CA Versailles, 12e ch., 17 septembre 2013, n° 11-06203
VERSAILLES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Milliman INC (SA), Milliman (SAS)
Défendeur :
Deloitte Conseil (SAS), Grannan, Winterhof
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Rosenthal
Conseillers :
Mmes Poinseaux, Orsini
Avocats :
Mes Lafon, Courtois, Lissarrague, Martel
Vu le jugement rendu le 22 juillet 2011 par le Tribunal de commerce de Nanterre, rectifié par arrêt du 20 octobre 2011 de la Cour d'appel de Versailles, qui a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- dit les sociétés Milliman INC et Milliman SAS et MM. Grannan et Winterhof recevables mais mal fondés en leur exception d'incompétence et s'est déclaré compétent,
- dit les demandes de condamnation de la société Deloitte conseil à l'encontre de MM. Grannan et Winterhof irrecevables,
- débouté les sociétés Milliman INC et Milliman SAS de leur demande de sursis à statuer,
- dit que les sociétés Milliman INC et Milliman SAS ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire dont elles doivent in solidum réparation ;
- condamné in solidum les sociétés Milliman INC et Milliman SAS à payer à la société Deloitte conseil la somme de 6 864 000 euros en réparation de son préjudice matériel ;
- condamné in solidum les sociétés Milliman INC et Milliman SAS à payer à la société Deloitte conseil la somme de 150 000 euros en réparation de son préjudice d'image ;
- débouté les sociétés Milliman INC et Milliman SAS de leur demande reconventionnelle,
- condamné in solidum les sociétés Milliman INC et Milliman SAS à payer à la société Deloitte conseil la somme de 150 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;
Vu les appels interjetés le 5 août 2011 par les sociétés Milliman INC et Milliman SAS et le 6 septembre 2011 par la société Deloitte conseil et la jonction des procédures ;
Vu les dernières écritures signifiées le 29 mai 2013 par lesquelles les sociétés Milliman INC et Milliman SAS et MM. Grannan et Winterhof demandent à la cour de, outre divers Dire et Juger :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis hors de cause MM.. Patrick Grannan et Bruce Winterhof,
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions portant condamnation des sociétés Milliman INC et Milliman SAS et statuant à nouveau,
- se déclarer territorialement incompétent et renvoyer Deloitte conseil devant le Tribunal de commerce de Paris,
Subsidiairement,
- dire et juger que les sociétés appelantes n'ont commis aucun acte de concurrence déloyale, et débouter en conséquence Deloitte conseil de ses demandes,
Très subsidiairement, sur le préjudice :
- dire et juger que Deloitte conseil ne justifie pas de la consistance de son préjudice, et en conséquence la débouter de ses demandes, sauf à désigner un expert judiciaire pour éclairer la cour sur la consistance du préjudice réellement subi par Deloitte conseil,
A titre infiniment subsidiaire, sur le quantum du préjudice
Sur les coûts de recrutement :
- dire et juger que la demande de Deloitte conseil est irrecevable et subsidiairement inondée et en conséquence, débouter Deloitte conseil de cette demande et à tout le moins limiter l'indemnisation de Deloitte à hauteur de ses dernières demandes, soit 1 000 000 euros.
Sur la perte de clientèle et de marge :
- dire et juger que le préjudice indemnisable de Deloitte conseil ne saurait dépasser 1 700 000 euros,
Sur le préjudice moral et d'image
- dire et juger que cette demande n'est assortie d'aucune justification et en conséquence débouter Deloitte conseil de cette demande,
Sur l'appel incident de Deloitte conseil au titre de l'évaluation du préjudice, de l'article 700 et des dépens :
- dire et juger que les demandes de Deloitte conseil sont purement et simplement abusives car sans commune mesure avec l'ampleur du préjudice réellement subi, et débouter, en conséquence, Deloitte conseil de ses demandes en toutes fins qu'elles comportent,
Sur la demande reconventionnelle de Milliman au titre du dénigrement commis par Deloitte conseil :
- condamner Deloitte conseil à payer aux sociétés Milliman INC et Milliman SAS la somme de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale (dénigrement),
Condamner Deloitte conseil à payer aux sociétés Milliman INC et Milliman SAS la somme de 250 000 euros et à M Grannan ainsi qu'à M Winterhof la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction ;
Vu les dernières écritures signifiées le 13 mai 2013 aux termes desquelles la société Deloitte conseil prie la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il s'est déclaré compétent et en ce qu'il a débouté les sociétés Milliman INC et Milliman SAS de leur demande de sursis à statuer et dit que ces sociétés ont commis des actes de concurrence déloyale et les a déboutées de leur demande reconventionnelle et condamnées au paiement de 150 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens ;
Pour le surplus, infirmer le jugement en ce qu'il a dit les demandes de condamnation de MM.. Grannan et Winterhof irrecevables, limité l'indemnisation du préjudice matériel de Deloitte conseil à la somme de 6 864 000 euros et celle du préjudice d'image à la somme de 150 000 euros
Statuant à nouveau :
- juger que MM. Patrick Grannan et Bruce Winterhof se sont rendus coupables d'actes de concurrence déloyale et parasitaire gravement fautifs pour détourner le fonds de commerce d'actuariat Conseil de Deloitte conseil ;
- juger Deloitte Conseil recevable et bien fondée à solliciter leur condamnation in solidum avec Milliman INC et Milliman SAS à réparer l'entier préjudice matériel et le préjudice moral et d'image dont elle est victime ;
- condamner in solidum les sociétés Milliman INC et Milliman SAS et MM. Grannan et Winterhof au paiement à la société Deloitte conseil de la somme de 33, 275 millions d'euros, sauf à parfaire, en réparation du préjudice matériel subi du fait et en conséquence des actes de concurrence déloyale et parasitaire dont ils se sont rendus coupables en détournant frauduleusement son fonds de commerce d'actuariat Conseil ;
- condamner in solidum les sociétés Milliman INC et Milliman SAS et MM. Grannan et Winterhof au paiement à la société Deloitte conseil de la somme de 500 000 euros, sauf à parfaire, en réparation du préjudice moral et d'image subi du fait de leurs agissements déloyaux ;
En tout état de cause,
- débouter les sociétés Milliman INC et Milliman SAS et MM. Grannan et Winterhof de l'ensemble de leurs demandes,
- condamner in solidum les sociétés Milliman INC et Milliman SAS et MM. Grannan et Winterhof à payer à la société Deloitte Conseil la somme de 500 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, dont distraction ;
SUR CE, LA COUR,
Considérant que, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement entrepris ainsi qu'aux écritures des parties ; qu'il sera seulement rappelé que :
- la société Deloitte conseil fait partie du réseau Deloitte qui intervient dans le domaine de l'audit, du conseil et de l'expertise comptable dans plus de 140 pays ; sous-filiale de la société Deloitte SA, holding de tête du réseau Deloitte en France, elle a développé à partir de 2005 une activité d'actuariat conseil pour laquelle elle est rapidement devenue le n° 1 en France ;
- le groupe Milliman est un des leaders mondiaux du conseil actuariel ; il dispose de 51 bureaux dans le monde et en a ouvert un à Paris en octobre 2008 après avoir créé à cette fin la société Milliman SAS immatriculée le 13 janvier 2008 ;
- en 2008, l'équipe en charge de l'activité d'actuariat conseil au sein de la société Deloitte conseil était composée de 30 salariés dont deux ayant le statut d'associés de la société Deloitte SA, Eric Serant et Jérôme Nebout, auxquels la société Deloitte conseil avait confié la gestion et la responsabilité de cette activité, et 28 consultants ;
- le 24 juillet 2008, MM.. Serant et Nebout ont démissionné de leurs fonctions,
- dans les deux mois qui ont suivi ces démissions, 25 des 28 collaborateurs de l'équipe d'actuariat conseil de la société Deloitte conseil ont à leur tour démissionné ;
- par courriers du 30 juillet 2008, l'avocat de 'Deloitte France' a rappelé à MM. Serant et Nebout l'obligation particulière de loyauté à laquelle ils étaient soumis vis à vis de la "firme", ainsi que le délai de préavis de 6 mois et les obligations de non concurrence et non débauchage auxquelles ils étaient tenus, selon les termes et avec les sanctions prévues par la "Charte associative Deloitte" qu'ils avaient signée ;
- par courriers du 6 août 2008 adressé à la société Milliman INC et du 15 octobre 2008 adressé à cette société et à la société Milliman SAS, ces sociétés ont été avisées des obligations contractuelles pesant sur MM. Serant et Nebout en application de la Charte associative Deloitte et les a mises en garde contre une participation à la violation de ces obligations ;
- MM. Serant et Nebout ont définitivement quitté la société Deloitte conseil le 24 octobre 2008 pour rejoindre la société Milliman SAS, suivis de la quasi intégralité de l'équipe d'actuariat conseil ;
- la société Deloitte conseil, exposant que ce départ massif de l'équipe d'actuaires avait été suivi de la perte de ses principaux clients détournés par la société Milliman SAS et soutenant que le détournement dont elle était victime était le résultat d'une véritable machination orchestrée très en amont, depuis le mois de février 2008, par la société Milliman INC et ses dirigeants MM. Grannan et Winterhof, et la société Milliman SAS, avec la complicité active de MM. Serant et Nebout, a, par actes des 16 juin, 10 et 15 juillet 2009, assigné les sociétés Milliman INC et Milliman SAS ainsi que MM. Grannan et Winterhof, devant le Tribunal de commerce de Nanterre, en dommages-intérêts pour concurrence déloyale, sollicitant leur condamnation in solidum à lui payer la somme de 30 000 000 euros ultérieurement portée à 39 400 000 euros en réparation de son préjudice matériel outre 500 000 euros au titre de son préjudice moral et d'image ;
- c'est dans ces circonstances que le Tribunal de commerce de Nanterre a rendu la décision entreprise ;
- d'autres procédures ont opposé ou opposent les parties :
* le 13 octobre 2008, MM. Serant et Nebout ont saisi le Conseil de prud'hommes de Nanterre pour faire constater que la charte associative Deloitte constituait un avenant à leur contrat de travail et qu'en conséquence, la clause de préavis de 6 mois et les obligations de non-concurrence non rémunérée et de non-débauchage qui y étaient prévues, étaient nulles comme contraires aux dispositions impératives du Code du travail ; la société Deloitte conseil ayant soulevé l'incompétence de la juridiction prud'homale en se prévalant de la clause compromissoire figurant dans la charte, et le conseil de prud'hommes s'étant déclaré compétent, la Cour d'appel de Versailles, par deux arrêts du 15 février 2011 statuant sur contredit, a dit que la Charte associative Deloitte constituait, pour les stipulations concernées, un avenant au contrat de travail dont la validité des dispositions relevait de l'appréciation du conseil de prud'hommes, a déclaré la clause compromissoire inopposable à MM. Serant et Nebout et a renvoyé l'affaire devant le Conseil de prud'hommes de Nanterre ; les pourvois formés contre ces arrêts ont été rejetés par la chambre sociale de la Cour de cassation par arrêt du 30 novembre 2012 ;
* de son côté, la société Deloitte SA avait initié à l'encontre de ses anciens associés, MM. Serant et Nebout, une procédure devant un tribunal arbitral saisi et constitué en application de l'article VII de la Charte Associative de Deloitte, pour violation par eux des obligations contractuelles contenues dans la Charte dont ils étaient signataires ; par sentence du 13 juillet 2010, le tribunal arbitral, après avoir retenu sa compétence, les a condamnés à payer, à ce titre, à la société Deloitte SA la somme de 3,5 millions d'euros ; saisie d'un recours en annulation de cette sentence arbitrale, la Cour d'appel de Paris, par arrêt du15 janvier 2012, l'a annulée, en retenant que la charte avait le caractère d'un avenant à leur contrat de travail et que la clause compromissoire qui y était stipulée, leur était par conséquent inopposable et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir ; le pourvoi formé contre cet arrêt a été rejeté le 6 mars 2013 ;
Sur l'exception d'incompétence du Tribunal de commerce de Nanterre :
Considérant qu'à l'appui de leur exception d'incompétence du Tribunal de commerce de Nanterre au profit du Tribunal de commerce de Paris, les sociétés Milliman et MM. Grannan et Winterhof font valoir qu'aucun des défendeurs ne demeure dans le ressort du Tribunal de commerce de Nanterre et soutiennent que l'option ouverte par l'article 46 du Code de procédure civile est sans application en cas de pluralité de défendeurs, de sorte que seul le Tribunal de commerce de Paris, dans le ressort duquel se trouve le siège social de la société Milliman SAS, est compétent ;
Mais considérant, que contrairement à ce qui est soutenu, la faculté pour le demandeur de saisir à son choix, en cas de pluralité de défendeurs, la juridiction du lieu où demeure l'un d'eux prévue par l'article 42, alinéa 2, du Code de procédure civile, n'est pas exclusive de celle que lui offre l'article 46, alinéa 3, du même Code de saisir en matière délictuelle, la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi, lorsque cette juridiction est à ce titre compétente à l'égard de tous les défendeurs ;
Qu'il n'est pas en l'espèce contesté que le dommage invoqué par la société Deloitte conseil a été subi dans le ressort du Tribunal de commerce de Nanterre ; qu'ainsi que l'a retenu ce tribunal, par des motifs qui ne sont pas contestés, l'activité d'actuariat dont la société Deloitte conseil allègue la désorganisation du fait des actes de concurrence déloyale qu'elle impute aux sociétés Milliman et à MM. Grannan et Winterhof était exercée à Neuilly Sur Seine, où travaillait l'équipe d'actuariat ; que plusieurs clients prétendument perdus avaient leur siège social dans le ressort de ce tribunal ;
Que le jugement doit, par conséquent, être confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence et s'est déclaré compétent pour statuer sur l'action en concurrence déloyale exercée par la société Deloitte conseil ;
Sur l'action en concurrence déloyale
Considérant qu'au soutien de son action en concurrence déloyale, la société Deloitte conseil fait valoir :
- qu'elle était jusqu'au mois d'octobre 2008 le numéro 1 du marché français de l'actuariat conseil, qu'en 2008, le débauchage massif et déloyal de la quasi-totalité des membres de son équipe d'actuariat suivie du départ de ses clients au profit de la société Milliman SAS, a eu pour conséquence de désorganiser complètement son activité en vidant de sa substance son département d'actuariat,
- que le détournement de sa clientèle est avéré et que le détournement du fonds de commerce d'actuariat dont elle a été victime au profit d'un concurrent jusqu'alors inexistant est le résultat d'une véritable machination, orchestrée très en amont par la société Milliman INC et ses dirigeants, MM. Grannan et Winterhof, et par la société Milliman SAS et mise en œuvre grâce à la complicité de MM. Serant et Nebout ;
Considérant que les sociétés Milliman et MM. Grannan et Winterhof contestent tout acte de débauchage en faisant valoir que les salariés de la société Deloitte conseil ont librement choisi de quitter cette société, qu'ils n'étaient pas liés par une clause de non concurrence et n'ont pas bénéficié d'augmentation substantielle de leur salaire ;
Qu'ils soutiennent que la société Deloitte conseil qui n'a pas été mise dans l'impossibilité de recruter des salariés pour remplacer l'équipe démissionnaire n'a pas été désorganisée et que la preuve d'un détournement de clientèle n'est pas rapportée ;
Considérant qu'il est établi par les pièces produites que le département d'actuariat conseil de la société Deloitte conseil était composé, en 2008, d'une équipe de 30 personnes dont MM. Serant et Nebout, associés et que, dans les semaines qui ont suivi la démission de ces derniers intervenue en juillet 2008, environ 90 % des effectifs de l'équipe avaient quitté la société Deloitte conseil pour rejoindre la société Milliman SAS, créée par la société Milliman INC, et qui n'avait jusqu'alors aucune activité ;
Que le départ de l'équipe d'actuariat de la société Deloitte conseil a été suivi du départ de nombreux clients au profit de la société Milliman SAS ;
Que s'il est constant, ainsi que le font valoir les sociétés Milliman, que l'embauche d'anciens salariés d'une entreprise concurrente n'est pas en elle-même fautive, même si elle concerne un nombre important de salariés, de nombreux éléments permettent au cas présent d'établir que les sociétés Milliman ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Deloitte conseil ;
Qu'il est l'espèce établi que la société Milliman INC s'est fait transmettre en avril 2008 par MM. Serant et Nebout les comptes de résultat de l'activité d'actuariat de Deloitte conseil des deux dernières années ainsi que le budget prévisionnel pour 2008/2009, chiffres ne prenant en compte, selon un courriel de M Serant, que les 28 personnes que nous souhaitons prendre avec nous, ce dont il résulte que les discussions avec les deux associés de Deloitte, salariés de Deloitte conseil, avaient pour objet de récupérer toute l'équipe d'actuaires de la société et partant, une grande partie du chiffre d'affaires de l'activité d'actuariat ;
Qu'il résulte par ailleurs des pièces produites que la société Milliman INC a proposé par courriel du 19 avril 2008 à MM. Serant et Nebout une garantie de "protection contre un litige avec Deloitte" d'un montant de 7 millions d'euros portée, à la demande de ces derniers, à 15 millions d' euros ; que l'explication de la société Milliman INC selon laquelle elle a accepté d'accorder cette protection afin de rassurer MM. Serant et Nebout qui craignaient que la société Deloitte conseil ne tente de les poursuivre et ou de poursuivre Milliman SAS, en raison des clauses de non-concurrence contenues dans la Charte Associative Deloitte, alors qu'elle-même ne partageait cette crainte, convaincue de la nullité de ces clauses non rémunérées, n'est guère convaincante lorsque l'on constate que, dans les contrats de travail signés avec MM. Serant et Nebout, la disposition affirmant qu'ils étaient libres de tout engagement envers leurs précédents employeurs, et notamment non liés par une quelconque clause de non-concurrence a été rayée ; que le financement proposé montre au contraire, qu'indépendamment de la question de la validité de la clause de non concurrence figurant dans la charte, la société Milliman INC avait conscience que le débauchage de toute l'équipe d'actuariat de la société Deloitte Conseil et le transfert de l'activité d'actuariat de cette société vers la société Milliman SAS qui devait en résulter caractérisaient des actes déloyaux de concurrence ;
Que dans des documents présentés par M Winterhof au conseil d'administration de Milliman INC le 23 août 2008 et ayant pour objet la nomination d'Eric Serant et Jérôme Nebout en qualité d'associés de Milliman, il est indiqué que MM. Serant et Nebout dirigeront le bureau parisien de Milliman et que l'équipe locale sera constituée de 30 professionnels à Paris et fournira des services d'actuariat en priorité pour le marché français et dans une moindre mesure, pour certaines zones de l'Europe continentale ; qu'il est également précisé que le chiffre d'affaires de l'équipe s'élève aujourd'hui à environ 9 millions d'euros et que nous espérons que ce niveau de revenu sera transféré harmonieusement chez Milliman. En tout état de cause, le business plan établi par l'équipe prévoit des pertes de chiffre d'affaires durant la transition.
Qu'il est encore indiqué dans ces documents, pour justifier la nomination de chacun des intéressés en tant qu'associé dès son embauche et sans attendre l'issue de la période de 2 ans habituellement respectée pour de telles nominations, qu'au regard (..) de l'engagement qu'il prend envers Milliman en transférant son équipe, nous pensons qu'il est opportun de le nommer Associé dès à présent ;
Que les documents listent également les noms des principaux clients de Deloitte en actuariat conseil (CNP, Predica, Groupama, Generali, Aviva France, MMA, SCOR, Swiss life), évoquent "le sacrifice (fait par MM. Serant et Nebout) et les risques qu'ils prennent pour transférer leur activité chez Milliman" et précisent que MM. Serant et Nebout "ont développé une équipe composée de 30 professionnels au sein du premier groupe de conseil en actuariat en France" ; qu'il est indiqué que "les senior managers de cette équipe" ont été rencontrés et que la totalité de l'équipe s'apprête à rejoindre Milliman .
Qu'il n'est pas inutile de relever en outre que si les salariés qui ont rejoint la société Milliman SAS n'ont pas bénéficié d'augmentation substantielle de leur rémunération, ils ont en revanche été recrutés sans période d'essai, ce qui démontre la connaissance qu'avait leur nouvel employeur de leur très haut niveau de formation et de technicité et de leur capacité à constituer une équipe immédiatement performante ;
Qu'il est enfin avéré que la société Deloitte conseil a perdu la plupart de ses principaux clients historiques, les sociétés Crédit agricole, CNP et Groupama qui représentaient 60 % de son chiffre d'affaires en 2007 et 2008 n'en représentant plus que 3 % en 2012 ; qu'alors qu'elle réalisait un chiffre d'affaires de 9 millions en 2008 pour son activité d'actuariat conseil, son chiffre d'affaires pour cette activité était inférieur à 3 millions d'euros en 2009, tandis que la société Milliman réalisait en 2009 pour sa première année d'activité plus de 7 millions d'euros de chiffre d'affaires, et en 2010 13 millions d'euros ; que le site internet français de Milliman en février 2010 revendiquait comme clients : CNP, Prédica (Crédit agricole assurance), Groupama, Generali...
Considérant qu'il n'est pas sérieusement contestable que ce transfert de clientèle et de chiffre d'affaires au profit de la société Milliman SAS était le résultat recherché du débauchage de 90 % des effectifs de l'équipe de Deloitte Conseil qui avait justement pour finalité de s'approprier, en quelques mois et à moindre frais, tout ou partie de l'activité d'actuariat conseil générée par le savoir-faire et l'expérience d'une équipe complète, homogène et formée à laquelle la clientèle était attachée ; que ces agissements ne pouvaient qu'entraîner la désorganisation totale du département actuariat conseil de la société Deloitte conseil, privé de ses acteurs qualifiés qui ne pouvaient être remplacés à bref délai et de ses moyens d'action ;
Que le fait que les salariés débauchés n'aient pas été tenus à une clause de non concurrence, n'aient pas bénéficié d'incitations financières substantielles pour quitter Deloitte ne suffit pas à ôter à ces agissements leur caractère fautif ;
Qu'ainsi que l'a retenu le tribunal, les agissements déloyaux des sociétés Milliman leur ont permis l'économie d'efforts financiers importants qu'elles auraient dû accomplir si elles avaient dû créer ex nihilo une activité d'actuariat conseil en France puisqu'elles ont pu économiser les frais et le temps nécessaires au recrutement et à la formation de l'équipe performante d'actuaires qu'avait constituée Deloitte conseil et ont bénéficié d'une rentabilité quasi immédiate, échappant aux aléas d'une croissance hypothétique sur un marché dont elles ont écarté un concurrent ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que le caractère massif, simultané et planifié du recrutement de 27 des 30 membres de l'équipe en charge de l'activité d'actuariat conseil au sein de la société Deloitte conseil, constituée de salariés d'un niveau de qualification élevé et très spécialisés parmi lesquels les deux associés la dirigeant, et l'appropriation de la clientèle et du chiffre d'affaires correspondant qui devait inéluctablement en résulter caractérisent des manœuvres déloyales ayant eu pour objet et pour effet la désorganisation complète et durable du département d'actuariat conseil de la société Deloitte conseil dont l'activité a été ainsi brutalement et durablement anéantie ;
Que ces agissements sont constitutifs d'actes de concurrence déloyale ;
Que le jugement n'est pas critiquable en ce qu'il a qualifié ces agissements d'actes de concurrence déloyale et parasitaire, ce dernier terme désignant plus particulièrement le fait pour les sociétés Milliman de tirer profit, pour s'implanter en France à moindre frais, des efforts et investissements réalisés par la société Deloitte conseil, en s'appropriant l'équipe immédiatement opérationnelle constituée par cette société et, par suite, la clientèle attachée à son savoir-faire ;
Que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a jugé que les sociétés Milliman s'étaient rendues coupables d'actes de concurrence déloyale et parasitaire
Sur la mise en cause de MM. Grannan et Winterhof
Considérant qu'ainsi que le fait valoir la société Deloitte conseil, la demande de voir condamner MM. Grannan et Winterhof in solidum aux côtés des sociétés Milliman est recevable, l'éventuelle carence de la société Deloitte conseil dans l'administration de la preuve des fautes susceptibles d'engager leur responsabilité ne constituant pas une cause d'irrecevabilité de la demande ;
Que le jugement doit dès lors être infirmé en ce qu'il a dit irrecevables les demandes de condamnation de la société Deloitte conseil à l'encontre de MM. Grannan et Winterhof ;
Considérant, sur le fond, que la société Deloitte conseil soutient à bon droit qu'un dirigeant social engage sa responsabilité personnelle à l'égard des tiers s'il commet une faute détachable de ses fonctions et qui lui est imputable personnellement et qu'il en est ainsi lorsqu'il commet une faute intentionnelle d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions sociales ;
Qu'à l'appui de ses demandes à l'encontre de MM. Grannan et Winterhof, elle soutient qu'ils ont participé activement et personnellement à la commission des actes de concurrence déloyale commis à son préjudice, excédant à l'évidence le cadre normal de leurs fonctions qui n'impliquent pas la commission d'actes volontairement délictueux ;
Considérant que la société Deloitte conseil, qui met en cause les intéressés en qualité de "dirigeants", indique que M Grannan est CEO (chief exécutive officer) de Milliman INC et se borne à préciser que M Winterhof est associé du bureau de Chicago de Milliman INC ;
Considérant qu'il ne résulte d'aucune des pièces versées aux débats que M Grannan aurait pu commettre une faute intentionnelle d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions sociales, alors que sa participation directe aux agissements reprochés aux sociétés Milliman n'est nullement établie ;
Qu'aucun élément ne permet davantage de retenir que M Winterhof a engagé sa responsabilité personnelle du fait des actes de concurrence déloyale commis au préjudice de la société Deloitte conseil ; que le fait qu'il ait rencontré MM. Serant et Nebout et demandé au conseil d'administration de la société Milliman INC leur nomination en tant qu'associés ne caractérise pas de sa part une faute d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions sociales ;
Que les demandes dirigées contre MM. Grannan et Winterhof doivent être rejetées ;
Sur le préjudice subi par la société Deloitte conseil
Considérant que la société Deloitte conseil chiffre son préjudice financier à la somme globale de 33 275 000 euros et invoque un préjudice moral et d'image de 500 000 euros ;
- Sur le préjudice matériel
Considérant que la société Deloitte conseil évalue son préjudice à la somme globale de 33,275 millions d'euros, soit :
- 19,7 millions d'euros de préjudice de gain manqué historique dont 16,4 millions d'euros pour l'actuariat-conseil et 3,3 millions d'euros pour les activités connexes,
- 12,5 millions d'euros de préjudice de gain manqué futur dont 10,4 millions d'euros pour l'actuariat-conseil et 2,1 millions d'euros pour les activités connexes,
- 1,042 millions d'euros au titre des frais de recrutement engagés pour reconstituer une équipe actuariat Conseil
Considérant que les sociétés Milliman opposent :
- que la demande au titre des coûts de recrutement ne peut pas prospérer, ces coûts ayant été exposés par la société Deloitte SA, et non la société Deloitte conseil et qu'en tout état de cause, la demande est infondée, compte tenu de l'économie de coûts salariaux réalisée par Deloitte conseil du fait du départ de l'équipe démissionnaire,
- que s'agissant de la perte de clientèle et de marge, l'activité actuariat-conseil de Deloitte conseil était d'une valeur d'environ 3 millions d'euros au moment des faits, que cette activité est toujours exercée par Deloitte conseil qui reste l'un des leaders sur ce marché, que la baisse de chiffre d'affaires alléguée par Deloitte conseil sur l'activité actuariat conseil à l'issue de l'exercice clos le 31 mai 2009 ne dépasse pas 4,523 millions d'euros, que le taux de marge brute à appliquer à la baisse de chiffre d'affaires ne saurait dépasser 25 %, que le manque à gagner subi par Deloitte conseil ne doit pas être calculé de façon linéaire sur une longue période ni sur deux exercices consécutifs, mais qu'il doit être réduit de moitié la deuxième année, et qu'en conséquence le préjudice indemnisable de Deloitte conseil ne saurait dépasser 1 700 000 euros ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été vu plus haut, les effectifs d'actuariat conseil de la société Deloitte conseil sont passés brutalement de 30 personnes dont 2 associés à seulement trois personnes à la fin de l'année 2008 ;
Qu'au vu des pièces produites, il est établi que les effectifs de cette activité d'actuariat étaient de 11 au 31 mai 2009, 17 au 31 mai 2010 et 21 au 31 mai 2011, avec durant toute cette période un seul associé ; que les difficultés à reconstituer une équipe de la taille et de la performance de celle qui était la sienne avant les faits, s'agissant d'un secteur très spécialisé où la main d'œuvre expérimentée et qualifiée est rare, ont ralenti les possibilités de développement et de reconquête de nouveaux clients de la société Deloitte conseil ; que les effectifs ont atteint 30 personnes au 31 mai 2012, dont 2 associés ;
Qu'au vu des pièces produites et des chiffres certifiés par le commissaire aux comptes de la société Deloitte conseil, il est établi que la reconstitution de son équipe d'actuaires a conduit cette société à supporter des coûts exceptionnels de recrutement, tels notamment des primes de bienvenue versées aux nouveaux collaborateurs ou des frais engagés auprès des cabinets de recrutement, ainsi que des frais de marketing ;
Que la société Deloitte conseil est fondée à demander réparation de son préjudice à ce titre, lequel est justifié à hauteur de 1 million d'euros ;
Considérant que, s'agissant du chiffre d'affaires de l'activité d'actuariat de la société Deloitte conseil, il peut être constaté, au vu des pièces versées aux débats validées par le commissaire aux comptes de cette société, qu'alors qu'il était passé de 4,671 millions d'euros (4 671 K) à la fin de l'exercice clos au 31 mai 2006 à 6 448 K au 31 mai 2007 pour atteindre 9 205 K au 31 mai 2008, il n'était plus que de 2 958 K au 31 mai 2009 et 2 439 K au 31 mai 2010 pour commencer ensuite à remonter et atteindre 4 101 K au 31 mai 2011 puis 5 482 K au 31 mai 2012, chiffres qui montrent qu'à cette dernière date, le département d'actuariat conseil n'avait toujours pas retrouvé le niveau qui était le sien avant les agissements déloyaux dont la société a été victime ;
Que les résultats générés par l'activité d'actuariat conseil durant cette période, représentés par la marge calculée après déduction des coûts salariaux et administratifs et après rémunération des associés, sont à prendre en compte pour déterminer le gain manqué par la société Deloitte conseil ; que selon les chiffres attestés par le commissaire aux comptes, les résultats des exercices 2007 et 2008 étaient respectivement de 3098 K et 4836 K, représentant un taux de marge respectif de 48 % et 53 %, tandis qu'ils étaient ensuite de 251 K, -127 K, 641 K et 545 K sur les exercices 2009, 2010, 2011 et 2012, chiffres qui attestent d'une baisse importante des performances du département actuariat conseil de la société ;
Qu'il résulte en outre des documents produits, également validés par le commissaire aux comptes de la société Deloitte conseil, que le chiffre d'affaires généré par les principaux clients de cette société, le crédit agricole, CNP et Groupama, est passé d'environ 5 000 K au 31 mai 2008 à 500 puis à 700 K pour les exercices clos aux 31 mai 2010 et 31 mai 2011 ; qu'il s'en déduit que le développement de l'activité d'actuariat de la société Deloitte conseil doit passer par la conquête de nouveaux clients, ses anciens clients étant définitivement perdus ;
Qu'il est par ailleurs établi que le chiffre d'affaires de la société Milliman SAS se chiffrait déjà, à la fin de la première année d'exercice, soit le 31 décembre 2009, à 7 443 K et qu'il atteignait, dès la deuxième année, 13 107 K au 31 décembre 2010, puis 16 603 K au 31 décembre 2011, progression qui exclut l'hypothèse de la crise économique avancée par cette société pour expliquer les mauvaises performances de la société Deloitte conseil ;
Que l'affirmation des sociétés Milliman selon laquelle la valeur de l'activité actuariat de Deloitte conseil était de 3 millions d'euros en 2008, affirmation fondée sur la valeur de 3,2 millions d'euros retenue à l'occasion de la fusion simplifiée de la société d'actuariat conseil B&W Deloitte par la société Deloitte conseil, est dénuée de pertinence, les opérations d'apports réalisées à l'occasion de cette fusion ayant été évaluées sur la base des valeurs nettes comptables et non des valeurs réelles ;
Qu'il n'est pas sérieusement contestable que la perte de son équipe d'actuaires à la fin de l'année de 2008 a entraîné une perte immédiate et massive du chiffre d'affaires réalisé par la société Deloitte conseil dans l'activité d'actuariat conseil et ce, au profit de la société Milliman SAS ; que le chiffre d'affaires de la société Deloitte conseil au titre de l'exercice 2012 ne représente toujours que 45 % de celui de l'exercice 2008 précédant les agissements déloyaux des sociétés Milliman et le départ de son équipe ; qu'à l'inverse, l'activité de Milliman SAS a progressé de manière fulgurante, bénéficiant non seulement de l'équipe et d' une partie de la clientèle de la société Deloitte conseil mais d'une période propice à l'expansion du fait des évolutions réglementaires (solvency II notamment), expansion dont n'a pu profiter la société Deloitte conseil privée de ses effectifs ;
Qu'en l'état de ces éléments et de l'ensemble des pièces produites, la cour est en mesure, et sans qu'il y ait lieu de recourir à une mesure d'expertise, de chiffrer le préjudice financier subi par la société Deloitte conseil par suite des agissements concurrentiels déloyaux des sociétés Milliman et de la perte partielle de son activité d'actuariat conseil, à la somme de 11 millions d'euros ;
Que les sociétés Milliman INC et Milliman SAS doivent dès lors être condamnées in solidum à payer à la société Deloitte conseil la somme globale de 12 millions d'euros (1 + 11), en réparation de son préjudice financier, le jugement étant infirmé en ce qu'il a limité la condamnation prononcée à la somme de 6 864 000 euros ;
Sur le préjudice moral
Considérant que les premiers juges ont exactement évalué à 150 000 euros le préjudice moral et d'image subi par la société Deloitte conseil du faits des agissements déloyaux ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;
Sur la demande reconventionnelle
Considérant que les sociétés Milliman sollicitent la somme de 200 000 euros à titre de dommages-intérêts pour concurrence déloyale par dénigrement et invoquent un article paru dans le mensuel "la tribune de l'assurance" d'octobre 2010 sous le titre "Deloitte gagne contre Milliman" dans lequel il est écrit : Un jugement arbitral daté du 13 juillet 2010 a considéré cette opération comme déloyale et régressive pour le marché précise Amaury de Beauvoir, secrétaire du conseil d'administration de Deloitte. Milliman devra payer des dommages et intérêts ;
Mais considérant que l'auteur de l'article dit rapporter les propos d'un secrétaire du conseil d'administration de Deloitte SA, ce dont il résulte qu'il n'est pas établi que la société Deloitte conseil soit à l'origine de l'article prétendument dénigrant ;
Que le jugement sera confirmé en ce qu'il a à bon droit rejeté la demande ;
Sur les autres demandes
Considérant que la décision sera confirmée en ses dispositions relatives aux dépens et aux dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; qu'en application de ce texte, il sera fait droit à hauteur de 50 000 euros à la demande de la société Deloitte conseil au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés en appel ;
Par ces motifs : Statuant par arrêt contradictoire, Infirme le jugement mais seulement en ce qu'il a dit les demandes de condamnation de la société Deloitte conseil à l'encontre de MM. Grannan et Winterhof irrecevables et a condamné in solidum les sociétés Milliman INC et Milliman SAS à payer à la société Deloitte conseil la somme de 6 864 000 euros en réparation de son préjudice matériel ;
Le Confirme pour le surplus, Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant, Déclare la société Deloitte conseil recevable en ses demandes de condamnation dirigées contre MM. Grannan et Winterhof pour concurrence déloyale ; Au fond, les rejette ; Condamne in solidum les sociétés Milliman INC et Milliman SAS à payer à la société Deloitte conseil la somme de 12 000 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel ; Condamne in solidum les sociétés Milliman INC et Milliman SAS à payer à la société Deloitte Conseil, la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Déboute les sociétés Milliman INC et Milliman SAS et MM. Grannan et Winterhof de leurs demandes à ce titre ; Condamne in solidum les sociétés Milliman INC et Milliman SAS aux dépens qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.