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Décisions

Cass. soc., 27 mars 2013, n° 11-26.912

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Distribution Casino France (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Linden

Avocats :

SCP Gatineau, Fattaccini, SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray

Amiens, du 20 sept. 2011

20 septembre 2011

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 20 septembre 2011), que Mme X et M. Y ont conclu avec la société Distribution Casino France (la société), à partir du 8 juillet 2006, plusieurs contrats en qualité de gérants non-salariés de succursale de commerce de détail alimentaire ; qu'ils ont été licenciés le 29 juin 2009 pour manquant de marchandises et/ou d'espèces inexpliqué et défaut de règlement ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale pour demander la requalification de leur contrat de cogérance en contrat de travail et le paiement de diverses sommes ;

Sur le pourvoi principal de Mme X et de M. Y : - Attendu que les moyens de cassation invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le pourvoi incident de la société : - Sur le premier moyen : - Attendu que la société fait grief à l'arrêt de décider que la rupture du contrat de cogérance est dépourvue de cause réelle et sérieuse et de la condamner à verser à Mme X et M. Y des indemnités de rupture et des dommages-intérêts pour rupture sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen : 1°) que depuis le 21 juillet 2008, la rédaction de l'article L. 7322-1 du Code du travail a été modifiée ; qu'elle accorde désormais aux gérants mandataires non-salariés des succursales de commerce de détail alimentaire, le bénéfice des dispositions du Livre I de la troisième partie relatif à la durée du travail, aux repos et aux congés, et la quatrième partie du Code du travail relative à la santé et à la sécurité au travail, et ce à la condition que soient fixées par l'entreprise propriétaire de la succursale les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail dans l'établissement, ou soumises à son agrément ; qu'en jugeant que les gérants non-salariés bénéficient " de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale ", pour en déduire que M. Y et Mme X, dont le contrat de gérance-mandat avait été rompu le 29 juin 2009, devaient bénéficier des dispositions du Code du travail relatives à la rupture du contrat de travail figurant dans le Livre II de la première partie du Code, la cour d'appel a violé l'article L. 7322-1 du Code du travail par fausse application ; 2°) subsidiairement qu'il appartient au juge d'examiner tous les motifs énoncés dans la lettre de rupture du contrat de gérance ; qu'en l'espèce la lettre de rupture du contrat de gérance du 29 juin 2009 reprochait à M. Y et Mme X non seulement un déficit d'inventaire, mais également l'absence, en méconnaissance de leurs obligations contractuelles, de toute justification apportée concernant les manquants constatés de même que leur carence totale à rembourser dans les délais contractuels le déficit d'inventaire constaté ; qu'en se bornant à juger non réel ni sérieux le grief pris du déficit d'inventaire, avant d'affirmer qu'il n'y avait pas lieu de s'interroger sur les fautes contractuelles ou conventionnelles susceptibles de recevoir la qualification de faute grave qui auraient pu être commises par les gérants-mandataires pour s'être abstenu de justifier ou de couvrir les manquants en marchandises ou en espèces, au motif inopérant que le premier grief constituait la cause première et déterminante de la rupture des relations contractuelles, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1232-1 et L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail ; 3°) qu'il incombe au mandataire dépositaire, serait-il salarié, de rendre compte de son mandat ou de son dépôt ; qu'il doit restituer en nature ou en espèces les choses qu'il a reçues en dépôt ou justifier de leur utilisation ; qu'en faisant peser sur le mandant déposant la charge de prouver que le mandataire dépositaire n'avait pas intégralement restitué les choses déposées, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé les articles 1315, 1927, 1933, 1993 du Code civil, L. 1232-6 et sq et L. 7322-1 du Code du travail ;

Mais attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 7322-1 du Code du travail que les dispositions de ce Code bénéficiant aux salariés s'appliquent en principe aux gérants non-salariés de succursales de commerce de détail alimentaire ; que les articles L. 1231-1 et suivants du Code du travail, relatifs à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée, sont par conséquent applicables à ces gérants non-salariés ;

Et attendu que si le gérant non-salarié d'une succursale peut être rendu contractuellement responsable de l'existence d'un déficit d'inventaire en fin de contrat et tenu d'en rembourser le montant, il ne peut être privé, dès l'origine, par une clause du contrat, du bénéfice des règles protectrices relatives à la rupture des relations contractuelles ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel, qui n'était pas liée par la définition donnée par la convention des parties des faits susceptibles d'en entraîner la rupture sans préavis ni indemnité, a apprécié si les faits reprochés aux cogérants justifiaient cette rupture ; qu'ayant estimé que le déficit d'inventaire n'était pas certain, elle en a déduit, sans inverser la charge de la preuve, que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi incident qui n'est pas de nature à permettre l'admission de ce pourvoi ;

Par ces motifs : Rejette les pourvois principal et incident.