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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 2, 19 septembre 2013, n° 12-19442

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Rue du Commerce (SA)

Défendeur :

Pioneer France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Louÿs

Conseillers :

Mmes Graff-Daudret, Lesault

Avocats :

Mes Boccon Gibod, Bijaye, Levy

T. com. Bobigny, prés., du 9 oct. 2012

9 octobre 2012

Ayant découvert que la société Rue du Commerce commercialise des produits de sa marque sur son site Internet accessible à l'adresse http://www.rueducommerce.fr dont les numéros de série ont, pour la majorité d'entre eux, été falsifiés ou effacés et que cette commercialisation s'effectue en outre, pour certains en violation du réseau de distribution sélective qu'elle a mis en place, la société Rue du Commerce ne faisant pas partie de ses distributeurs agrées, la société Pioneer France, ci-après dénommée société Pioneer, a obtenu, au vu des constats dressés les 18 avril, 8 mai et 16 juillet 2012 par la SCP Gaulin-Beddouk & Lacas, du juge des requêtes du Tribunal de commerce de Bobigny sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile, par ordonnance du 4 septembre 2012, la désignation d'un huissier avec mission notamment de rechercher le nombre de produits Pioneer achetés et vendus depuis le 1er janvier 2011, leur provenance et le type de garantie proposée.

L'huissier a procédé à ses opérations au siège de la société Rue du Commerce le 10 septembre 2012.

Par ordonnance du 11 septembre 2012 rendue à la requête de la société Rue du Commerce, le président du Tribunal de commerce de Bobigny a ordonné à l'huissier de ne pas se dessaisir des éléments collectés dans l'attente d'un débat contradictoire devant être initié par la société Rue du Commerce dans le cadre d'un référé-rétractation avant le 15 octobre 2012.

Aux termes de trois ordonnances également rendues le 12 septembre 2012, le juge des requêtes a autorisé la société Rue du Commerce à se rendre dans trois magasins distributeurs agréés de la société Pioneer à savoir Fnac, Darty et Boulanger afin d'obtenir des informations sur les modalités d'application des contrats de distribution sélective liant la société Pioneer à ses distributeurs.

Le 19 septembre 2012 enfin, le président du Tribunal de commerce de Bobigny a autorisé la société Pioneer à obtenir communication du procès-verbal réalisé par maitre Ochoa huissier le 10 septembre 2012.

Par acte d'huissier du 26 septembre 2012, la société Pioneer a assigné au fond la société Rue du Commerce.

Le 27 septembre 2012, la société Rue du Commerce a assigné la société Pioneer devant le juge des référés du Tribunal de commerce de Bobigny afin notamment de rétractation totale de l'ordonnance du 4 septembre 2012, à titre subsidiaire de rétractation partielle en limitant les mesures ordonnées aux six produits figurant dans ses écritures, d'ordonner la restitution des éléments mis sous séquestre et de condamner la société Pioneer à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile outre les dépens, la société Pioneer sollicitant pour sa part notamment la réformation des trois ordonnances rendues le 12 septembre 2012 et la remise immédiate des constats réalisés en exécution de ces décisions.

Par ordonnance du 9 octobre 2012, le président du Tribunal de commerce de Bobigny a débouté les parties de leurs demandes respectives et liquidé les dépens.

La société Rue du Commerce a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions signifiées le 10 juin 2013, auxquelles il convient de se reporter, la SA Rue du Commerce, demande à la cour de :

A titre principal,

- prononcer la nullité de l'ordonnance rendue le 9 octobre 2012,

- statuer de nouveau sur la demande de rétractation de l'ordonnance du 4 septembre 2012

A titre subsidiaire,

- infirmer l'ordonnance du 9 octobre 2012,

En tout état de cause,

Sur la rétractation de l'ordonnance du 4 septembre 2012 :

A titre principal,

- prononcer la rétractation totale de l'ordonnance du 4 septembre 2012

- constater l'irrégularité de l'ordonnance du 19 septembre 2012 et son inopposabilité,

A titre subsidiaire,

- prononcer la rétractation partielle de l'ordonnance du 4 septembre 2012 et limiter les mesures ordonnées aux 6 produits suivants : BCS-FS515 (home cinéma), VSX-S300 (ampli audio/vidéo), STZ-D10Z-R (système audio de danse de rue), X-HM20-K (chaîne Hifi), BCS-HF818 (home cinéma) et N-50-K (lecteur audio de réseau)

- en conséquence, ordonner la restitution des éléments mis sous séquestre par maître Ochoa,

- interdire à la société Pioneer France d'utiliser dans le cadre de toute action judiciaire le procès-verbal dressé par maître Ochoa les 10 et 11 septembre 2012 ainsi que les éléments collectés à la même date,

En toute hypothèse :

- condamner la société Pioneer France à lui verser la somme de 50 000 euros pour procédure abusive, celle de 10 000 euros au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions signifiées le 17 avril 2013, auxquelles il convient de se reporter, la société Pioneer France demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance du 9 octobre 2012,

- dire que l'ordonnance du 9 octobre est conforme à l'article 455 du CPC,

- que la société Pioneer a démontré la nécessité de ne pas recourir à une procédure contradictoire,

- et que les conditions de l'article 145 du CPC étaient réunies.

- confirmer l'ordonnance du 4 septembre 2012,

A titre reconventionnel,

- dire que la société Rue du Commerce n'a pas justifié d'un motif légitime ni de la nécessité de recourir à une procédure non contradictoire et a porté atteinte au secret des affaires de la société Pioneer lorsqu'elle a sollicité des mesures de constat par requête le 12 septembre 2012,

- en conséquence, réformer les 3 ordonnances rendues le 12 septembre 2012 et ordonner la remise immédiate à la société Pioneer des constats réalisés en exécution de celles-ci,

- condamner la société Rue du Commerce à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 juin 2013.

SUR CE, LA COUR,

Sur la nullité de l'ordonnance du 9 octobre 2012

Considérant que la société Rue du Commerce fait essentiellement valoir que l'ordonnance du 9 octobre 2012 est nulle faute de motivation, en l'absence de réponse du juge aux conclusions détaillées qui ont été déposées ;

Que la société Pioneer France réplique que l'ordonnance du 9 octobre 2012 est suffisamment motivée ;

Considérant que l'ordonnance du 9 octobre 2012 énonce "Attendu que la SA Rue du Commerce ne fait état à l'appui de sa demande de rétractation d'aucun élément susceptible à Nous incliner à l'ordonner ; que de surcroît, il est reconnu aux débats que l'huissier commis a accompli sa mission et que le fond est saisi" ;

Considérant qu'en se déterminant ainsi sans mentionner les éléments qui lui étaient soumis et sans dire en quoi ils ne permettaient pas de justifier la rétractation qui était sollicitée, le premier juge n'a pas satisfait à son obligation de motiver sa décision au regard des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile ;

Considérant que par application de l'article 458 du même Code, il convient de prononcer la nullité de l'ordonnance rendue le 9 octobre 2012 par le juge des référés du Tribunal de commerce de Bobigny ;

Considérant qu'en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, il appartient à la cour d'appel de statuer sur l'entier litige ;

Sur la rétractation de l'ordonnance du 4 septembre 2012

Considérant que la société Rue du Commerce conteste la décision du juge des requêtes en l'absence de motif légitime au sens de l'article 145 du CPC ; qu'elle fait valoir que la société Pioneer ne démontre pas la licéité de son réseau de distribution sélective ni l'existence de difficultés dans la mise en œuvre de la garantie constructeur par des consommateurs, que les mesures sollicitées par voie de requête ne sont ni proportionnées à l'objectif poursuivi ni utiles ; qu'elles portent atteinte au secret des affaires ; que la société Pioneer ne démontre pas l'existence de circonstances justifiant une dérogation au principe du contradictoire ; qu'elle a omis sciemment de demander le séquestre des éléments saisis afin d'obtenir immédiatement les informations ; que la véritable motivation de la société Pioneer France était d'exercer un contrôle sur ses sources d'approvisionnement ; que l'ordonnance du 11 septembre 2012 n'a ni modifié ni annulé les termes de l'ordonnance du 4 septembre 2012 mais l'a complétée ; que l'ordonnance du 19 septembre 2012 a été rendue de manière irrégulière, constituant une annulation de l'ordonnance du 11 septembre 2012 qui aurait dû être obtenue par la voie du référé-rétractation ; qu'elle a été exécutée sans avoir fait l'objet d'une signification et en dépit de l'obligation pour l'huissier de ne se dessaisir du séquestre qu'avec l'accord de toutes les parties intéressées ;

Qu'elle sollicite, à titre subsidiaire, la rétractation partielle de l'ordonnance du 4 septembre 2012 motif pris que seuls les actes visant à rechercher les éléments relatifs aux six commandes passées auraient dû entrer dans la mission de l'huissier et que toute investigation excédant les 6 produits alimentant les doutes de la société Pioneer doit être exclue ; que les requêtes de la société Pioneer et l'obtention des documents collectés caractérisent une intention de nuire ;

Considérant que la société Pioneer rappelle que la présente procédure ne porte que sur la question de savoir si l'ordonnance du 4 septembre 2012 doit être rétractée et fait valoir que les développements de l'appelante sur l'illicéité de son réseau de distribution sélective n'ont aucun intérêt ;

Qu'elle objecte qu'aucun texte n'impose de recourir à un séquestre à l'issue d'une mesure d'instruction in futurum ; qu'elle était fondée à procéder par voie de requête en raison du risque existant de dissimulation ou de destruction des preuves ; que la modification des numéros de série ou la vente de produits portant de faux numéros de série constituent à elles seules une volonté de masquer l'origine des produits en question ; que la nécessité de ne pas recourir à une procédure contradictoire est patente et le motif légitime d'obtenir les mesures sollicitées établi ; que les opérations de constat aux fins d'accéder à l'ensemble de la comptabilité de la société Rue du Commerce constituaient le seul moyen d'établir la matérialité des faits allégués et de connaître l'identité des fournisseurs ayant porté atteinte au réseau de distribution sélective ; qu'elle a agi en toute loyauté ; que contrairement à ses allégations, la société Rue du Commerce ne l'a jamais approchée pour entrer en relations commerciales avec elle ;

Considérant que l'article 145 du Code de procédure civile dispose : "S'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé"

Considérant que ce texte suppose l'existence d'un motif légitime c'est à dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse qui présente un lien avec un litige potentiel futur dont l'objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d'autrui, qu'elle soit, enfin, pertinente et utile ;

Considérant encore que les mesures d'instruction peuvent être ordonnées par voie de requête à condition que les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement ;

Considérant qu'en l'espèce, il résulte des procès-verbaux de constat des 18 avril et 7 mai 2012 dressés à la suite d'achats de produits Pioneer sur le site www.rueducommerce.com effectués par la SCP Gaulin-Beddouk & Lacas, huissiers, que le numéro de série a été arraché ou masqué et pour certains remplacé par un faux numéro et encore, selon le constat du 16 juillet 2012, que la société Rue du Commerce commercialise des produits soumis à distribution sélective ne pouvant être vendus que par des distributeurs agréés ;

Considérant que les longues écritures de la société Rue du Commerce tendant à démontrer l'illicéité du réseau de distribution sélective de la société Pioneer relèvent d'un débat devant le juge du fond et sont inopérantes devant le juge des référés saisi de la seule question de savoir si l'ordonnance du 4 septembre 2012 doit ou non être rétractée ;

Considérant encore que l'instance en rétractation d'une ordonnance sur requête ayant pour seul objet de soumettre à l'examen d'un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l'initiative d'une partie, la saisine du juge de la rétractations se trouve limitée à cet objet ; que la demande de la société Rue du Commerce tendant à voir constater l'irrégularité de l'ordonnance du 19 septembre 2012 et son inopposabilité à son égard n'est pas recevable ;

Considérant qu'il ressort des pièces de la procédure qu'en présence des agissements de la société Rue du Commerce, les mesures sollicitées par la société Pioneer constituaient le seul moyen de confirmer la réalité et d'établir l'ampleur de la vente de produits Pioneer comportant des numéros modifiés ou supprimés ou des produits Pioneer soumis à distribution sélective ainsi que la provenance de ces produits autrement dit l'identité des fournisseurs ayant porté atteinte au réseau de distribution sélective et l'étendue du préjudice subi ; qu'il en est d'autant plus ainsi que les produits effacés ou falsifiés ne pourront pas bénéficier de la garantie constructeur ce qui est de nature à impacter l'image de la société Pioneer ;

Considérant que l'appelante dénonce vainement un droit d'accès général et injustifié à l'ensemble de ses approvisionnements dès lors que la mesure est limitée aux seuls produits Pioneer et non aux chiffres de vente et approvisionnements de sociétés concurrentes et exclusivement aux achats postérieurs au 1er janvier 2011 ; qu'elle n'est pas davantage fondée à prétendre à l'inutilité de la mesure d'instruction sollicitée au vu des constats que la société Pioneer avait déjà fait réaliser lesquels ne portaient que sur quelques références de produits et ne permettaient pas de connaître les références exactes et les quantités de produits illicitement vendus par la société Rue du Commerce ;

Considérant qu'il s'ensuit que la mesure sollicitée par la société Pioneer était bien dictée par un motif légitime et un intérêt probatoire certain ; que l'éventualité d'un litige au regard des agissements reprochés à la société Rue du Commerce de nature à engager sa responsabilité sur le fondement des articles 1382, 1383 du Code civil et L. 442-61 6° du Code commerce est ainsi suffisamment démontrée ;

Considérant que la société Rue du Commerce soutient, en outre, que la société Pioneer ne démontre pas l'existence de circonstances justifiant une dérogation au principe du contradictoire en invoquant simplement une crainte de voir des éléments de preuve disparaître alors qu'elle est cotée en bourse et totalement transparente ;

Mais considérant, comme le souligne à juste titre la société Pioneer, qu'il existait un risque manifeste de dissimulation ou de destruction de preuve de la part d'une société vendant des produits dont les numéros de série avaient été falsifiés et dont les sources d'approvisionnement étaient illicites ; que la pleine efficacité de la mesure d'instruction sollicitée justifiait donc de procéder de façon non contradictoire ;

Considérant qu'il n'est pas démontré qu'il ait été porté atteinte aux droits de la société Rue du Commerce du fait de l'absence de demande de placement sous séquestre des documents collectés en l'étude de l'huissier ce qui n'est exigé par aucun texte ;

Considérant enfin, que la société Rue du Commerce ne peut être valablement alléguer une violation du secret des affaires au motif que les approvisionnements constituent des données financières et économiques sensibles, à ce titre, protégées ; que la mission confiée à l'huissier consiste à obtenir des renseignements précis sur le nombre total de produits de la marque Pioneer achetés et vendus par la société Rue du Commerce depuis le 1er janvier 2011 et commercialisés sur ses sites Internet ainsi que la référence, le numéro de série et le prix d'achat et de revente de chacun de ces produits, la provenance de ces produits, la quantité exacte de produits de la marque Pioneer, leurs numéros de série, leurs références et leur localisation précise au sein du stock de la société Rue du Commerce et le type de garantie proposée par cette société à ses clients sur les produits Pioneer ;

Considérant que force est de constater que la société Rue du Commerce ne justifie pas que ces informations "constitueraient des données financières et économiques sensibles" alors que la mission de l'huissier ne permet pas à la société Pioneer d'obtenir des renseignements sur les concurrents, la stratégie commerciale, la politique de vente ou les opérations promotionnelles de l'appelante ;

Considérant que le secret des affaires ne constitue pas en lui-même un obstacle à l'application des dispositions de l'article 145 du Code de procédure civile dès lors que le juge constate que les mesures qu'il ordonne procèdent d'un motif légitime et sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées ce qui est le cas en l'espèce ;

Considérant qu'il découle de l'ensemble de ces éléments que la mesure ordonnée aux termes de l'ordonnance rendue le 4 septembre 2012 était utile à la recherche des preuves, proportionnée au but poursuivi et répondait à un intérêt légitime de la société Pioneer de sorte que les conditions posées par l'article 145 du Code de procédure civile étaient bien réunies ;

Considérant dès lors que la demande de rétractation totale de cette décision formée par la société Rue du Commerce doit être rejetée ;

Que celle tendant à sa réformation partielle aux fins de voir la mesure d'instruction limitée aux six produits ayant donné lieu aux constats des 18 avril, 7 mai et 16 juillet 2012 doit l'être également dès lors que le but légitimement poursuivi par la société Pioneer est d'établir l'ampleur des ventes des produits de sa marque réalisées par la société Rue du Commerce sous des numéros falsifiés ainsi que ceux soumis à distribution sélective ;

Considérant que l'ordonnance du 4 septembre 2012 n'étant pas rétractée, la demande de dommages et intérêts formée par la société Rue du Commerce pour procédure abusive ne peut prospérer et sera donc rejetée ;

Sur la rétractation des trois ordonnances rendues le 12 septembre 2012

Considérant que la société Pioneer demande à la cour de rétracter les trois ordonnances rendues le 12 septembre 2012 à la requête de la société Rue du Commerce donnant l'autorisation de se rendre directement dans les magasins Fnac, Darty et Boulanger afin de vérifier si ces distributeurs agréés Pioneer respectaient les critères qualitatifs et quantitatifs qu'elle imposait ; qu'elle estime que les mesures sollicitées sont dénuées de tout motif légitime permettant de les fonder et portent atteinte au secret des affaires ; qu'elle sollicite la remise des trois procès-verbaux de constat réalisés en exécution de ces ordonnances ;

Considérant que la société Rue du Commerce conclut à la régularité desdites ordonnances au regard des exigences de l'article 145 du Code de procédure civile ;

Considérant que, dans sa requête, la société Rue du Commerce fait état des refus de la société Pioneer à l'intégrer dans son réseau de distribution sélective ; qu'elle se réfère à l'imminence d'un débat judiciaire concernant la violation du réseau de distribution sélective de la société Pioneer France et indique "qu'il apparaît peu probable que les distributeurs agrées de type Fnac, Darty et Boulanger répondent à des critères qualitatifs élevés, disposent d'installations appropriées et d'un personnel ayant l'expertise nécessaire pour donner aux clients un conseil approprié dans des locaux accessibles au public et équipés à cette fin" ;

Considérant que le juge de la rétractation doit se placer au jour où il statue ;

Considérant que, par acte en date du 26 septembre 2012, la société Pioneer a assigné la société Rue du Commerce au fond en arguant de l'existence et de la licéité de son réseau de distribution ;

Considérant qu'au vu de cette situation, il apparaît que la requête déposée par la société Rue du Commerce tendant à l'instauration de la mesure de constat est bien fondée sur un motif légitime ; que la nécessité d'une décision non contradictoire est également établie en raison du risque de voir la société Pioneer d'assurer l'approvisionnement de l'ensemble de sa gamme dans les magasins concernés et la mise à disposition d'un personnel compétent ; qu'il n'existe enfin au vu de la mission confiée à l'huissier consistant à collecter les réponses des vendeurs à un certain nombre de question portant sur les approvisionnements et sur la compétence du personnel aucune atteinte au secret des affaires ;

Considérant que la demande de la société Pioneer tendant à la rétractation des trois ordonnances rendues le 12 septembre 2012 doit être rejetée ;

Par ces motifs : Annule l'ordonnance de référé rendue le 9 octobre 2012 par le président du Tribunal de commerce de Bobigny. Rejette les demandes de la société Rue du Commerce tendant à la rétractation totale et partielle de l'ordonnance du 4 septembre 2012. Déclare irrecevable la demande tendant à voir constater l'irrégularité de l'ordonnance du 19 septembre 2012 et son inopposabilité à la société Rue du Commerce. Déboute la société Rue du Commerce de sa demande de dommages et intérêts. Dit n'y avoir lieu à rétractation des trois ordonnances rendues le 12 septembre 2012 à la requête de la société Rue du Commerce. Rejette la demande de la société Pioneer France aux fins de remise des trois procès-verbaux de constat d'huissier réalisés en exécution de ces ordonnances. Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile. Dit que chaque partie conservera la charge des dépens par elle exposés.