été accordé, en vertu du contrat relatif aux terrains, à un bénéficiaire déterminé, à savoir Habidite et le groupe Afer auquel appartient cette entreprise.

Distorsion de la concurrence

(84) Comme indiqué au considérant (43), Habidite fait valoir que les contrats notifiés n'entraînent pas de distorsion de la concurrence étant donné que : a) le marché de référence se limite à "la fabrication, la vente et la location de constructions modulaires", et b) il résulte des caractéristiques uniques des modules préfabriqués de Habidite que l'entreprise n'a pas de concurrents.

(85) La Commission ne peut accepter les arguments présentés par Habidite. Même à supposer que les modules préfabriqués de Habidite puissent être considérés comme un produit particulier en raison de leurs caractéristiques, le marché du produit de référence doit, dans le cas d'espèce, être défini au sens large comme le marché de la construction et de la vente de logements en général, ce qui inclut tant les logements vendus sur le marché libre que ceux qui relèvent du segment réglementé du marché (logements sociaux).

(86) Comme l'affirme Habidite elle-même, les prix des logements qui devaient être vendus à Bizkailur peuvent être comparés à ceux des logements vendus sur le marché libre ou à ceux des logements vendus en fin de compte sous régime de protection ou de semi-protection. Le fait que Bizkailur ait également passé des contrats portant sur des logements avec des fabricants autres que Habidite pour les vendre sous régime de semi-protection démontre qu'il y avait, à cette époque, d'autres constructeurs en situation de concurrence avec Habidite pour la fourniture de logements à Bizkailur en vue de leur vente sous régime de protection ou de semi-protection.

(87) Par ailleurs, dans le plan d'entreprise que Habidite a présenté au gouvernement basque à l'appui de sa demande d'aide régionale pour l'année 2008 (datée de novembre 2008, p. 10 à 12), l'entreprise indiquait qu'elle avait été en concurrence avec des constructeurs de maisons traditionnelles sur plusieurs marchés régionaux d'Espagne sur lesquels elle souhaitait vendre ses produits (notamment au Pays basque, ainsi que dans les communautés autonomes de Navarre, de Cantabrie, de La Rioja, de Madrid et de Catalogne, mais également en 2011 dans d'autres communautés autonomes espagnoles). Elle estimait que sa part de marché totale sur le marché espagnol (marché libre et projets de logements sociaux) passerait de 0,4 % en 2011 à 1 % au cours de la période 2012-2016. Pour l'année 2011 par exemple, Habidite calculait que le nombre total de logements vendus sur l'ensemble du marché espagnol serait d'environ 320 000 logements, dont 1 403 seraient des logements Habidite, ce qui correspond à une part de marché de 0,4 %. En ce qui concerne le marché du Pays basque en particulier, Habidite tablait sur une part de marché de 0,5 % en 2011 et jusqu'à 2,8 % à partir de 2014, en partant du principe que la demande totale de logements dans cette région serait de 8 000 logements par an pour la période 2011-2016.

(88) Selon une jurisprudence constante, il convient de considérer que l'aide fausse la concurrence si elle renforce la position financière et les possibilités de l'entreprise bénéficiaire par rapport à ses concurrents qui ne bénéficient d'aucune aide (43). Au vu de ce principe et des considérations antérieures, il y a lieu de conclure que les aides accordées à Habidite et au groupe Afer en vertu du contrat relatif aux terrains auraient eu pour effet de fausser la concurrence puisqu'elles auraient permis à Habidite de réduire les coûts d'investissement supportés normalement par l'entreprise elle-même et, par conséquent, d'obtenir un avantage concurrentiel par rapport aux concurrents réels et potentiels.

Affectation du commerce entre États membres de l'UE

(89) Conformément à ce qui a été exposé plus haut aux considérants (84) à (87), l'argument de Habidite selon lequel le marché géographique de référence est limité au marché local ou régional en ce qui concerne notamment les logements préfabriqués, en raison des coûts liés au transport des éléments préfabriqués, n'est pas recevable. Le Pays basque étant géographiquement proche d'autres États membres et possédant une façade maritime, il est probable que les coûts de transport supplémentaires ne seraient pas décisifs pour l'élimination des concurrents potentiels de Habidite dans cette communauté autonome. À l'inverse, il est possible que les coûts de transport ne représentent pas un obstacle pour Habidite si celle-ci souhaite concurrencer à d'autres entreprises sur le marché de la construction de logements dans des États membres proches.

(90) Dans le droit fil de la jurisprudence citée ci-dessus au considérant (88), lorsque l'aide d'État renforce la position d'une entreprise par rapport à d'autres entreprises concurrentes sur le marché au sein de l'Union, il convient de considérer que ces dernières sont lésées par l'aide. L'aide peut être de nature à affecter les échanges dans l'Union même si l'entreprise bénéficiaire n'exerce pas d'activités transfrontières (44).

(91) Au vu des faits exposés aux considérants (89)et (90), la Commission conclut qu'il est probable que l'aide contenue dans le contrat relatif aux terrains aurait influencé les échanges entre États membres.

VII.1.2 Mesure 2 : contrat relatif aux logements

(92) Les observations formulées aux considérants (64)-(67), (84)-(88) et (89)-(90) au sujet des critères concernant l'usage de ressources d'État et d'imputabilité à l'État, la distorsion de la concurrence et les effets sur les échanges à l'intérieur de l'Union aux fins de la définition d'une aide d'État sont également applicables, mutatis mutandis, au contrat relatif aux logements. Par conséquent, dans les considérants (93) à (96), seul le critère de l'avantage sélectif sera analysé.

Avantage sélectif

(93) Comme expliqué au considérant (45), Habidite allègue que le contrat relatif aux logements ne lui a procuré aucun avantage étant donné qu'en substance les prix que Bizkailur devait payer pour les 1 500 logements à construire par Habidite en vertu de ce contrat se situaient réellement en-dessous du niveau du marché.

(94) En particulier, Habidite soutient premièrement que les 1 500 logements qui devaient être livrés par l'entreprise en vertu de ce contrat auraient été vendus par Bizkailur en tant que logements conventionnés au prix maximal limité par la législation régionale en vigueur à 1,7 fois le prix établi par l'arrêté du gouvernement basque du 1 er août 2004, indexé sur la base de l'indice des prix à la consommation tel qu'établi par l'Institut national de la statistique [voir à cet égard les considérants (17) à (18)]. Par conséquent, le prix moyen que Bizkailur aurait obtenu pour les 1 500 logements était de 2 010,19 EUR/m 2 , soit au prix inférieur au prix moyen de 2 921,9 EUR/m 2 des logements vendus librement dans la province de Biscaye en 2007. Par ailleurs, Habidite n'aurait obtenu que 83 % - ou 83,30 % dans le cas des 750 logements de moins de 75 m 2 - des 2 010,19 EUR/m 2 que Bizkailur a obtenu pour la vente des logements bénéficiant d'un régime de semi-protection.

(95) Deuxièmement, Habidite fait valoir que le prix qu'elle aurait obtenu de Bizkailur en vertu du contrat relatif aux logements pour les 1 500 logements était comparable aux prix obtenus par d'autres entreprises de construction qui avaient conclu des contrats analogues avec Bizkailur lors de cette période (des exemples sont fournis à cet égard au considérant (45).

(96) En dernier lieu, Habidite a également allégué qu'en vertu du Decreto Ley 78-1986 et de l'article 31 de la directive 2004-18-CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services, ces contrats peuvent également être conclus directement, c'est-à-dire sans publication d'un avis de marché, lorsque la nature technique du projet ou la protection des droits d'exclusivité le justifie (45).

(97) Après avoir évalué les informations et les arguments présentés par Habidite aux considérants (98) à (107), la Commission présente les observations suivantes.

(98) En premier lieu, il convient de signaler que les informations relatives aux prix moyens obtenus par d'autres entreprises de construction qui ont conclu des contrats analogues avec Bizkailur se fondent exclusivement sur des données publiées dans la presse. La Commission n'a pas reçu d'informations directement de la Diputación à ce sujet, par exemple sous forme de copies de contrats analogues conclus par Bizkailur avec d'autres entreprises de construction. En tout état de cause, les estimations de prix fournies tant par Habidite que par la Diputación portent sur les années 2006 et 2007, alors que selon l'article A, point c), du contrat relatif aux logements et le plan d'entreprise de Habidite (publié en 2009), les 1 500 logements auraient été fournis à Bizkailur tout au long de la période 2009-2011.

(99) Même à admettre que les prix que Habidite aurait dû obtenir de Bizkailur pour les 1 500 logements en vertu de ce contrat étaient comparables aux prix que d'autres entreprises de construction ont obtenu de Bizkailur sur la base de contrats analogues, prix qui étaient en tout état de cause inférieurs aux prix observés sur le marché libre pour ce type de logements, cet argument est insuffisant pour permettre à la Commission de conclure que Habidite n'a pas retiré d'avantage de ce contrat. Comme indiqué également dans la décision d'ouvrir la procédure (46), l'avantage obtenu par Habidite grâce à ce contrat réside essentiellement dans le fait que ce contrat garantissait la vente d'une partie importante de la production initiale de l'entreprise, ce qui réduisait considérablement les risques associés à un nouveau produit d'investissement, qui sont par définition plus élevés lors de la phase de lancement d'un nouveau produit tel que les "modules Habidite".

(100) Pour mémoire, la concurrence sur le marché espagnol de la construction était très forte à cette époque, et n'a cessé de l'être depuis lors. Le fait que Bizkailur commande 1 500 logements à Habidite a dû conférer à celle-ci, de ce point de vue, un avantage non négligeable par rapport à ses concurrents, même si l'on tient compte uniquement de la demande de construction de logements destinés à la vente conventionnée ou sous régime de protection officiel.

(101) Le fait que, selon les informations fournies par la Diputación Foral, le Plan Foral (voir le considérant (19) prévoyait que Bizkailur fournisse un total de 3 000 logements à vendre sous régime de protection officiel au cours de la période 2004-2007 est un bon indice que le nombre de logements commandés à Habidite n'était absolument pas insignifiant. Certes, le Plan Foral porte sur la période 2004-2007, tandis que les 1 500 logements commandés par Bizkailur à Habidite devaient être livrés au cours de la période 2009-2011 (selon le plan d'entreprise rendu public en 2009). Il s'agit néanmoins d'une indication du nombre total de logements que Bizkailur avait l'intention de vendre sous régime de protection officiel au moment de la conclusion du contrat relatif aux logements.

(102) Cet élément doit être évalué à la lumière de la proportion de logements commandés par la Diputación et Bizkailur par rapport à la production totale estimée de Habidite sur la période de référence. Selon le plan d'entreprise rendu public en 2009, Habidite estimait qu'en 2009, la totalité de sa production (433 logements) serait acquise exclusivement par Bizkailur. En 2010, Bizkailur aurait acheté 670 logements, alors que la production totale de Habidite devait être, selon les prévisions, de 1 113 logements. En 2011, Bizkailur aurait acheté 342 logements, alors que la production totale de Habidite devait être, selon les prévisions, de 3 151 logements. Ces chiffres montrent qu'au moment de la conclusion du contrat relatif aux logements, Habidite estimait que la Diputación et Bizkailur auraient acheté une partie importante de la production au cours des deux premières années de production de son usine de Alonsotegi (2009 et 2010). Cet élément étaye la conclusion selon laquelle le contrat relatif aux logements réduisait, en effet, considérablement les risques associés intrinsèquement à un nouveau projet d'investissement, et particulièrement au lancement d'un nouveau produit sur le marché (les "modules Habidite").

(103) Le plan d'entreprise (de novembre 2008) présenté pour l'obtention d'aides régionales en 2008 témoigne également du fait que le risque lié à la vente du produit de Habidite sur le marché aurait été considérablement réduit grâce au contrat précité. Dans ce plan d'entreprise, Habidite avait calculé que la demande totale de logements qui devaient être vendus sur le marché réglementé dans l'ensemble du Pays basque au cours de la période 2011- 2016 serait de 8 000 logements par année. Ce plan indique que Habidite avait l'intention de vendre en priorité sur le segment réglementé du marché (logements sociaux), tant au Pays basque que dans d'autres communautés autonomes d'Espagne. En 2011, en particulier, il était prévu que Habidite vende sur le marché réglementé espagnol un total de 289 logements, sur une production totale de 1 403 logements la même année. Cela montre qu'à l'expiration du contrat relatif aux logements (sachant que les 1 500 logements commandés par la Diputación et Bizkailur devaient être livrés au plus tard en mai 2011), le nombre de logements que Habidite espérait vendre sur le marché réglementé, c'est-à-dire 289 sur une production totale annuelle de 1 403, était nettement inférieur à la proportion des trois premières années de fonctionnement de l'usine de Habidite d'Alonsotegi, couvertes par le contrat relatif aux logements.

(104) Un autre aspect important est la demande réelle de logements sociaux dans la province de Biscaye que Bizkailur satisfaisait dans le cadre du contrat relatif aux logements. Ni la Diputación ni Habidite n'ont fourni de preuves spécifiques relatives à la demande réelle de logements sociaux qui aurait été satisfaite par Bizkailur dans le cadre du contrat relatif aux logements conclu avec Habidite dans les conditions de l'espèce. À l'instar de ce qui est mentionné au considérant (98), il avait été estimé que les 1 500 logements prévus par ce contrat seraient livrés au cours de la période 2009-2011. Par ailleurs, la Diputación n'a pas contesté le fait que le contrat avait été conclu en vue de fournir un service d'intérêt économique général sous forme de logements sociaux. De plus, il convient de signaler que le contrat relatif aux logements n'a pas été conclu après publication d'un avis de marché alors que, selon les informations fournies par Habidite elle-même lorsqu'elle faisait référence à des contrats analogues conclus par Bizkailur avec d'autres entreprises de construction, il semblerait que Bizkailur aurait dû normalement lancer un appel d'offres pour ce type de contrat.

(105) Vu sous cet angle, l'argument de Habidite [voir le considérant (96)], selon lequel la nature technique spécifique de ce projet justifiait la conclusion directe du contrat sans publication d'un avis de marché, n'est pas recevable. En premier lieu, les dispositions invoquées par Habidite n'ont pas trait au cas d'espèce, dans lequel la nature particulière du projet consistait à lancer un nouveau produit sur le marché. L'objet du contrat relatif aux logements était l'acquisition de ceux-ci en vue de leur vente ultérieure en tant que logements conventionnés destinés à des personnes défavorisées. La technique utilisée pour leur construction est sans importance étant donné que les logements construits à l'aide de modules préfabriqués étaient en concurrence directe avec ceux construits avec des méthodes traditionnelles. En deuxième lieu, dans un rapport de janvier 2009 (47), le Tribunal Vasco de Cuentas Públicas (cour des comptes basque) a exprimé des doutes quant à la légalité des contrats relatifs aux terrains et aux logements, attirant l'attention sur le fait que les marchés publics en cause violaient les principes de transparence et de mise en concurrence.

(106) Selon la jurisprudence P&O Ferries (48), le seul fait qu'une autorité publique acquière des biens aux conditions du marché ne suffit pas pour que cette opération constitue une transaction commerciale effectuée aux conditions du marché s'il s'avère que l'État n'avait pas un besoin réel de ces biens, en particulier s'ils ont été acquis sans publication d'un avis de marché. En l'espèce, le manque d'informations sur la nécessité réelle qu'avait Bizkailur de vendre sous régime de semi-protection les 1 500 logements commandés au cours de la période 2009-2011, ainsi que l'absence de publication d'un avis de marché, constituent des indices montrant que l'opération n'a pas été effectuée aux conditions du marché.

(107) Compte tenu des considérations exposées aux considérants (97) à (106), la Commission doit conclure que le contrat relatif aux logements ne peut être considéré comme une opération de marché normale. Au contraire, il n'échappera à personne que le contrat confère un avantage à Habidite et au groupe Afer puisqu'il réduit, pour ces entreprises, le risque de devoir vendre leur production aux conditions du marché, en concurrence directe avec d'autres constructeurs. L'élément d'aide se définit ici comme le bénéfice que Habidite aurait tiré de la vente des 1 500 logements à la Diputación et à Bizkailur en vertu des conditions du contrat relatif aux logements, c'est-à-dire la différence entre le prix qu'aurait obtenu Bizkailur pour la vente des 1 500 logements aux conditions de prix établies à l'article A, point e), du contrat relatif aux logements et les coûts de construction des 1 500 logements. L'avantage est sélectif puisqu'il est conféré spécifiquement à Habidite et au groupe Afer en vertu du contrat relatif aux logements.

VII.1.3. Conclusions préliminaires

(108) Compte tenu des considérations exposées aux considérants (64) à (90) et (92) à (106), et sans préjudice de toute conclusion supplémentaire à propos de la compatibilité avec la réglementation de l'Union relative aux marchés publics, il convient de conclure que les contrats relatifs aux terrains et aux logements sont constitutifs d'une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, du traité.

(109) Dans le cas du contrat relatif aux terrains, l'aide d'État en question se compose de deux éléments :

a) les intérêts non perçus sur un prêt d'un montant équivalent au total des coûts supportés par Bizkailur pour l'acquisition du terrain destiné au projet Habidite, qui aurait été accordé sans intérêts pour une période de sept ans, avec une période de carence de quatre ans. Ces intérêts non perçus représentent un ESN de 13,41 % des coûts d'acquisition des terrains supportés par Bizkailur conformément à la deuxième partie, article premier, point ii), du contrat relatif aux terrains ;

b) les coûts totaux supportés par Bizkailur pour l'aménagement, en vue d'un usage industriel, de la parcelle mentionnée, d'une superficie totale d'au moins 101 430 m 2 , conformément aux dispositions de la deuxième partie, article premier, point iii), du contrat relatif aux terrains.

(110) Dans le cas du contrat relatif aux logements, l'élément d'aide est constitué par le bénéfice que Habidite aurait tiré de la vente des 1 500 logements en vertu de ce contrat, c'est-à-dire la différence entre le prix établi à l'article A, point e), pour les 1 500 logements et les coûts de fabrication des 1 500 logements supportés par Habidite.

VII.2 Compatibilité

(111) Dans la décision d'ouvrir la procédure du 2 décembre 2009, la Commission a mis en doute le fait que l'aide prévue par les contrats relatifs aux terrains et aux logements aurait pu être considérée compatible avec le traité en vertu des règles pertinentes applicables au moment de l'appréciation, et notamment du cadre temporaire (49), des lignes directrices relatives au sauvetage et à la restructuration de 2004, des lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale pour la période 2007-2013 (50) et du règlement d'exemption par catégorie de 2008 (51).

(112) Cependant, comme indiqué aux considérants (60) à (62), l'aide accordée dans le cadre des contrats relatifs aux terrains et aux logements a été accordée illégalement le 15 décembre 2006 (c'est-à-dire sans avoir été notifiée à la Commission), raison pour laquelle sa compatibilité doit être appréciée sur la base des règles relatives aux aides d'État en vigueur au moment de son octroi.

(113) Compte tenu de cette perspective temporelle, la compatibilité de l'aide accordée en vertu des contrats relatifs aux terrains et aux logements ne peut être appréciée au regard des règles spéciales en vigueur concernant la crise, qui ont été adoptées et sont entrées en vigueur postérieurement.

(114) Par ailleurs, d'après la Diputación, Habidite et le groupe Afer ne remplissaient pas, en date du 15 décembre 2006, les conditions requises pour être considérées comme des entreprises en difficulté au sens des points 9, 10 et 11 des lignes directrices relatives au sauvetage et à la restructuration de 2004. Par conséquent, elles n'étaient pas éligibles aux aides au sauvetage et à la restructuration au moment de la conclusion des contrats relatifs aux terrains et aux logements.

(115) Les contrats relatifs aux terrains et aux logements ont été conclus le 15 décembre 2006 en vue de fournir un appui à un projet d'investissement à Alonsotegi, localité située dans la région du Grand Bilbao, qui était, à cette époque, une région assistée au sens de l'article 107, paragraphe 3, point c), du traité (52). Il convient dès lors d'examiner si l'aide accordée en vertu des contrats relatifs aux terrains et aux logements aurait pu être compatible avec le traité au regard des règles applicables aux aides régionales en date du 15 décembre 2006, à savoir : les lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale de 1998 (53) (ci-après les "LDAR de 1998") et l'encadrement multisectoriel des aides à finalité régionale en faveur de grands projets d'investissement de 2002 (54) (ci-après l'"encadrement multisectoriel de 2002") et l'article 107, paragraphe 3, point c), du traité.

Compatibilité du contrat relatif aux terrains avec les LDAR de 1998 et l'encadrement multisectoriel de 2002

(116) Pour pouvoir être considérées compatibles avec le marché intérieur, les aides régionales à l'investissement doivent respecter une série de critères standard de compatibilité qui, au moment de la conclusion du contrat relatif aux terrains, le 15 décembre 2006, figuraient dans les LDAR de 1998. En particulier, les aides devaient pouvoir contribuer au développement régional et appuyer un projet d'investissement initial dont les travaux n'auraient débuté qu'après la présentation, par le bénéficiaire, d'une demande d'aide (effet incitatif), et le projet d'investissement devait avoir été financé par le bénéficiaire au moins à hauteur de 25 % et être maintenu dans la région assistée dans laquelle il se trouvait pendant cinq ans au moins. De plus, les dépenses éligibles à prendre en considération pour l'octroi de l'aide devaient se limiter à certains coûts éligibles, et l'aide ne devait pas être cumulée avec d'autres formes d'aide de manière à dépasser le plafond d'aide régionale applicable.

(117) En vertu du point 2 des LDAR de 1998, l'aide régionale ad hoc accordée à une seule entreprise ou qui bénéficie à un seul secteur d'activité ne sera pas, en règle générale, considérée compatible avec le traité puisqu'en principe, ses effets de distorsion sont supérieurs à ses effets positifs sur le développement régional. En outre, les aides ad hoc à des entreprises en difficulté étaient interdites.

(118) L'aide accordée à Habidite en vertu du contrat relatif aux terrains n'a pas été notifiée par les autorités espagnoles dans le cadre d'un régime d'aide régionale autorisé. Elle répond plutôt aux critères permettant de la considérer comme une mesure ad hoc qui bénéficie exclusivement à Habidite et au groupe Afer et, implicitement, au secteur de la construction.

(119) Cependant, en vertu du même point 2 des LDAR de 1998, cette aide ad hoc qui bénéficie à un seul secteur d'activité et à une seule entreprise peut, à titre exceptionnel, être déclarée compatible avec le traité s'il peut être prouvé qu'elle apporte une contribution notable au développement régional, supérieure aux effets de distorsion sur les échanges dans l'Union et sur la concurrence. Bien que les autorités n'aient pas présenté d'arguments à cet égard, la Commission analysera de sa propre initiative et sur la base des données dont elle dispose si, dans le cas de l'aide octroyée dans le cadre du contrat relatif aux terrains, les conditions d'application d'une telle exception sont réunies.

(120) Le contrat relatif aux terrains était clairement destiné à soutenir un nouveau projet d'investissement, à savoir la nouvelle usine Habidite de Alonsotegi. À l'époque, on prévoyait que le projet créerait 1 100 nouveaux emplois directs dans une région assistée et, très probablement, un nombre significatif d'emplois indirects. À cet élément, il convient d'ajouter le fait, qu'en vertu du contrat parallèle relatif aux logements, le nouveau projet d'investissement aurait également contribué à la réalisation des objectifs de la politique régionale, à savoir la construction de logements sociaux pour les personnes défavorisées domiciliées dans la province de Biscaye. En outre, ni Habidite ni le groupe Afer ne remplissaient les conditions pour être considérées comme des entreprises en difficulté au sens des points 9, 10 et 11 des lignes directrices relatives au sauvetage et à la restructuration au moment de la signature des contrats relatifs aux terrains et aux logements [voir le considérant (9). En conséquence, la Commission doit conclure que, dans le cas du contrat relatif aux terrains, les conditions concernant l'application de l'exception prévue au dernier alinéa du point 2 des LDAR de 1998 sont réunies.

(121) En vertu du point 4.4 des LDAR de 1998, le concept d'aide régionale se limite aux aides à l'investissement initial, défini comme un investissement en capital fixe se rapportant à la création d'un nouvel établissement, à l'extension d'un établissement existant, ou au démarrage d'une activité impliquant un changement fondamental dans le produit ou le procédé de production d'un établissement existant. L'aide accordée en vertu du contrat relatif aux terrains correspond à cette définition puisqu'elle été octroyée en vue de soutenir l'établissement d'un nouveau projet d'investissement à Alonsotegi.

(122) En vertu du point 4.5 des LDAR de 1998, les aides à l'investissement initial doivent servir à couvrir exclusivement les dépenses d'investissement éligibles et, en conséquence, le montant maximum d'aide régionale se définit comme un pourcentage des dépenses d'investissement éligibles. Conformément aux point 4.5 et 4.6 des LDAR de 1998, la catégorie "dépenses éligibles" d'un nouveau projet d'investissement comprend les terrains, les bâtiments et les équipements, ainsi que certaines catégories d'investissements immatériels (brevets, licences, connaissances techniques), jusqu'à une limite de 25 % de l'assiette type dans le cas de grandes entreprises.

(123) Il convient donc de déterminer en premier lieu les dépenses éligibles du projet Habidite à Alonsotegi, à la date du 15 décembre 2006.

(124) Étant donné que l'aide prévue par le contrat relatif aux terrains n'a pas été accordée sur la base d'une demande d'aide préalable, le bénéficiaire n'a pas fourni, à l'époque, les informations pertinentes pour recenser les dépenses éligibles en faveur d'un nouveau projet d'investissement relevant d'une aide régionale. Les informations dont disposait la Diputación à propos des dépenses éligibles ont été fournies au considérant (12), comme suit :

Terrains / 4,8 Mio EUR

Construction industrielle / 22,5 Mio EUR

Travaux de viabilisation / 4 Mio EUR

Installations / 24 MioEUR

Total / 55,34 Mio EUR

(125) Les catégories de dépenses indiquées ci-dessus peuvent être considérées comme des "dépenses éligibles" au sens du point 4.5 des LDAR de 1998. Par ailleurs, comme l'aide figurant dans le contrat relatif aux terrains était directement liée à l'acquisition et à l'aménagement, en vue d'un usage industriel, des terrains destinés au nouveau projet d'investissement, elle satisfait également à cette exigence relevant des dispositions du point 4.5 des LDAR de 1998.

(126) Aux termes du point 4.10 des LDAR de 1998, les aides à l'investissement initial sont subordonnées au maintien de l'investissement en cause sur une période minimale de cinq ans. Bien que cette condition n'ait pas été imposée spécifiquement à Habidite dans le cadre du contrat relatif aux terrains, il convient de signaler que, dans le cadre du contrat parallèle relatif aux aides à la formation [décrit au considérant (39)], également conclu le 15 décembre 2006 et concernant le même projet d'investissement, l'entreprise s'est engagée à maintenir 1 100 emplois pendant une période minimale de cinq ans. La Commission doit donc conclure que les dispositions du point 4.10 des LDAR de 1998 sont également respectées.

(127) Ne disposant pas d'informations sur les coûts salariaux estimés des 1 100 salariés de l'usine Habidite de Alonsotegi, la Commission ne peut procéder à une appréciation sérieuse de l'éventuelle compatibilité des aides octroyées en vertu du contrat relatif aux terrains avec les points 4.11 à 4.17 des LDAR de 1998 en ce qui concerne la création d'emplois. Néanmoins, pour autant que l'aide prévue par le contrat relatif aux terrains ait été liée à l'achat des terrains, qui constitue un coût éligible, il n'est pas nécessaire de procéder à une appréciation des points 4.11 à 4.17 des LDAR de 1998.

(128) Avant la signature du contrat relatif aux terrains, le projet d'investissement de Habidite n'avait bénéficié d'aucune autre aide à l'investissement qui devrait être prise en compte aux fins d'évaluer les effets cumulatifs en vertu du point 4.18 des LDAR de 1998.

(129) Le point 4.2 des LDAR de 1998 dispose que "les régimes d'aides doivent prévoir que la demande de l'aide doit être introduite avant le début de l'exécution des projets". La finalité de cette disposition est de garantir que l'aide régionale est accordée uniquement si elle a un effet incitatif vérifiable : dans le cas où les travaux d'un projet déterminé auraient commencé avant la demande d'aide, l'aide régionale accordée postérieurement n'aurait évidemment pas d'effet incitatif, ce qui signifie que le projet aurait probablement été mené à bien même en l'absence d'aide.

(130) À cet égard, il convient de signaler avant tout que le contrat relatif aux terrains était une mesure ad hoc et non une aide octroyée dans le cadre d'un régime autorisé. Néanmoins, l'effet incitatif est un critère général de compatibilité qui relève de l'article 107, paragraphe 3, point c), du traité, dont il convient de vérifier le respect en tout état de cause. Bien que la Diputación n'ait pas allégué l'existence d'un effet incitatif dans le cas de cette mesure, la Commission doit néanmoins examiner d'office le respect de cette condition essentielle de compatibilité.

(131) La Commission considère que la condition de l'effet incitatif est remplie dans le cas de l'aide prévue par le contrat relatif aux terrains pour les raisons précisées ci-après. En premier lieu, bien que l'aide n'ait pas été notifiée avant la date à laquelle elle a été accordée (15 décembre 2006), les travaux liés au projet n'ont pas commencé avant l'octroi de l'aide. D'après les informations fournies par la Diputación, l'achat des terrains nécessaires au projet, qui peut être considéré comme correspondant au début des travaux dans ce projet d'investissement, n'a pas commencé avant mai 2007, c'est-à-dire après la signature du contrat relatif aux terrains, qui a eu lieu le 15 décembre 2006. En second lieu, le fait que le projet Habidite n'ait pas été mené à bien après la suspension des contrats relatifs aux terrains et aux logements peut être considéré comme la preuve que l'aide avait un effet incitatif : en effet, le projet n'a pas été réalisé en l'absence d'aide.

(132) Le point 4.2 des LDAR de 1998 exige également que le bénéficiaire de l'aide apporte au projet une contribution financière exempte d'aides d'au moins 25 % des dépenses éligibles. Il est évident que cette condition est aussi remplie dans le cas de l'élément d'aide contenu dans le contrat relatif aux terrains. Les dépenses éligibles déclarées par la Diputación pour ce projet s'élevaient à 55 millions d'EUR et, étant donné que Habidite aurait dû financer au moins 25 % de cette somme sur ses ressources propres, cela signifie qu'elle aurait dû prendre à sa charge au moins 13,75 millions d'EUR. La Commission considère que l'élément d'aide du contrat relatif aux terrains, tel que décrit au considérant (109), n'aurait pas pu dépasser 75 % des dépenses éligibles, c'est-à-dire 41,25 millions d'EUR, même dans l'hypothèse où l'on aurait augmenté considérablement le montant total de l'aide en acceptant que celle-ci s'élève à 28,2 millions d'EUR de dépenses effectives pour l'aménagement des terrains en vue d'un usage industriel, auxquels on aurait ajouté 0,98 million d'EUR (c'est-à-dire 13,41 % d'un total de 7,3 millions d'EUR de dépenses liées à l'acquisition des terrains, selon les estimations de la Diputación).

(133) Sur la base des observations formulées aux considérants (116) à (132), la Commission doit conclure que l'aide qui relève du contrat relatif aux terrains satisfaisait aux conditions de compatibilité des LDAR de 1998.

(134) Les informations sur les dépenses d'investissement éligibles qui figurent aux considérants (12) et (124) montrent également que le projet d'investissement de Habite réunissait en décembre 2006 les conditions pour être considéré comme un grand projet d'investissement au sens de l'encadrement multisectoriel de 2002 puisque les coûts éligibles totaux pour ce projet dépassaient 50 millions d'EUR. Par conséquent, la compatibilité de l'élément d'aide contenu dans le contrat relatif aux terrains doit également être examinée du point de vue de sa conformité avec les conditions de l'encadrement multisectoriel de 2002.

(135) L'intensité maximale de l'aide applicable dans la région du Grand Bilbao en décembre 2006, exprimée en ESN, était de 20 %. Conformément aux dispositions du point 21 de l'encadrement multisectoriel de 2002, et compte tenu des dépenses éligibles précitées pour le projet Habidite à partir de 2006, telles qu'indiquées au considérant (12), l'intensité maximale de l'aide éligible pour ce projet aurait dû être revue à la baisse comme suit :

Dépenses éligibles / Plafond d'aide corrigé

Jusqu'à 50 Mio EUR / 10 Mio EUR (20 % - le plafond régional - de 50 Mio EUR)

50-100 Mio EUR / 0,5 Mio EUR (10 % - la moitié du plafond régional - de 5 Mio EUR)

Montant excédant 100 Mio EUR / --

Total / 10,5 Mio EUR

(136) Il en découle que l'élément d'aide contenu dans le contrat relatif aux terrains n'aurait été compatible qu'à concurrence d'un montant total de 10,5 millions d'EUR et incompatible pour la partie qui aurait excédé ce montant. Comme indiqué aux considérants (78) à (82) et (109), le montant de l'aide contenue dans le contrat relatif aux terrains ne peut être quantifié exactement compte tenu de la controverse sur les coûts effectifs que Bizkailur aurait dû supporter pour tenir ses obligations contractuelles concernant l'acquisition et l'aménagement, en vue d'un usage industriel, des terrains destinés à l'installation de l'usine de Habidite à Alonsotegi, litige au sujet duquel la Commission n'est pas en mesure d'adopter une position finale en connaissance de cause.

(137) La première composante de l'aide aurait représenté 13,21 % des coûts effectifs supportés par Bizkailur pour l'achat des terrains. La Diputación allègue que ces coûts effectifs se seraient élevés à un total de 7,3 millions EUR, mais Habidite considère que cette estimation est excessive. Il convient de noter également que d'après les informations fournies par la Diputación elle-même [voir le considérant (12)], les coûts d'achat des terrains ont été estimés, à un moment donné, à 4,8 millions EUR. Enfin, en novembre 2008, les coûts pour l'achat des terrains, tels qu'indiqués dans le plan d'entreprise de Habidite présenté dans sa demande d'aide régionale de 2008, étaient estimés à 5,5 millions EUR.

(138) Quant à la seconde composante de l'aide, c'est-à-dire la totalité des coûts effectifs supportés par Bizkailur pour l'aménagement, en vue d'un usage industriel, des terrains en cause, en mars 2009, la Diputación a calculé un montant de 28,5 millions d'euros, bien qu'elle ait précisé par ailleurs qu'il avait été estimé à un moment donné que ces coûts ne s'élevaient qu'à 4,04 millions EUR [voir le considérant (12)].

(139) En conclusion, on ne saurait exclure avec une certitude absolue, sur la base des informations existantes, que l'aide relevant du contrat relatif aux terrains n'aurait pas dépassé le montant permis pour ce projet, soit 10,5 millions EUR.

(140) Le point 24 de l'encadrement multisectoriel de 2002 établit des conditions supplémentaires de compatibilité pour les mesures pour lesquelles le montant de l'aide est supérieur à l'aide maximale admissible à laquelle peut prétendre un investissement de 100 millions EUR dans une même région assistée. En l'espèce, sur la base du point 21 de l'encadrement multisectoriel de 2002, l'aide maximale admissible pour un investissement de 100 millions EUR dans la région du Grand Bilbao était, en décembre 2006, de 15 millions EUR (soit 10 millions EUR, représentant 20 % des premiers 50 millions EUR, auxquels s'ajoutent 5 millions EUR, c'est-à-dire 10 % des 50 millions EUR suivants).

(141) Ainsi qu'il a été expliqué aux considérants (78) à (82), sur la base des informations disponibles, on ne peut quantifier avec précision le montant total de l'aide prévue par le contrat relatif aux terrains. Cependant, la Commission ne peut exclure que le montant de l'aide aurait pu être supérieur au plafond de 15 millions EUR. Dans ces circonstances, la Commission a vérifié si, dans le cas du contrat relatif aux terrains, les deux conditions supplémentaires pour l'approbation de cette aide étaient satisfaites.

(142) La première condition est que le bénéficiaire de l'aide ne doit pas dépasser 25 % des ventes du produit concerné avant ou après l'investissement. La seconde est que la capacité de production créée par le projet d'investissement ne doit pas représenter plus de 5 % de la taille du marché en question. Selon le point 24 de l'encadrement multisectoriel de 2002, la charge de la preuve relative au respect de ces conditions incombe à l'État membre en cause. En l'espèce, les autorités espagnoles n'ont pas fourni d'informations permettant à la Commission de vérifier si l'une ou l'autre de ces deux conditions supplémentaires était satisfaite.

(143) Cependant, sur la base des estimations de prix du marché fournies par Habidite en novembre 2008 pour l'obtention de l'aide régionale de 2008 [voir le considérant (87)], l'entreprise a calculé que sa part sur le marché général espagnol de la construction de logements (marché libre et segment du logement social) était de [0,1-1,0] % en 2011, soit après l'ajout de la nouvelle capacité de production issue de ce projet d'investissement, et qu'elle atteindrait [0,5-1,5] % à partir de 2012. Si l'on considère exclusivement le marché basque, la part de marché de Habidite en 2011 sur le marché libre du secteur de la construction aurait été de [0,1-1,0] %, avec une tendance à la hausse pour atteindre [2,0-3,0] % à partir de 2014.

(144) Compte tenu de ces estimations, qui n'ont été remises en cause par aucune autre information dont dispose la Commission, il y a lieu de supposer que Habidite n'aurait pas dépassé les limites en matière de part de marché et de capacité établies au point 24 de l'encadrement multisectoriel de 2002 en décembre 2006 pour ce qui est de l'investissement subventionné sur la base du contrat relatif aux terrains.

(145) Pour conclure, la part de l'élément contenu dans le contrat relatif aux terrains qui ne dépasse pas le montant maximal autorisé de 10,5 millions d'EUR aurait également respecté les conditions de compatibilité de l'encadrement multisectoriel de 2002. Le montant de l'aide dépassant éventuellement ce plafond n'aurait pas été compatible avec le traité car il n'aurait pas satisfait aux conditions de compatibilité des LDAR de 1998 et de l'encadrement multisectoriel de 2002 n'auraient pas été respectées.

(146) Étant donné que l'aide n'a pas été décaissée et que son recouvrement n'est pas nécessaire, ces conclusions sur la compatibilité de l'élément d'aide contenu dans le contrat relatif aux terrains sont suffisantes aux fins de la présente décision.

(147) La Commission attire l'attention des autorités espagnoles compétentes sur le fait que l'élément d'aide contenu dans le contrat relatif aux terrains doit être prise en compte pour l'examen du respect des règles de cumul en ce qui concerne les aides régionales de 2008 accordées par le gouvernement basque en faveur de ce projet. Cela est d'autant plus nécessaire que tant l'élément d'aide contenu dans le contrat relatif aux terrains que l'aide régionale de 2008 portent sur des dépenses éligibles liées à l'acquisition et à l'aménagement des terrains en question. Il convient de noter une fois de plus que les travaux liés à ce projet d'investissement ont commencé en mai 2007 alors que la demande d'aide régionale de 2008 a été présentée en 2008.

Compatibilité de l'élément d'aide contenu dans le contrat relatif aux logements avec les dispositions des LDAR de 1998 et de l'encadrement multisectoriel de 2002

(148) Ainsi qu'il a été précisé aux considérants (93) à (107), l'élément d'aide contenu dans le contrat relatif aux logements réduit les risques liés à l'investissement initial en garantissant la vente d'une partie importante de la production initiale de la nouvelle usine et confère également un avantage à Habidite par rapport à d'autres concurrents en ce sens qu'il garantit, sans la publication d'un avis de marché, un contrat pour la fourniture aux autorités publiques de 1 500 logements qui doivent être vendus sous régime de semi-protection. L'élément d'aide contenu dans le contrat relatif aux logements a été défini comme le bénéfice que Habidite aurait tiré de la vente des 1 500 logements à la Diputación et à Bizkailur, c'est- à-dire la différence entre le prix auquel cette dernière aurait vendu les logements et les coûts supportés par Habidite pour leur fabrication.

(149) En application des LDAR de 1998, les aides régionales sont liées aux coûts éligibles. S'il est exact que le point 4.2 des LDAR de 1998 ne limite pas les formes sous lesquelles l'aide peut être accordée, il ressort néanmoins clairement du point 4.5 et de l'ensemble des LDAR que les aides à l'investissement doivent être affectées à des coûts d'investissement éligibles. Conformément au point 4.5 des LDAR de 1998, seuls les coûts d'acquisition d'actifs tels que terrains, bâtiments et équipements/machines peuvent être pris en compte aux fins de l'octroi d'aides régionales. En vertu du point 4.6 des LDAR de 1998, les aides régionales peuvent également servir à subventionner d'autres coûts, tels que l'acquisition de brevets, de licences et de connaissances techniques.

(150) Cependant, compte tenu de sa nature, l'aide octroyée dans le cadre du contrat relatif aux terrains n'est pas destinée à couvrir ce type de coûts éligibles, mais à réduire les coûts de fonctionnement courants du bénéficiaire. Selon le point 4.15 des LDAR de 1998, les aides au fonctionnement sont en principe interdites et ne peuvent être octroyées qu'exceptionnellement dans les régions assistées en vertu des dispositions de l'article 107, paragraphe 3, point a), du traité. Or il était prévu que le projet Habidite serait mis en œuvre dans une région assistée en vertu de l'article 107, paragraphe 3, point c), du traité et non en vertu de l'article 107, paragraphe 3, point a).

(151) La Commission conclut dès lors que l'élément d'aide contenu dans le contrat relatif aux terrains constituait une aide au fonctionnement qui, en application du point 4.15 des LDAR de 1998, n'aurait pas été compatible avec le traité.

VIII. CONCLUSION

(152) Au vu des observations formulées aux considérants (63) à (151), et sans préjudice de toute conclusion supplémentaire relative à la compatibilité avec les règles de l'Union sur les marchés publics, la Commission conclut que le contrat relatif aux terrains et le contrat relatif aux logements comportent une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, du traité.

(153) Dans le cas du contrat relatif aux terrains, l'aide se compose de deux éléments :

a) les intérêts non perçus sur un prêt équivalent au total des coûts supportés par Bizkailur pour l'acquisition du terrain destiné au projet Habidite, qui aurait été accordé sans intérêts pour une période de sept ans, avec une période de carence de quatre ans. Ces intérêts non perçus supposent un ESN de 13,41 % des coûts d'acquisition de terrains supportés par Bizkailur conformément à la deuxième partie, article premier, point ii), du contrat relatif aux terrains ;

b) les coûts totaux supportés par Bizkailur pour l'aménagement, en vue d'un usage industriel, de la parcelle de terrain d'une superficie totale d'au moins 101 403 m 2 , conformément aux dispositions de la deuxième partie, article premier, point iii), du contrat relatif aux terrains.

(154) Dans le cas du contrat relatif aux logements, l'élément d'aide est constitué par le bénéfice que Habidite et le groupe Afer auraient tiré de la vente des 1 500 logements commandés par la Diputación et Bizkailur, c'est- à-dire la différence entre le prix auquel cette dernière aurait vendu les logements sur la base des dispositions du contrat relatif aux logements et les coûts de fabrication supportés par Habidite.

(155) Les informations disponibles ne permettent pas de quantifier exactement les montants de l'aide contenue dans les contrats relatifs aux terrains et aux logements. Cela dit, la quantification de cette aide n'est pas nécessaire aux fins de la présente décision étant donné que l'aide n'a pas été décaissée et qu'il n'est donc pas nécessaire de la recouvrer.

(156) En outre, la Commission souligne que les contrats relatifs aux terrains et aux logements comportent une aide illégale. L'aide concernée dans les deux contrats a été accordée le 15 décembre 2006, en violation de l'obligation de notification préalable établie dans le traité. Au vu de la jurisprudence CELF/SIDE (55), la notification postérieure des deux contrats et la conclusion de compatibilité partielle de l'aide prévue par le contrat relatif aux terrains à hauteur du montant autorisé de 10,5 millions EUR ne changent rien au caractère illégal de l'aide. La Commission exige des autorités espagnoles qu'elles tirent toutes les conclusions juridiques qui s'imposent du caractère illégal de l'aide prévue par les contrats relatifs aux terrains et aux sols.

(157) L'aide accordée dans le cadre du contrat relatif aux terrains est compatible avec le traité selon les LDAR de 1998 et l'encadrement multisectoriel de 2002 à hauteur du montant autorisé de 10,5 millions d'euros. La partie de l'aide accordée en vertu du contrat relatif aux terrains qui serait supérieure à ce montant autorisé est incompatible avec le traité.

(158) L'aide octroyée dans le cadre du contrat relatif aux logements constitue une aide au fonctionnement, totalement incompatible avec le traité en application du point 4.15 des LDAR de 1998.

(159) Les conclusions de la présente décision sur l'existence d'une aide dans le contrat relatif aux terrains sont pertinentes pour les aides à finalité régionale octroyées, en 2008, par le gouvernement basque, au même projet d'investissement. La Commission constate que les travaux pour ce projet d'investissement ont commencé en mai 2007, c'est-à-dire avant la demande d'aide régionale de 2008.

(160) Les bénéficiaires de l'aide octroyée dans le cadre des contrats relatifs aux terrains et aux logements sont Habidite Technologies País Vasco S.A. et le groupe Afer, tous deux parties contractantes auxdits contrats. Ces entreprises sont liées au sens des dispositions de l'article 3, paragraphe 2 et 3, de l'annexe de la recommandation de la Commission du 6 mai 2003 concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises (56),

A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION :

Article premier

Les deux contrats notifiés par le Royaume d'Espagne le 15 avril 2009, conclus le 15 décembre 2006 entre la Diputación Foral de Bizkaia et Bizkailur S.A., d'une part, et Habidite Technologies País Vasco S.A. et le groupe Afer, d'autre part, comportent une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, du traité.

Article 2

L'aide contenue dans les contrats notifiés est illégale, car elle a été octroyée en violation de l'obligation de notification préalable prévue à l'article 108, paragraphe 3, du traité.

Article 3

L'aide contenue dans le contrat relatif aux terrains se compose des éléments suivants :

a) les intérêts non perçus par la Diputación et Bizkailur sur un prêt équivalent au total des coûts supportés pour l'acquisition du terrain, qui doit être remboursé à l'échéance d'une période de carence de quatre ans en quatre tranches équivalentes de 25 % chacune, sans intérêts. L'ESN d'un prêt sans intérêts comme celui dont il est question aurait été de 13,41 % des coûts effectifs supportés par Bizkailur pour l'acquisition du terrain destiné à ce projet en vertu de la deuxième partie, article premier, point ii), du contrat relatif aux terrains ;

b) les coûts totaux effectifs que Bizkailur aurait supportés pour l'aménagement, en vue d'un usage industriel, des terrains à acquérir pour ce projet, d'une superficie totale d'au moins 101 430 m 2 , en vertu de la deuxième partie, article premier, point iii), du contrat relatif aux terrains.

Article 4

L'aide contenue dans le contrat relatif aux logements correspond au bénéfice que Habidite et le groupe Afer auraient tiré de la vente des 1 500 logements commandés par la Diputación Foral de Bizkaia et Bizkailur S.A., en application de ce contrat. Ce bénéfice correspond à la différence entre le prix obtenu de Bizkailur par Habidite en vertu de l'article A, point e), de ce contrat, et les propres coûts de Habidite, afférents à la construction des 1 500 logements.

Article 5

L'aide contenue dans le contrat relatif aux terrains est compatible avec le traité en vertu des lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale de 1998 et de l'encadrement multisectoriel des aides à finalité régionale en faveur de grands projets d'investissement de 2002, à hauteur d'un montant autorisé de 10,5 millions EUR. Toute aide dépassant cette limite maximale est incompatible avec le traité.

Article 6

L'aide contenue dans le contrat relatif aux logements est incompatible avec le traité en vertu du point 4.15 des lignes directrices concernant les aides d'État à finalité régionale de 1998, car elle constitue une aide au fonctionnement.

Article 7

Le Royaume d'Espagne est destinataire de la présente décision.

Notes

(1) Le 1 er décembre 2009, les articles 87 et 88 du traité CE sont devenus respectivement les articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ("TFUE"). Dans les deux cas, les dispositions sont, en substance, identiques. Aux fins de la présente décision, les références aux articles 107 et 108 du TFUE s'entendent, le cas échéant, comme des références aux articles 87 et 88 du traité CE, respectivement.

(2) Décision C(2009) 9310 final de la Commission du 2 décembre 2009 (JO C 61 du 12.3.2010, p. 6).

(3) Voir la note de bas de page n° 2.

(4) Voir la note de bas de page n° 2.

(5) Règlement (CE) n° 1049-2001 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2001 relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145 du 31.5.2001, p. 43).

(6) http ://www.azpiegiturak.bizkaia.net/index.php?option=com_ content&task=view&id=140&Itemid=185.

(7) Voir http ://www.grupoafer.com/.

(8) À l'exception de Habidite Technologies Alonsotegi S.A., récemment créée, et qui fait l'objet des deux contrats notifiés.

(*) Secret d'affaires.

(9) JO C 244 du 1.10.2004, p. 2.

(10) Voir la décision de la Commission du 17.5.2000 relative à l'aide d'État N 773-99 - Espagne, qui approuve la carte des aides régionales pour l'Espagne pour la période 2000-2006. Cette décision peut être consultée à l'adresse suivante : http ://ec.europa.eu/eu_law/ state_aids/comp-1999/n773-99.pdf.

(11) Selon le plan d'entreprise de Habidite (non daté) disponible lors de la conclusion des contrats notifiés, 56 demandes de brevet concernant ce produit ont été déposées au total. Les parties n'ont pas indiqué si les brevets demandés ont été accordés ou non. Pour de plus amples informations concernant les caractéristiques des modules de construction de Habidite, voir le site web de Habidite à l'adresse suivante : http ://www.habidite.com/descripcion.html.

(12) BOPV (Journal officiel du Pays basque) n° 2006-138, p. 15396.

(13) Carte des aides à finalité régionale.

(14) Journal officiel espagnol n° 80 du 3.4.1985, p. 8945.

(15) Informations fournies par la Diputación le 23 septembre 2009, avant l'ouverture de la procédure formelle d'examen.

(16) Voir la note de bas de page n° 2.

(17) Voir les affaires jointes T-116-01 et T-118-01, P&O European Ferries (Vizcaya) et Diputación Foral de Vizcaya/Commission, Recueil 2003, p. II-2957.

(18) JO C 54 du 4.3.2006, p. 13.

(19) JO L 214 du 9.8.2008, p. 3.

(20) JO C 83 du 7.4.2009, p. 1 (version consolidée).

(21) Publiée au BOPV (Journal officiel du Pays basque) n° 194 du 8.10.2007.

(22) Affaire C-379-98, PreussenElektra, Recueil 2001, p. I-02099.

(23) BOE (Journal officiel de l'État espagnol) n° 96 du 22.4.1986.

(24) JO L 134 du 30.4.2004, p. 114.

(25) JO C 239 du 25.3.2001, p. 9.

(26) Voir www.behargintza.net/home2/Bizkaiamedia/Contenido_Noticia. asp?TNo_Codigo=0&Not-Codigo=1196&Tem_Codigo=7&Texto= plan%foral%20vivienda.

(27) Informations obtenues par Habidite à partir de données publiées par le ministère de l'économie espagnol, disponibles sur www.fomento. gob.es/BE2/sedal/35101000.XLS.

(28) JO C 54 du 4.3.2006, p. 13.

(29) Affaire MF 12-2009, Habidite - Espagne, pendante à la date de la présente décision.

(30) Voir, par exemple, la décision de la Commission relative à l'aide d'État C 19-2006/Javor Pivka Lesna Industrija d.d., (JO L 29 du 2.2.2008, p. 16).

(31) Voir la note de bas de page n° 18.

(32) Voir la note de bas de page n° 18.

(33) Voir la note de bas de page n° 30.

(34) Affaire C-199-06, CELF/SIDE, Recueil 2008, p. I-469.

(35) JO C 119 du 22.5.2002, p. 22.

(36) Voir la note de bas de page n° 18.

(37) Voir par exemple les affaires C-278-00, Grèce/Commission, Recueil 2004, p. I-3997, point 50 ; C-482-99, Commission/France, Recueil 2000, p. I-4397, et les affaires jointes C-328-99 et C-399-00, Italie et SIM 2 Multimedia/Commission, Recueil 2003, p. I-4035, point 33.

(38) Voir : http ://www.azpiegiturak.bizkaia.net/index.php?%20option% 20=%20com_content%20&%20task%20= %20view%20&%20id%20=%20397%20&%20Itemid%20=%20492

(39) Affaire C-482-99, Commission/France, Recueil 2000, p. I-4397.

(40) http ://ec.europa.eu/competition/state_aid/legislation/reference_rates. html.

(41) JO C 273 du 9.9.1997, p. 3.

(42) Règlement (CE) n° 794-2004 de la Commission du 21 de avril 2004 concernant la mise en œuvre du règlement (CE) n° 659-1999 du Conseil portant modalités d'application de l'article 93 du traité CE (JO L 140 du 30.4.2004, p. 1). De fait, la méthode de calcul des taux de référence et de récupération n'a pas été modifiée avant 2008, date à laquelle les compléments/marges qu'il convenait d'ajouter au taux de référence pour refléter le profil de risque du bénéficiaire et les niveaux de sûretés ont été introduits - voir communication de la Commission relative à la révision de la méthode de calcul des taux de référence et d'actualisation (JO C 14 du 19.1.2008, p. 6).

(43) Voir par exemple les affaires C-730-79, Philip Morris Holland/ Commission, Recueil 1980, p. I-2671, point 11, et C-259-85, France/Commission, Recueil 1987, p. I-4393, point 24.

(44) Voir par exemple l'affaire C-102/87, France/Commission, Recueil 1988, p. 4067, et l'affaire C-310/99, République italienne/Commission, Recueil 2002, p. I-289, point 85.

(45) JO L 134 du 30.4.2004, p. 114.

(46) Voir le considérant 32 de la décision d'ouvrir la procédure.

(47) Voir http ://legislacion.derecho.com/acuerdo-11-junio-2009-tribunal- vasco-de-cuentas-publicas-2231134.

(48) Voir les affaires jointes T-116/01 et T-118/01, P&O European Ferries (Vizcaya) S.A. et Diputación Foral de Vizcaya/Commission, Recueil 2003, p. II-2957, en particulier les points 109 à 139. L'arrêt a été confirmé en ce qui concerne cette partie de l'appréciation, par la décision de la Cour de justice du 1 er juin 2006 relative au pourvoi.

(49) Cadre communautaire temporaire pour les aides d'État destinées à favoriser l'accès au financement dans le contexte de la crise économique et financière actuelle (JO C 83 du 7.4.2009, p. 1).

(50) JO C 54 du 4.3.2006, p. 13.

(51) Règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (JO L 214 du 9.8.2008, p. 3).

(52) Voir la décision de la Commission du 17.5.2000 dans l'affaire N 773/99 - Espagne - Carte des aides à finalité régionale pour la période 2000-2006 ; cette décision peut être consultée à l'adresse suivante : http ://ec.europa.eu/eu_law/state_aids/comp-1999/n773-99. pdf.

(53) JO C 74 du 10.3.1998, p. 9.

(54) JO C 70 du 19.3.2002, p. 8.

(55) Voir la note de bas de page n° 33.

(56) JO L 124 du 20.5.2003, p. 36.