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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 19 septembre 2013, n° 12-02555

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Sarffa (SAS)

Défendeur :

Ront (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Perrin

Conseillers :

Mmes Michel-Amsellem, Pomonti

Avocats :

Mes Fisselier, Putigny-Ravet, Guizard, Helwaser

T. com. Paris, 13e ch., du 30 janv. 2012

30 janvier 2012

FAITS ET PROCEDURE

La société Ront qui fabrique, notamment, des produits destinés à l'hygiène et l'entretien des prothèses auditives a, depuis l'année 1998, approvisionné en produits vendus sous les marques Audika et CFA, la société Sarffa qui exerce son activité sous l'enseigne Audika.

Le 15 mai 2009, la société Sarffa, se plaignant d'un défaut de respect des devis et de problèmes de qualité dans la réalisation des packagings des produits a, par lettre recommandée, informé la société Ront de son intention de ne plus lui confier la fabrication des produits Audika et CFA.

Estimant cette rupture brutale, la société Ront a, par acte du 22 septembre 2010, fait assigner la société Sarffa devant le Tribunal de commerce de Paris en demandant sa condamnation à lui payer des dommages-intérêts

Par un jugement en date du 30 janvier 2012, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Paris a :

- condamné la société Sarffa à payer à la société Ront la somme de 46 967 euros en réparation du préjudice subi par la rupture brutale partielle des relations commerciales établies, déboutant la société Ront pour le surplus de sa demande,

- débouté la société Ront de sa demande d'indemnisation pour le préjudice moral subi,

- débouté la société Sarffa de la totalité de ses demandes,

- condamné la société Sarffa à payer à la société Ront la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Vu l'appel interjeté le 9 février 2012 par la société Sarffa contre cette décision.

Vu les dernières conclusions signifiées le 30 août 2012 par lesquelles la société Sarffa demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondée la société Sarffa en son appel,

- infirmer le jugement rendu le 30 janvier 2012 par le Tribunal de commerce de Paris en toutes ses dispositions,

- débouter la société Ront de toutes ses demandes,

- condamner la société Ront à verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société Sarffa soutient qu'elle était bien fondée à rompre la relation commerciale, car la société Ront a commis régulièrement des erreurs de prix dans les devis, en dépit de multiples remarques et relances. Elle fait valoir que l'explication donnée par la société Ront et relative aux difficultés générées par un changement de charte graphique n'est pas opérante. Elle insiste sur la gravité des erreurs récurrentes commises par l'intimée et soutient qu'elles justifiaient parfaitement le recours à un autre fournisseur.

La société appelante fait encore valoir que la société Ront n'a pas tenu compte de ses mécontentements et a fourni les produits de manière tardive et non-conforme à ses exigences. Sur ce point, elle indique que le camouflage des erreurs commises par la société Ront ne rend pas pour autant l'exécution de ses obligations conformes aux demandes qui lui étaient faites.

La société Sarffa soutient encore que les inexécutions récurrentes du contrat par la société Ront présentaient un degré de gravité suffisant pour justifier une diminution des relations commerciales, voire une cessation définitive de celles-ci et sans préavis. Elle expose qu'elle n'a pas réduit les commandes de manière brutale, car elle a fait connaître son insatisfaction à l'intimée à plusieurs reprises ainsi que sa décision de recourir à une autre société pour le lancement du second projet d'évolution de sa gamme entretien.

Sur le montant du préjudice, elle précise que la société Ront a disposé du temps nécessaire pour conclure de nouveaux contrats, qu'elle n'était pas son unique client et qu'elle pouvait développer librement sa clientèle. Elle fait observer que la société Ront ne produit aucune pièce permettant d'apprécier l'importance du préjudice prétendument subi.

Vu les dernières conclusions signifiées le 30 octobre 2012 par lesquelles la société Ront demande à la cour de :

- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 30 janvier 2012 en ce qu'il a dit que la société Sarffa avait rompu brutalement les relations commerciales établies avec la société Ront et en ce qu'il a dit que la société Ront n'avait commis aucune faute grave justifiant une rupture sans préavis des dites relations, mais réformera ledit jugement en ce qui concerne la durée du délai de préavis et le montant des dommages et intérêts alloués, qui devront être revus à la hausse,

- dire et déclarer la société Ront recevable et bien fondée en ses demandes,

- dire et déclarer que la société Sarffa a engagé sa responsabilité à l'égard de la société Ront en mettant brusquement un terme, sans respecter aucun préavis, à des relations commerciales qui duraient depuis plusieurs années, au moins depuis 1998,

- dire et déclarer que compte tenu de l'ancienneté des relations commerciales, du volume d'affaires réalisé et du fait qu'il s'agissait de produits marqués, de l'état de dépendance économique dans lequel se trouvait la société Ront pour ce marché, la société Sarffa aurait dû respecter un préavis d'au moins 18 mois,

- dire et déclarer que la société Ront n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité à l'égard de la société Sarffa,

- condamner la société Sarffa à payer à la société Ront une somme de 161 127 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la rupture brutale des relations commerciales,

- condamner la société Sarffa à payer à la société Ront une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait du manque de loyauté et du comportement vexatoire de la société Sarffa,

- débouter la société Sarffa de l'intégralité de ses demandes, fin et conclusions,

- condamner la société Sarffa à payer à la société Ront une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société intimée rappelle, d'une part, que le défaut de préavis écrit caractérise automatiquement le caractère brutal de la rupture, d'autre part, que l'auteur de celle-ci ne peut s'affranchir de ce délai qu'en cas de force majeure ou de faute revêtant un certain degré de gravité. Selon elle, aucune des fautes reprochées par la société Sarffa n'est suffisamment grave pour justifier l'absence de délai de préavis. Elle précise que la société Sarffa ne l'a informée de sa décision de rompre les relations commerciales que verbalement par téléphone.

La société Ront oppose qu'elle n'a pas été informée du changement de charte graphique bien avant sa mise en place comme le prétend la société appelante, que les erreurs dans les devis, n'ont pas prêté à conséquence puisqu'elles ont été corrigées et que de telles erreurs sont inhérentes aux relations commerciales. Sur la non-conformité des produits, elle soutient que l'appelante a opté pour un procédé d'impression qu'elle lui avait au préalable déconseillé et qu'elle s'est montrée diligente et réactive en proposant une solution permettant de maintenir l'approvisionnement des centres Audika.

La société intimée réfute avoir pratiqué des prix élevés et précise qu'elle a fait bénéficier à la société Sarffa de nombreux gestes commerciaux dans le cadre du lancement de sa nouvelle gamme de produits. Elle fait valoir sur ce point qu'il convient de tenir compte de l'ensemble des conditions tarifaires et commerciales appliquées et non de s'en tenir à une stricte comparaison des prix.

Concernant son préjudice, la société Ront fait valoir qu'au regard de l'ancienneté des relations, du volume d'affaires réalisé et du fait que la relation commerciale portait sur des produits marqués ainsi que de l'état de dépendance économique dans lequel elle se trouvait, le préavis aurait dû être de 18 mois minimum. Elle ajoute que compte tenu de la part importante que représentait la société Sarffa dans son chiffre d'affaires, elle ne pouvait pas compenser immédiatement la perte brutale et conséquente de chiffre d'affaires par le développement d'une autre clientèle puisque celle-ci ne lui a accordé aucun délai de préavis.

LA COUR renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

MOTIFS

Sur l'existence d'une relation commerciale établie et sa durée

Il n'est pas contesté entre les parties qu'elles ont été liées par une relation commerciale établie à partir de l'année 1998. Cette relation commerciale ayant été rompue par la société Sarffa le 15 mai 2009, elle a donc duré onze années.

Sur la rupture brutale

Aux termes de l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce, "engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, (...) de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels (...). Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure".

Il résulte de ces dispositions qu'en principe les relations commerciales établies ne peuvent être rompues qu'à l'issue d'un délai de préavis précisé par écrit, sauf dans le cas où l'une des parties n'exécute pas ses obligations, hypothèse dans laquelle, la rupture peut alors se réaliser immédiatement.

En l'espèce, la société Sarffa reproche à la société Ront plusieurs inexécutions qui, selon elle, justifiaient une réduction progressive du volume de ses commandes.

Cependant, il convient de rappeler, d'une part, que l'absence de préavis n'est justifiée que lorsque les fautes reprochées à un partenaire sont suffisamment graves pour constituer une inexécution de ses obligations, d'autre part, que durant le préavis, les volumes d'échanges entre les parties doivent demeurer équivalents à ce qu'ils étaient avant sa délivrance. Dans ces conditions, une réduction progressive des commandes s'analyse comme une rupture sans préavis.

Il convient, en conséquence, d'examiner si les manquements reprochés à la société Ront revêtaient un caractère de gravité suffisante pour que la société Sarffa puisse s'abstenir d'avertir sa partenaire de sa décision et de lui accorder un préavis avant que cette rupture ne soit définitive.

Sur les erreurs de devis

Selon la société Sarffa, il était fréquent que la société Ront commette des erreurs dans les devis qu'elle lui adressait et qu'elle soit contrainte de la relancer à plusieurs reprises avant d'obtenir les rectifications. Elle ne produit, cependant, à ce sujet qu'un échange de courriels entre Mme Ichbia, attachée de direction générale de la société Audika, et Mme Saclier, salariée de la société Ront. Il ressort de cet échange que les deux personnes ont négocié les quantités des commandes compte tenu des tarifs proposés et s'il est exact que Mme Saclier n'a pas corrigé, dès que cela lui a été demandé, certaines mentions du devis, un accord était intervenu entre elles par téléphone et a, par la suite, été confirmé par l'envoi d'un nouveau devis le 14 janvier 2008. Le délai écoulé entre l'envoi de ce nouveau devis et celui du mois d'octobre précédent a correspondu aux négociations entre les parties sur certains points qui faisaient l'objet d'un désaccord de la part de la société Sarffa. Par ailleurs, celle-ci ne démontre pas qu'il y aurait eu une erreur non rectifiée depuis le mois d'avril 2007 et qu'elle aurait été signalée par elle.

S'agissant de la répercussion du changement de la charte graphique des emballages des produits sur la correction du devis, la société Sarffa ne démontre pas que cette charte aurait été communiquée à la société Ront, à la date du 14 septembre 2007, puisque le courriel sur lequel elle s'appuie précise seulement que "la gamme sera en 3 couleurs" et, au contraire, indique que "les maquettes sont en cours de réalisation". Par ailleurs, l'échange de courriels entre les parties du 15 au 26 janvier 2008 permet de constater que la société Ront ne disposait pas des maquettes lui permettant d'imprimer rapidement des étiquettes convenues pour le dépoussiérant 210 ml et que lorsque ces maquettes lui ont été adressées, elles comportaient une erreur sur le nom et l'adresse du fabricant. L'échange de courriel entre les parties du 14 janvier au 5 février 2008 ne permet, enfin, pas de relever une faute ou une négligence à la société Ront dans la fabrication ou les délais de livraison des produits.

C'est donc à juste titre que le tribunal a jugé que les erreurs alléguées concernant les devis ne permettaient pas de considérer que la société Ront aurait commis une faute justifiant une rupture sans préavis de la relation commerciale.

Sur la non-conformité des prestations

Il résulte des échanges de courriels produits que la modification de la présentation des contenants, boites et bombes, de produits au début de l'année 2008 a été difficile et a provoqué de nombreuses contestations de la part de la société Sarffa. Si des discussions ont eu lieu sur la question de la sérigraphie des bombes 75ml avec un marquage CFA, rien dans le dossier ne permet de constater que la société Ront aurait commis une faute en conduisant la société Sarffa à "renégocier" cette production en sérigraphie, aucune pièce ne démontre que ces produits aient finalement été livrés avec retard. Il convient par ailleurs d'examiner chacun des sujets de mécontentement invoqués par la société Sarffa.

Les trousses

La société Sarffa soutient que le fait que les trousses de produits de démarrage aient été composées à la fois de produits conditionnés sous l'ancien et le nouveau packaging a contrarié son projet de modifier l'image du groupe Audika. Elle ne démontre cependant pas que cette solution ait perduré au-delà d'une période transitoire et que cette contrariété ait nui à sa politique d'image.

Les boîtes de lingettes

Il ressort d'un courriel adressé par M. Sineau, de la société Audika, à Mme Ichbia que la version de la boîte de lingettes avec deux rabats au lieu de trois, reprochée à la société Ront, avait été validée par le service marketing de la société Sarffa, qui ne peut donc faire grief à la société Ront de l'avoir fabriqué telle quelle.

Les bombes dépoussiérantes

Il résulte d'un courriel adressé à plusieurs personnes au sein de la société Audika par M. Sineau, le 12 mai 2008, que la bombe de 75 ml était acceptable en dépit d'un "ombré" manquant, ce point étant confirmé par Mme Sevenet le lendemain. En revanche, les courriels échangés démontrent que s'agissant de la bombe 210 ml, le produit réalisé ne correspondait pas aux attentes, ce que M. Sineau a fait savoir à la société Ront le 22 mai 2008. Néanmoins, les échanges produits, notamment, le courriel de M. Benoist, directeur commercial de la société Ront, à M. Sineau de la société Sarffa, permettent de constater que les deux sociétés ont transigé sur ce point pour l'apposition d'étiquettes autocollantes sur les bombes, et en ont partagé les frais, la société Ront y contribuant à concurrence de 1098 euros et non en totalité, contrairement à ce que prétend la société Sarffa. Il n'est pas contesté par la société Sarffa que la société Ront lui aurait déconseillé la sérigraphie pour les décors de ces bombes et les responsabilités de ces non conformités sont dès lors partagées entre les parties, la société Sarffa ne pouvant s'exonérer en affirmant que la société Ront était informée de la charte graphique avant le premier trimestre 2008, ce qui n'est pas démontré.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que s'il est incontestable que la société Ront n'a pas livré des produits dans un packaging conforme aux attentes de la société Sarffa au moment du changement de charte graphique, il n'est pas démontré que celle-ci aurait commis des erreurs ou des négligences à l'occasion de la réalisation de ses obligations, assimilables à une inexécution et justifiant une rupture sans préavis.

Enfin, la société Sarffa prétend que les prix auraient été plus élevés que ceux de ses concurrents, mais cet élément, quand bien même serait-il prouvé, ne lui permettait pas de rompre ses relations commerciales sans préavis.

C'est donc de façon brutale que, le 15 mai 2009, soit presqu'un an après ces dysfonctionnements, la société Sarffa a annoncé à la société Ront qu'elle n'entendait pas poursuivre ses relations commerciales avec elle, et ce, quand bien même elle lui ait encore commandé certains produits, puisqu'ainsi qu'il a été rappelé précédemment, la relation doit se poursuivre pendant le délai de préavis dans des conditions équivalentes à ce qu'elles étaient jusque-là.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Durée du préavis

Il n'est pas contesté que les relations commerciales des parties ont été continues pendant 11 ans. La société Ront soutient, sans être démentie sur ce point, que le chiffre d'affaires qu'elle réalisait avec la société Sarffa représentait 15 % de son chiffre d'affaires total en 2008. Elle ne saurait toutefois prétendre s'être trouvée en situation de dépendance économique vis-à-vis de cette société dans la mesure où elle ne démontre pas qu'elle ne pouvait, au moment de la rupture, trouver une solution alternative pour vendre ses produits. Il convient sur ce point de relever que la société Ront n'était pas son seul client sur le marché des produits d'hygiène et que ce marché n'était pas son seul secteur d'activité, ainsi que le démontrent les pages de son site Internet, dont la société Sarffa produit la copie. Au regard de l'ensemble de ces éléments, la société Sarffa aurait dû accorder à la société Ront un préavis de quatre mois, lequel, s'agissant de produits vendus sous marque de distributeurs, doit être porté à huit mois en application des dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce qui prévoit le doublement du délai de préavis dans le cas où sont concernés des produits vendus sous marque de distributeur.

Sur les dommages-intérêts

Le préjudice résultant de la rupture brutale d'une relation commerciale est équivalent à la perte de marge brute pour les mois pendant lequel le préavis aurait dû se dérouler. Il est indépendant d'une éventuelle perte de chiffre d'affaires. En l'espèce, la rupture a été annoncée le 15 mai 2009 et elle aurait donc dû être effective le 15 janvier 2010.

Il ressort des pièces produites que les chiffres d'affaires réalisés par la société Ront avec la société Sarffa ont été de 221 159 euros en 2007 et de 217 101 euros en 2008, soit une moyenne mensuelle de 18 260,83 euros (438 260 /24). La société Sarffa ne conteste pas le coefficient de 43 % de marge brute énoncé par la société Ront et retenu par le tribunal. Il en résulte que la marge brute que la société Ront aurait dû réaliser pendant le préavis est équivalente à 62 817,26 euros ([18 260,83 X 8] X 43 %).

Il n'y a pas lieu d'ajouter à cette somme les frais généraux de 14 % dont la charge n'est pas la conséquence de la brutalité de la rupture.

En revanche, il convient d'en déduire la marge brute qui résulte de la continuation des commandes pendant les huit mois écoulés entre le 15 mai 2009 et le 15 janvier 2010, puisque la rupture n'a pas été totale. Il résulte des éléments fournis par la société Ront qu'elle a réalisé un chiffre d'affaires de 84 538,98 euros avec la société Sarffa pendant l'année 2009 et elle ne conteste pas que le chiffre d'affaires réalisé en 2010 ait été de 24 760 euros. La moyenne mensuelle de chiffre d'affaires réalisé a donc été, pendant ces deux années, de 4 554,12 euros et la marge brute mensuelle de 1 958,27 euros, ce dont il se déduit qu'entre 2009 et 2010, la société Ront a réalisé avec la société Sarffa une marge brute moyenne de 15 666,16 euros pour 8 mois, qu'il convient de déduire de la somme de 62 817,26 euros. Le préjudice subi par la société Ront s'établit ainsi à la somme de 47 151 euros.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement sur ce montant et de condamner la société Sarffa à payer à la société Ront la somme de 47 151 euros.

Sur le préjudice moral

La société Ront n'apporte aucun élément qui démontrerait qu'elle a subi un préjudice moral du fait que la société Sarffa n'ait pas tenu compte des efforts commerciaux consentis pour éviter une rupture d'approvisionnement lors du lancement de ses nouveaux produits. Sa demande de dommages-intérêts à cet égard doit donc être rejetée.

Sur les frais irrépétibles

Au regard de l'ensemble de ce qui précède, il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Ront la totalité des frais engagés pour faire valoir ses droits. La société Sarffa sera condamnée à lui payer la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme le jugement rendu entre les parties par le Tribunal de commerce de Paris, le 30 janvier 2012, sauf en ce qu'il a condamné la société Sarffa à payer à la société Ront la somme de 46 967 euros ; Statuant à nouveau, Condamne la société Sarffa à payer à la société Ront la somme de 47 151 euros ; Rejette la demande de dommages-intérêts de la société Ront en réparation de son préjudice moral ; Condamne la société Sarffa à payer à la société Ront la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; Rejette toutes les autres demandes plus amples ou contraires de parties ; Condamne la société Sarffa aux dépens de l'instance qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.