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Décisions

Cass. com., 14 mai 2013, n° 12-15.390

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

BMW France (SA)

Défendeur :

Taurisson (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Rapporteur :

Mme Riffault-Silk

Avocats :

SCP Fabiani, Luc-Thaler, Me Copper-Royer

T. com. Brive-La-Gaillarde, du 10 déc. 2…

10 décembre 2010

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société BMW France (la société BMW), dont l'entreprise Taurisson était membre du réseau de distribution depuis 1977, a conclu avec la société Taurisson, le 1er octobre 2003, pour une durée de cinq années prenant effet à cette date, un contrat de concession conforme au règlement européen d'exemption par catégorie dans le secteur automobile n° 1400-2002 du 31 juillet 2002 ; qu'il était stipulé que chaque partie devrait, avec un préavis de six mois avant son terme, notifier à l'autre partie son intention de ne pas renouveler le contrat par lettre recommandée avec avis de réception ; que par lettre du 31 mai 2007, la société BMW a demandé à son concessionnaire s'il entendait faire acte de candidature en vue de la proposition d'un nouveau contrat puis, par lettre du 27 septembre 2007, lui a indiqué que si elle-même n'avait pas l'intention de lui proposer le renouvellement du contrat à son terme, ceci ne saurait exclure l'examen de la candidature de la société Taurisson dans le cadre de la proposition du nouveau contrat de manière concomitante à toute autre candidature ; que, le contrat n'ayant pas été renouvelé à son échéance, la société Taurisson a fait assigner la société BMW sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

Sur le second moyen : - Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche : - Vu l'article 1134 du Code civil ; - Attendu que pour condamner la société BMW à payer les sommes de 875 589 euros et 215 000 euros à titre de dommages-intérêts correspondant à un préavis non effectué, l'arrêt retient que la lecture des courriers litigieux adressés à la société Taurisson révèle que si la société BMW a certes émis des réserves sur la poursuite des relations entre les parties, elle n'en a nullement exclu la possibilité, puisqu'elle se bornait dans le courrier du 31 mai 2007 à demander à la société Taurisson si elle entendait faire acte de candidature, même si elle y indiquait que "eu égard aux conditions difficiles d'exécution du contrat qui nous lie actuellement, nous ne vous cachons pas que nous nous réservons d'examiner toute autre candidature qui nous serait présentée en vue de la proposition d'un nouveau contrat de concession BMW au 1er octobre 2008 sur la zone de chalandise de votre contrat" ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait des termes clairs et précis de ce courrier qu'il était demandé à la société Taurisson de dire si elle se portait candidate en vue de la proposition d'un nouveau contrat et que le concédant l'informait de son intention de la mettre en concurrence avec d'autres candidats potentiels pour l'obtention de la concession, ce qui manifestait l'intention de la société BMW de ne pas poursuivre ses relations commerciales avec la société Taurisson dans les conditions antérieures, la cour d'appel a dénaturé les termes de ce courrier ;

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche : - Vu l'article 1134 du Code civil ; - Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt, après avoir relevé que la lettre du 27 septembre 2007, après la mention "conformément à l'article 11-1 du contrat de concession automobile Mini, nous vous informons que nous n'avons pas l'intention de vous proposer le renouvellement de ce contrat à son terme", se terminait de la façon suivante "cela ne saurait bien évidemment exclure l'examen de la candidature de votre société dans le cadre de la proposition du nouveau contrat de manière concomitante à toute autre candidature", retient que la rédaction de ce dernier courrier était pour le moins ambiguë et n'était pas en conséquence de nature à renseigner de façon claire et précise la société Taurisson sur les intentions de la société BMW à son égard, la décision de celle-ci y apparaissant réservée à l'examen des candidatures qui lui seraient proposées ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait des termes clairs et précis de ce courrier que la société BMW n'avait pas l'intention de proposer à la société Taurisson le renouvellement du contrat à son terme et se bornait à ne pas exclure l'examen d'une proposition de la société Taurisson pour un nouveau contrat, de manière concomitante à toute autre candidature, manifestant ainsi son intention de ne pas poursuivre les relations commerciales aux conditions antérieures, la cour d'appel a dénaturé les termes de ce courrier ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : casse et annule, mais seulement en ce qu'il a condamné la société BMW à payer à la société Taurisson la somme de 875 589 euros à titre de dommages-intérêts et celle de 215 000 euros à titre de dommages-intérêts supplémentaires, l'arrêt rendu le 9 février 2012, entre les parties, par la Cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Limoges autrement composée.