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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 28 juin 2013, n° 12-01138

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Overture Search Services Ireland Limited (Sté)

Défendeur :

Live Banner (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Chandelon

Conseillers :

Mmes Saint-Schroeder, Lion

Avocats :

Mes Couturier, Crevieux, Pecnard, Teytaud, Barbry

T. com. Paris, 7e ch., du 30 nov. 2011

30 novembre 2011

La société Live Banner, concepteur de bannières publicitaires sur Internet et intermédiaire en publicité a conclu deux contrats avec la société de droit irlandais Overture Search Services Limited (Ossil), qui appartient au groupe Yahoo et exerce dans le même secteur d'activité.

Le premier, en date du 6 septembre 2005, est un "contrat de syndication", ce terme désignant le fait de confier à un prestataire ayant acquis des espaces publicitaires auprès de différents sites, la diffusion des annonces de ses propres clients.

Par le second contrat, dit "de partenariat", conclu le 10 janvier 2006, la société Ossil a confié à la société Live Banner la réalisation de publicités sur ses sites supports.

Reprochant à la société Ossil d'avoir, le 12 novembre 2008, rompu la relation commerciale établie, la société Live Banner a engagé la présente procédure par exploit du 15 juillet 2009.

Par jugement du 30 novembre 2011, assorti de l'exécution provisoire sous réserve de la fourniture d'une caution, le Tribunal de commerce de Paris a condamné la société Ossil au paiement des sommes de :

- 1 513 754,84 € portant intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2009,

- 30 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par déclaration du 19 janvier 2012, la société Ossil a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du Code de procédure civile, déposées le 29 novembre 2012, la société Ossil demande principalement à la cour de :

- infirmer le jugement,

- débouter la société Live Banner de ses demandes,

- condamner la société Live Banner au paiement de la somme de 450 361,66 € de dommages-intérêts,

- condamner la société Live Banner à lui verser 50 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du Code de procédure civile, déposées le 6 juin 2012, la société Live Banner demande principalement à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a appliqué l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce et débouté la société Ossil de sa demande reconventionnelle,

- l'infirmer pour le surplus,

- condamner, sous astreinte de 10 000 € par jour de retard, portant intérêts au taux légal, la société Ossil au paiement de 2 946 455,22 € au titre de la rupture brutale de la relation, portant intérêts au taux légal, capitalisés, à compter de l'assignation,

- ordonner, sous astreinte, la mention de cette condamnation sur le site yahoo.fr, du dispositif de cette décision et d'un lien hypertexte permettant d'accéder à son intégralité pendant une durée d'un mois outre sa publication dans trois journaux et revues de presse,

- condamner la société Ossil, sous astreinte de 10 000 € par jour de retard portant intérêts au taux légal, au paiement d'une indemnité de 70 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Cela étant exposé, LA COUR,

Considérant que le 12 novembre 2008 M. Jean-Christophe Conti, agissant en sa qualité de "Head of YSM Europe Yahoo Network" a notifié à la société Live Banner la résiliation immédiate du contrat de partenariat par un courrier dont l'objet était "Résiliation du Contrat de Syndication du 6 septembre 2005" ;

Considérant que la société Live Banner soutient que ce courrier lui est inopposable comme rédigé par un tiers au contrat, au surplus dépourvu d'existence juridique ;

Qu'elle ajoute qu'il ne concerne que le premier contrat signé, l'autorisant à tirer certaines conséquences de la survie du second ;

Mais considérant que les pièces produites démontrent que "Yahoo! Network" est le nom commercial sous lequel sont diffusées les annonces publicitaires du groupe Yahoo et que si l'objet annoncé du courrier est limité au contrat de syndication, sa teneur et les précisions apportées dans sa motivation permettent de constater qu'il vise l'ensemble des relations contractuelles de sorte que les observations faites par la société Live Banner de ce chef sont sans objet ;

Considérant qu'après avoir rappelé le niveau d'exigence des prestations attendues pour maintenir sa crédibilité, le représentant de la société Ossil précise :

"malgré nos multiples réunions et nos différentes mises en garde, vous avez persisté dans des pratiques constituant des manquements manifestes à votre obligation de bonne foi du contrat de partenariat liant nos deux sociétés.

En effet en détournant les programmes Content Match de leur objet, en permettant la diffusion de publicités n'ayant aucun rapport avec le thème de l'audience de la page Web concernée, en privilégiant un trafic de qualité médiocre plus rémunérateur au détriment de l'intérêt des annonceurs, votre société dévalorise l'image de marque de ces derniers ainsi que celle de Yahoo! Network.

Ainsi que nous vous l'avons indiqué lors de nos entretiens, nous avons dû faire face à de nombreuses critiques des annonceurs se plaignant de la qualité du trafic généré sur leur site (...)" ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 442.6-1 5° du Code de commerce, "engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, pour tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels (...)" ;

Considérant que la société Ossil ne conteste ni l'existence d'une relation commerciale établie avec la société Live Banner, ni la rupture sans préavis, mais évoque la suite de ce texte qui prescrit : "Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations (...)" ;

Qu'elle soutient ainsi que la rupture notifiée à son co-contractant n'est pas abusive dès lors qu'elle a, conformément à ces dispositions, mis en œuvre la clause résolutoire de l'article 9-2 du contrat et qu'elle n'est pas davantage brutale, cette clause la dispensant de toute mise en demeure au regard de la gravité des manquements de son co-contractant ;

Considérant que la société Ossil conclut à l'autonomie de l'article 9-2 par rapport à l'article 9-1, ce dernier texte, parce qu'il sanctionne des infractions bénignes, exigeant, contrairement au premier, une mise en demeure infructueuse ;

Qu'elle soutient en toute hypothèse avoir délivré à son prestataire des mises en garde répondant aux exigences contractuelles, dans le cadre de son obligation d'exécution de bonne foi du contrat ;

Sur l'analyse de ces dispositions

Considérant que le paragraphe 9 du contrat concerne sa résiliation ;

Qu'il se subdivise en 5 sous parties dont seuls la première et les points a) et b) de la seconde concernent le présent litige :

9.1 Chaque partie peut résilier immédiatement le présent Contrat à tout moment en adressant une notification écrite à l'autre partie si l'autre partie commet une violation du présent Contrat à laquelle, dans le cas d'une violation à laquelle il peut être remédié, il n'est pas remédié dans les 30 jours d'une demande écrite à son égard,

9.2 Overture peut résilier le contrat immédiatement, de plein droit et sans intervention judiciaire si :

(a) un site Web n'est pas conforme aux lois et règlements en vigueur, ou qu'il viole un droit de propriété intellectuelle et plus généralement qu'il porte atteinte aux droits des tiers ;

(b) la Société ne satisfait pas à ses engagements tels que définis aux Sections 2.2 et 4.2 de la Partie A des présentes, des Articles 2.3, 3.2, 4.2 et 4.3 de la Partie B des présentes ;

Considérant :

Que dans le chapitre A, relatif à la mise en œuvre du contrat :

- 2.2 oblige la société Live Banner à soumettre à la société Ossil tout nouveau site Web pressenti pour la diffusion de ses publicités et l'autorise à en éliminer certains,

- 4.2 décline en 20 rubriques, de a) à t) toutes les obligations du prestataire,

Que dans le chapitre B sur les conditions générales du contrat :

- 2.3 prend acte de la capacité juridique dont atteste le prestataire ainsi que du respect, par lui-même et par les sites Web qu'il propose, de la législation,

- 3.2 concerne l'affichage des résultats Overture qui doivent correspondre à sa demande et ne pas déprécier sa marque, sa réputation ou celle de sa clientèle,

- 4.2.précise que Overture décline toute responsabilité en cas de plaintes de ses partenaires ou des sites,

- 4.3 autorise Overture à résilier le contrat en cas d'insatisfaction de sa clientèle ;

Considérant qu'il résulte de cet examen que l'article 9.2 vise tout manquement du prestataire à l'une quelconque de ses obligations de sorte que l'interprétation donnée par la société Ossil ne peut être retenue, qui viderait l'article 9.1 de toute substance ;

Qu'il s'agit en réalité, comme sa présentation le laisse supposer, d'un texte introductif ;

Sur l'existence de mises en demeure

Considérant que la société Ossil prétend y avoir procédé, ce dont elle déduit que l'acquisition de la clause résolutoire pourrait être constatée par la cour ;

Considérant que si elle soutient à bon droit qu'une mise en demeure peut être délivrée sans formalisme particulier, elle doit cependant, sinon viser la clause résolutoire, du moins avertir solennellement le co-contractant des risques encourus s'il ne remédie pas aux manquements contractuels dénoncés ;

Considérant qu'en l'espèce, la société Ossil se réfère à deux mises en demeure ;

Par courriel du 17 janvier 2008

Considérant que ce courriel mentionne l'objet suivant : changement pour amélioration de la qualité du trafic ;

Qu'il dénonce l'insuffisance des "referer" (technique permettant de connaître le site à partir duquel l'internaute a été redirigé vers l'annonceur), du trafic, l'emploi de mots-clés inadaptés et suggère une modification des implémentations et du look des bannières ;

Qu'il se termine par un paragraphe intitulé "Prochaines Etapes", décrites comme suit : améliorer la qualité n'est pas un objectif impossible. (...) Votre business sera d'autant plus attractif s'il est respectable. (...) Ne vous découragez pas (...) je m'efforcerai de vous orienter le mieux possible dans les deux prochains mois ;

Considérant que la teneur de ce courrier ne pouvait permettre à la société Live Banner de prendre conscience du risque affectant la pérennité du contrat de sorte qu'il ne répond pas à la définition de mise en demeure ;

Par l'organisation d'une réunion à Londres, le 6 août 2008

Considérant que les témoignages des salariés de la société Ossil s'opposent à celui du salarié de la société Live Banner sur la teneur de cette réunion de sorte qu'il y a lieu de les écarter ;

Considérant que la société Ossil qui ne produit aucun autre élément au soutien de son argumentation ne saurait prétendre avoir délivré une mise en demeure au cours de cette réunion alors que tout en soulignant son importance capitale, s'agissant, d'une réunion de crise visant à remettre sur de bons rails un prestataire au comportement déviant, elle ne produit ni convocation mettant en évidence l'importance de cet ordre du jour ni le moindre compte rendu, ce qu'elle a fait en d'autres occasions comme le démontre la société Live Banner ;

Que la mise en demeure alléguée ne peut ainsi être admise et qu'il n'y a pas matière à constater l'acquisition de la clause résolutoire en l'absence de respect des prescriptions contractuelles ;

Sur la résiliation unilatérale

Considérant que si un partenaire peut résilier unilatéralement un contrat, cette mesure, opérée à ses risques et périls et sous un contrôle a posteriori du juge, doit être justifiée par une situation d'autant plus grave qu'aucun préavis n'est accordé ;

Et considérant que les quelques griefs, qui seront évoqués ci-après, n'ont pas une importance suffisante pour justifier une telle mesure ;

Considérant qu'il convient d'observer en premier lieu que le courrier de résiliation n'en mentionne que deux :

- la diffusion de publicités n'ayant aucun rapport avec le thème de l'audience de la page Web concerné,

- un trafic de qualité médiocre ayant amené des récriminations de certains clients ;

Considérant qu'il résulte des pièces produites que l'offre dite "Content Match" que la société Live Banner était chargée de mettre en œuvre consiste à proposer à l'internaute qui navigue sur un site de se rendre chez un annonceur susceptible de lui faire une offre en rapport avec la page visitée ;

Que sur le plan technique la "rencontre" résulte de l'adéquation des mots-clés choisis par l'annonceur, ce dernier sélectionné en fonction du niveau de l'enchère qu'il a consenti à porter pour cette publicité, avec ceux caractérisant le site consulté par l'internaute et qu'il incombait à la société Live Banner de choisir,

Que si ce visiteur est attiré par la publicité qui s'affiche, il clique sur un hyperlien qui le dirige automatiquement vers le site de l'annonceur ;

Que les intermédiaires en publicité sont payés en fonction du nombre de clics ;

Considérant que dans le courrier de rupture, la société Ossil reproche à la société Live Banner d'avoir diffusé des messages publicitaires sans rapport avec les goûts manifestés par l'internaute, privilégiant la recherche du profit en choisissant des mots-clés, en rapport avec le jeu et la finance, attirant des annonceurs prêts à investir un gros budget dans ce type de publicités ;

Qu'elle fait également part à son partenaire de l'insatisfaction de ses clients qui n'ont eu qu'un maigre retour sur leur investissement ;

Que ces écritures consacrent de longs développements à ce sujet et présentent un certain nombre de statistiques sous la forme de graphiques pour démontrer l'impact insuffisant de la publicité mise en œuvre par la société Live Banner en termes de trafic ;

Mais considérant que toutes les données chiffrées sont données par la société Ossil qui ne saurait se constituer ses propres preuves ;

Que par ailleurs et alors que le reproche fait à la société Live Banner est d'employer des mots-clés susceptibles de générer une rémunération élevée, à savoir ceux qui ont trait au jeu et à la finance, l'appelante produit, pour corroborer cette assertion, peu de captures d'écran ;

Que l'une d'entre elles est justement contestée par la société Live Banner s'agissant d'une bannière réalisée pour le compte de la société Miva dont le nom apparaît ;

Que les autres comportent des publicités pour des rencontres dans des sites qui n'ont pas cet objet ;

Qu'aucune ne concerne le domaine de la finance et du jeu ;

Considérant encore que pour démontrer l'insatisfaction de ses clients, la société Ossil se borne à communiquer, hors les écrits électroniques de ses salariés, le courriel de l'annonceur AGL dont la teneur démontre qu'il considère que c'est le concept même de cette publicité qui est à revoir, ce que l'appelante ne peut sérieusement contester, l'ayant abandonné en mars 2009 ;

Considérant qu'en l'absence de tout autre élément et au regard de cette unique plainte pour plusieurs milliers d'annonceurs, la résiliation n'est pas justifiée ;

Considérant que dans ses écritures la société Ossil ajoute deux autre griefs tenant l'un au refus de la société Live Banner de communiquer les sources de son trafic, lui interdisant ainsi d'exercer son contrôle, le second à l'insertion de bannières intrusives ;

Mais considérant qu'il résulte aussi bien des pièces de la société Ossil que de l'avis n° 10-A-29 donné le 14 décembre 2010 par l'Autorité de la concurrence que la communication du nom du site Web à partir duquel un internaute a cliqué sur le lien hypertexte se heurte à des obstacles techniques ;

Et considérant que les parties se sont employées ensemble à les résoudre et que leurs multiples échanges intervenus entre 2005 à 2008 démontrent un souci de transparence partagé pour améliorer la qualité du service permettant à la société Ossil une information complète sur la diffusion des publicités, dont elle validait aussi bien le graphisme que la mise en œuvre technique ;

Que c'est ainsi à bon droit que les premiers juges ont constaté que la société Live Banner s'est employée à satisfaire toutes les exigences de son partenaire ;

Considérant que s'agissant des bannières intrusives, il convient d'observer que la société Ossil ne s'y est opposée qu'à partir de 2008, dans son "guidelines" diffusé en septembre de cette année, prohibant toute forme de publicité agressive ;

Qu'il ne saurait ainsi être fait grief à la société Live Banner l'emploi de procédés qui non seulement n'étaient pas interdits par le contrat, ou le guidelines diffusé en 2007, mais que son partenaire a admis à une certaine époque, étant encore observé que les preuves apportées par la société Ossil sont une nouvelle fois peu nombreuses, une seule capture d'écran démontrant l'emploi d'un point rouge sur lequel l'internaute est encouragé à cliquer alors que huit procédés sont dénoncés ;

Considérant enfin que la société Live Banner relève avec pertinence que le volume d'affaires confié par la société Ossil n'a cessé d'augmenter, ce que les parties ont pris en compte en signant plusieurs avenants complétant les deux contrats d'origine et que les relations commerciales entre la société Live Banner et d'autres sociétés du groupe se sont poursuivies après la rupture du contrat témoignant ainsi s'il en était besoin des compétences professionnelles de cette entreprise ;

Considérant que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a considéré que la sanction de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce était applicable aux faits de l'espèce ;

Sur l'indemnisation

Considérant que la société Ossil ne saurait utilement invoquer la clause limitative de responsabilité, objet de l'article 6.2 du contrat, alors qu'est mise en jeu sa responsabilité délictuelle ;

Sur la durée du préavis

Considérant que la généralité des termes employés par l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce autorise son application dans le cadre d'une relation contractuelle, apportant ainsi une exception à l'interdiction pour un co-contractant de fonder son action sur le terrain délictuel, mais également dans une situation pré voire post contractuelle ;

Considérant toutefois que ce texte, conçu à l'origine pour lutter contre les déréférencements abusifs de la grande distribution, vise à protéger l'une des parties, considérée comme plus vulnérable, indépendamment des dispositions d'un éventuel contrat susceptible de ne pas prendre suffisamment en compte ses intérêts ;

Qu'il en résulte que le préavis ne saurait être inférieur à celui prévu par le contrat et que l'argumentation de la société Ossil tendant à le voir fixer à 3 mois est inopérante ;

Considérant que le premier contrat était d'une durée d'une année, reconductible par tacite reconduction pour une même durée sauf dénonciation respectant un délai de préavis de 3 mois ;

Que sa date anniversaire étant le 6 septembre, une résiliation opérée le 12 novembre 2008 ne pouvait produire effet qu'à compter du 6 septembre 2009, permettant ainsi à la société Live Banner de bénéficier de 10 mois pour démarcher de nouveaux clients et obtenir d'autres marchés de sorte que le préavis à retenir en application du texte précité ne peut être d'une durée inférieure ;

Considérant que la société Live Banner propose de retenir un préavis d'une année exposant qu'elle réalisait l'essentiel de son chiffre d'affaires avec la société Ossil qui était non seulement son principal client mais également son fournisseur, 30 % de ses espaces publicitaires étant achetés sur des sites de son groupe ;

Mais considérant que le critère essentiel posé par l'article L. 442-6 I 5° concerne la durée des relations, quatre années en l'espèce, de sorte qu'il ne saurait être accordé de préavis supérieur à 10 mois et que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur l'évaluation du préjudice

- Perte de marge brute sur 10 mois

Considérant que pour accorder le principal critiqué, le tribunal a retenu, à l'examen des documents produits, une marge brute moyenne de 51,86 % pour les années 2007 et 2008 qu'il a appliqué au chiffre d'affaires moyen des mêmes années ;

Considérant que la société Ossil conteste ce calcul en ce qu'il n'a pas pris en compte les trois années précédant la rupture alors que seules les pratiques déloyales de la société Live Banner justifient l'important chiffre d'affaires réalisé en 2007 et 2008 ;

Qu'elle considère que les éléments comptables produits ne permettent pas de vérifier les chiffres avancés et qu'au regard du secteur d'activité concerné, il convient de calculer les préjudices sur la base de la marge sur coûts variables ;

Mais considérant qu'au regard de l'évolution des relations contractuelles en 2007, attestée par les avenants produits, l'année 2006 n'est pas représentative du volume d'affaires et que c'est à bon droit que les premiers juges n'ont pris en compte que les deux derniers exercices ;

Que la cour n'ayant pas retenu l'existence de pratiques déloyales, le second argument est sans objet ;

Que les calculs de l'expert-comptable sont justifiées par les données des comptes d'exploitation ;

Qu'enfin la société Live Banner soutient que les coûts variables, qui correspondent aux charges variant avec le volume d'affaires de l'entreprise, ont été prises en compte ;

Que la société Ossil, qui ne sollicite pas de mesure d'expertise ni ne propose son propre calcul se borne à produire des notes d'un expert-comptable qui rappelle que la marge brute est plus étroite que la marge sur coûts variables en ce qu'elle ne retient que les charges liés aux achats à l'exception de celles liées aux ventes comportant notamment les avantages particuliers accordés au personnel commercial ;

Qu'il apparaît toutefois que si la prise en compte de ces coûts variables peut faire varier dans des proportions importantes la marge brute pour certaines activités de service où les coûts salariaux constituent le principal poste de dépense, tel n'est pas le cas dans l'hypothèse d'espèce où les principales charges sont liées à l'acquisition d'espaces publicitaires de sorte que la marge brute retenue par le tribunal est justifiée au regard des éléments comptables produits ;

- Coût de restructuration

Considérant que la juridiction consulaire a fait droit à cette demande qu'elle a estimé justifiée par une attestation de l'expert-comptable de la société Live Banner ;

Considérant toutefois que cette attestation détaille ces coûts en quatre rubriques :

- coût des conseils, 15 975 €,

- coût de sortie du personnel : 77 939,12 €,

- frais liés à la rupture du bail commercial : 75 324,36 €,

- coût de location d'espaces pour le data center : 122 244,82 € ;

Considérant que la cour constate en premier lieu que la somme de ces différents postes ne correspond pas au total réclamé de 271 707,84 € ;

Considérant ensuite,

- sur le premier poste, que rien ne justifie que les frais d'avocat ou d'expert-comptable mentionnés sont en relation directe avec la rupture des contrats et que l'intimée ne précise pas ce qu'est l'assistance à transaction Actisens qu'elle chiffre à 3 713 € ;

- sur le second poste concernant les indemnités de licenciement, la société Live Banner, ne produit pas les courriers nécessairement adressés au personnel concerné pour démontrer le motif économique des mesures prises et ne précise même pas leur date de sorte que la cour ne peut retenir qu'ils sont intervenus à la suite de la résiliation des contrats,

- sur le 3e poste, il n'est pas davantage précisé en quoi la société Ossil serait à l'origine du déménagement de la rue Vivienne et quel fondement permettrait à la société Live Banner de se faire rembourser le dépôt de garantie dont l'expert-comptable indique qu'il a été perdu ou les travaux, sans doute imposés par le propriétaire dans le cadre de la restitution des locaux ;

- sur le 4e poste, la prise en charge par la société Ossil des frais de location data center ou engagement transit IP, cette dépense n'étant pas autrement explicitée, n'est pas juridiquement justifiée ;

- Coût des procédures engagées par les partenaires

Considérant que ce poste vise une procédure engagée par la société Best of Media en paiement des espaces publicitaires acquis par la société Live Banner ;

Qu'il résulte des pièces produites que la société Ossil, appelée en intervention forcée, a été mise hors de cause par la juridiction saisie du litige de sorte que l'autorité de chose jugée s'oppose à la demande ;

- Perte des investissements

Considérant que la société Live Banner sollicite de ce chef la somme de 365 867 € qu'elle prétend justifiée par une attestation de son expert-comptable ;

Qu'il résulte cependant de la pièce à laquelle elle renvoie (24) que ses investissements ont été de 20 196 € en 2006, 47 185 € en 2007 et 16 640 € en 2008 soit un total de 84 021 € ;

Qu'au surplus aucun élément ne vient attester du fait qu'ils auraient été nécessités par des besoins particuliers de la société Ossil ;

- Coût d'achat d'espaces publicitaires

Considérant qu'une somme de 116 593,144 € est sollicitée à ce titre sans production de la moindre facture ni même attestation de l'expert-comptable ;

Considérant en conséquence que c'est à bon droit que les premiers juges n'ont pas retenu ces différentes demandes ;

Sur les autres demandes de la société Live Banner

Considérant qu'aucun motif juridique ne justifie que les condamnations soient assorties d'une astreinte et que la nature des faits ne commande pas de faire droit à la demande de publication de la décision ;

Sur la demande reconventionnelle de la société Ossil

Considérant que le sens du présent arrêt commande de la rejeter ;

Sur l'application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile

Considérant que la condamnation prononcée par le tribunal sera confirmée ;

Que chaque partie succombant partiellement en cause d'appel, il n'y a pas lieu à application de ce texte devant la cour ;

Par ces motifs : Réforme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Overture Search Services Limited au paiement de la somme de 271 707,84 € au titre des frais de restructuration et déboute la société Live Banner de ce chef ; Statuant de nouveau sur le principal alloué ; Condamne la société Overture Search Services Limited au paiement de la somme de 1 242 047 € ; Confirme pour le surplus les dispositions du jugement non contraires au présent arrêt ; Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel ; Condamne la société Overture Search Services Limited aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.