CA Aix-en-Provence, 11e ch. B, 20 juin 2013, n° 12-07275
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
France Telecom Lease (SA)
Défendeur :
Association Nord Assistance Santé Service
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Coleno
Conseillers :
M. Junillon, Mme Camugli
Avocats :
Mes Sider, Prevot-Lambard, Simoni, Bickert
Rappel des faits et de la procédure
L'Association Nord Assistance Santé a souscrit auprès de la SA France Telecom Lease deux contrats de location financière du 12 février 2009 et du 22 mai 2008 destinés à financer l'installation de standard téléphonique. Les matériels objet de ces contrats ont été livrés et installés.
L'Association Nord Assistance Santé ayant cessé de régler les loyers à compter du 1er juillet 2010, la SA France Telecom Lease l'a fait assigner devant le Tribunal d'instance de Marseille par acte du 18 janvier 2011 pour :
- l'entendre condamner au paiement des loyers échus soit 615,28 euros au titre du premier contrat et 440,58 euros au titre du deuxième contrat majoré des intérêts contractuels calculés au prorata temporis au taux de l'intérêt légal plus un point à compter de chacune des échéances,
- voir constater la résiliation des deux contrats pour défaut de paiement de loyer,
- voir condamner l'Association Nord Assistance Santé à lui payer les sommes, au titre des loyers restant à échoir des deux contrats, soit 6 460,44 euros, majorées d'une indemnité de résiliation de 10 % sur les loyers TTC (646,04 euros et 234,98 euros).
La société France Telecom Lease a par la suite minoré ses demandes en calculant ses indemnités de résiliation sur les loyers hors taxes, ce pour rester dans les limites du taux du ressort du tribunal d'instance.
Par jugement contradictoire du 10 février 2012, le Tribunal d'instance de Marseille a :
- rejeté les exceptions d'incompétence soulevées par l'Association Nord Assistance Santé à raison du quantum de la demande,
- condamné l'Association Nord Assistance Santé au paiement des sommes de :
615,28 euros avec intérêts au taux légal à compter du 18 août 2010 au titre du premier contrat du 12 février 2009
440,58 euros avec intérêts au taux légal à compter du 6 août 2010 au titre du contrat du 22 mai 2008, 1 euro au titre de chaque clause pénale des deux contrats
1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
- ordonné l'exécution provisoire.
Le jugement a modéré les indemnités réclamées, considérant par application des articles 1152 et 1226 du Code civil que la clause prévoyant la majoration des intérêts contractuels et la clause prévoyant l'exigibilité des loyers TTC à échoir jusqu'au terme du contrat et une indemnité de résiliation de 10 % comme des clauses pénales.
Il a rejeté la demande d'indemnisation de l'Association Nord Assistance Santé par application de l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce à raison du déséquilibre significatif entre les parties au contrat ainsi que la demande de délai de grâce de l'Association Nord Assistance Santé.
La SA France Telecom Lease a relevé appel de la décision le 19 avril 2012.
Par conclusions récapitulatives et en réplique numéro 2, elle conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il a écarté les demandes formulées au titre des intérêts contractuels, des loyers à échoir et de l'indemnité de résiliation de 10 % et réitéré ses demandes initiales, sollicitant en outre une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle conteste que le taux d'intérêt et l'indemnité de résiliation de 10 % stipulés au contrat présentent un caractère excessif au sens de l'article 1152 du Code civil, dès lors qu'ils constituent la juste contrepartie financière de son engagement (produit des jurisprudences de plusieurs cour d'appel excluant le caractère excessif de la majoration de 10 %).
Elle confirme que l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce est inapplicable aux relations contractuelles de l'espèce dès lors que l'Association Nord Assistance Santé n'est pas un partenaire économique au sens de ses dispositions et qu'il n'existe aucun déséquilibre significatif du fait des contrats de location financière souscrits.
Elle conclut au rejet des délais de grâce demandés par l'Association Nord Assistance Santé qui s'est refusée à tout paiement en dépit de l'exécution provisoire assortissant la décision de première instance et qui n'a pas de compte bancaire.
Par conclusions déposées et signifiées le 3 août 2012, l'Association Nord Assistance Santé :
- conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a réduit à sa juste mesure, par application des articles 1152 et 1226 du Code civil la somme réclamée au titre des articles 3.4 b) et 2.4 a) des contrats litigieux,
- demande acte de ce qu'elle ne conteste pas devoir la somme de 1 055,86 euros au titre des loyers échus impayés, demande, par voie de réformation, le bénéfice des dispositions de l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce à raison du déséquilibre significatif créé par le contrat dans les droits et obligations des parties, les conditions générales lui ayant été imposées, en l'absence au surplus de toute réciprocité, l'association ayant pas de droit contractuel de rompre le contrat en cas d'inexécution de son cocontractant ni de prétendre, comme celle-ci, à une indemnité exorbitante, les clauses pénales revenant à la forcer à exécuter son obligation de payer le prix sans aucune contrepartie de la part de la SA France Telecom Lease. Elle sollicite à nouveau le bénéfice de délais de grâce.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 avril 2013.
Motifs de la décision
La recevabilité de l'appel n'est pas contestée et la procédure ne révèle aucune irrégularité susceptible d'être relevée d'office.
Sur le fond.
Sur la dette principale.
Il sera donné acte à l'association Nord Assistance Santé de ce qu'elle conteste pas devoir la somme de 1055,86 euros au titre des loyers échus et impayés.
Sur la clause prévoyant la majoration des intérêts contractuels.
Le jugement déféré a justement qualifié, et la SA France Telecom Lease ne conteste au demeurant pas la qualification de clause pénale de la clause contractuelle prévoyant la majoration des intérêts contractuels sur les sommes impayées calculés au prorata temporis au taux de l'intérêt légal plus un point à compter de chacune des échéances.
Cette clause a été justement qualifiée de manifestement excessive par le premier juge par application de l'article 1152 du Code civil dès lors qu'elle s'ajoute à une clause prévoyant une indemnité de résiliation contractuelle équivalente à 10 % des loyers restant à échoir et la restitution immédiate du matériel prêté, qu'en outre le contrat a été exécuté partiellement.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a alloué à l'appelante le strict bénéfice des intérêts au taux légal.
Sur la clause prévoyant l'exigibilité des loyers TTC à échoir jusqu'au terme du contrat et une indemnité de résiliation de 10 %.
La SA France Telecom Lease rappelle qu'en contrepartie de la mise à disposition du locataire du matériel choisi par cette dernière et qu'elle a financé, l'association Nord Assistance Santé s'est engagée à payer le nombre de loyers convenus, que le nombre et le montant des échéances a été calculé en fonction du coût des matériels financés, que l'obligation prise par la locataire de payer les loyers et en cas de non-paiement, d'encourir la résiliation du contrat avec restitution du matériel et le versement d'une indemnité de 10 % a eu pour contrepartie l'obligation du bailleur de mettre à sa disposition la chose louée, que les sommes réclamées par la SA France Telecom Lease tant au titre des loyers à échoir que de l'indemnité de 10 % correspondent aux sommes attendues de l'exécution du contrat et ne présentent aucun caractère excessif.
Le jugement déféré sera par conséquent réformé en ce qu'il a réduit à un euro le montant des clauses pénales de chacun des contrats et il sera fait droit à la demande, à ce titre, de l'appelante.
Sur la demande d'indemnisation tirée du déséquilibre significatif entre les parties au contrat.
La SA France Telecom Lease rappelle que l'association Nord Assistance Santé avait la libre opportunité de s'adresser à la société qui lui paraîtrait offrir les meilleures conditions pour le financement de l'installation des appareils dans ses sites. Elle fait donc valoir à juste titre qu'il n'existait en l'espèce aucun partenariat économique lui permettant au sens de l'article L. 442-6 I 2° précité du Code de commerce d'imposer à son cocontractant des clauses créant un déséquilibre significatif.
Elle précise qu'elle a quant à elle satisfait à son obligation de procéder au règlement des factures correspondant au matériel choisi par la locataire dès réception du procès-verbal d'installation de ces matériels signé sans réserve par celle-ci, qu'elle a ainsi permis que le matériel soit mis à disposition de l'association qui s'est engagée en contrepartie au paiement du nombre de loyers convenus, le nombre le montant de ces échéances ayant été calculé en fonction du coût des matériels financés.
Aucun déséquilibre significatif n'étant démontré entre les engagements réciproques des parties, le montant des loyers à échoir majorés de 10 % ne représente pas un montant manifestement disproportionné.
La demande d'indemnisation de l'association Nord Assistance Santé fondée sur les dispositions précitées a donc été à juste titre écartée.
Sur la demande de délais de grâce.
L'association Nord Assistance Santé sollicite le bénéfice des plus larges délais pour s'acquitter de sa dette sans fournir d'éléments financiers ou comptables permettant de justifier des difficultés financières qu'elle allègue.
La SA France Telecom Lease fait de surcroît justement observer que l'association Nord Assistance Santé a de fait, bénéficié de larges délais dès lors qu'elle s'abstient de régler les sommes qu'elle doit depuis l'année 2010 y compris la somme de 1 055,86 euros qu'elle reconnaît devoir.
La demande de délais de grâce sera par conséquent rejetée.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens.
Le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions relatives aux dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Il n'apparaît pas équitable de laisser à la charge de la SA France Telecom Lease l'intégralité de ses frais irrépétibles d'appel.
La somme de 1 500 euros lui sera allouée sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
L'association Nord Assistance Santé supportera la charge des dépens, sans qu'il y ait lieu, cependant, de déroger aux dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001.
Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement, Confirme le jugement déféré en ce qu'il a : - condamné l'association Nord Assistance Santé à payer à la SA France Telecom Lease les sommes de : - 615,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du 18 août 2010 au titre du contrat NT05904 du 12 février 2009. - 440,58 euros avec intérêts au taux légal à compter du 6 août 2010 au titre du contrat NT06876 du 22 mai 2008. - Débouté l'association Nord Assistance Santé de sa demande de dommages et intérêts et de délais. Le réformant sur le surplus Condamne l'association Nord Assistance Santé à payer à la SA France Telecom Lease les sommes suivantes : - contrat de location financière NT05904. - 5 401,71 euros au titre du montant hors taxes des loyers à échoir - 540,17 euros au titre de l'indemnité de résiliation - Contrats de location financière NT6876. - 1 964,68 euros au titre du montant hors taxes des loyers à échoir. - 196,47 euros au titre de l'indemnité de résiliation. Y ajoutant Condamne l'association Nord Assistance Santé à payer à la SA France Telecom Lease la somme de 1 500 euros sur le fondement du Code de procédure civile. Condamne l'association Nord Assistance Santé aux dépens, ceux d'appel distraits au profit de Me Sider conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.