Cass. com., 24 septembre 2013, n° 12-22.955
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Calzados Fal (Sté)
Défendeur :
Auvergne Limousin export (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
Mme Tréard
Avocat général :
M. Mollard
Avocats :
SCP Célice, Blancpain, Soltner, SCP Monod, Colin
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 31 mai 2012), rendu sur renvoi après cassation (Chambre commerciale, financière et économique, 1er mars 2011, pourvoi n° 10-11.079), que le contrat d'agence commerciale qui la liait à la société de droit espagnol Calzados Fal (la société Calzados) pour la commercialisation des chaussures de chasse fabriquées par cette dernière, auprès de certaines catégories de clientèle en France, en Belgique et en Allemagne, ayant pris fin, la société Auvergne Limousin export (la société Alex), l'a assignée en paiement d'indemnités de préavis, de cessation de contrat et pour perte de sa reconduction ainsi qu'en remboursement de frais d'envois de collections textiles ;
Sur le premier moyen : - Attendu que la société Calzados fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la société Alex une somme au titre des pertes de rémunérations sur les trente-trois mois restants et une autre au titre du préavis, alors, selon le moyen, que l'indemnité de cessation du contrat d'agent commercial n'est pas due lorsque cette cessation résulte de l'initiative de l'agent, à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ; que le mandant peut, sans commettre de faute, commercialiser directement auprès des clients de la zone géographique confiée à l'agent des produits différents de ceux objets du contrat d'agence commerciale ; que pour dire que la cessation du contrat dont la société Alex avait pris l'initiative était imputable à la société Calzados, la cour d'appel a énoncé que celle-ci s'était interposée dans les relations entre la société Alex et ses clients en commercialisant directement auprès de la société Manucentre des chaussures de randonnée contournant ainsi l'exclusivité dont bénéficiait la société Alex pour commercialiser ses produits relevant de la gamme "chasse" ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a refusé de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société Calzados s'est interposée dans les relations entre la société Alex et ses clients, prétextant un retard de livraison non démontré pour commercialiser directement auprès d'un client de la société Alex des chaussures de randonnées à la place des chaussures de chasse commandées, lui permettant de contourner son obligation de lui verser une commission, et qu'à cette circonstance devaient être ajoutées l'augmentation des tarifs de l'année 2006, avant une baisse significative en 2007, ainsi que la déduction des frais liés à l'envoi de collections textiles sur le montant des commissions dues à l'agent, la cour d'appel, en a exactement déduit que ces circonstances rendaient la rupture imputable au mandant ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen : - Attendu que la société Calzados fait encore le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen : 1°) que le contrat à durée déterminée prévoyait qu'il était conclu pour une durée de cinq années et qu'il pouvait être "prorogé par tacite reconduction sauf en cas de renonciation unilatérale par l'une quelconque des parties à la reconduction du contrat, moyennant préavis signifié par courrier recommandé avec accusé de réception, au moins trois mois avant la fin du contrat" ; que la cour d'appel, après avoir constaté que le contrat aurait dû se poursuivre pendant trente-trois mois en l'absence de rupture, a condamné la société Calzados à payer à la société Alex, à titre d'indemnité de rupture, la somme de 95 264,40 euros correspondant à la perte de rémunérations sur les trente-trois mois restants ; qu'en condamnant en outre la société Calzados à payer à la société Alex la somme de 8 600,40 euros correspondant à une "indemnité de préavis", quand ce préavis devait, par définition, s'exécuter antérieurement au terme du contrat contractuellement prévu, et se trouvait en conséquence nécessairement déjà inclus dans l'indemnité de rupture, la cour d'appel a violé les articles L. 134-12 du Code de commerce et 1134 du Code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale ; 2°) qu'il en va d'autant plus ainsi que la cour d'appel a en l'espèce expressément constaté que la société Alex avait pris l'initiative de la rupture anticipée du contrat d'agence commerciale, de sorte que l'absence de préavis ne pouvait être imputable à la société Calzados ; qu'en accordant néanmoins une "indemnité de préavis" à la société Alex, la cour d'appel a de plus fort violé les articles L. 134-12 du Code de commerce et 1134 du Code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale ;
Mais attendu que la société Calzados s'étant bornée dans ses conclusions d'appel à solliciter la réduction des demandes présentées par la société Alex à de plus justes proportions, en indiquant pour l'indemnité compensatrice comme pour l'indemnité de préavis la moyenne mensuelle des commissions perçues devant servir de base à leur calcul, sans soutenir que l'indemnisation du délai de préavis serait déjà incluse dans l'indemnité de rupture ni qu'une telle indemnité ne pourrait être mise à la charge du mandant qui n'avait pas pris l'initiative de la rupture, le moyen, nouveau en ses deux branches, et mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.