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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5-7, 10 octobre 2013, n° 2012-07909

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Nestlé Purina Petcare France (SAS), Nestlé (SA), Royal Canin (SAS), Mars Incorporated (Sté), Hill's Pet Nutrition (SNC), Colgate-Palmolive Company (Sté)

Défendeur :

Autorité de la concurrence, Ministre de l'Economie, des Finances et du Commerce extérieur

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Remenieras

Conseillers :

Mmes Beaudonnet, Leroy

Avocats :

SCP Fisselier & Avocats, Cabinet Freshfields Bruckhaus Deringer, Mes Teytaud, Zelenko, Pecnard, Voisset, Saint Esteben, Philippe

CA Paris n° 2012-07909

10 octobre 2013

Par lettre enregistrée le 10 octobre 2007 sous le numéro 07-0071 F, le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre dans le secteur de la commercialisation des aliments pour chiens et chats par des circuits spécialisés, susceptibles d'être qualifiées de pratiques anticoncurrentielles au regard des dispositions du titre II du livre IV du Code de commerce.

En France, la population des animaux de compagnie est estimée à huit millions de chiens et dix millions de chats. Ces animaux sont nourris soit par des restes de table, soit par une alimentation industrielle. En 2006, l'alimentation industrielle représentait 50 % des repas donnés aux chiens et aux chats.

Au sein des aliments industriels, on distingue les aliments pour chiens, d'une part, de ceux destinés aux chats, d'autre part, les deux espèces ayant des besoins nutritionnels spécifiques. Toutefois, quelle que soit l'espèce concernée, il existe deux catégories principales d'aliments industriels définies par la réglementation européenne : les aliments humides, qui contiennent au moins 70 % d'eau, comme les conserves et les terrines, d'une part, et les aliments secs, qui contiennent moins de 14 % d'eau, comme les croquettes ou les biscuits, d'autre part.

Depuis quelques années, les fabricants d'aliments pour animaux familiers ont développé une offre diversifiée d'aliments secs haut de gamme, désignés sous les vocables de "premium" ou "super premium", visant à faciliter la prévention de certaines pathologies mineures de l'animal ou à répondre à des besoins physiologiques propres à chaque étape de sa vie. Ces produits sont vendus au détail à un prix plus élevé de 20 à 30 % en moyenne que celui des aliments pour animaux classiques.

Concernant la distribution de détail, il convient de rappeler que la vente d'aliments secs représente près de 70 % des ventes globales d'aliments pour chiens et chats en France. Elle emprunte deux canaux principaux : les grandes surfaces alimentaires, d'une part, et les commerces spécialisés, d'autre part (animaleries, jardineries, libres-services agricoles, magasins de bricolage, vétérinaires et éleveurs). Les produits standards sont essentiellement distribués dans les grandes surfaces alimentaires, alors que les aliments premium et super premium sont vendus exclusivement dans les réseaux spécialisés ainsi que chez les éleveurs et les vétérinaires.

La distribution des aliments pour chiens et chats en France se caractérise ainsi par une grande diversité des points de vente (grandes surfaces alimentaires, animaleries, jardineries, magasins de bricolage, etc.), à la différence de la plupart des autres pays européens où ces produits sont principalement offerts à la vente dans des magasins dédiés.

Le secteur de la distribution spécialisée est lui-même particulièrement diversifié. Il repose sur trois catégories de distributeurs au détail : les magasins spécialisés, les éleveurs et les vétérinaires.

La France compte environ 8 200 magasins spécialisés (4 500 magasins sous enseigne et 3 700 magasins indépendants). Les deux principales catégories de magasins spécialisés sont les magasins franchisés ou affiliés à une centrale d'achat ou une centrale de référencement, qui représentent 70 % de ce canal de distribution, et les magasins détaillants indépendants d'une centrale d'achat ou de référencement, qui occupent les 30 % restants. Les enseignes les plus importantes sont les sociétés Truffaut/Animalis, Gamm Vert, Botanic, Jardiland et Apex.

Il existe, par ailleurs, 10 000 éleveurs et 5 000 vétérinaires exerçant sur le territoire français. Les vétérinaires et les éleveurs représentent respectivement 10 et 25 % de la distribution spécialisée. A la différence des magasins spécialisés, ils interviennent sur ce marché comme des prescripteurs et non comme de simples revendeurs. Les éleveurs vendent les mêmes produits que les magasins spécialisés, mais ceux-ci sont présentés dans des conditionnements différents (paquets plus volumineux). Les vétérinaires, quant à eux, disposent de produits spécifiques destinés à répondre à un besoin médicalisé particulier, qui ne sont vendus ni dans les magasins spécialisés ni par les éleveurs.

En ce qui concerne enfin les entreprises en cause, il est rappelé que l'essentiel de la production de nourriture industrielle pour chiens et chats émane d'entreprises actives à l'échelle mondiale. Dans un document intitulé "Channel Plan 2007", le directeur des ventes au sein de la division spécialisée de la société Nestlé Petcare France souligne qu'en 2007, les filiales des groupes Mars, Nestlé, Colgate-Palmolive, Procter et Gamble représentaient 75 à 85 % du marché de la nourriture pour chiens et chats dans la distribution spécialisée, Royal Canin et Nestlé Purina Petcare France (ci-après "NPPF") représentant à eux seuls 70 % de ce même marché (cote 26 385). Des entreprises telles qu'Affinity Care ou Néodis ou encore des marques de distributeurs comme Nutrivia, développée par l'enseigne Truffaut, sont aussi présentes sur le marché, mais de manière résiduelle.

En 2002, la Commission européenne a autorisé sous conditions le rachat de la société Royal Canin SA (ci-après "Royal Canin") par l'entreprise Masterfoods Holding, filiale française du groupe américain Mars Incorporated dans une décision n° COMP/M.2544 (JO C 79 du 3 avril 2002). Royal Canin détient Royal Canin Distribution SA, qui distribue des aliments pour animaux familiers sur tout le territoire français. Royal Canin possède quatre usines en Europe, dont deux en France. Royal Canin ne vend plus ses produits dans les grandes surfaces alimentaires depuis 2002.

Nestlé Purina Pet Care France (NPPF) est contrôlée majoritairement par le groupe Nestlé Entreprise. NPPF est spécialisée dans la distribution d'aliments et d'accessoires pour les animaux de compagnie. Ses produits sont fabriqués au sein du groupe par une quinzaine d'usines en Europe, dont quatre en France.

NPPF commercialise ses produits à la fois dans les grandes surfaces alimentaires et dans les circuits spécialisés. Toutefois, les gammes de produits offertes à la vente dans les grandes surfaces alimentaires diffèrent de celles qui sont distribuées dans les circuits spécialisés, les gammes premium et super premium étant réservées à cette dernière forme de distribution.

La société Hill's Pet Nutrition SNC (ci-après "Hill's") est une filiale de la société américaine Hill's Pet Products Inc., elle-même filiale de Hill's Pet Nutrition Inc., qui appartient au groupe Colgate Palmolive. Hill's ne possède qu'une seule usine en Europe, située aux Pays-Bas.

Hill's est entrée sur le marché en 1985, chez les vétérinaires d'abord, puis dans le circuit spécialisé. Ses produits ne sont pas disponibles dans les grandes surfaces alimentaires.

L'instruction du dossier a permis de relever un certain nombre de pratiques concernant NPPF et Royal Canin ainsi que leurs distributeurs respectifs.

Sous réserve des développements ci-après consacrés à la remise en cause, du fait de l'application du communiqué sanctions, de la régularité de la procédure de non-contestation des griefs, il n'en demeure pas moins que ces entreprises n'ont pas contesté la matérialité des constatations de l'Autorité que la cour rappellera, pour l'essentiel, en renvoyant, en tant que de besoin, aux développements de la Décision (points 16 à 116).

Concernant tout d'abord NPPF et ses distributeurs, il a été constaté, en premier lieu, l'existence de restrictions de clientèle convenues par NPPF et ses plateformes de distribution.

En effet, NPPF a mis en place deux systèmes de distribution distincts et étanches de ses produits haut de gamme en fonction de la catégorie de revendeurs concernée. Ainsi, alors que la grande distribution alimentaire et les vétérinaires sont approvisionnés directement par NPPF, c'est un réseau de 21 grossistes indépendants, appelés "plateformes", qui est chargé de la distribution en gros aux éleveurs et aux magasins spécialisés. Si les produits distribués aux éleveurs sont identiques, en ce qui concerne leur composition, à ceux distribués aux magasins spécialisés, ils sont offerts sous des conditionnements spécifiques, les plateformes reconnaissant se conformer à la stratégie de compartimentage de la distribution mise en œuvre par NPPF.

L'instruction a révélé, en deuxième lieu, que NPPF a également mis en place une stratégie de distribution mono-marque pour ses produits, destinée à lui garantir une exclusivité d'achat reposant, d'une part, sur des remises de fidélité encourageant les plateformes à acheter exclusivement des produits fabriqués par NPPF, et, d'autre part, sur le nombre élevé de références conduisant à une saturation des capacités logistiques de ses distributeurs.

Sur le premier point, l'article 7 des conditions générales de vente et de livraison de NPPF soumet l'octroi d'une remise annuelle sur facture de 30 % applicable aux achats de produits destinés à la vente en circuit spécialisé aux engagements suivants de la plateforme :

"- Acheter des aliments pour chiens et chats exclusivement à NPPF et

- Commander en véhicule optimisé, tel que défini dans le paragraphe 3. Tarif des présentes CGV, et

- Prendre en charge une force de vente exclusive et proportionnée pour être en contact avec les détaillants (magasins et éleveurs) et

- Participer aux programmes de formation mis en œuvre par NPPF, compte tenu des particularités nutritionnelles de certaines gammes qui nécessitent un conseil spécifique" ;

Il ressort du dossier que l'ensemble des plateformes a effectivement perçu cette remise de 30 % depuis 2004 et, qu'en pratique, les plateformes, si elles peuvent parfois distribuer plusieurs types d'articles différents, ne vendent, s'agissant des aliments pour chiens et chats, que les marques fabriquées par NPPF.

Sur le second point, l'exclusivité d'achat mise en place par NPPF a également reposé sur le développement d'une grande variété de références, conduisant à saturer les capacités logistiques des plateformes par la multiplication des références, étant enfin observé que cette exclusivité d'achat est confortée par le fait, d'une part, que la plupart des commerciaux travaillant pour les plateformes sont, en fait, salariés de Nestlé et non-salariés des plateformes et font l'objet d'une refacturation par cette dernière aux plateformes, d'autre part, que Nestlé est présent à toutes les réunions de l'association regroupant les plateformes.

En troisième lieu, les pratiques reprochées aux requérantes sont caractérisées par la mise en place d'exclusivités territoriales. En effet, NPPF a conféré une exclusivité territoriale à chacune de ses plateformes de distribution. Chacune des 21 plateformes de distribution en gros des produits NPPF opère sur une zone géographique donnée, composée de plusieurs départements, l'ensemble des plateformes couvre ainsi la totalité du territoire français et NPPF elle-même procédant à la répartition territoriale. Il ressort des éléments recueillis lors de l'enquête et de l'instruction que les plateformes se conforment à l'exclusivité territoriale qui leur a été accordée par NPPF de manière très précise.

En quatrième lieu, la procédure a révélé l'interdiction des ventes passives des plateformes aux distributeurs-détaillants sur les segments des magasins spécialisés et des éleveurs. En effet, plusieurs déclarations de détaillants opérant sur le segment des magasins spécialisés ont fait état de l'impossibilité de solliciter une livraison auprès d'un grossiste différent de celui qui leur a été préalablement indiqué par NPPF ou par les grossistes eux-mêmes. Par ailleurs, l'instruction a relevé l'absence de flux commercial entre la France et les pays frontaliers, alors même que les prix d'approvisionnement pour les produits NPPF y sont parfois plus faibles.

En dernier lieu, sur la politique tarifaire de NPPF, il ressort du dossier, tout d'abord, concernant la politique tarifaire de NPPF à l'égard des centrales de référencement ou d'achat, que les conditions tarifaires et commerciales applicables aux distributeurs adhérant à une centrale de référencement ou d'achat sont établies directement par NPPF, sans intervention des grossistes qui ne sont pas libres de fixer les prix auxquels ils revendent les produits NPPF aux magasins affiliés à une enseigne nationale et ne négocient pas non plus les conditions commerciales. Ainsi, les marchandises sont d'abord vendues aux plateformes, auxquelles sont appliquées les conditions générales de vente convenues avec NPPF et que les plateformes revendent ensuite aux magasins des enseignes, au prix qui a été négocié par NPPF et les centrales d'achat ou de référencement, sans que les plateformes elles-mêmes prennent part à cette négociation. La nomenclature des tarifs pratiqués par NPPF comprend quatre catégories, identifiées dans la correspondance de la société par les appellations "T0", "T1", "T2" et "T3" (ou T1-10 %) : T0 est le tarif de base proposé par NPPF pour la revente aux détaillants ; T3 désigne le tarif le plus bas ; les autres tarifs, T1 et T2, rarement utilisés, correspondent à des tarifs compris entre T0 et T3, appliqués en fonction du volume commandé. Le tarif négocié par NPPF avec les centrales est appliqué de manière identique pour chacun des magasins des enseignes correspondantes. NPPF justifiait ce choix, à l'époque des faits, par le respect des dispositions relatives à la discrimination issue du régime antérieur à celui mis en place par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (ci-après "LME") : sous ce régime, NPPF estimait être tenue de proposer le même prix aux clients se trouvant dans des situations identiques. NPPF transmet aux plateformes la liste des prix des produits ainsi que les conditions commerciales, telles qu'elles ont été négociées avec les centrales. NPPF a ainsi établi, à cet effet, des fiches intitulées "récapitulatif des conditions commerciales" qui ont été transmises aux plateformes chaque année par le responsable national Comptes-Clés au sein de NPPF. Ces fiches précisent, outre les références des différentes gammes proposées, le tarif d'achat (aussi appelé "tarif T3" ou "T0-10 %") pour toutes les enseignes concernées, les conditions de livraison et de règlement, l'escompte éventuel, les conditions tarifaires liées à l'ouverture ou la réouverture d'un magasin, les ristournes de fin d'année versées à la centrale et les accords de coopération commerciale. Les plateformes auditionnées pendant la procédure ont confirmé, ne pas intervenir dans la négociation commerciale avec les détaillants et affirment que les prix résultant de ces négociations leur sont communiqués par NPPF. Ainsi, l'ensemble des conditions tarifaires et commerciales est défini par NPPF et les centrales d'achat et de référencement des enseignes. Les plateformes sont toutes informées de la teneur de ces négociations et se contentent d'appliquer les prix qui leur sont communiqués par NPPF. Les centrales de référencement auditionnées pendant la procédure ont confirmé négocier directement les prix avec NPPF et ses représentants et non avec les plateformes de distribution.

Il ressort, ensuite, du dossier, concernant la définition de la politique tarifaire à l'égard des magasins indépendants, qu'à l'instar de ce qui prévaut en matière de politique tarifaire à l'égard des magasins sous enseigne, les plateformes n'interviennent pas dans les négociations tarifaires avec les magasins indépendants qui se tiennent uniquement entre des représentants de NPPF et les magasins. Ainsi, dans le cas de détaillants qui n'adhèrent pas à une centrale d'achat ou de référencement, les prix de revente des produits NPPF sont relayés directement dans les magasins par des commerciaux salariés de NPPF. NPPF refacture ensuite cette prestation aux plateformes. Les commerciaux se présentent comme des salariés des marques de NPPF lorsqu'ils approchent les détaillants indépendants, qui les perçoivent comme tels. L'enquête a ainsi révélé qu'à l'occasion de leurs visites, certains commerciaux remettent des cartes de visite les identifiant clairement comme des salariés "Purina". Les représentants de magasins indépendants auditionnés par l'Autorité pendant la procédure ont évoqué recevoir des listes de prix de NPPF ou de ses représentants et non des plateformes, qui se contentent de la livraison et de la facturation.

Il est établi par la procédure, enfin, concernant la communication des prix par NPPF et son application par les distributeurs, que NPPF définit et transmet à ses plateformes des listes de prix de revente aux détaillants une à deux fois par an. NPPF a remis aux services d'instruction l'ensemble des tarifs communiqués aux plateformes entre 2004 et 2008 : ces listes sont identiques aux tarifs qu'ont communiqués les plateformes aux services d'instruction. L'ensemble des plateformes interrogées ont déclaré que Nestlé leur a fourni des prix conseillés en fonction du volume de commande. Les prix communiqués variaient de T0 à T3 avec une remise de 2 à 10 % pour T3. Les magasins indépendants ont également déclaré acheter les marchandises au tarif T3 selon la nomenclature de NPPF. Par ailleurs, les factures communiquées par les détaillants dans le cadre de l'enquête révèlent une application quasi systématique d'un tarif d'achat correspondant au tarif T3 élaboré par NPPF par les plateformes, quand bien même certains grossistes donnent à ce tarif un intitulé différent et que, quelle que soit la plateforme concernée, le tarif apparaissant sur la facture est soit un tarif net, soit un tarif correspondant au tarif T0 de NPPF auquel s'applique une remise sur facture de 10 %.

S'agissant, ensuite, de Royal Canin et de ses distributeurs, l'instruction a également permis de déterminer, en premier lieu, des restrictions de clientèle convenues par Royal Canin et ses distributeurs. Cette entreprise a développé des gammes de produits dédiées aux vétérinaires et d'autres, différentes, destinées aux magasins spécialisés et aux éleveurs. Royal Canin disposait d'un réseau de centres de distribution composé pour partie de distributeurs indépendants jusqu'en septembre 2009 ; qu'ils soient indépendants ou intégrés, ces centres de distribution commercialisent les produits à l'attention des magasins spécialisés et des éleveurs alors que les centrales d'achat vétérinaires concluent des accords directement avec Royal Canin qui a ainsi compartimenté son réseau de distribution en fonction des types de détaillants concernés. Les centres de distribution de Royal Canin ont tous confirmé ne distribuer les produits Royal Canin qu'aux magasins spécialisés et aux éleveurs, à l'exclusion des vétérinaires.

Toutefois, Royal Canin a entamé un processus d'intégration progressif des différents grossistes qui livrent ses produits aux détaillants, à la suite de la décision n° 05-D-32 du 22 juin 2005, relative à des pratiques mises en œuvre par la société Royal Canin et son réseau de distribution et de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 avril 2006.

L'instruction a aussi mis en lumière le mono-marquisme des distributeurs des produits Royal Canin. Les grossistes commercialisant les produits de Royal Canin ne vendent pas de produits pour chiens et chats haut de gamme de marques autres que Royal Canin. Comme pour NPPF, le mono-marquisme des distributeurs de Royal Canin repose sur deux fondements : la mise en place d'un système incitatif de rémunération, d'une part, et une stratégie de multiplication des références conduisant à une saturation de leurs capacités logistiques, d'autre part.

Le système de remise aux distributeurs de Royal Canin est construit sur la réalisation d'objectifs d'accroissement tant des volumes globaux que des volumes sur certaines références de produits considérés comme prioritaires par Royal Canin. Seul ce dernier objectif détermine, dans un premier temps, les niveaux de remise finaux dont vont bénéficier les distributeurs. Par ailleurs, la multiplicité des gammes proposées par Royal Canin a conduit à une saturation des capacités logistiques des grossistes et limité les possibilités de multi-marquisme des distributeurs et que l'ensemble des distributeurs entendus a confirmé ne distribuer que des produits Royal Canin.

Comme en ce qui concerne NPPF, Royal Canin a mis en place des exclusivités territoriales. Ainsi, lors de son audition du 26 novembre 2008, le directeur général de Royal Canin a déclaré : "Pour des raisons logistiques, les centres de distribution ont une zone de chalandise définie par (Royal Canin) qui demande à ces centres de développer leur clientèle sur leur zone de chalandise qui comprend plusieurs départements. Il existe des cartes de découpage. Dans leur zone de chalandise, les centres de distribution organisent leur travail de prise de commande, de prospection, de livraison etc. Les forces de vente vont voir les points de vente et les éleveurs régulièrement et se font connaître. Il y a tellement à faire dans ces zones qu'ils se concentrent sur ces départements qu'ils veulent développer". Les zones de chalandise des différents distributeurs sont matérialisées sur une carte établie par Royal Canin, que cette dernière transmet aux grossistes. Chaque distributeur dispose d'une zone géographique déterminée composée de différents départements, l'ensemble couvrant la totalité du territoire français. Cette carte a été transmise en annexe à leur réponse aux questionnaires des services de l'Autorité par l'ensemble des grossistes de Royal Canin qui ont, par ailleurs, confirmé n'opérer que dans une zone géographique limitée, déterminée par Royal Canin.

Le dossier révèle encore une interdiction des ventes passives des grossistes aux détaillants : plusieurs détaillants entendus par l'Autorité ont fait état de l'impossibilité de solliciter une livraison auprès d'un grossiste différent de celui qui leur a été préalablement indiqué par Royal Canin. La situation est identique pour les centres intégrés par Royal Canin, qui ne réalisent aucune transaction transfrontalière.

Sur la politique tarifaire de Royal Canin, s'agissant tout d'abord de l'élaboration des prix de vente au détail et leur communication aux grossistes, il est établi que la politique tarifaire de Royal Canin varie suivant que les produits sont destinés à des magasins affiliés à des centrales d'achat et de référencement ou à des magasins indépendants. Dans le cas des magasins affiliés, Royal Canin négocie les conditions tarifaires et les accords de partenariat avec les centrales nationales d'achat et de référencement. Ces négociations sont réalisées directement par les centres de distribution dans le cas des magasins indépendants. Dans le cadre des relations avec les centrales des enseignes nationales, les grossistes ne disposent d'aucune marge de manœuvre sur le plan tarifaire : ils ne sont pas libres de fixer les prix pour la revente des produits vers les magasins affiliés à une enseigne nationale et ils ne négocient pas non plus les conditions commerciales, qui figurent dans les conditions d'achat des grandes enseignes et signées chaque année avec Royal Canin. Ce n'est que ponctuellement que des promotions locales sont réalisées. Les services commerciaux de Royal Canin désignent les prix de revente qui seront pratiqués par les grossistes-distributeurs sous l'appellation "tarif T0", laquelle comprend plusieurs tranches : la tranche "T0 prix de base" pour les commandes de 300 à 499 kg, la tranche "T1, prix T0-2 %", pour les commandes de 500 à 749 kg et la tranche "T2, prix T0-4 %" pour les commandes de 750 à 999 kg. Royal Canin édite, pour le compte de ses grossistes-distributeurs, les barèmes de prix de vente aux détaillants, dits "tarifs T0" à destination des centrales d'achat.

S'agissant ensuite des prix pratiqués par les grossistes, les grossistes entendus par l'Autorité (points 103 à 116 de la Décision auxquels la cour renvoie expressément) ont confirmé ne pas être en mesure de négocier eux-mêmes les conditions tarifaires avec les détaillants appartenant à des enseignes et ainsi appliquer les prix communiqués par Royal Canin.

Enfin, l'instruction du dossier a permis de relever un certain nombre de pratiques concernant Hill's ainsi que ses distributeurs respectifs, magasins spécialisés et éleveurs.

Si, de son côté, Hill's a contesté les griefs qui lui ont été notifiés, cette entreprise n'a cependant, ni sérieusement, ni utilement contesté la matérialité des constatations de l'Autorité que la cour rappellera pour l'essentiel, en renvoyant, en tant que de besoin, aux développements de la Décision (points 117 à 128).

Il est établi que Hill's ne commercialise aucun produit auprès de la grande distribution alimentaire. La distribution de ses aliments pour chiens et chats à destination des magasins spécialisés était assurée par un seul distributeur, la société Oxadis, jusqu'en juillet 2008, date à laquelle Hill's a repris la distribution de ses produits en propre. Hill's a recours à cinq grossistes-vétérinaires pour la revente de ses gammes de produits destinées aux vétérinaires. Ces gammes de produits diffèrent de celles destinées aux magasins spécialisés. Hill's ne fournit les éleveurs que de manière résiduelle.

Il a été constaté que Hill's a conclu avec Oxadis plusieurs contrats de distribution entre 2004 et 2008, dans lesquels figuraient trois types d'exclusivités : une exclusivité de clientèle, une exclusivité d'approvisionnement ou clause de mono-marquisme et une restriction territoriale.

Cependant, l'Autorité a estimé que les éléments figurant au dossier ne permettent pas de considérer que les clauses d'exclusivité mises en place par Hill's aient des effets actuels ou même potentiels suffisants pour pouvoir contribuer de façon significative à un éventuel effet cumulatif de verrouillage attribuable à des pratiques imputables à d'autres opérateurs présents sur le secteur et qu'il n'y avait pas lieu, dès lors, en l'absence d'éléments suffisamment probants à cet égard, de considérer ces clauses comme contraires aux règles de concurrence.

L'instruction (points 122 à 128 de la Décision) a également révélé la mise en place par Hill's une exclusivité territoriale pour la distribution aux magasins spécialisés et d'une interdiction de vente passive à la charge des grossistes-vétérinaires.

Lorsqu'Oxadis assurait l'activité de grossiste pour le compte de Hill's, sa compétence était restreinte au seul territoire français. Dans leur réponse à une demande d'information, les représentants d'Oxadis ont précisé, le 17 décembre 2008 : "Le territoire de distribution confié par la société Hill's à la société Oxadis était la France métropolitaine. La société Oxadis ne distribuait par de manière active les produits Hill's en dehors du territoire de la France métropolitaine (...). Oxadis n'a jamais reçu de demandes de fourniture de produits Hill's de la part de magasins situés hors du territoire français (zone frontalière)".

Cette exclusivité est prévue par le contrat de distribution exclusive, dont une clause stipule : "En relation avec la vente et la promotion des produits Hill's, le distributeur convient de s'abstenir de créer toute succursale ou dépôt de distribution et de vendre activement ou de rechercher des clients dans toute région de l'EEE que Hill's se réserve pour elle-même ou que Hill's a affecté à un autre distributeur ou de permettre la vente de produits Hill's à distributeur, a l'intention de vendre, distribuer ou exporter les produits Hill's hors de l'EEE. Rien dans le présent contrat n'interdira toutefois au distributeur de satisfaire à toutes demandes de Science Plan Products que le distributeur n'aura pas sollicitées mais qu'il aura reçues en provenance de l'extérieur du Territoire (...). Hill's convient de prendre toutes les mesures raisonnables autorisées par la réglementation française ou des autres pays de l'Union européenne pour décourager d'autres distributeurs appointés par Hill's dans d'autres pays de commercialiser les produits auprès du commerce de détail en France".

Oxadis est tenue de communiquer des informations statistiques régulières à Hill's. Selon les termes du contrat de distribution exclusive : "Oxadis s'engage à transmettre à Hill's, dans la continuité de contenu et de délai, avant le 10 de chaque mois, sous la forme actuelle, un état faisant apparaître par code client, par code produit le nombre d'unités de produits Hill's vendu par le distributeur au cours du mois civil précédent". Sur ce point, Oxadis s précisé, dans sa réponse du 17 décembre 2008 : "La société Oxadis fournissait trimestriellement un point à date sur le chiffre d'affaires réalisé avec chaque enseigne et précisant les quantités vendues par produit, ainsi que les opérations promotionnelles décidées par la société Oxadis avec les magasins".

Les représentants de Hill's ont déclaré, lors de leur audition du 26 janvier 2009, livrer directement depuis la Belgique et les pays nordiques : "Nous opérons aussi dans ces deux circuits-là : les vétérinaires et les magasins spécialisés dans les autres pays européens. Il existe un entrepôt central en Belgique, par exemple. Nous sommes en direct dans le circuit des magasins en Belgique et dans les pays nordiques. En Allemagne, nous n'avons qu'un distributeur indépendant mais qui fait à la fois les vétérinaires et les magasins spécialisés".

Les grossistes-vétérinaires sont également tenus à une exclusivité territoriale, ne pouvant opérer que sur une zone géographique déterminée. Ils sont, par ailleurs, tenus de restreindre leurs ventes au territoire national. Selon les termes des conditions générales de vente les liant à Hill's : "Sauf accord préalable signé de Hill's ces établissements, propriété d'un vétérinaire ou dont les adhérents ou actionnaires sont majoritairement des vétérinaires, s'engagent à délivrer nos produits uniquement à leurs détaillants vétérinaires et ce sur le territoire national exclusivement".

Comme Oxadis, les grossistes-vétérinaires font remonter régulièrement des statistiques précises comme cela est envisagé par les contrats commerciaux de 2004 et 2007 que le fournisseur leur donne à titre d'exemple. Ces contrats, qui lient les grossistes vétérinaires à Hill's, stipulent : "Le prestataire fournira au fournisseur, sur disquette ou sur Internet, le détail des ventes par référence et par clinique du mois précédent, avant le dix de chaque mois".

Aucun échange transfrontalier de produits Hill's n'est intervenu entre la France et les autres pays européens pendant la durée pendant laquelle les pratiques ont été observées.

Sur la base des constatations recueillies dans le cadre de la procédure, par courrier en date du 12 mars 2010, la rapporteure générale de l'Autorité a notifié les griefs suivants aux sociétés précitées

- "(...) aux sociétés Nestlé Purina Petcare France SAS et Nestlé SA de s'être entendues avec leurs grossistes (Madelon SA, Haudecoeur SAS, Huro'agri SARL, Jean-Marc Barralon distribution SARL, la Bonbonnière SARL, Nutri d'Oc SAS, Etablissements Etourneaud SAS, Solignac SAS, Cany Ouest distribution SAS, Emis France SARL, Profood SAS, Multari SARL, Garibaldi SAS, Distripro SAS, le Capitaine SA, Cani Distribution SAS, Animal Food SAS, Agri Pasquier, Epis Centre) pour mettre en place un système de distribution présentant les restrictions de concurrence suivantes : fixer le prix de revente minimum aux détaillants, ne pas pratiquer des ventes passives pour des clients situés en dehors des territoires alloués à chaque grossiste, restreindre la clientèle à laquelle les grossistes peuvent vendre les aliments secs pour chats et chiens en la limitant aux réseaux spécialisés, magasins spécialisés et éleveurs à l'exclusion des vétérinaires, restreindre le territoire de distribution de chacun d'eux et restreindre leurs approvisionnements en aliments secs pour chiens et pour chats exclusivement aux produits Nestlé. Ces pratiques ont eu pour objet ou pour effet d'empêcher, de fausser ou de restreindre la concurrence intra-marque et inter-marque entre 2004 et 2008. Ces pratiques sont prohibées par les dispositions des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101, paragraphe 1, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), (anciennement article 81, paragraphe 1, CE) ;

- (...) aux sociétés Royal Canin SAS et Mars Inc. de s'être entendues avec leurs grossistes (Royal Canin distribution Rhones Alpes (Rhonaldis) Normandie Loir Distribution SAS, Royal Canin Distribution Poitou SAS, Canidis SA, Ferrat Distribution SAS, Alpadis SAS, Fapac Tivadis SAS, Galetou SAS, Cazenave SARL) pour mettre en place un système de distribution présentant les restrictions de concurrence suivantes : fixer le prix de revente minimum aux détaillants, ne pas pratiquer des ventes passives pour des clients situés en dehors des territoires alloués à chaque grossiste, restreindre la clientèle à laquelle les grossistes peuvent vendre les aliments secs pour chats et chiens en la limitant aux réseaux spécialisés, magasins spécialisés et éleveurs à l'exclusion des vétérinaires, restreindre le territoire de distribution de chacun d'eux et restreindre leurs approvisionnements en aliments secs pour chiens et pour chats exclusivement aux produits Royal Canin. Ces pratiques ont eu pour objet ou pour effet d'empêcher, de fausser ou de restreindre la concurrence intra-marque et inter-marque entre 2004 et 2008. Ces pratiques sont prohibées par les dispositions des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101, paragraphe 1, TFUE, (anciennement article 81, paragraphe 1, CE) ;

- (...) aux sociétés Hill's Pet Nutrition SNC et Colgate-Palmolive Company de s'être entendues avec leur grossiste, la société Oxadis SA, pour mettre en place un système de distribution présentant les restrictions de concurrence suivantes : restreindre la clientèle à laquelle le grossiste peut vendre les aliments secs pour chats et chiens en la limitant aux réseaux spécialisés, magasins spécialisés et éleveurs à l'exclusion des vétérinaires, restreindre le territoire de distribution, restreindre son approvisionnement en aliments secs pour chiens et pour chats exclusivement aux produits Hill's. Ces pratiques ont eu pour objet ou pour effet d'empêcher, de fausser ou de restreindre la concurrence intra-marque et inter-marque entre 2004 et 2007. Ces pratiques sont prohibées par les dispositions des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101, paragraphe 1, TFUE, (anciennement article 81, paragraphe 1, CE) ;

- (...) aux sociétés Hill's Pet Nutrition SNC et Colgate-Palmolive Company de s'être entendues avec leurs grossistes vétérinaires (Alcyon France SA, Centravet SA coopérative, Coveto SA coopérative, Hippocampe SA, Médicoop Services - SA coopérative) pour ne pas pratiquer des ventes passives pour des clients situés hors du territoire national entre 2004 et 2008. Cette pratique est prohibée par les dispositions des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101, paragraphe 1, TFUE, (anciennement article 81, paragraphe 1, CE)."

Les sociétés Royal Canin et Mars Incorporated, d'une part, et NPPF et Nestlé, d'autre part, qui étaient destinataires de la notification de griefs, ont sollicité le bénéfice des dispositions du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce, selon lesquelles : "Lorsqu'un organisme ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés, le rapporteur général peut proposer à l'Autorité de la concurrence, qui entend les parties et le commissaire du Gouvernement sans établissement préalable d'un rapport, de prononcer la sanction pécuniaire prévue au I en tenant compte de l'absence de contestation. Dans ce cas, le montant maximum de la sanction encourue est réduit de moitié. Lorsque l'entreprise ou l'organisme s'engage en outre à modifier son comportement pour l'avenir, le rapporteur général peut proposer à l'Autorité de la concurrence d'en tenir compte également dans la fixation du montant de la sanction."

La mise en œuvre de ces dispositions a donné lieu à l'établissement de deux procès-verbaux signés le 7 mai 2010 et le 18 mai 2010 par les représentants des deux sociétés, qui ont proposé des engagements. En séance, plusieurs améliorations ont été apportées aux propositions d'engagements faites par la société NPPF, dont la version définitive figure en annexe 1 de la décision déférée à la cour.

Pour tenir compte de la non-contestation des griefs et des engagements proposés par les sociétés Royal Canin, NPPF et leurs sociétés mères respectives, le rapporteur général adjoint a proposé que la sanction pécuniaire encourue par NPPF et Nestlé soit réduite dans une proportion allant de 12 à 22 % du montant qui leur aurait été normalement infligé et celle encourue par Royal Canin et Mars Incorporated dans une proportion allant de 15 à 25 %.

Enfin, il est rappelé que l'Autorité a précisé (point 236 de la Décision) qu'elle apprécierait les critères légaux concernant la détermination des sanctions selon les modalités pratiques décrites dans son communiqué du 16 mai 2011 relatif à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires.

C'est dans ces conditions que, par Décision n° 12-D-10 du 20 mars 2012, (la Décision), l'Autorité a décidé :

"Article 1er : Il est établi que les sociétés NPPF et Nestlé SA, Royal Canin et Mars Incorporated et Hill's Pet Nutrition SNC et Colgate-Palmolive Company ont enfreint les dispositions des articles 101, paragraphe 1 du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce.

Article 2 : Il est établi que les sociétés Hill's Pet Nutrition SNC et Colgate-Palmolive Company ont enfreint les dispositions des articles 101, paragraphe 1, du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce au titre du second grief notifié à ces sociétés, relatif aux ventes passives pour des clients situés hors du territoire national entre 2004 et 2008.

Article 3 : Il n'est pas établi que les pratiques visées par le premier grief notifié aux sociétés Hill's Pet Nutrition et. Colgate-Palmolive Company soient contraires aux dispositions mentionnées ci-dessus.

Article 4 : Pour les infractions visées aux articles 1 et 2, sont infligées les sanctions pécuniaires :

* de 19 040 000 euros aux sociétés Nestlé Purina Petcare France et Nestlé SA, conjointement et solidairement ;

* de 11 618 000 euros aux sociétés Royal Canin SAS et Mars Incorporated, conjointement et solidairement ;

* de 4 664 000 euros aux sociétés Hill's Pet Nutrition SNC et Colgate-Palmolive Company, conjointement et solidairement.

Article 5 : Il est enjoint aux sociétés NPPF et Nestlé SA, ainsi qu'aux sociétés Royal Canin et Mars Incorporated de se conformer en tous points aux engagements visés respectivement aux paragraphes 305 et suivants et aux paragraphes 310 et suivants, dont les versions définitives figurent en annexes 1 et 2 de la présente décision, qui sont rendus obligatoires."

LA COUR :

Vu le recours en annulation et subsidiairement en réformation déposé le 27 avril 2012 au greffe de la cour par la société Royal Canin et par la société Mars Incorporated ;

Vu le mémoire au soutien du recours déposé le 1er juin 2012 soutenu par le mémoire récapitulatif déposé le 21 février 2013 ;

Vu le recours en réformation déposé le 2 mai 2012 au greffe de la cour par la société Hill's Pet Nutrition et par la société Colgate-Palmolive Company ;

Vu le mémoire déposé le 1er juin 2012 à l'appui du recours soutenu par le mémoire récapitulatif déposé le 20 février 2013 ;

Vu le recours en annulation et/ou en réformation déposé le 3 mai 2012 au greffe de la cour par la société Nestlé Purina Petcare France et par la société Nestlé SA ;

Vu l'exposé des moyens déposé le 1er juin 2012 à l'appui du recours soutenu par le mémoire récapitulatif déposé le 21 février 2013 ;

Vu les observations de l'Autorité de la concurrence en date du 13 novembre 2012 ;

Vu les observations du ministre de l'Economie et des Finances du 13 novembre 2012 ;

Vu les observations écrites du Ministère public, mises à la disposition des parties ;

Après avoir entendu à l'audience publique du 16 mai 2013, les conseils des requérantes, qui ont été mis en mesure de répliquer, ainsi que le représentant de l'Autorité de la concurrence et le Ministère public ;

SUR CE :

SUR LA PROCÉDURE

Sur le délai écoulé entre la signature du procès-verbal de non-contestation des griefs et la décision de l'Autorité

Considérant que le délai raisonnable prescrit par l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, doit s'apprécier au regard de l'ampleur et de la complexité de l'affaire et que la sanction qui s'attache à la violation par l'Autorité de la concurrence de l'obligation de se prononcer dans un délai raisonnable n'est pas l'annulation de la procédure mais la réparation du préjudice résultant éventuellement du délai subi, sous réserve, toutefois, que le délai écoulé durant la phase d'instruction, en ce compris la phase non contradictoire, devant l'Autorité n'ait pas causé à chacune des entreprises, formulant un grief à cet égard, une atteinte personnelle, effective et irrémédiable à son droit de se défendre ;

Considérant que NPPF et Nestlé demandent à la cour de prononcer l'annulation de la Décision qui est entachée d'irrégularité au motif que le délai excessif qui s'est écoulé entre la signature du procès-verbal de non-contestation des griefs et la décision de l'Autorité a porté une atteinte personnelle, effective et irrémédiable à leurs droits de la défense ; que les requérantes prétendent caractériser la durée anormalement longue de la procédure au regard de la pratique décisionnelle de l'Autorité qui ne permet de constater des durées plus longues que dans des affaires présentant un degré supérieur de complexité impliquant un grand nombre d'entreprises et concernant des pratiques beaucoup plus graves dont le déroulement s'inscrit dans un laps de temps significativement supérieur ; qu'en l'espèce, les requérantes prétendent étayer leurs affirmations :

- par le fait, qu'au stade de la notification des griefs, l'Autorité a décidé de ne pas poursuivre les grossistes, pourtant également parties à l'entente, ainsi que certains distributeurs et, par surcroît, que des réorganisations internes survenues au sein des services d'instruction, notamment les désignations successives de rapporteurs ont provoqué un ralentissement inhabituel et imprévisible de la procédure, s'agissant d'une procédure de non-contestation des griefs ;

- par le refus de l'Autorité de procéder à une disjonction des procédures, pourtant possible, dès lors que, en dépit du choix par certaines entreprises seulement de la procédure de non-contestation des griefs, les pratiques en cause n'en restaient pas moins distinctes selon les opérateurs ;

Que c'est dans ces conditions que NPPF et Nestlé prétendent avoir été victimes :

- d'une atteinte personnelle et effective à leurs droits de la défense, dès lors qu'ils n'ont pas pu bénéficier des avantages en termes de célérité qui sont spécialement attendus dans le cadre d'une procédure de non-contestation des griefs et qui ont été déterminants pour les inciter à opter pour une telle stratégie de défense, en particulier en ce qui concerne une modification rapide du système de distribution ;

- d'une atteinte également irrémédiable à de tels droits, dans la mesure où, dans le cadre d'une stratégie de défense, l'engagement dans une procédure de non-contestation des griefs qui, par définition, les prive de la possibilité de contester par la suite la réalité des griefs qui leur sont imputés est, de facto, irréversible ;

Mais considérant qu'au regard de la chronologie des différentes étapes de la procédure qui ressortent de la Décision et qui sont rappelées dans les écritures des requérantes, que celles-ci ne sont pas fondées à imputer à l'Autorité un défaut de diligence et de célérité procédant de la durée de la phase contradictoire de la procédure, qui s'est élevée à 24 mois, et de la durée de la période de 22 mois qui s'est écoulée entre la signature du procès-verbal et la décision, s'agissant de pratiques d'entente non dénuées d'ampleur et de complexité, mises en œuvre par des entreprises actives à l'échelle mondiale et appartenant à des groupes de dimension internationale avec l'ensemble de leurs distributeurs spécialisés ;

Qu'au demeurant, NPPF et Nestlé n'invoquent aucune circonstance précise et concrète démontrant que, dans le cadre particulier de la procédure de non-contestation des griefs mise en œuvre au cas d'espèce, elles auraient pu être privées du bénéfice de prétendus "gains procéduraux" découlant de cette procédure dans des conditions constitutives d'une atteinte à leurs droits de la défense ;

Que ce n'est qu'au surplus que la cour relève, d'une part, que les requérantes invoquent vainement le refus de l'Autorité de procéder à une disjonction, dès lors que les décisions du rapporteur général de l'Autorité de joindre ou disjoindre l'instruction de plusieurs affaires ne sont pas susceptibles d'être examinées par la cour et, d'autre part, qu'une comparaison de la durée de la procédure dans la présente affaire avec la durée de la procédure dans d'autres affaires qui reposent nécessairement sur des éléments de fait et de droit distincts et des circonstances différentes est inopérante ;

Que le moyen tiré de la violation du principe du délai raisonnable sera rejeté ;

Sur le respect des droits de la défense dans le cadre de la mise en œuvre du communiqué sanctions

Considérant que NPPF et Nestlé demandent à la cour de prononcer l'annulation de la Décision en raison, tout d'abord, de la violation du principe de légalité des délits et des peines et du principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère qui découle de l'application par la Décision de certaines dispositions novatrices du communiqué sanctions de l'Autorité ; que les requérantes soutiennent, en effet, que, pour déterminer le montant de la sanction qui leur a été infligée, la Décision a appliqué des critères et des paramètres de calcul autonomes dont elles ne pouvaient pas prévoir l'application au moment de la mise en œuvre des pratiques entre 2004 et 2008 ; que tel est le cas :

- du critère tiré de la durée des pratiques qui leur sont imputées qui, alors qu'il ne constitue pas en vertu des dispositions de l'article L. 464-2, I du Code de commerce un critère autonome de détermination des sanctions, a cependant été pris en compte de manière spécifique et autonome par rapport à la gravité des faits ainsi qu'au dommage à l'économie en la conduisant au triplement du montant de base de la sanction ;

- du second critère résultant de trois paramètres constitués par "la taille, la puissance économique et (des) ressources globales de NPPF et de sa société mère", qui ont conduit à une majoration de la sanction de 25 % qui n'est pourtant prévue, ni par la loi, ni même par le communiqué sanctions ;

Que NPPF et Nestlé précisent qu'en appliquant rétroactivement ces deux critères autonomes pour déterminer des sanctions concernant des pratiques qui ont été mises en œuvre avant l'adoption du communiqué sanctions, l'Autorité leur a ainsi infligé une sanction plus sévère que celle qui était prévue par la loi, en observant, par surcroît, que tant la notification des griefs intervenue le 8 mars 2010 que le procès-verbal de non-contestation des griefs du 18 mai 2010 sont intervenus plus d'un an avant l'adoption du communiqué, texte qui ne comporte par ailleurs aucune précision sur ses modalités d'application dans le temps ; qu'à cet égard, les requérantes opposent notamment aux appréciations de l'Autorité (point 237 de la Décision) selon lesquelles les entreprises avaient pu présenter leurs observations sur les principaux éléments de détermination des sanctions, que cette circonstance n'efface pas l'irrégularité résultant du fait qu'elles ignoraient totalement, au moment du choix de la procédure de non-contestation des griefs, que la méthode de calcul des sanctions pécuniaires serait bouleversée et conduirait à des amendes majorées ; qu'à supposer toutefois prise en considération, à cet égard, la date du rapport complémentaire, soit le 19 juillet 2011, les requérantes opposent à l'Autorité qu'elles ne bénéficiaient pas alors du recul nécessaire sur l'application du communiqué, dès lors que la première décision prononcée en application de ce texte n'est intervenue que le 8 décembre 2011 ; qu'elles ajoutent que l'analyse des décisions de l'Autorité rendues en matière d'ententes verticales qui leur ont été présentées par le Rapporteur général adjoint comme étant de nature à "(les) éclairer sur les sanctions que l'Autorité pourrait infliger" illustre également l'application, à leur détriment, d'une sanction plus sévère que celle qui était encourue.

Considérant que les requérantes soutiennent ensuite que la violation par l'Autorité des principes précités est aggravée par l'atteinte irrémédiable qui a été apportée à leurs droits de la défense en raison du non-respect des principes de loyauté et d'égalité des armes au cours de la procédure ; qu'en effet, l'application rétroactive des dispositions du communiqué a conduit à une aggravation significative de la sanction, alors qu'elles n'étaient en mesure de le prévoir, ni antérieurement, ni postérieurement à la réception de la notification de griefs, lorsqu'elles ont été conduites à faire le choix "stratégique" de ne pas contester les griefs notifiés ; qu'au surplus, selon NPPF et Nestlé, alors qu'elle était en mesure de les informer, même en dehors de tout cadre officiel de la procédure, et en tout état de cause avant la renonciation à contester les griefs, de son intention d'adopter le communiqué et de l'appliquer rétroactivement, l'Autorité s'est ainsi rendue coupable d'un comportement déloyal à l'égard des requérantes en procédant à une rétention d'informations sur le traitement de l'affaire, qui étaient pourtant déterminantes sur les choix de défense de l'entreprise ; qu'à l'opposé, au moment où les requérantes ont engagé une réflexion sur l'opportunité de ne pas contester les griefs, les services d'instruction ont, dans un courrier électronique qui leur a été adressé 30 avril 2010, cité trois décisions de l'Autorité de 2005 et 2006, adoptées au moment de la commission des pratiques reprochées aux requérantes, qui ont sanctionné des pratiques d'ententes verticales, afin de leur permettre de prévoir, sur la base de ces décisions, le niveau des sanctions qui leur seraient appliquées, sans les alerter à ce moment-là sur la possibilité d'un changement de méthode de détermination des sanctions ; que NPPF et Nestlé affirment que le comportement des services de l'Autorité les a ainsi influencées en les privant de la possibilité de prévoir raisonnablement les implications de leur choix de renoncer à contester les griefs et qu'elles ont finalement été contraintes de ne se défendre que sur le montant de la sanction qui leur a été infligée, sans pouvoir invoquer, à armes égales avec l'Autorité, de moyens relatifs à la réalité des pratiques retenues dans la décision, à leur qualification juridique, à leur imputabilité, ainsi qu'à tout moyen de légalité formelle de la décision pouvant leur permettre, le cas échéant, d'échapper à tout ou partie de la sanction, ce qui a ainsi porté atteinte à leurs droits de la défense ;

Que NPPF et Nestlé prétendent, enfin, que la communication par les soins du rapporteur général adjoint de l'Autorité, au moyen du message électronique précité, de données erronées sur la pratique décisionnelle de l'Autorité présentant des similitudes avec l'espèce afin de les inciter à opter pour une procédure de non-contestation des griefs qu'elles n'auraient pas choisie si elles avaient pu escompter qu'elles seraient soumises, près de deux années après la signature du procès-verbal de non contestation, à une sanction ne pouvant être anticipée et sans commune mesure avec celle qui leur avait été annoncée, constitue, en tout état de cause, une violation du principe de confiance légitime, étant observé que cet échange a été déterminant dans leur choix d'opter pour la procédure de non-contestation des griefs ;

Considérant que, pour leur part, Royal Canin et Mars demandent également à la cour de prononcer l'annulation de la décision déférée qui est entachée d'irrégularité à la suite d'une violation du principe de sécurité juridique résultant d'une application rétroactive à l'espèce, après clôture de l'instruction et après signature du procès-verbal de non-contestation des griefs, d'une part du communiqué sanctions, mais également du communiqué de procédure relatif à la non-contestation des griefs adopté par l'Autorité le 10 février 2012 ; qu'elles font particulièrement valoir qu'alors qu'elles avaient renoncé à contester les griefs, non seulement elles ont été exposées à des sanctions dont le montant, très supérieur à celui des sanctions qui étaient prononcées au moment où elles ont fait ce choix et qui a déterminé leur choix de renoncer à contester les griefs, s'est avéré imprévisible mais encore qu'elles n'ont plus été mises en mesure de bénéficier d'une réfaction de la sanction à intervenir de 15 à 25 % que le rapporteur général adjoint avait indiqué proposer au collège ;

Considérant que la cour observe, à titre liminaire, que si les moyens des requérantes tirés de la violation du principe de légalité des délits et des peines et du principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère en raison de l'application par l'Autorité du communiqué sanctions concernent, en principe, la détermination des sanctions et non, en soi, la régularité de la procédure, l'examen de leur bien-fondé ne peut cependant être dissocié de l'étude des moyens tirés d'une violation des droits de la défense qui sont fondés, notamment, sur la mise en œuvre du communiqué sanctions dans des conditions irrégulières qui affecteraient, a posteriori, la validité de la procédure de non-contestation des griefs ;

Considérant que le troisième alinéa du I de l'article L. 464-2 du Code de commerce prévoit que "les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation individuelle de l'organisme ou de l'entreprise sanctionné ou du groupe auquel l'entreprise appartient et à l'éventuelle réitération de pratiques prohibées par le (titre VI du livre IV du Code de commerce). Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction".

Qu'aux termes du quatrième alinéa du I de l'article L. 464-2 du Code de commerce, la sanction pécuniaire maximum qui peut être imposée à une entreprise est "de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante" ;

Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu, le communiqué de l'Autorité de la concurrence du 16 mai 2011 relatif à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires se borne à décrire et à expliciter, à droit constant, la méthode suivie en pratique par l'Autorité pour mettre en œuvre, au cas par cas, en se conformant à l'exigence de proportionnalité et d'individualisation des sanctions, dans l'ordre prévu par le Code de commerce, les critères fixés par ce code tenant à la gravité des faits, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'organisme ou de l'entreprise sanctionné ou du groupe auquel l'entreprise appartient, et à l'éventuelle réitération de pratiques prohibées par les règles de concurrence ; que le point 21 du communiqué décrit comme suit la mise en œuvre de ces critères :

- l'Autorité détermine d'abord le montant de base de la sanction pécuniaire pour chaque entreprise ou organisme en cause, en considération de la gravité des faits et de l'importance du dommage causé à l'économie, critères qui concernent tous deux l'infraction ou les infractions en cause (A) ;

- ce montant de base est ensuite adapté pour prendre en considération les éléments propres au comportement et à la situation individuelle de chaque entreprise ou organisme en cause, à l'exception de la réitération dont la loi a fait un critère autonome (B) ;

- il est augmenté par la suite, pour chaque entreprise ou organisme concerné, en cas de réitération (C).

- le montant ainsi obtenu est comparé au maximum légal, avant d'être réduit pour tenir compte, le cas échéant, de la clémence et de la non-contestation des griefs, puis ajusté, lorsqu'il y a lieu, au vu de la capacité contributive de l'entreprise ou de l'organisme qui en a fait la demande (D) ;

Considérant qu'il en résulte que, dans ce communiqué, en effet assimilable, comme énoncé par ce texte, à une simple directive au sens de la jurisprudence administrative (point 14 du communiqué), l'Autorité, exprimant notamment un souci de transparence (points 10 à 19 du communiqué annonçant les objectifs poursuivis), s'est ainsi seulement bornée à préciser par avance, et sous réserve de l'examen concret des circonstances propres à chaque cas d'espèce, les modalités concrètes selon lesquelles elle entend faire usage du pouvoir d'appréciation qui lui a été confié par la loi pour déterminer, en vertu des dispositions du I de l'article L. 464-2 du Code de commerce, par surcroît sous le contrôle de cette cour et le cas échéant de la Cour de cassation, les sanctions qu'elle impose aux entreprises et aux organismes qui se livrent à des pratiques anticoncurrentielles ;

Considérant que la méthode décrite dans le communiqué, exclusivement fondée sur les différents éléments énoncés par le Code de commerce, s'inscrit bien, sans le modifier, dans le cadre légal existant et que, dès lors, le communiqué ne peut recevoir la qualification affirmée par les parties de "texte à valeur normative" comportant, le cas échéant, des dispositions plus sévères que les dispositions du Code de commerce en vigueur ;

Qu'il ressort également des développements qui précèdent que le communiqué sanctions n'a pas institué, ainsi que ce texte le précise d'ailleurs lui-même (point 16), un barème mécanique permettant de prévoir par avance le montant précis des sanctions et de postuler, comme le font les requérantes, une aggravation des sanctions découlant nécessairement et automatiquement de sa mise en œuvre ;

Considérant qu'il s'ensuit que les moyens des requérantes tirés de la violation par l'Autorité des principes de légalité des peines et de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère au motif que la publication du communiqué est intervenue postérieurement à la mise en œuvre des pratiques poursuivies ainsi qu'à la date du procès-verbal de non-contestation des griefs sont inopérants ;

Considérant que les requérantes ne sont pas plus en droit d'invoquer une atteinte à leurs droits de la défense en raison du non-respect des principes de loyauté, de confiance légitime, d'égalité des armes et de sécurité juridique au cours de la procédure ;

Considérant, en effet, qu'il n'est pas contesté, ainsi que le mentionne la Décision (point 237), que "chacune des entreprises en cause dans la présente affaire a été mise en mesure de formuler des observations sur les principaux éléments de droit et de fait du dossier susceptibles, selon les services d'instruction, d'influer sur la détermination de la sanction pouvant lui être imposée, à la suite de la réception de la notification des griefs, du rapport et du rapport complémentaire en date du 19 juillet 2011, décrivant ces différents éléments." ;

Considérant que les requérantes ont, de la sorte, été formellement mises en mesure, dès la notification du rapport complémentaire, de discuter l'application du communiqué sanctions et de présenter des observations sur les éléments susceptibles d'être pris en considération par le collège pour déterminer le montant de la sanction qui était encourue ;

Qu'à tout le moins, ainsi que le relève à juste titre le ministre de l'Economie dans ses observations, les requérantes ne peuvent sérieusement prétendre avoir ignoré, ni l'existence même du communiqué dont le projet avait fait l'objet d'une vaste consultation publique entre janvier et mars 2011 puis de discussions sur les observations reçues lors d'une table ronde publique, ni le fait, qu'en l'absence de référence à une période transitoire ou, plus généralement, de précisions sur ses modalités d'application dans le temps, la méthode de détermination des sanctions qu'il décrit serait susceptible de s'appliquer à l'affaire en cours ;

Qu'au surplus, le fait que la méthode décrite dans le communiqué n'avait pas encore été mise en œuvre dans d'autres affaires en les privant alors d'une référence à la pratique décisionnelle antérieure de l'Autorité n'est, de toute façon, pas susceptible, en soi, de porter atteinte aux droits de la défense ;

Considérant, en outre, que s'il est vrai que, par courrier électronique du 30 avril 2010, le rapporteur général adjoint de l'Autorité a transmis aux conseils des requérantes trois décisions du Conseil et de l'Autorité présentées comme semblant de nature, parmi d'autres, à "éclairer (NPPF) sur les sanctions que l'Autorité pourrait infliger", une telle transmission, ne pourrait pour autant être de nature à porter atteinte au principe de confiance légitime, à le supposer applicable dans les circonstances de l'espèce et à ce stade de la procédure, ni encore au principe d'égalité des armes, dès lors que les termes de ce courrier sont dépourvus d'ambigüité sur la portée des décisions qui étaient jointes, puisqu'il se borne à indiquer "Bien entendu, non seulement, chaque affaire a ses spécificités, notamment en ce qui concerne la durée des pratiques mais on ne peut pas préjuger de ce que décidera le collège dans la présente affaire" ;

Qu'au demeurant, ainsi que cela sera précisé dans les développements consacrés aux sanctions, les requérantes ne sont pas fondées è se prévaloir de la pratique décisionnelle antérieure de l'Autorité dans le domaine des sanctions pour contester le quantum les sanctions qui leur ont été infligées par la Décision déférée ;

Que le moyen doit être écarté ;

SUR LE FOND

Sur l'applicabilité du droit de l'Union

Considérant qu'il est rappelé :

- que l'article 101, paragraphe 1, du TFUE prohibe les accords ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à la concurrence et qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre Etats membres ;

- que dans sa communication n° 2004-C 101-07 du 27 avril 2004 portant lignes directrices relatives à la notion d'affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité (devenus articles 101 et 102 du TFUE), la Commission européenne rappelle que "les articles 81 et 82 du Traité s'appliquent aux accords horizontaux et verticaux et aux pratiques abusives d'entreprises qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre Etats membres" (point 1) et que cette affectation actuelle ou potentielle doit être sensible (JO C 291 p. 1, points 44 et suivants) ;

Considérant qu'il n'est, ni contesté, ni contestable, que les pratiques examinées dans la présente affaire sont des accords verticaux conclus dans le cadre de systèmes de distribution exclusive et portant notamment sur la liberté tarifaire des distributeurs et leur capacité à se livrer à des ventes passives et que ces pratiques ont été mises en œuvre par les principaux opérateurs du secteur et couvrent l'ensemble du territoire national ;

Que, dès lors, ces pratiques sont susceptibles d'affecter les échanges entre Etats membres ;

Que, s'agissant de la question de savoir si cette affectation peut être qualifiée de sensible, il a été rappelé que les trois fabricants concernés par les pratiques représentaient ensemble, à l'époque des faits, la majeure partie de l'offre sur le marché français, soit plus de 70 % des ventes d'aliments pour chiens et chats ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les pratiques en cause dars la présente affaire sont susceptibles d'affecter de manière sensible le commerce entre Etats membres et doivent, par conséquent, être analysées au regard des règles de concurrence tant internes que de l'Union, ce que les entreprises mises en cause n'ont pas contesté devant l'Autorité et qu'elles ne contestent pas non plus devant la cour ;

Sur la définition des marchés pertinents

Considérant qu'en l'absence de contestation ou de critique des requérantes sur ce point, la cour renvoie aux développements de la Décision (points 149 à 154) dont il résulte que les marchés pertinents aux fins de l'appréciation des pratiques en cause dans la présente affaire peuvent être définis comme ceux de la vente d'aliments secs pour chiens dans la distribution spécialisée, soit en magasins spécialisés, soit chez les éleveurs et vétérinaires sur le territoire national, d'une part, et la vente d'aliments secs pour chats dans la distribution spécialisée, soit en magasins spécialisés, soit chez les éleveurs et vétérinaires sur le territoire national, d'autre part ;

Sur le bien-fondé des griefs

En ce qui concerne le droit applicable :

Considérant que la cour renvoie également, sur ce point, aux développements, non critiqués, de la Décision (points 158 à 165) sauf à rappeler, en synthèse :

- sur les prix de revente imposés, que la Cour de justice a énoncé, dans son arrêt du 4 juin 2009, T-Mobile (C-8-08, Rec. p. I-4529), qu'une pratique concertée a un objet anticoncurrentiel "lorsque, en raison de sa teneur ainsi que de sa finalité et compte tenu du contexte juridique et économique dans lequel elle s'insère, elle est concrètement apte à empêcher, à restreindre ou à fausser la concurrence au sein du marché commun. Il n'est pas nécessaire que la concurrence soit réellement empêchée, restreinte ou faussée ni qu'il existe un lien direct entre cette pratique concertée et les prix à la consommation" et, qu'en application de cette jurisprudence, les juridictions tant de l'Union qu'internes ont considéré des pratiques de prix de revente imposés revêtant différentes formes comme constituant des restrictions de la concurrence par leur objet même ;

- sur l'interdiction des ventes passives, que si les clauses visant à la concession, par un fournisseur, d'un territoire exclusif de vente à son distributeur ne sont pas anticoncurrentielles en elles-mêmes, les clauses visant à la restriction des ventes passives de ces mêmes distributeurs vers des territoires exclusifs peuvent revêtir le caractère de pratiques anticoncurrentielles par leur objet même ;

- sur les clauses d'exclusivité, que les clauses d'exclusivité figurant dans les relations contractuelles entre un producteur et ses distributeurs ne constituent pas, en principe, des pratiques anticoncurrentielles par leur objet même ; que, toutefois, de telles clauses peuvent restreindre la concurrence en raison de leurs effets actuels ou potentiels, notamment lorsque ceux-ci tendent à restreindre l'accès des concurrents au marché concerné ; qu'à cet égard, il convient d'apprécier non seulement l'effet de l'accord ou de la clause en cause sur le jeu de la concurrence, mais également de prendre en compte l'existence sur le marché d'autres contrats de même type afin de déterminer si cet accord ou cette clause contribue à un effet cumulatif de fermeture du marché résultant d'un ensemble de contrats similaires ; que les exclusivités contribuant de manière significative à l'effet cumulatif de verrouillage du marché relèvent de l'interdiction posée par les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce ; qu'en pratique, l'effet actuel ou potentiel d'éviction ou de verrouillage que peuvent engendrer les clauses d'exclusivité dépend donc de nombreux facteurs, parmi lesquels le champ et la portée de l'exclusivité, la part de la demande liée, la durée ou la combinaison dans le temps des contrats, les conditions de résiliation et de renouvellement, la position des opérateurs et les conditions de concurrence régnant sur le marché en cause, ou encore la position des clients ou des fournisseurs d'intrants ;

En ce qui concerne la non-contestation des griefs notifiés à NPPF et à Royal Canin ainsi qu'à NPPF SA et Mars Incorporated :

Considérant que l'Autorité a utilement rappelé (points 133 et 134 de la Décision) :

- que l'entreprise qui choisit de solliciter le bénéfice de la mise en œuvre du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce doit respecter les conditions imposées à cet égard, en ne contestant pas la réalité des griefs qui lui ont été notifiés ;

- que l'intéressée doit ainsi renoncer, de manière claire, complète et dépourvue d'ambiguïté à contester, non seulement la réalité de l'ensemble des pratiques visées par la notification des griefs, mais également la qualification qui en a été donnée au regard des dispositions du droit de l'Union, ainsi que du Code de commerce, et sa responsabilité dans la mise en œuvre de ces pratiques ;

Considérant qu'il ressort des développements qui précèdent consacrés à l'application du communiqué sanctions, que NPPF, Royal Canin et leurs sociétés mères respectives - Nestlé SA et Mars Incorporated - ne sont pas fondées à soutenir qu'elles n'ont pas été mises en mesure de renoncer, dans les conditions qui viennent d'être mentionnées, à contester les griefs qui leur ont été notifiés ;

Que, dès lors, il suffit de renvoyer aux développements de la Décision (point 136) qui a exactement rappelé qu'une telle renonciation à contester les griefs suffit pour permettre à l'Autorité de considérer que l'ensemble des infractions en cause sont établies à l'égard des parties qui ont fait ce choix procédural ;

En ce qui concerne les pratiques relevées à l'encontre de NPPF :

Considérant qu'il est établi par la Décision, non critiquée sur ce point :

- que NPPF s'est entendue avec ses distributeurs pour mettre en œuvre des exclusivités de clientèle, d'approvisionnement et des restrictions territoriales qui ont eu pour effet actuel ou potentiel de restreindre la concurrence et d'assurer une totale étanchéité des réseaux de distribution, privant ainsi les détaillants de la possibilité de faire jouer pleinement la concurrence entre les plateformes pour réduire les prix de gros et de répercuter cette réduction sur les prix de détail ;

- que l'ensemble des pratiques mises en œuvre par NPPF, dont la matérialité, la qualification juridique et l'imputabilité n'ont pas été contestées a tendu à restreindre la concurrence sur le marché des aliments secs pour chiens et sur le marché des aliments secs pour chats et doivent être considérées comme constituant des violations des articles 101, paragraphe 1 TFUE et L. 420-1 du Code de commerce, sans qu'il soit besoin en l'espèce d'examiner en outre si leurs effets se sont cumulés avec ceux des pratiques mises en œuvre par les autres entreprises en cause dans la présente affaire ;

Considérant, en conséquence, que la cour renvoie aux développements de la Décision (166 à 178), sauf cependant, compte tenu de la nature des moyens concernant l'appréciation du dommage à l'économie et la gravité des faits soulevés par les requérantes au soutien de leur contestation de la détermination et du quantum des sanctions, à rappeler, qu'en ce qui concerne tout d'abord, la politique tarifaire de NPPF sur les segments de marché des magasins spécialisés et des éleveurs, qu'entre 2004 et 2008, les conditions tarifaires et commerciales applicables aux détaillants spécialisés - qu'ils adhèrent ou non à une centrale d'achat ou de référencement - et aux éleveurs, étaient établies directement par NPPF sans intervention des plateformes et transmises une à deux fois par an à ces dernières dans une fiche intitulée "récapitulatif des conditions commerciales" ; que les produits étaient d'abord vendus aux plateformes puis revendus par ces dernières aux magasins spécialisés et aux éleveurs, au prix convenu entre NPPF et les centrales d'achat, les magasins indépendants et les éleveurs ; que les plateformes s'en tenaient à appliquer les prix sans disposer d'aucune liberté tarifaire ;

Qu'il n'est pas contesté qu'en mettant en œuvre ces pratiques, qui se sont étendues sur une période comprise entre 2004 et 2008, NPPF s'est entendue avec ses distributeurs sur les prix de revente de ses produits destinés aux magasins spécialisés et aux éleveurs et que ces pratiques constituent, pour les raisons rappelées ci-dessus, une violation des articles 101, paragraphe 1, du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce ;

Considérant, en ce qui concerne, ensuite, l'interdiction des ventes passives des plateformes NPPF aux distributeurs-détaillants sur les segments de marché des magasins spécialisés et des éleveurs, qu'il n'est pas plus contesté que les magasins spécialisés et les éleveurs ne sont pas en mesure de solliciter de livraison auprès d'un grossiste différent de celui qui leur a été préalablement indiqué par NPPF ou par les grossistes eux-mêmes ; qu'il est constant que les plateformes respectent cette restriction et ont ainsi déclaré ne pas satisfaire la demande de détaillants situés en dehors de la zone géographique qui leur a été assignée par NPPF ; que, par ailleurs, l'absence de flux commerciaux entre la France et les pays frontaliers n'est pas contestée, alors même que les prix d'approvisionnement pour les produits NPPF sont plus faibles dans certains autres Etats européens frontaliers de la France que les grossistes situés à l'étranger ne sont, quoiqu'il en soit, pas incités à vendre leurs produits à l'étranger dans la mesure où ces ventes ne sont pas prises en compte pour le calcul des primes des commerciaux de l'entreprise ;

Qu'il n'est pas non plus contesté que, en mettant en œuvre ces pratiques, qui se sont déroulées de 2004 à 2008, NPPF s'est entendue avec ses distributeurs pour interdire à ces derniers de pratiquer des ventes passives ; que pour les raisons rappelées ci-dessus, celles-ci constituent une violation des articles 101 paragraphe 1, du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce ;

Considérant qu'en ce qui concerne, enfin, les exclusivités accordées par NPPF à ses distributeurs :

- il n'est pas contesté que NPPF a mis en place deux systèmes de distribution distincts et étanches de ses produits haut de gamme en fonction de la catégorie de détaillants concernée ; que les produits destinés à la grande distribution alimentaire et les vétérinaires sont distribués directement par NPPF ; que la vente en gros aux éleveurs et aux magasins spécialisés a été confiée exclusivement à un réseau de plateformes de distribution qui se conforment strictement à cette exclusivité et ne livrent pas les grandes surfaces à dominante alimentaire ou les vétérinaires ;

- il n'est pas contesté, par ailleurs, que ces pratiques restreignent la concurrence, en ce qu'elles ont tendu à cloisonner les marchés concernés pour certaines variétés de produits, les enseignes de la grande distribution et les vétérinaires ne pouvant s'adresser aux plateformes de distribution, et qu'elles ont ainsi empêché les détaillants de faire jouer la concurrence, à la fois entre les plateformes et entre ces dernières et NPPF elle-même ;

Que, de plus, NPPF a mis en place une stratégie de distribution mono-marque pour ses produits, destinée à lui garantir une exclusivité d'achat de la part de ses distributeurs ; que cette stratégie commerciale s'appuyait d'abord sur l'octroi d'une remise de 30 % si les plateformes s'approvisionnaient en aliments pour chiens et chats uniquement auprès de NPPF ; que les plateformes ont toutes répondu à cette incitation dont l'effet a été renforcé par la multiplicité des références de produits NPPF que les plateformes étaient tenues de distribuer, saturant ainsi les capacités logistiques des plateformes et les contraignant au mono-marquisme ;

Que, par ailleurs, il n'est pas contesté que NPPF a conféré une exclusivité territoriale de fait à chacune de ses plateformes de distribution, lesquelles opèrent sur des zones géographiques données, composées de plusieurs départements ; que le processus d'attribution d'un territoire à un grossiste reposait sur la remise d'un document aux centrales de référencement de la distribution spécialisée précisant le nom de l'ensemble des plateformes et les départements dans lesquels chacune d'elles intervient ; que, par ailleurs, une carte de France définissant les zones de compétence de chaque plateforme est remise par NPPF aux centrales et aux détaillants ; que les plateformes se sont conformées à cette exclusivité de manière précise, ne livrant des clients situés en dehors de la zone qui leur a été assignée que de manière exceptionnelle ;

Considérant que cette exclusivité territoriale a pu contribuer au cloisonnement du marché de gros et affaiblir la concurrence intra-marque, les détaillants étant moins à même de faire jouer la concurrence entre des plateformes de distribution situées dans un secteur autre que celui défini par NPPF ;

En ce qui concerne les pratiques relevées à l'encontre de Royal Canin :

Considérant qu'il ressort de la Décision, non critiquée sur ce point :

- que Royal Canin s'est entendue avec ses distributeurs pour mettre en œuvre des exclusivités de clientèle, d'approvisionnement et restrictions territoriales qui ont eu pour effet actuel ou potentiel de restreindre la concurrence et d'assurer une totale étanchéité des réseaux de distribution et que les détaillants n'ont ainsi pas été en mesure de faire jouer pleinement la concurrence entre les plateformes pour réduire les prix de gros et n'ont dès lors pu répercuter cette réduction sur les prix de détail ;

- que l'ensemble des pratiques mises en œuvre par Royal Canin a tendu à restreindre la concurrence sur le marché des aliments secs pour chiens et sur le marché des aliments secs pour chats et que ces pratiques, dont la matérialité, la qualification juridique et l'imputabilité n'ont pas été contestées, constituent des violations des articles 101, paragraphe 1 du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce ;

Considérant, en conséquence, que la cour renvoie aux développements de la Décision (166 à 178), sauf cependant, compte tenu de la nature des moyens concernant l'appréciation du dommage à l'économie et la gravité des faits soulevés par les requérantes au soutien de leur contestation de la détermination et du quantum des sanctions, à rappeler, qu'en ce qui concerne tout d'abord la politique tarifaire de Royal Canin sur le segment de marché des magasins spécialisés appartenant à une enseigne, il n'est pas contesté qu'entre 2004 et 2008, les conditions tarifaires et commerciales applicables aux magasins spécialisés étaient établies directement par Royal Canin qui préparait un accord-cadre, renégocié annuellement, comprenant le tarif de base ainsi que certaines remises ou ristournes accordées aux centrales d'achat ; que les produits étaient d'abord vendus aux grossistes indépendants puis revendus aux magasins des enseignes, au prix convenu entre Royal Canin et les centrales d'achat des magasins spécialisés et qu'il est établi que les grossistes ne disposaient d'aucune marge de manœuvre sur le plan tarifaire et ne participant pas aux négociations commerciales et tarifaires ; que les grossistes ont tous déclaré se conformer aux tarifs qui leur étaient communiqués par Royal Canin et que les détaillants ont également confirmé se voir appliquer ces mêmes prix par les grossistes ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Royal Canin s'est entendue avec ses grossistes-distributeurs, sur une période comprise entre 2004 et 2008, sur les prix de revente de ses produits destinés aux magasins spécialisés appartenant à une enseigne et que cette pratique, qui n'a pas été contestée par Royal Canin et Mars Incorporated, constitue, pour les raisons rappelées ci-dessus, une violation des articles 101, paragraphe 1, du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce ;

Considérant qu'en ce qui concerne, ensuite, l'interdiction des ventes passives des distributeurs en gros aux distributeurs-revendeurs sur les segments de marché des magasins spécialisés et des éleveurs, il n'est pas contesté que Royal Canin a, entre 2004 et 2008, interdit à ses distributeurs de pratiquer des ventes passives sur le segment de marché des magasins spécialisés et des éleveurs ; que plusieurs détaillants de produits Royal Canin ont ainsi fait état de l'impossibilité de solliciter une livraison auprès d'un grossiste différent de celui qui leur a été préalablement indiqué par le fabricant et que, par ailleurs, un détaillant a rapporté avoir essuyé un refus lorsqu'il a demandé à être livré par des grossistes étrangers ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Royal Canin s'est entendue avec ses distributeurs, entre 2004 et 2008, pour interdire à ces derniers de pratiquer des ventes passives et que cette pratique, qui n'a pas été contestée, constitue, pour les raisons rappelées ci-dessus, une violation des articles 101, paragraphe 1, du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce ;

Considérant qu'en ce qui concerne, enfin, les exclusivités accordées par Royal Canin à ses distributeurs, il n'est pas contesté que Royal Canin a mis en place, entre 2004 et 2008, deux systèmes de distribution distincts et étanches de ses produits haut de gamme en fonction de la catégorie de détaillants concernés ; que les produits destinés à la distribution spécialisée et aux éleveurs étaient distribués exclusivement par les centres de distribution de Royal Canin, indépendants ou non et que les produits destinés aux centrales d'achat des vétérinaires étaient livrés directement par Royal Canin ; que les centres de distribution de Royal Canin ont confirmé ne distribuer les produits de la marque qu'aux magasins spécialisés et aux éleveurs, à l'exclusion des vétérinaires ; qu'il n'est, par ailleurs, pas contesté que cette exclusivité de clientèle constitue une restriction de la concurrence en ce qu'elle tend à cloisonner les marchés en cause pour certaines variétés de produits, les vétérinaires ne pouvant s'adresser qu'à Royal Canin directement et non à ses distributeurs, et ainsi à limiter la concurrence intra-marque entre les différentes formes de distribution ; que, de plus, Royal Canin a mis en place une stratégie de distribution mono-marque pour ses produits, destinée à lui garantir une exclusivité d'achat de la part de ses distributeurs, cette stratégie commerciale s'appuyant d'abord sur la mise en œuvre d'un système incitatif de remises, dont l'effet était renforcé par la multiplicité des références et la saturation des capacités logistiques des grossistes, les contraignant ainsi, de fait, au mono-marquisme ; que l'ensemble des distributeurs entendus a confirmé ne distribuer que des produits Royal Canin ; que, par ailleurs, il n'a pas été contesté que Royal Canin a conféré une exclusivité territoriale de fait à chacune de ses plateformes de distribution, lesquelles opèrent sur des zones géographiques données, composées de plusieurs départements ; que les distributeurs se sont conformés à cette exclusivité n'opérant que dans la zone géographique limitée et que cette exclusivité territoriale a pu contribuer au cloisonnement du marché de gros et affaiblir la concurrence intra-marque, les détaillants ne pouvant faire jouer la concurrence entre des plateformes de distribution situées dans un autre secteur que celui défini par NPPF ;

En ce qui concerne la pratique d'interdiction d'exporter mise en œuvre par Hill's et ses grossistes-vétérinaires :

Considérant que Hill's et Colgate qui, pour leur part, ont contesté les griefs qui leur ont été notifiés, ne critiquent cependant pas formellement la Décision en ce qu'elle a constaté (point 211) que Hill's s'est entendue avec les grossistes-vétérinaires pour interdire les exportations de ses produits hors du territoire national et demandent seulement à la cour, compte tenu du caractère disproportionné et inéquitable de la sanction pécuniaire qui leur a été infligée, de les décharger de toute sanction ou, à tout le moins, de réduire son montant de manière substantielle ;

Que, cependant, que dans les développements de leurs écritures consacrées aux sanctions, les requérantes affirment que l'Autorité n'a pas correctement apprécié la gravité réelle de la pratique en dénaturant la clause incriminée dès lors qu'elle ne stipule aucune interdiction automatique, générale et absolue d'exporter mais prévoit seulement l'accord de Hill's de telle sorte qu'elle ne comporte, tout au plus, qu'une simple restriction aux ventes passives et en aucun cas une interdiction, en précisant, par surcroît, que Hill's n'a pas opposé de refus aux demandes d'exportation formulées en application de cette clause ; qu'ainsi, une sollicitation d'accord préalablement à une vente passive à l'étranger, au demeurant non appliquée, ne peut être considérée comme aussi grave qu'une interdiction pure et simple d'exporter, étant observé que ce sont les pures interdictions d'exportation qui sont, dans la pratique décisionnelle, considérées comme revêtant un caractère certain de gravité ;

Mais considérant qu'il suffit de constater que la clause incriminée figurant dans les conditions générales de vente conclues par Hill's avec les grossistes vétérinaires, applicables à l'ensemble des relations entre Hill's et ses grossistes vétérinaires sur le territoire français, stipulait une interdiction de livrer des produits en dehors du territoire français sans accord préalable du fabricant ; qu'ainsi que l'a exactement rappelé l'Autorité (points 199 à 201 de la Décision), une clause figurant dans un contrat conclu entre un fournisseur et son distributeur, interdisant les exportations, a un objet anticoncurrentiel au sens de l'article L. 420-1 du Code de commerce ; que, dès lors, la clause litigieuse d'interdiction d'exporter avait, compte tenu de son économie et de sa finalité, un objet anticoncurrentiel, et que l'objet anticoncurrentiel de l'accord étant démontré, il n'est pas nécessaire d'établir l'existence des effets qu'il est à même d'engendrer ;

Considérant que ce n'est qu'au surplus que la cour relève que, contrairement à ce qui est soutenu, l'Autorité n'a pas procédé à une dénaturation de la clause litigieuse, dès lors que la circonstance que la clause prévoyait expressément l'obligation pour les distributeurs vétérinaires d'obtenir un accord signé de Hill's préalablement à la livraison des produits de cette dernière à des clients situés hors du territoire national constitue assurément une interdiction d'exporter et que la circonstance que cette interdiction pouvait être levée après obtention de l'accord exprès de Hill's et ne revêtait pas ainsi un caractère absolu ne remet pas en cause sa nature intrinsèque ;

Considérant, enfin, ainsi que l'a justement relevé la Décision (points 202 et 203), que la circonstance que la clause n'a pas reçu application, autrement dit, qu'elle n'aurait pas eu d'effet, n'est pas de nature à remettre en cause cette qualification, à supposer même qu'elle ait été démontrée en l'espèce et que, dès lors, la non-application de la clause doit être prise en compte au titre de la sanction, et non de la qualification des pratiques ;

Sur l'imputabilité des pratiques

Considérant que sous réserve de l'analyse à laquelle il va être procédé des moyens tirés de l'application du communiqué sanctions, la cour renvoie aux développements non contestés de la Décision (points 217 à 232) sur l'imputabilité des pratiques au sociétés NPPF et Nestlé SA et Royal Canin et Mars Incorporated, d'une part, et sur l'imputabilité des pratiques aux sociétés Hill's et Colgate Palmolive, d'autre part ;

SUR LES SANCTIONS

Considérant, à titre liminaire, qu'il est rappelé que, faisant application de la méthode instituée par le communiqué sanctions :

- l'Autorité, compte tenu de son appréciation de la gravité des faits et de l'importance du dommage à l'économie, a retenu, pour déterminer le montant de base de la sanction, une proportion de (5-10 %) de la valeur des ventes pour NPPF et une proportion de (5-10 %) de la valeur des ventes pour Royal Canin alors que pour Hill's, l'Autorité a retenu une proportion de 4 % de la valeur des ventes ;

- l'Autorité, après appréciation de la situation individuelle de NPPF et du groupe auquel elle appartient, a augmenté de 25 % le montant de base de la sanction pécuniaire de NPPF, soit une somme de 23 220 000 euros, somme inférieure au maximum légal applicable compte tenu de la procédure de non-contestation de griefs, puis dans le cadre de cette procédure et au regard des engagements pris, a procédé à une réduction à hauteur de 18 % soit, en définitive, une sanction pécuniaire de 19 040 000 euros infligée conjointement et solidairement à NPPF et à sa société mère ;

- l'Autorité après appréciation de la situation individuelle de Royal Canin et du groupe auquel elle appartient :

* a augmenté de 15 % le montant de base de la sanction pécuniaire, soit une somme de 11 618 220 euros ;

* compte tenu de la circonstance aggravante tenant à l'existence de la réitération, a décidé une majoration de 25 % de la sanction en la portant ainsi à 14 522 775 euros, somme inférieure au maximum légal applicable compte tenu de la procédure de non-contestation des griefs puis, dans le cadre de cette procédure et au regard des engagements pris, a procédé à une réduction à hauteur de 20 % soit, en définitive, une sanction pécuniaire de 11 618 000 euros infligée conjointement et solidairement à Royal Canin et à sa société mère ;

- l'Autorité, après appréciation de la situation individuelle de Hill's et du groupe auquel elle appartient, a augmenté de 15 % le montant de base de la sanction pécuniaire de Hill's, soit une somme de 4 664 000 euros, somme inférieure au maximum légal, qui a, en définitive, été infligée conjointement et solidairement à Hill's et à sa société mère ;

Considérant que NPPF et Nestlé sollicitent, à titre subsidiaire une réduction significative du montant de la sanction pécuniaire qui leur aurait été infligée dans des conditions portant atteinte au principe de proportionnalité des peines ainsi qu'aux principes fondamentaux de légalité des délits et des peines et d'égalité de traitement ;

Qu'elles affirment que le montant de base de la sanction pécuniaire retenu par la décision enfreint le principe de proportionnalité des peines, dès lors que la valeur des ventes réalisées avec les enseignes, qui représentait 76 % du chiffre d'affaires de la division spécialiste de NPPF en 2010, aurait dû être déduite de l'assiette de la sanction pécuniaire ; que les requérantes font ainsi spécialement valoir qu'alors que la Décision constate (point 261) que la concurrence intra-marque a été totalement préservée à l'égard des enseignes et que les pratiques en cause n'ont eu aucun impact sur ces dernières, l'assiette retenue par la Décision ne tient cependant pas compte de l'ampleur économique de l'infraction en intégrant la valeur des ventes réalisées avec les enseignes, ce d'autant que celles-ci, qui disposaient d'un important pouvoir de négociation, sont à l'origine des pratiques en cause et alors que le système de distribution mis en place répondait précisément à une demande de leur part ainsi que de leurs centrales d'achat ; que, précisément, afin d'obtenir ce résultat, les enseignes, mettant en œuvre leur pouvoir de négociation afin de chercher à obtenir les meilleures conditions auprès des fournisseurs, d'une part, utilisaient la concurrence inter-marques en mettant les fournisseurs en concurrence entre eux afin d'obtenir les meilleures conditions commerciales en contrepartie de leur référencement et, d'autre part, utilisaient également la concurrence intra-marque en vue d'obtenir les meilleures conditions commerciales sur les produits d'un fournisseur donné ; que les enseignes disposaient ainsi d'un levier de négociation supplémentaire avec les marques de distributeurs qui leur permettait de se passer plus facilement des marques nationales et d'arguer de la réduction d'espace des linéaires pour réclamer des conditions toujours plus favorables de la part des fournisseurs ; qu'en outre, la forte concurrence inter-marques au niveau des enseignes, qui représentaient la très large majorité des détaillants a nécessairement eu un effet d'entraînement sur les autres détaillants indépendants, tenus de s'adapter à la pression concurrentielle des enseignes ; que, dès lors, les prix au niveau du consommateur ont nécessairement bénéficié de cette concurrence entre détaillants et, partant des meilleures conditions octroyées aux enseignes du fait de la négociation centralisée avec NPPF ;

Que les requérantes reprochent également à l'Autorité d'avoir surestimé la gravité des pratiques en se référant à des affaires concernant des pratiques plus graves avec, en particulier, des mesures de coercition ou de police de prix qui empêchaient les distributeurs de s'écarter des prix imposés par les fournisseurs au stade de la revente au détail et affectaient ainsi nécessairement et directement le consommateur final ; que NPPF et Nestlé affirment, qu'à l'opposé, la Décision n'a pas pris en considération des éléments de nature à atténuer, voire neutraliser, la prétendue gravité des pratiques, notamment le fait, d'une part, que les pratiques, qui n'étaient pas secrètes, ont été mises en œuvre au stade de la distribution de gros et non du commerce de détail et n'ont pas ainsi eu d'impact direct sur les consommateurs et, d'autre part, que le pouvoir de négociation avéré des enseignes confirme si besoin est l'absence d'impact sur le consommateur final ;

Que NPPF et Nestlé font également grief à la Décision, d'une part, d'avoir surestimé l'importance du dommage causé à l'économie en procédant à une analyse par trop sommaire, imprécise et non circonstanciée, par surcroît entachée d'un grand nombre d'erreurs ; qu'elles font ainsi valoir, à titre liminaire, qu'ayant indiqué avoir procédé à une appréciation séparée de l'importance du dommage causé à l'économie par chacune des pratiques, dans la mesure où elle examinait dans une seule et même décision des pratiques distinctes, mises en œuvre par des opérateurs différents, son "individualisation" de l'appréciation du dommage à l'économie n'en reste pas moins discutable dès lors qu'elle aboutit à une différence notable de traitement avec Hill's et Colgate, en particulier au regard du pourcentage de la valeur des ventes retenu à leur endroit, inférieur à celui de 8 % appliqué aux requérantes, alors que les pratiques reprochées étaient, sinon identiques, à tout le moins similaires ;

Que, selon les requérantes, l'analyse conduite par la Décision pour parvenir à la conclusion de l'existence d'un dommage à l'économie "certain" du fait de la réduction de la concurrence intra-marque, est erronée ;

Qu'elles font observer, d'une part, qu'en application de l'article 3 du règlement de la Commission n° 330-2010 du 20 avril 2010, concernant l'application de l'article 101 § 3 du TFUE à des catégories d'accords verticaux, des pratiques d'exclusivité territoriale, d'exclusivité de clientèle et de mono-marquisme peuvent bénéficier d'une exemption par catégorie et partant, ne peuvent être sanctionnées, si la part de marché concernée est inférieure à 30 %, ce qui est le cas en l'espèce de NPPF et Nestlé sur les marchés concernés (27 % pour le chien et 10 % pour le chat en 2008) et, d'autre part, que les "restrictions caractérisées" au sens du règlement précité, comme l'existence de prix de revente imposés, peuvent bénéficier, le cas échéant d'une exemption individuelle sur le fondement de l'article 101 § 3 TFUE, en raison notamment des efficiences économiques en résultant ;

Que concernant spécialement la réduction de la concurrence intra-marque mise en exergue par la Décision, les requérantes affirment :

- qu'il n'est pas démontré qu'une mise en concurrence des grossistes aurait permis aux détaillants d'obtenir de meilleurs prix, cette appréciation de l'Autorité étant en contradiction non seulement avec sa pratique décisionnelle, mais encore avec ses propres constatations sur le fait que l'importance des coûts de transport et de logistique comparés aux taux de marge moyen des grossistes-distributeurs a pu décourager la livraison des clients situés hors de leur zone de chalandise, ce qui a limité les gains potentiels qu'aurait pu introduire une mise en concurrence des grossistes, ou encore sur le fait que le pouvoir de négociation des enseignes a été totalement préservé

- qu'il n'est pas non plus établi que la mise en concurrence des plateformes a été particulièrement obérée en raison de la mise en place d'exclusivités territoriales, conjuguées à des interdictions de ventes passives : non seulement la Décision est affectée d'une contradiction sur ce point, lorsqu'elle mentionne (point 252) que les plateformes "ont pu ponctuellement satisfaire la demande de détaillants situés en dehors de leur zone de compétence" ou encore (point 260) que les gains potentiels d'une mise en concurrence des plateformes se seraient heurtés à l'importance des coûts logistiques et de transport pour les plateformes limitant d'autant toute concurrence effective entre elles, mais encore que rien ne démontre que NPPF ait donné des instructions à ce sujet ou encore qu'elle ait exercé un contrôle à l'égard de ses plateformes ;

- que l'affirmation selon laquelle les exclusivités de clientèle auraient empêché les vétérinaires de s'approvisionner auprès des grossistes et de bénéficier des meilleures conditions consenties par les fabricants méconnaît, non seulement, la pratique décisionnelle de l'Autorité qui reconnaît toute possibilité à un fournisseur d'organiser son circuit de distribution comme il l'entend mais également ignore le fait que les vétérinaires n'avaient aucun intérêt à négocier avec les plateformes qui ne pouvaient couvrir qu'une partie de leur demande - produits pour lesquels aucun prescription préalable n'est requise - et qui, par conséquent n'étaient pas en mesure d'offrir des conditions commerciales aussi avantageuses que NPPF ;

- que les appréciations de l'Autorité selon lesquelles les détaillants n'ont pas été à même de s'approvisionner auprès d'un même grossiste pour des produits de marques différentes, non seulement sont sans rapport avec la réduction de concurrence intra-marque et ne démontrent pas en quoi cet élément aurait contribué à une aggravation du dommage à l'économie, en empêchant d.es prix plus bas, mais encore sont dépourvues de pertinence, dès lors que les plateformes, si elles avaient été multi-produits, auraient alors dû étendre leur capacité de stockage et leur flotte de camions pour continuer de servir les mêmes volumes à leurs clients tout en augmentant le nombre de marques et de références distribuées, soit une réalisation d'investissements importants à la rentabilité incertaine rendant illusoire l'obtention de prix plus bas ;

Que les requérantes soutiennent encore que la Décision ne pouvait pas non plus se fonder uniquement sur la réduction de concurrence intra-marque pour démontrer l'existence d'un dommage à l'économie en soulignant :

- à titre liminaire, que la réduction de la concurrence intra-marque est en tout état de cause très limitée, puisque circonscrite au marché de gros et non au commerce de détail et que c'est donc à tort que la Décision ne prend pas en compte le maintien d'une concurrence inter-marques dans son évaluation du dommage à l'économie ;

- qu'alors que la Commission - § 102 des lignes directrices sur les restrictions verticales du 19 mai 2010 - considère, qu'en cas de restrictions verticales, l'intensité de la concurrence inter-marques est l'élément primordial pour apprécier l'importance du dommage à l'économie de nombreux éléments du dossier, qui n'ont pas été repris dans la Décision, démontrent la vivacité de la concurrence inter-marques sur les marchés en cause :

* les enseignes ont pu faire jouer pleinement la concurrence inter-marques et n'ont pas été affectées par les pratiques reprochées ;

* la constante évolution des parts de marché des parties sur les marchés pertinents entre 2004 et 2008 qui se manifeste par le fait que les parts de marché Royal Canin se sont érodées au profit notamment de Hill's et des marques distributeurs ;

* l'arrivée de nouveaux acteurs qui viennent intensifier la concurrence et dynamiser le marché, entraînant ainsi un renforcement de la pression concurrentielle avec l'entrée de nouveaux concurrents et notamment de marques nationales ou encore de marques propres développées par des distributeurs ;

Que les requérantes critiquent aussi les appréciations de l'Autorité portant sur le fait qu'en raison de "l'attachement affectif" que des produits en cause peuvent susciter auprès des consommateurs finals, la fidélité aux marques tend à rendre la demande plus faiblement élastique au prix en amplifiant ainsi le dommage à l'économie ; que NPPF et Nestlé soutiennent que l'analyse de l'Autorité sur ce point :

- est contredite par l'évolution récente du marché, caractérisée par une progression forte et rapide des marques distributeurs, avec l'intensification déjà évoquée de la concurrence inter-marques ;

- à tout le moins, n'est pas confirmée par les décisions qui leur sont opposées qui concernent des pratiques horizontales sans rapport avec les faits de l'espèce et, surtout, intervenues au stade du consommateur final ; qu'à cet égard, les requérantes font valoir que l'éventuelle constatation d'une fidélité des consommateurs finals à une marque, n'a, en aucun cas, automatiquement un impact sur l'élasticité de la demande des grossistes vis-à-vis de leurs fabricants et que, plus généralement, l'éventuelle fidélité des consommateurs à la marque ne peut être considérée comme la conséquence des pratiques en cause, contrairement à ce que laisse entendre la Décision ; que, dès lors, quand bien même il y aurait une concurrence très vive, une éventuelle fidélité à la marque viendrait remettre en cause la seule concurrence par les prix ;

Que NPPF et Nestlé critiquent enfin les appréciations de la Décision sur l'importance du dommage à l'économie en ce qu'elle leur reproche d'avoir renforcé les barrières à l'entrée déjà existantes sur le marché pertinent en question par le biais des clauses de mono-marquisme et qu'elle estime, en conséquence, que les nouveaux entrants potentiels seraient contraints d'internaliser la fonction de distribution, ce qui nécessiterait des ressources particulièrement élevées ; qu'à l'opposé, selon les requérantes, cette assertion est démentie :

- par la vitalité précédemment démontrée de la concurrence sur le marché pertinent ;

- par le fait que d'autres grossistes pourraient distribuer des aliments pour chiens et chats à de nouveaux entrants : à cet égard, les propres grossistes de NPPF auraient, pour certains, une activité diversifiée et non limitée à la distribution des aliments pour chiens et chats, si bien que d'autres grossistes polyvalents pourraient distribuer des produits concurrents pour un coût additionnel minime ;

- par la possible mise en place d'un système de vente en ligne ;

- par l'approvisionnement direct des enseignes ;

Que les requérantes reprochent aussi à la Décision de ne pas avoir pris en compte des gains d'efficience qui auraient pourtant dû conduire à constater l'absence de dommage à l'économie et de n'avoir pas non plus répondu aux arguments développés dans les deux études économiques CRA fournies à l'Autorité - et ce alors même que le paragraphe 129 du communiqué Sanctions lui impose de répondre aux études qui lui sont soumises - dont il ressort une mise en valeur d'une pluralité de gains d'efficacité engendrés par le système de distribution mis en place soit :

- des coûts de transport et de logistique minimisés grâce à des économies d'échelle résultant de la livraison des produits concentrés sur une vingtaine de plateformes et non sur l'ensemble des points de vente ;

- une uniformisation des coûts et, partant, des coûts de livraison plus bas quelle que soit la taille des points de vente

- une optimisation de la présence des produits sur le terrain et une meilleure promotion de ces derniers ;

- une innovation permanente permettant aux consommateurs de bénéficier de produits en constante amélioration ;

Que NPPF et Nestlé soulignent, enfin, qu'au regard de la pratique décisionnelle de l'Autorité, qui concerne des pratiques pourtant plus graves, le dommage à l'économie n'est, ni certain, ni modéré, mais, tout au plus, extrêmement faible ;

Que, dans ces conditions, les requérantes affirment que la proportion de la valeur des ventes de 8 % retenue à leur encontre est particulièrement surestimée :

- en ce que la Décision leur a appliqué sans justification objective un traitement différent de celui accordé à Hill's et Colgate, pourtant dans une situation similaire, en violation du principe d'égalité de traitement consacré par la jurisprudence communautaire ainsi que par l'article premier de la DDHC, mais également par le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et l'article premier de la Constitution du 4 octobre 1958, qui pose un principe de non-discrimination ; qu'à supposer que l'Autorité ait eu des raisons objectives de retenir un tel traitement différencié, il n'en est cependant nullement fait mention dans la Décision, en violation, à la fois, de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, de l'article L. 464-2, 1, alinéa 3 du Code de commerce et du droit à un procès équitable garanti par l'article 6 § I de la CESDH ; qu'au surplus, en ce qui concerne Royal Canin, les requérantes déclarent "s'interroger " sur les raisons d'une identité de pourcentage de la valeur des ventes retenu, alors que Royal Canin serait en situation de réitération et qu'elle détiendrait une position dominante sur le marché (40-45 % en 2008), comparativement à NPPF sur la même période (27 %) ;

- en raison de la prépondérance du critère de la gravité sur l'importance du dommage causé à l'économie consacrée par cette proportion, une telle hiérarchie n'étant, ni permise par le Code de commerce, ni même par le communiqué sanctions ;

- au regard de la pratique décisionnelle de l'Autorité, alors que les pratiques verticales qui leur sont reprochées, qui ne doivent pas être regardées avec autant de sévérité que les ententes horizontales, n'ont, par surcroît, donné lieu qu'à une mise en œuvre limitée ;

Que les requérantes critiquent encore les conditions dans lesquelles l'Autorité a pris en compte une seconde fois, postérieurement à l'analyse de l'importance du dommage causé à l'économie, la durée des pratiques (points 267 et suivants de la Décision) qui est appréhendée sans base légale, comme critère autonome, ce qui l'a conduit à appliquer de manière "mathématique" un coefficient multiplicateur de trois et à majorer ainsi de manière injustifiée la sanction infligée, en violation du principe de légalité des délits et des peines ainsi que du principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère ;

Que, sur l'individualisation des sanctions, NPPF et Nestlé font valoir que l'Autorité a, au terme d'une motivation défaillante, exclusivement retenu des éléments en leur défaveur, en procédant à une majoration injustifiée de leur sanction en violation des principes de proportionnalité et de légalité des peines des peines ainsi que des principes de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère et d'égalité de traitement ;

Que, selon les requérantes, tel est le cas, non seulement, de la majoration de 25 % du montant de base au titre de l'appartenance de NPPF au groupe Nestlé qui est appliquée, sans fondement légal, en vertu du seul communiqué sanctions, mais encore de la prise en compte du critère de l'appartenance à un groupe à deux reprises - au niveau du calcul de la valeur des ventes et ensuite comme critère autonome au titre de l'individualisation de la sanction - en violation du principe de proportionnalité des peines ; qu'elles opposent à l'Autorité la contradiction apportée à sa propre pratique décisionnelle - décision n° 11-D-17 du 8 septembre 2011 - dès lors qu'elle a pris en compte la taille, la puissance économique et de NPPF et de Nestlé au moment du calcul de la valeur des ventes alors que, dans la décision précitée (point 662), après avoir indiqué que le poids de chaque entreprise était d'ores et déjà pris en compte au stade de la détermination du montant de base, l'Autorité, a refusé de prendre en compte le poids d'une entreprise au titre de la situation individuelle ;

Que les entreprises requérantes soulignent aussi que le critère de l'appartenance à un groupe a été appliqué en violation du principe d'égalité de traitement, dès lors qu'il conduit à une différence de traitement injustifiée entre, d'une part, les groupes et, d'autre part, les sociétés individuelles et ce alors même que les pratiques sanctionnées sont comparables, que le profit qui en est tiré est le même, que les entreprises appartiennent ou non à un groupe et également que le poids économique des entreprises concernées est déjà pris en considération au stade de la valeur des ventes et du calcul du plafond de la sanction ; qu'elles affirment aussi que les entreprises appartenant à un groupe n'ont pas, nécessairement une taille, une puissance économique et des ressources plus importantes, en particulier lorsque la structure du groupe est décentralisée et, qu'au surplus, aucune obligation d'exemplarité ne pèse sur les entreprises appartenant à un groupe, l'effet sur le marché n'étant pas plus important quand les pratiques sont le fait d'une filiale du groupe ; que NPPF et Nestlé affirment encore que L. 464-2 du Code de commerce ne prévoit pas l'application d'un traitement différencié aux groupes ou aux filiales de groupes ;

Qu'elles précisent qu'à supposer licite une majoration, celle-ci a cependant été appliquée de manière discriminatoire et en violation du principe d'égalité de traitement, au regard du taux, identique de majoration retenu à l'encontre de Mars et Colgate et du taux de majoration de 15 % appliqué à Royal Canin et Hill's ; qu'en effet, selon les requérantes, il est déjà tenu compte du chiffre d'affaires mondial réalisé par les groupes au stade du calcul du plafond de la sanction et qu'au surplus, tel qu'il est appliqué, ce critère ne reflète pas la position sur le marché des opérateurs concernés par les pratiques, en particulier de Royal Canin, qui occupe une place de leader ; que les requérantes soulignent qu'en tout état de cause, aucune justification objective ne permet de traiter les entreprises poursuivies de manière différente alors que, selon les termes mêmes de la Décision, les trois groupes incriminés étaient dans une situation économique comparable, étant tous trois de "dimension internationale", commercialisant "des marques à très forte notoriété" et disposant de "ressources financières globales considérables" ; que la méthode utilisée dans la Décision, qui consiste à introduire un barème selon la taille des groupes ne trouve de fondement, ni dans le communiqué sanctions, qui ne définit pas ce qu'est un groupe ni, partant, la taille critique à partir de laquelle un groupe peut se voir appliquer un taux de majoration spécifique de la sanction ; qu'enfin, les requérantes précisent que l'appartenance de NPPF au groupe Nestlé n'a eu, en soi, aucune incidence sur la mise en œuvre des pratiques ;

Que NPPF et Nestlé font encore grief à la Décision d'avoir omis des circonstances atténuantes qui auraient dû être de nature à minorer la sanction qui leur a été infligée et, en particulier :

- leur coopération immédiate et de bonne foi, visée par le point 44 du communiqué sanctions, alors que, dès le mois d'octobre 2008, aussitôt après la première, mesure d'instruction, elles ont proposé des engagements portant sur la réorganisation du système de distribution auxquels l'Autorité a cru devoir ne pas donner suite, alors pourtant que le rapport des services d'instruction avait considéré comme une circonstance atténuante au profit de Royal Canin le fait qu'il avait modifié son système de distribution après sa première condamnation intervenue en 2006, circonstance qui est à. l'origine d'un traitement inéquitable et injustifié entre les sociétés incriminées ;

- la position des requérantes sur le marché en cause, dès lors que, sur l'ensemble de la période des faits, les parts de marché de NPPF sur les marchés en cause (aliments secs pour chiens et aliments secs pour chats) ne l'avaient jamais placée en position de leader ;

Que les requérantes reprochent enfin à la Décision d'avoir fixé un taux de réfaction insuffisant au titre de la non-contestation des griefs, alors que son engagement structurel consistant à" internaliser" la fonction commerciale assumée auparavant par les plateformes aurait dû être pris en compte pour minorer ce taux, conformément aux dispositions du communiqué sur la non-contestation des griefs auxquelles l'Autorité a dérogé, sans s'attacher à vérifier si l'engagement était de nature à mettre fin aux pratiques et sans justifier pour autant, comme elle y était tenue, de circonstances particulières lui permettant de s'en écarter ;

Que NPPF et Nestlé critiquent aussi la Décision en ce qu'elle a procédé à une insuffisante valorisation des engagements comportementaux sur lesquels elle a porté une appréciation erronée, le programme de conformité satisfaisant pleinement à tous les critères dégagés, dans le document-cadre du 10 février 2012, et alors que la pratique décisionnelle de l'Autorité démontre qu'elle a déjà valorisé des engagements de même nature mais moins consistants que les leurs qui avaient pour objet de prévoir un ensemble de mesures de responsabilisation des cadres et des agents ; que NPPF et Nestlé font aussi grief à la Décision de ne pas avoir précisé en quoi les mesures mises en place par Royal Canin dans son programme de conformité différent des leurs, ce qui prive la cour, placée dans l'ignorance des raisons pour lesquelles les engagements des entreprises poursuivies ont fait l'objet d'un traitement différencié, de la possibilité d'exercer valablement son contrôle, ce qui, par surcroît, porte atteinte à leurs droits de la défense ; que les requérantes font enfin grief à l'Autorité d'avoir relevé que le dispositif d'alerte professionnelle serait peu crédible au motif que sa mise en place serait conditionnée à l'obtention des autorisations requises dans un délai de 6 mois à compter de la publication de la Décision, alors que, ainsi que cela ressort pourtant de sa pratique décisionnelle, l'Autorité a eu l'occasion de valider sans réserve cette modalité de mise en œuvre des dispositifs d'alerte ;

Considérant que Royal Canin et Mars prient pour leur part la cour d'annuler ou, subsidiairement, de réformer la décision déférée en réduisant très substantiellement le montant des sanctions qui leur ont été infligées en raison de leur caractère disproportionné ;

Que les requérantes font ainsi grief à la Décision d'avoir procédé à une appréciation erronée des éléments légaux du calcul de la sanction, en retenant une proportion de 8 % de la valeur des ventes excessive au regard de la gravité limitée des faits ; qu'à cet égard, elles reprochent à l'Autorité de n'avoir pas procédé à une analyse concrète, adaptée et individualisée, du degré de gravité des pratiques retenu par la Décision, qui doit être relativisé ; qu'en ce qui concerne spécialement la pratique reprochée à Royal Canin au titre de l'imposition aux centres de distribution d'un prix de revente à l'égard des magasins sous enseigne, les requérantes font observer que cette pratique qui, aux yeux de l'Autorité, constitue l'une des pratiques anticoncurrentielles les plus graves, n'est cependant intervenue qu'au niveau du commerce de gros et non du commerce de détail, à la différence des pratiques citées dans la Décision ; que les consommateurs n'ont pas ainsi été privés du bénéfice d'un fonctionnement concurrentiel du marché de détail, alors par surcroît que l'Autorité a reconnu l'incidence négligeable de la pratique au niveau des prix de détail et qu'elle n'a tiré aucune conclusion quant au fait que la pratique a été limitée aux magasins sous enseigne et, par surcroît, imposée par leurs centrales d'achat ;

Que, selon les requérantes, si la Décision relève que les magasins sous enseigne ont pu exercer, en matière tarifaire, un véritable pouvoir de négociation pendant la durée des pratiques du fait de la négociation directe entreprise avec les fournisseurs, il n'en demeure pas moins que la raison d'être des centrales repose principalement sur leur capacité à exiger une négociation unique et centralisée avec chacun des fournisseurs référencés afin de bénéficier de conditions d'achat optimisées ; que c'est cette circonstance qui est à l'origine de la pratique de prix reprochée aux requérantes, dans la mesure où cette négociation nationale avait pour objet de fixer les conditions de vente applicables aux détaillants affiliés aux différentes centrales qu'alors que cette négociation unique et centralisée pour chaque enseigne a constitué une réelle exigence de celles-ci et qu'un refus était susceptible de donner lieu à des représailles au niveau des référencements, Royal Canin s'est chargée de la négociation nationale afin de répondre à cette exigence des centrales et a communiqué à l'ensemble de ses centres de distribution les prix ainsi négociés ; que, dès lors, il est illusoire d'envisager que, lors d'une seconde négociation avec le distributeur, la centrale cherche à obtenir un prix inférieur alors que sa préférence va, à l'évidence, à l'obtention au plan national, en une seule fois, du meilleur prix pour ses affiliés ; que, dans ces conditions, selon les requérantes, la pratique de négociation centralisée et, partant de prix imposés au niveau du gros pour les seules enseignes ne résultait nullement de l'intention de Royal Canin de s'affranchir des règles de concurrence ;

Que, sur l'interdiction des ventes passives, en relevant que cette interdiction était considérée, de manière constante, comme revêtant un caractère certain de gravité, en particulier en ce que cette interdiction tend à "compartimenter les marchés", l'Autorité n'a pas pris en compte les éléments de faits propres à l'espèce pourtant indispensables à une analyse concrète de la gravité de cette pratique qui sont précisément de nature à l'atténuer ; qu'il s'agit, en particulier, du fait que seuls deux cas d'interdiction de ventes passives ont été rapportés par l'ensemble des points de vente et des centrales interrogés :

- l'un, qui a émané d'un centre de distribution intégré de Royal Canin en Belgique, ne peut donc caractériser la pratique ;

- pour l'autre cas, il ressort du dossier d'instruction que, en dépit de cette interdiction, les centres de distribution ont, pour la plupart, déclaré qu'ils étaient prêts à satisfaire une demande d'un magasin situé en dehors de leur zone d'influence ;

Que, s'agissant, des différents types d'exclusivités, Royal Canin et Mars reprochent également à l'Autorité de s'être abstenue de relever les éléments de fait essentiels qui auraient dû lui permettre de procéder à une analyse concrète, et donc individualisée de la gravité des pratiques ; qu'elles font ainsi valoir :

- que les différentes exclusivités n'étaient pas stipulées dans les divers documents contractuels émanant de Royal Canin, de telle sorte que les centres de distribution étaient libres de ne plus distribuer les produits Royal Canin et d'opter pour la distribution des produits d'un autre fabricant qui leur aurait offert des conditions plus avantageuses ;

- que ces exclusivités étaient caractérisées par une réelle souplesse, dès lors que de nombreux centres de distribution ont fait état de l'existence de ventes en dehors de leurs zones de chalandise sans subir de mesures coercitives ou de rétorsion ;

- que ces exclusivités se situaient au niveau de la distribution de gros et non du marché de détail, de sorte que les concurrences intra-marques et inter-marques se sont pleinement exercées au niveau de ce marché ;

- qu'il s'agissait d'exclusivités ayant généré des gains d'efficacité importants qui auraient dû être pris en considération dans l'appréciation de la gravité de cette pratique ;

Qu'en ce qui concerne le dommage à l'économie résultant des pratiques mises en œuvre par Royal Canin, les requérantes affirment qu'il n'est, tout au plus, que très faible, en reprochant à l'Autorité :

- d'avoir procédé à une analyse commune concernant les différentes entreprises mises en cause, sans tirer de conclusions à partir des différences constatées entre les entreprises ;

- de ne pas s'être prononcée sur les gains d'efficacité pourtant démontrés par les requérantes ;

- de s'être abstenue de répondre à trois études économiques réalisées par RBB Economies qui lui ont été soumises au cours de l'instruction et qui ont été également présentées oralement lors de la séance du 16 novembre 2011, études qui ont permis de conclure, ainsi que l'a d'ailleurs fait le rapporteur général adjoint lui-même au cours de la séance du 16 novembre, à l'existence d'un dommage économique très faible ;

Que les requérantes affirment que, contrairement à ce que retient la Décision, les pratiques mises en œuvre par Royal Canin n'ont pas pu réduire sensiblement la concurrence intra-marque (point 259 de la Décision) qui a été faiblement affectée au niveau du commerce de gros, ce d'autant qu'il existe une forte concurrence inter-marques sur le marché de la distribution spécialisée, aussi bien au niveau du commerce gros qu'au niveau du commerce de détail ; qu'en effet, l'Autorité, qui considère elle-même que l'importance des coûts de transport et de logistiques, comparée aux taux de marge moyen des grossistes-distributeurs, a pu décourager la livraison à des clients situés en dehors de leur zone de chalandise, en déduit également que ceci a limité les gains potentiels qu'aurait pu produire une mise en concurrence des grossistes alors, qu'en réalité, les gains potentiels résultant d'une mise en concurrence entre les centres de distribution ont été extrêmement faibles et, en tout état de cause, circonscrits à un nombre très limité de clients ; que, s'agissant de l'imposition aux centres de distribution des prix de revente aux magasins sous enseigne, les requérantes font observer que si l'Autorité relève que les magasins sous enseigne ont pu exercer en matière tarifaire, un véritable pouvoir de négociation pendant la durée des pratiques du fait de leur négociation directe avec les fournisseurs, elle en tire paradoxalement la conclusion que les pratiques de prix imposés mises en œuvre par Royal Canin et ses grossistes distributeurs n'ont pas conduit à une uniformisation des prix pratiqués à l'égard des distributeurs de détail, conclusion très incomplète, dès lors que cette pratique n'a pas conduit à l'uniformisation des prix de revente au détaillants et par voie de conséquence aux consommateurs et, qu'en outre, elle n'a provoqué aucun effet inflationniste ; qu'en effet, la raison d'être des centrales est d'organiser des négociations commerciales uniques et plus efficaces avec chaque fournisseur et que cette centralisation permet d'obtenir des conditions commerciales optimales, en optimisant et en renforçant leur pouvoir de négociation, en réduisant les coûts de transaction des centrales d'achat qui seraient supérieurs si chacun des magasins sous enseigne, voire la centrale elle-même, devaient négocier séparément avec chacun des centres de distribution et, enfin, en coordonnant les activités promotionnelles de leur réseau à une échelle nationale, avec une planification de la stratégie marketing à long terme, rendues plus efficaces par une négociation centralisée avec Royal Canin ;

Que, selon les requérantes, l'absence d'exclusivité territoriale des centres de distribution, n'aurait pas pour autant contribué à renforcer de manière significative la concurrence intra-marque, dès lors que l'exclusivité territoriale n'a pu affecter qu'un petit nombre de clients et n'a pas pu avoir un effet sensible sur les prix ; qu'à cet égard, les études RBB Economics qui ont été produites démontrent que les clients auraient difficilement pu obtenir de meilleurs prix en faisant jouer la concurrence intra-marque entre les différents centres de distribution, dans la mesure où ces centres de distribution auraient, dans ce cas, dû supporter des coûts logistiques plus importants, qui auraient encore réduit leur faible marge, évaluée à 2 % ; que seuls les clients établis à la frontière des zones de chalandise étaient susceptibles de profiter d'une éventuelle concurrence intra-marque, mais à la condition qu'au moins un des centres de distribution situés à ces frontières soit indépendant ; qu'en effet, il ne pouvait pas y avoir de concurrence intra-marque au niveau des zones frontalières communes à deux centres de distribution intégrés dans la mesure où ces derniers n'avaient aucune raison de se faire concurrence entre eux ; qu'en outre, les magasins sous enseigne n'auraient pas intérêt à s'approvisionner auprès d'un autre centre de distribution dans la mesure où il bénéficient des mêmes tarifs à l'intérieur du territoire national, quel que soit le centre de distribution auquel ils s'adressent, du fait de la négociation nationale ; que, par ailleurs, ils n'auraient pas d'intérêt à s'approvisionner à l'étranger car la négociation nationale reposerait sur une massification de l'ensemble des achats des magasins situés sur le territoire national ;

Que, sur l'exclusivité de clientèle, les requérantes affirment que les centrales vétérinaires n'ont eu aucun intérêt à s'approvisionner auprès des centres de distribution de Royal Canin, dans la mesure où elles se situaient au même niveau de la chaîne de distribution que ces derniers et que les vétérinaires n'auraient pas non plus eu intérêt à arbitrer entre les différents centres de distribution de Royal Canin et les centrales vétérinaires ; que, par surcroît, il ne s'agit pas de commerçants mais de professionnels de la santé pour qui la vente d'aliments pour animaux ne représente qu'une part minoritaire de leur activité et, qu'en outre, parfaitement approvisionnés par les centrales, ils n'ont aucune raison de s'approvisionner ailleurs ;

Que les requérantes prétendent aussi qu'une concurrence intra-marque s'est pleinement exercée au stade du commerce de détail, constat que l'Autorité, qui relève que les différentes pratiques anticoncurrentielles mises en œuvre par les entreprises en cause ont eu pour cadre le stade de la revente en gros, s'est pourtant abstenue d'effectuer, de telle sorte que les consommateurs ont pu arbitrer entre les différentes enseignes, mais également entre les enseignes elles magasins indépendants ; qu'ainsi, en présence d'une concurrence intra-marques, toute restriction de la concurrence intra-marque au stade du gros n'a pu avoir que des effets très limités et qu'en relevant que les pratiques mises en œuvre sur le marché amont de l'approvisionnement des grossistes n'ont pas empêché une concurrence inter-marques par la variété et par les prix de s'exercer au niveau des détaillants, le constat de l'Autorité est incomplet et ne tient pas compte de l'existence d'une vive concurrence inter-marques tant au niveau du commerce de gros que de détail ; qu'au-delà, l'évolution des parts de marché de Royal Canin et de ses concurrents est cohérente avec la présence d'une vive concurrence inter-marques qui s'est également pleinement exercée au niveau du commerce de détail, l'ensemble des magasins et la très grande majorité des vétérinaires vendant plusieurs marques d'aliments secs pour chiens et chats, étant par surcroît observé qu'il résulte non seulement de la théorie économique, mais également des lignes directrices de la Commission européenne que les restrictions verticales n'ont généralement pas d'effets anticoncurrentiels significatifs lorsque la concurrence inter-marques est vigoureuse ;

Que Royal Canin et Mars reprochent aussi à l'Autorité d'avoir omis de répondre à leurs arguments tirés de l'existence de gains d'efficacité notables découlant des pratiques d'exclusivité territoriale qui, d'une part, ont permis d'augmenter l'efficacité de la logistique en termes de coûts de transport, de délais de livraison et de nombre de magasins desservis et, d'autre part, ont entraîné l'élimination des risques de parasitisme, ce qui a permis d'améliorer la formation des vendeurs attachés aux magasins, d'obtenir un retour d'information permettant d'améliorer les produits et d'intensifier la concurrence inter-marques par une réduction des coûts de promotions et de marketing ;

Que la pratique d'imposition des prix de revente et, plus généralement, la négociation nationale avec les centrales auxquelles les magasins sous enseigne sont affiliés ont notamment permis d'augmenter l'efficacité des activités promotionnelles et de réduire les coûts administratifs liés aux négociations annuelles ainsi que d'éviter les coûts liés au référencement et à l'achat des produits au niveau régional ;

Que Royal Canin et Mars ajoutent que la fidélité des consommateurs finals à la marque résultant de leur "attachement affectif" à l'animal mis en avant par la Décision, non seulement n'est pas démontrée, mais est même contredite par la "réalité du marché", dès lors que les consommateurs du circuit spécialisé recherchent avant tout la meilleure qualité d'aliments pour leurs animaux et que, s'agissant de consommateurs exigeants, ils sont prêts à changer de marque d'alimentation pour leurs animaux lorsqu'ils jugent la qualité des produits qu'ils achètent peu satisfaisante ; que confirment en particulier un tel constat :

- l'évolution des parts de marché sur la période 2004-2008 démontrant que nombre de consommateurs ont reporté leur demande sur les produits NPPF ;

- le fait que l'Autorité a elle-même reconnu (au point 261) qu'il existe une concurrence inter-marques caractérisée par la variété et parles prix ;

- le fait que certains grossistes distributeurs et détaillants auraient relevé le défaut de fidélité, sans que la Décision n'y fasse écho ;

Que les requérantes soutiennent que l'Autorité, qui opère une confusion entre les notions distinctes d'élasticité au prix de la marque et d'élasticité au prix de l'ensemble du marché ne démontre pas en quoi ce comportement particulier du consommateur contribuerait à l'aggravation du dommage à l'économie ; qu'en effet, la fidélité des consommateurs à une marque, lorsqu'elle est démontrée, se traduit par une élasticité propre à la marque qui permet au fabricant de déterminer son niveau de prix en situation de concurrence et, qu'à l'inverse, la fidélité des consommateurs à un marché se traduit par une élasticité aux prix de l'ensemble du marché ; que, dès lors, lorsqu'il existe un attachement au marché, la mise en œuvre d'une pratique anticoncurrentielle et notamment d'une entente horizontale permet l'inflation des prix dans la mesure où les consommateurs ne pourront se reporter sur des produits alternatifs, ni ne pourront réduire de manière significative les quantités achetées ;

Que les requérantes affirment aussi que la conjonction des pratiques mises en œuvre par NPPF et Royal Canin qui est mise en avant dans la Décision (point 263) n'a produit aucun effet de fermeture du marché dommageable à la concurrence ; qu'en effet, la variété des produits, fruit d'importantes innovations, est généralement reconnue comme faisant partie des objectifs même de la régulation du marché par le droit de la concurrence, une concurrence saine devant permettre, outre une baisse des prix, un plus grand choix de produits soutenu par des innovations et une meilleure qualité de services grâce notamment à des activités promotionnelles ; qu'ainsi l'Autorité ne peut, sans se contredire, considérer que ces caractéristiques du marché spécialisé de l'alimentation animale, considérées comme pro-concurrentielles, constitueraient des barrières à l'entrée ; qu'à l'opposé, Royal Canin et Mars font valoir que les exclusivités d'approvisionnement ont engendré de réels gains d'efficacité qui n'auraient pu, apparaître si les centres de distribution n'étaient pas mono-marques et que ces exclusivités ont permis de maintenir une qualité optimale des services de conseils et ont ainsi augmenté le bien-être des consommateurs ;

Qu'elles ajoutent que, contrairement à ce qu'affirme la Décision, l'exclusivité d'approvisionnement combinée à l'exclusivité territoriale n'a pas produit un effet de fermeture du marché et, qu'à l'inverse, cette combinaison, dont la Commission européenne a d'ailleurs souligné elle-même les effets positifs, a permis :

- d'assurer la mise à disposition aux consommateurs de la gamme complète des produits Royal Canin à un coût moyen unitaire réduit ;

- d'inciter les centres de distribution à promouvoir la marque Royal Canin par le biais des actions de communication et de promotion auprès des détaillants et ainsi améliorer la qualité des services aux détaillants et donc aux consommateurs ;

Que, par ailleurs, Royal Canin et Mars contestent l'appréciation de l'Autorité selon laquelle les exclusivités d'approvisionnement auraient renforcé les barrières à l'entrée ; qu'en effet, selon les requérantes, les études économiques produites démontrent qu'il serait facile pour un nouveau fabricant de distribuer ses produits, sans qu'il soit nécessaire, comme semble le considérer l'Autorité, d'adopter le modèle économique de distribution retenu par les sociétés Royal Canin ou NPPP et alors que, par ailleurs, l'Autorité écarte l'éventualité d'un tel effet pour Hill's (point 216) ;

Que, dès lors, compte tenu de la gravité limitée des faits et du très faible dommage à l'économie causé par les pratiques de Royal Canin, les requérantes demandent à. la cour de réformer la Décision en ce qu'elle a retenu une proportion de la valeur des ventes de 8 % et de fixer une proportion très largement inférieure, tout en reprochant à l'Autorité une application contestable du critère relatif à la durée des pratiques qui, d'une part, ne constitue pas un critère légal fixé à l'article L. 464-2 du Code de commerce et qui, d'autre part, appliqué au cas d'espèce sans prendre en compte des circonstances propres à chaque entreprise, a provoqué l'augmentation quasi mécanique du montant de base de la sanction ;

Que les requérantes reprochent également à l'Autorité une appréciation erronée de la situation individuelle de Rayai Canin, en premier lieu en aggravant de manière disproportionnée la sanction pécuniaire infligée à Royal Canin en raison de son appartenance à un groupe de dimension internationale ;

Qu'au-delà des liens capitalistiques et financiers avec sa société mère et de l'imputabilité, non discutable, de l'infraction au groupe Mars, les requérantes reprochent à l'Autorité d'avoir méconnu l'absence d'adossement juridique et économique de Royal Canin au groupe Mars à l'occasion des pratiques reprochées, soit l'utilisation à cette fin des moyens matériels, humains ou financiers que la société mère aurait mis à sa disposition ; qu'à cet égard, les requérantes soutiennent :

- que, postérieurement à son acquisition en 2002 par la société Masterfoods Holding SAS, filiale française du groupe Mars, Royal Canin avait conservé une organisation opérationnelle propre, ne dépendant donc pas des infrastructures juridico-économiques du groupe Mars pour la mise en œuvre des pratiques litigieuses ;

- que si la décision de l'Autorité fait état de pratiques anticoncurrentielles mises en œuvre par Royal Canin avec certains de ses grossistes ou centres de distribution, ce réseau de distribution n'a jamais eu de contact ni de relation commerciale avec les autres entités du groupe Mars, étant observé que la spécialisation de Mars PF France et Royal Canin résulte très directement des engagements souscrits auprès de la Commission européenne lors de l'acquisition de Royal Canin par Mars, et ayant conduit à une spécialisation des différentes activités ;

- qu'à l'occasion de la sanction infligée le 22 juin 2005 à Royal Canin par le Conseil de la concurrence, pour des pratiques analogues, le Conseil n'avait pas relevé que la société s'était appuyée sur son appartenance à un groupe pour développer lesdites pratiques ;

- que Royal Canin n'avait aucun intérêt à s'adosser au groupe Mars dans le cadre de la mise en œuvre des pratiques litigieuses afin de tirer avantage de sa "très forte notoriété", dans la mesure où les autres entités du groupe Mars ne disposaient d'aucune notoriété sur le marché en cause ; que le groupe Mars, via sa filiale Mars PF France commercialise des aliments pour chiens et chats essentiellement en Grandes Surfaces Alimentaires (OSA), conformément aux engagements souscrits auprès de la Commission européenne ;

Que Royal Canin et Mars soulignent aussi que le taux d'aggravation de 15 % pour Royal Canin est disproportionné en comparaison de celui qui a été retenu à l'encontre de NPPF, à qui a été appliquée une majoration de 25 %, alors que son chiffre d'affaires est quatre fois supérieur à celui du groupe Mars ;

Considérant que les requérantes reprochent encore à la Décision d'avoir retenu, au titre de la réitération, un taux de majoration de 25 % qui est disproportionné en particulier ;

Qu'elles affirment que la période 2004/2008 qui a été prise en considération pour conclure à une réitération est erronée, dans la mesure où la décision de condamnation du Conseil de la concurrence prononcée le 22 juin 2005 qui a été prise en compte a été partiellement réformée par la Cour d'appel de Paris par arrêt du 4 avril 2006 et que ce n'est ainsi qu'à partir de cette date, et non avant, qu'elle peut être considérée dans une situation de réitération, n'ayant pas eu auparavant connaissance de manière certaine et définitive que les pratiques qui étaient reprochées à Royal Canin étaient contraires aux règles du droit de la concurrence ;

Qu'elles soulignent que Royal Canin n'a, à aucun moment, entendu s'affranchir des règles de concurrence et que, si tel avait été le cas, les pratiques reprochées auraient été maintenues en 2005, ce qui ne s'est pas produit, puisqu'elle n'a plus imposé aux centres de distribution, les prix de revente aux magasins indépendants ; que, par ailleurs, la pratique d'imposition du prix de revente aux centres de distribution à l'égard des magasins sous enseigne n'a été maintenue qu'en raison de la volonté persistante des centrales d'achat auxquelles les magasins sous enseigne étaient affiliés de mener une négociation unique centralisée ; qu'afin de mettre fin à une telle pratique tarifaire ainsi qu'aux autres pratiques, Royal Canin a pris la décision d'intégrer ses centres de décision indépendants, décision dont la mise en œuvre, qui a concerné trois centres, a toutefois nécessité un délai incompressible, et qui, contrairement à l'affirmation de l'Autorité selon laquelle une telle décision relevait de choix stratégiques propres, constituait la seule option envisageable pour mettre fin aux pratiques ;

Que les requérantes affirment encore :

- que la majoration de la sanction à hauteur de 25 % au titre de la réitération était dépourvue d'objet, dès lors que Royal Canin ayant, dès le prononcé de l'arrêt de la cour, engagé le processus de réalisation de l'intégration des distributeurs indépendants qui s'est achevé au 1er septembre 2009, l'effet dissuasif de la première sanction prononcée par le Conseil de la concurrence a été pleinement atteint

- que le taux de 25 % est trop élevé au regard de la pratique décisionnelle de l'Autorité et des infractions en cause ;

Que Royal Canin et Mars reprochent enfin à l'Autorité de ne pas avoir suffisamment pris en-compte les engagements souscrits dans le cadre de la procédure de non-contestation des griefs qui, eu égard à leur caractère exceptionnel et novateur, auraient dû entraîner un taux de réfaction de la sanction pécuniaire d'au moins 25 % et non de 20 %, spécialement au regard de la comparaison opérée tant avec le taux de réfaction de la sanction appliqué à NPPF qu'avec les taux qui peuvent être observés dans la pratique décisionnelle de l'Autorité qui, par surcroît, s'est cru, à tort, liée par le communiqué de procédure du 10 février 2012 relatif à la procédure de non contestation des griefs et le document-cadre du 10 février 2012 sur les programmes de conformité aux règles de concurrence qui venaient d'être publiés quelques jours avant la décision, textes qui limitent le taux de réfaction de la sanction pécuniaire encourue à 20 % lorsque l'entreprise en cause sollicite le bénéfice des dispositions de l'article L. 464-2, III du Code de commerce et assortit sa demande d'un engagement de nature comportementale consistant en la mise en œuvre d'un programme de conformité ; que, pour autant, la cour ne saurait être liée par ce taux maximum de 20 % dès lors, d'une part que ces textes sont postérieurs à la procédure écrite et à la séance du 16 novembre 2011 et, d'autre part, que le procès-verbal de non-contestation des griefs signé le 7 mai 2010 par les requérantes, aurait préconisé un taux de réfaction maximum de 25 % :

Considérant qu'au soutien de leur recours, Hill's et Colgate affirment, en premier lieu, que la sanction qui leur a été infligée en application du communiqué du 16 mai 2011, texte, dépourvu de toute valeur juridique et dont l'Autorité a, par surcroît, fait une application incorrecte, viole les exigences légales de proportionnalité et d'individualisation qui sont fixées par l'article L. 464-2 du Code de commerce ; que, selon les requérantes, la comparaison des montants de base retenus pour chaque entreprise sanctionnée révèle ainsi :

- que Hill's n'a été condamnée qu'au titre d'une seule pratique d'interdiction des ventes passives à l'étranger, alors que les autres entreprises ont également été condamnées pour une série d'autres pratiques, dont des pratiques tarifaires ;

- que, comme les autres entreprises sanctionnées, cette unique pratique d'interdiction de ventes passives est considérée comme ayant un "caractère certain de gravité" alors que l'accumulation des pratiques reprochées aux autres entreprises sanctionnées, telle l'imposition de prix de revente ou des exclusivités de clientèles d'approvisionnement, engendre assurément un degré de gravité supplémentaire ;

- en ce qui concerne l'appréciation du dommage à l'économie que, contrairement à ses concurrents, Hill's est la seule entreprise dont la pratique n'a jamais été mise en œuvre et n'a en conséquence, pas pu causer un tel dommage ;

Que Hill's et Colgate ajoutent que la pratique reprochée ne peut être que d'une gravité minimale :

- en raison de la dénaturation de la clause critiquée par l'Autorité

- en raison de la non-application de la clause, étant observé, non seulement, qu'en se référant indistinctement aux ventes passives des trois entreprises en cause (point 249) pour estimer qu'elles revêtaient un certain degré de gravité, la Décision n'a pas porté sur la pratique une appréciation individualisée mais encore que, du fait de cette non-application, elle n'a pu avoir l'effet de compartimentation des marchés qui lui est attribué alors, par ailleurs, que Hill's n'a retiré aucun bénéfice de la pratique ;

- au regard du fait qu'elle a, d'elle-même, mis spontanément un terme à la pratique en cause, circonstance que l'Autorité prend habituellement en compte comme élément autonome d'atténuation de la gravité d'une pratique anticoncurrentielle ;

- au regard des lignes directrices de la Commission européenne pour le calcul des amendes de 1998 ;

Que les requérantes font également valoir que les critères d'appréciation de la gravité des pratiques qui résultent de la pratique décisionnelle de l'Autorité doivent également conduire à minimiser la gravité de la pratique dénoncée en raison :

- de son absence d'emprise sur le marché et de son défaut de persistance, faute d'application de la clause incriminée ;

* d'une étendue géographique limitée à des marchés pertinents qui ne sont pas de dimension exclusivement nationale comme le retient la Décision ;

* d'un champ matériel relativisé par le fait que la clause incriminée ne doit pas être confondue avec une interdiction per se et que sa rédaction, certes maladroite, visait à réaffirmer le caractère historiquement "coopératif' des distributeurs grossistes vétérinaires, s'adressant par priorité statutaire et économique à leurs adhérents inscrits à l'Ordre des vétérinaires français ;

- de l'absence de caractère contraignant de la clause ;

Que les requérantes reprochent enfin à l'Autorité, alors, que la Décision constate l'absence de dommage à l'économie, de ne pas en avoir constaté les conséquences nécessaires, dès lors qu'il ressort de la pratique décisionnelle de l'Autorité, que celle-ci a, à plusieurs reprises, décidé de ne prononcer aucune sanction pour des pratiques résultant en un dommage à l'économie limité ou inexistant, du fait notamment de leur non-application ;

Que Hill's et Colgate reprochent en deuxième lieu à la Décision d'avoir omis de prendre en considération au bénéfice de Hill's une circonstance atténuante pourtant prévue par le document-cadre du 10 février 2012 sur les programmes de conformité aux règles de concurrence tenant au fuit qu'elle a spontanément supprimé la clause litigieuse avant qu'elle ne lui soit reprochée ; qu'elles font observer, par surcroît :

- qu'en 2008, sans aucun lien avec l'enquête, Hill's a entrepris une refonte complète de sa politique de distribution avec, comme conséquence, d'une part, l'internalisation de la distribution de ses produits sur le segment des magasins spécialisés à. compter du 1er juillet 2008 et, d'autre part, la modification substantielle de ses conditions générales de vente (CGV) sur le segment vétérinaire ;

- que, dans le cadre de cette réorganisation, Hill's a opéré une révision approfondie de ses CGV l'ayant conduite à. supprimer ladite clause qui ne se retrouverait plus dans ses CGV 2009 ;

- que la modification contractuelle est ainsi intervenue spontanément, dès 2008, étant observé, qu'à cette date, la saisine de l'Autorité, qui était déjà intervenue, ne visait pas Hill's mais exclusivement Nestlé et que les CGV n'ont été versées à la procédure que le 17 novembre 2008, à la suite d'une demande d'information de la rapporteure en date du 24 octobre 2008, soit postérieurement à la décision de Hill's de modifier ses CGV pour l'année 2009 et alors qu'elle n'avait aucun moyen de penser qu'elle pourrait être mise en cause dans cette procédure ou même de soupçonner que cette clause concernant un segment déterminé puisse lui être reprochée avant toute notification de griefs, intervenue le 12 mars 2010, soit après la suppression de la clause ;

- que l'interdiction des ventes à l'exportation n'est pas éligible à la procédure de clémence et ne peut être corrigée que par une modification des conditions contractuelles ;

- que l'Autorité méconnaît ainsi sa pratique décisionnelle, qui prend en compte la circonstance d'un abandon spontané pour réduire l'amende imposée, voire pour en dispenser totalement les entreprises ;

Que Hill's et Colgate soutiennent, en dernier lieu, que la sanction imposée serait disproportionnée et inéquitable au regard de la politique répressive de l'ADLC visant les pratiques verticales, qui concerne des pratiques plus graves et restrictives de concurrence, ayant toutes été appliquées, et pour lesquelles l'existence d'un dommage à l'économie a toujours été caractérisée ;

En ce qui concerne l'étendue et les modalités de contrôle par la cour des sanctions infligées aux requérantes :

Considérant qu'au-delà du déroulement des étapes successives découlant de la mise en œuvre par l'Autorité de la méthode de détermination des sanctions du communiqué sanctions qui, ainsi que cela a été rappelé, ne constitue qu'une directive, comme telle dépourvue de valeur normative, il revient seulement à la cour d'apprécier si, en définitive, l'Autorité a bien déterminé les sanctions pécuniaires qui ont été infligées aux requérantes au titre des pratiques anticoncurrentielles poursuivies en application des dispositions précitées de l'article L. 464-2 du Code de commerce ;

Considérant que, dans un tel cadre, la cour relève qu'au cas d'espèce, sous couvert de moyens tendant notamment à contester les appréciations portées par l'Autorité sur la gravité des pratiques poursuivies ainsi que sur l'importance du dommage causé à l'économie, NPPF et Nestlé, d'une part, Royal Canin et Mars, d'autre part, qui n'ont pourtant contesté, ni la réalité de l'ensemble des pratiques visées par la notification des griefs, ni la qualification qui en a été donnée par l'Autorité, remettent en réalité le plus souvent en cause, ce qu'elles ne sont pourtant pas désormais recevables à faire, les constatations et appréciations précitées de l'Autorité qui lui ont permis de décider que les pratiques anticoncurrentielles dénoncées à leur encontre étaient établies ;

Considérant que, pour prétendre contester les modalités de détermination de la sanction ainsi que le quantum de celles-ci, NPPF, Hill's, Royal Canin et leurs sociétés mères respectives ne sont pas non plus en droit d'opposer la pratique décisionnelle antérieure l'Autorité en matière de sanctions, dès lors que les sanctions sont déterminées par l'Autorité en fonction d'un ensemble d'éléments de droit ou de fait particuliers conduisant nécessairement à des appréciations différentes d'une affaire à une autre ;

Que, de même, une entreprise n'est pas non plus fondée à se prévaloir d'une comparaison du montant de la sanction qui lui a été infligée avec le montant de la sanction infligée à d'autres entreprises dans la même affaire, l'Autorité prenant nécessairement en compte, pour prononcer une sanction en application des dispositions de l'article L. 464-2 du Code de commerce, des éléments d'appréciation individuels distincts d'une entreprise à une autre ;

En ce qui concerne la valeur des ventes :

Considérant, sur l'assiette servant de calcul au montant des sanctions, que la Décision a rappelé à bon droit (point 238) que la valeur des ventes réalisées par les entreprises en cause de produits ou de services en relation avec l'infraction constitue généralement une référence appropriée pour déterminer l'assiette de la sanction pécuniaire infligée par l'Autorité de la concurrence, dans la mesure où elle permet de proportionner celle-ci à la réalité économique de l'infraction et au poids relatif sur le secteur concerné de chaque entreprise qui y a participé ;

Considérant que l'Autorité a décidé (points 242 à 246 de la Décision) :

- pour Royal Canin, sans contestation, que la valeur des ventes retenue correspond aux ventes d'aliments secs pour chiens à ses grossistes-distributeurs indépendants à destination des magasins spécialisés et des éleveurs, en France, d'une part, et aux ventes d'aliments secs pour chats à ses grossistes-distributeurs indépendants à destination des magasins spécialisés et des éleveurs, en France, d'autre part ;

- pour Hill's, sans contestation de sa part, que la valeur des ventes retenue correspond aux ventes d'aliments secs pour chiens en France aux grossistes-répartiteurs à destination des vétérinaires, d'une part, et aux ventes d'aliments secs pour chats en France aux grossistes-répartiteurs à destination des vétérinaires, en France, d'autre part ;

Considérant que, sans contestation de ces entreprises, l'Autorité a également précisé qu'eu égard à la participation individuelle de chaque entreprise en cause aux infractions, l'exercice comptable complet retenu pour déterminer cette valeur des ventes sera, compte tenu des données chiffrées à la disposition de l'Autorité, l'exercice 2008 ;

Considérant, que pour NPPF, qui le conteste, l'Autorité a décidé que la valeur des ventes retenue correspond aux ventes d'aliments secs pour chiens aux plateformes de distribution à destination des magasins spécialisés et des éleveurs, en France, d'une part, et aux ventes d'aliments secs pour chats aux plateformes de distribution à destination des magasins spécialisés et des éleveurs, en France, d'autre part ;

Considérant, cependant, que NPPF n'est pas fondée à réclamer la déduction de la valeur des ventes réalisées avec les enseignes, dès lors que, comme il a été dit, NPPF et Nestlé n'ont pas contesté le grief selon lequel NPPF s'est entendue avec l'ensemble des grossistes indépendants chargés de la revente de leurs produits aux circuits spécialisés, qu'ils soient sous enseigne ou indépendants ;

Qu'au surplus, contrairement à ce qui est soutenu, l'existence d'un véritable pouvoir de négociation des magasins sous enseigne, dont les dirigeants négocient en effet avec les fournisseurs, ne constitue pas une donnée de nature à restreindre l'assiette de la valeur des ventes retenue, dès lors que cette circonstance ne remet en cause, ni la matérialité de l'infraction ou de son étendue, ni, en conséquence, la réalité économique ou le poids relatif de chaque entreprise en cause sur le secteur ou les marchés concernés ;

Considérant, en revanche, qu'ainsi que cela sera vu dans les développements consacrés à l'appréciation de l'importance du dommage à l'économie, l'Autorité a pris en considération à ce stade (point 261 de la Décision) ce pouvoir de négociation des magasins sous enseigne ;

En ce qui concerne la gravité des faits :

Considérant que c'est par des appréciations pertinentes (points 249 à 252) que la cour fait siennes et, contrairement à ce qui est soutenu, à l'exclusion de toute référence à une pratique décisionnelle non-pertinente, mais seulement au terme d'une analyse précise et circonstanciée de la nature intrinsèque et des caractéristiques objectives et concrètes des pratiques poursuivies, que la Décision a exactement qualifié la gravité de ces pratiques, en relevant :

- que les sociétés NPPF et Royal Canin se sont entendues avec leurs grossistes-distributeurs respectifs sur les prix de revente de leurs produits destinés aux éleveurs et aux magasins spécialisés, dans le cas de NPPF, et à destination des seuls magasins sous enseigne, dans le cas de Royal Canin, pratiques qui, si elles ne sont pas regardées avec autant de sévérité que les ententes horizontales, figurent parmi les plus graves des pratiques anticoncurrentielles ;

- que les sociétés NPPF et Royal Canin se sont également entendues avec leurs grossistes-distributeurs pour interdire à ces derniers de pratiquer des ventes passives et que la société Hill's s'est entendue avec ses grossistes-vétérinaires pour interdire à ces derniers de pratiquer des ventes passives pour des clients situés en dehors du territoire national ; que de telles pratiques anticoncurrentielles sont considérées, de manière constante, en droit de l'Union comme en droit interne, comme revêtant un caractère certain de gravité, en particulier parce qu'elles tendent à compartimenter les marchés ; que l'entente poursuivie par Hill's et ses grossistes-vétérinaires a, par ailleurs, été mise en œuvre au moyen du document qui servait de fondement à leur relation commerciale ; que le caractère contractuel de la pratique a ainsi permis à Hill's de généraliser l'entente, en s'assurant de son application à l'ensemble des grossistes sur le segment de marché en cause, et de sceller l'acquiescement des distributeurs dans un document contraignant ;

- que les sociétés NPPF et Royal Canin se sont également entendues avec leurs grossistes-distributeurs pour conférer à ces derniers des exclusivités d'approvisionnement de clientèle et des exclusivités territoriales et que ces pratiques, qui ont eu pour effet réel ou potentiel de cloisonner le marché de gros et d'affaiblir la concurrence revêtent un caractère certain de gravité ;

- que, s'agissant de NPPF et de Royal Canin, le fait que ces entreprises aient mis en œuvre de multiples pratiques affectant des paramètres de concurrence distincts, tout en poursuivant le même objectif anticoncurrentiel, en accroît la gravité intrinsèque ;

- que, toutefois, il n'est pas établi que les pratiques mises en œuvre par NPPF, Royal Canin et Hill's ont été accompagnées de mesures de coercition destinées à en garantir le respect, ce qui en attenue la gravité et qu'il a été également constaté que les plateformes de NPPF ont pu ponctuellement satisfaire la demande de détaillants situés en dehors de leur zone de compétence ;

Considérant qu'il suffit tout au plus de préciser que, contrairement à ce qui lui est reproché, s'agissant tout d'abord de la gravité des pratiques d'interdiction des ventes passives mises en œuvre par Royal Canin, que si la Décision n'a pas expressément relevé que les plateformes de Royal Canin ont comme celles de NPPF, pu ponctuellement satisfaire la demande de détaillants situés en dehors de leur zone de compétence, il a cependant ainsi que le précise l'Autorité dans ses observations (point 75) été tenu compte de cette circonstance dans le calcul du montant de base, ce qui rend vain, par ailleurs, les griefs d'inégalité de traitement entre Royal Canin et NPPF qui sont faits à l'Autorité par les requérantes ;

Que, par ailleurs, il importe peu, pour le calcul des amendes, que, les lignes directrices de la Commission européenne de 1998 aient alors considéré, sous certaines conditions, comme "peu graves" les restrictions verticales visant à limiter des échanges mais dont l'impact sur le marché reste limité, dès lors que ces lignes directrices ne lient, ni l'Autorité, ni la cour, et que, par surcroît, ces indications n'ont pas été reprises dans les lignes directrices de la Commission européenne de 2006 ;

Qu'en outre, contrairement à ce qui est soutenu, la circonstance tenant à ce que la clause litigieuse n'a pas été appliquée par Hill's et le fait que celle-ci a mis fin spontanément à la pratique, n'ont pas à être pris en compte par l'Autorité au titre de la gravité des pratiques, dès lors que cela n'atténue pas la gravité intrinsèque de la pratique ;

Qu'en revanche, il conviendra de vérifier si les conséquences attachées à ces éléments ont été pris en considération par l'Autorité dans l'appréciation de l'importance du dommage à l'économie ;

Considérant que, s'agissant des exclusivités mises en œuvre par NPPF et Royal Canin, la circonstance que les exclusivités en cause n'étaient pas formellement stipulées dans des documents contractuels n'est pas de nature à en atténuer la gravité, dès lors qu'il ressort suffisamment du dossier que, quelle que soit la forme qu'elle a revêtu, cette pratique a été mise en œuvre de manière généralisée et structurée, en la rendant au moins aussi efficace que si elle avait été prévue expressément dans des stipulations contractuelles, étant observé que la mise en place d'exclusivités territoriales a reposé sur un document transmis à tous les grossistes, précisant, au moyen d'une carte, la zone géographique qui leur échoyait ;

Qu'au surplus, ainsi que le relève l'Autorité dans ses observations, la prise en compte d'une telle circonstance s'impose d'autant moins qu'au cas d'espèce il ne peut être utilement contesté que l'insertion des exclusivités dans les clauses contractuelles n'était pas nécessaire pour emporter le consentement des distributeurs puisque leurs capacités logistiques se trouvaient saturées par la multiplicité des gammes offertes par Royal Canin (point 88 de la Décision) ou pour s'assurer de son caractère généralisé, lequel découlait nécessairement de la stratégie de segmentation territoriale de la distribution des produits Royal Canin sur l'ensemble de la France (points 90 et suivants de la Décision) ;

Qu'en outre, il ne peut non plus être sérieusement discuté que la formalisation des exclusivités dans les clauses contractuelles était d'autant moins nécessaire que Royal Canin a progressivement intégré les distributeurs en gros concernés au cours de la période pendant laquelle les pratiques étaient en œuvre (point 84) ;

Que les requérantes ne sont pas non plus fondées à reprocher à l'Autorité de ne pas avoir tenu compte du fait que les pratiques ont été mises en œuvre sur le marché de gros, cette circonstance relevant d'une analyse de l'importance du dommage causé à l'économie ;

Que les requérantes critiquent également en vain le prétendu défaut de prise en compte des gains d'efficacité par la Décision, dès lors que l'appréciation de tels gains s'inscrit seulement dans le cadre de l'examen d'une éventuelle demande, non formulée au cas d'espèce, tendant à obtenir l'exemption au titre des articles 101, paragraphe 3, TFUE et L. 420-4 du Code de commerce ;

Considérant, s'agissant enfin de la gravité des pratiques mises en œuvre par NPPF et Royal Canin envisagées de manière parallèle, qu'il suffit de constater et qu'il n'est d'ailleurs, ni contesté, ni contestable, que les pratiques en cause ont concerné des paramètres concurrentiels distincts, tant tarifaires que commerciaux et qu'elles ont eu cour objet ou pour effet d'empêcher les détaillants de bénéficier de la concurrence qui aurait pu s'exercer entre les grossistes ;

En ce qui concerne l'importance du dommage causé à l'économie :

Considérant que l'Autorité a rappelé à bon droit (point 253 à 255 de la Décision) et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté :

- que l'importance du dommage causé à l'économie s'apprécie de façon globale pour l'infraction en cause c'est-à-dire au regard de l'action cumulée de tous les participants à la pratique sans qu'il soit besoin d'identifier la part imputable à chaque entreprise prise séparément ;

- que, cependant, lorsque, comme en l'espèce, l'Autorité examine dans une seule et même décision des pratiques distinctes, mises en œuvre par des opérateurs différents, elle apprécie, en principe, de manière séparée l'importance du dommage causé par chacune de ces pratiques ;

- que le critère légal constitué par l'importance du dommage causé à l'économie ne se confond pas avec le préjudice qu'ont pu subir les victimes des pratiques en cause, mais s'apprécie en fonction de la perturbation générale apportée par ces pratiques à l'économie ;

- que l'Autorité, qui n'est pas tenue de chiffrer précisément le dommage causé à l'économie, doit procéder à une appréciation de son existence et de son importance, en se fondant sur une analyse aussi complète que possible des éléments du dossier et en recherchant les différents aspects de la perturbation générale du fonctionnement normal de l'économie engendrée par les pratiques en cause, de sorte que l'existence du dommage à l'économie ne saurait donc être présumée, y compris en cas d'entente ;

- que l'Autorité tient notamment compte, pour apprécier l'incidence économique de la pratique en cause, de l'ampleur de l'infraction, telle que caractérisée, entre autres, par sa couverture géographique ou par la part de marché cumulée des parties sur le secteur concerné, de sa durée, des conséquences conjoncturelles ou structurelles, ainsi que des caractéristiques économiques pertinentes du secteur concerné, les effets tant avérés que potentiels de la pratique pouvant être pris en considération à ce titre ;

Considérant qu'en l'espèce, c'est par des appréciations pertinentes que la cour adopte, que l'Autorité a conclu, à partir d'un rappel, opéré de manière concrète, de l'ampleur des pratiques en cause puis d'une analyse de leurs conséquences conjoncturelles et structurelles, avec une étude de leur impact sur les marchés concernés et leurs effets conjugués et en prenant en compte certaines caractéristiques économiques de la demande sur ces marchés, que le dommage à l'économie résultant des pratiques mises en œuvre par NPPF et Royal Canin est certain mais, en définitive, modéré et que le dommage à l'économie est même extrêmement limité en ce qui concerne la pratique mise en œuvre par Hill's ;

Considérant que la cour renvoie ainsi aux développements de la Décision (points 257 à 263 de la Décision) procédant de constatations objectives et concrètes du dossier, dont il résulte, concernant tout d'abord l'ampleur des pratiques :

- que Royal Canin et NPPF se sont entendues avec l'ensemble de leurs grossistes indépendants chargés de la revente de leurs produits aux détaillants des circuits spécialisés ;

- que les pratiques mises en œuvre par NPPF ont concerné l'ensemble des grossistes vendant aux éleveurs et/ou aux magasins spécialisés, tandis que celles mises en œuvre par Royal Canin n'ont concerné qu'une fraction de la distribution de ce type de produits ;

- que par ailleurs, s'agissant des pratiques de prix imposés, alors que la pratique mise en œuvre par NPPF et ses grossistes a concerné l'ensemble des ventes de ces derniers aux éleveurs et aux magasins spécialisés, Royal Canin ne s'est entendue avec ses grossistes indépendants, concernant les prix de revente de ses produits, qu'en ce qui concerne ceux qui étaient destinés à être vendus dans les magasins sous enseigne ;

- que, pour sa part, la pratique mise en œuvre par Hill's et ses grossistes-vétérinaires n'a concerné que le segment des vétérinaires et que, par ailleurs, aucune application de la clause n'a pu être constatée durant la période pendant laquelle les conditions générales de ventes dans lesquelles elle figurait étaient en vigueur ;

Que, s'agissant ensuite des conséquences conjoncturelles et structurelles des pratiques en cause, avec une étude de leur impact sur les marchés concernés, la Décision a exactement constaté que la réduction de la concurrence intra-marque induite par les différentes restrictions verticales mises en œuvre par NPPF, Royal Canin et leurs distributeurs a effectivement empêché les détaillants des circuits spécialisés de bénéficier de la concurrence qui aurait pu s'exercer entre les grossistes ; que, plus particulièrement, les pratiques de prix de revente imposés en cause ont privé les détaillants concernés de la possibilité de mettre en concurrence les grossistes entre eux pour obtenir des prix inférieurs à ceux qu'ils négociaient directement avec les fabricants ; que la possibilité, pour les détaillants, d'arbitrer entre plusieurs grossistes a été également obérée par la circonstance que les exclusivités territoriales, conjuguées aux interdictions de ventes passives en dehors des territoires attribués, ont interdit ou restreint les possibilité des détaillants de mettre en concurrence des grossistes implantés dans des territoires différents ; que les exclusivités de clientèle ont, quant à elles, privé les vétérinaires et leurs centrales d'achat de la possibilité de s'approvisionner auprès des grossistes-distributeurs et de bénéficier ainsi des conditions tarifaires avantageuses consenties à ces derniers par les fabricants ; qu'enfin, les détaillants n'ont pas été à même de s'approvisionner auprès d'un même grossiste pour des produits de marques différentes ;

Que l'Autorité a régulièrement pris en compte certaines caractéristiques économiques de la demande sur ces marchés, en relevant que les différentes ententes mises en œuvre par les fabricants et leurs grossistes-distributeurs ont porté sur des produits qui peuvent susciter un certain attachement affectif des consommateurs finals, dont la fidélité aux marques tend à rendre la demande plus faiblement élastique au prix, fidélité des consommateurs qui a été soulignée tant par les grossistes-distributeurs (cotes 19928, 20109), que par les détaillants (cotes 20078, 20084) ;

Que, surtout, contrairement à ce qui lui est reproché, la Décision a bien constaté, ce qui lui a permis de qualifier le dommage à l'économie de modéré ou limité :

- que les différentes pratiques anticoncurrentielles dénoncées ont eu pour cadre le stade de la revente en gros et que, de ce fait, les pratiques mises en œuvre sur le marché amont de l'approvisionnement des grossistes n'ont pas empêché une concurrence inter-marques par la variété et par les prix de s'exercer au niveau des détaillants ;

- qu'en l'espèce, il a été constaté que les magasins sous enseigne ont pu exercer, en matière tarifaire, un véritable pouvoir de négociation pendant la durée des pratiques du fait de leur négociation directe avec les fournisseurs et qu'il en résulte que les pratiques de prix imposés mises en œuvre par NPPF et leurs grossistes-distributeurs n'ont pas conduit une uniformisation des prix pratiqués à l'égard des distributeurs de détail ;

- que l'importance des coûts de transport et de logistique, comparée aux taux de marge moyens des grossistes-distributeurs, a pu décourager la livraison à des clients situés hors de leur zone de chalandise, ce qui a limité les gains potentiels qu'aurait pu produire une mise en concurrence des grossistes ;

Qu'enfin, la Décision a justement apprécié les effets conjugués des différentes pratiques mises en œuvre par NPPF et Royal Canin et leurs grossistes respectifs, en particulier les clauses de mono-marquisme - éliminant la concurrence inter-marques au niveau de chaque grossiste-distributeur - et les exclusivités territoriales, même non-absolues - réduisant sensiblement la concurrence intra-marque - a produit un effet de fermeture du marché dommageable à la concurrence ; que l'Autorité a constaté que le marché de la vente d'aliments secs pour chiens et pour chats se caractérise par d'importantes barrières à l'entrée, résultant notamment de la multiplicité des gammes de produits et de l'importance des coûts de logistique et de formation ; que les exclusivités d'approvisionnement mises en œuvre par NPPF et Royal Canin ont pu conduire à renforcer ces barrières à l'entrée dans la mesure où, malgré la durée relativement limitée des contrats d'approvisionnement, il est peu probable que de nouveaux entrants auraient pu parvenir à convaincre les grossistes exclusifs des deux fabricants de remettre en cause lesdites exclusivités pour commercialiser des produits qui, à court terme, n'auraient pu capter qu'une part marginale du marché ; que, dans ce contexte, les ressources nécessaires à l'internalisation de la fonction de distribution pour un nouvel entrant s'avéraient particulièrement élevées ;

Considérant que la cour relève que les moyens soutenus par la parties ne sont pas de nature à remettre en cause les appréciations de l'Autorité sur l'importance du dommage à l'économie qui ont été opérées conformément aux exigences découlant des principes qui ont été rappelés alors, surtout, que ni NPPF, ni Royal Canin, ni Hill's et leurs sociétés mères respectives ne contestent sérieusement que les pratiques incriminées - restrictions de ventes passives et prix imposés - ont intrinsèquement pour effet actuel ou potentiel la restriction, voire l'élimination de la concurrence intra-marque sur le marché sur lequel elles sont mises en œuvre, ce qui suffit, en soi, à conférer un caractère certain au dommage à l'économie ;

Considérant, au surplus, que les requérantes ne sont pas fondées à s'emparer des constatations de l'Autorité lui ayant permis de conclure de manière circonstanciée à l'existence d'un dommage à l'économie modéré ou limité pour, contester, en définitive, le principe même de l'existence du dommage à l'économie, dès lors que, ainsi que l'expose utilement l'Autorité dans ses observations (points 103 et 104), la circonstance que les pratiques ont été mises en œuvre au stade de gros n'implique pas, par principe, l'absence d'impact sur le marché de détail dès lors que les détaillants ont, compte tenu de la nature même des pratiques, pu répercuter dans les prix de revente au détail les surprix qu'ont pu entraîner les pratiques ;

Que s'agissant spécialement de la concurrence inter-marques sur les marchés concernés, présentée par les parties comme vigoureuse, force est de constater qu'aucun élément du dossier ne confirme cette caractéristique et, qu'à l'opposé, le secteur est resté relativement concentré au cours de la période pendant laquelle les pratiques ont été mises en œuvre, les parts de marché des deux principaux opérateurs - Royal Canin et NPPF - n'ayant pas substantiellement évolué ; qu'à cet égard, si, à la fin de la période concernée par les pratiques, des marques de distributeurs se sont développées et que de nouveaux acteurs sont arrivés sur le marché, leur impact doit être tempéré, dès lors que leurs parts de marché réelles restent faibles ;

Que si, comme l'affirment les requérantes, les pratiques tarifaires en cause ont pu faciliter les modalités de négociations entre les centres de distribution et les enseignes et l'obtention de conditions commerciales plus avantageuses pour ces dernières dans le cadre de l'organisation de promotions spécifiques, avantages présentés par les requérantes comme de véritables gains d'efficacité, il n'en demeure pas moins que de tels avantages ne nécessitent ni ne justifient pour autant la mise en œuvre de pratiques qui ont un objet anticoncurrentiel et entraînent, par essence, une réduction de la concurrence intra-marque ;

Que, concernant plus particulièrement l'existence des gains d'efficacité invoqués par les requérantes, les développements de l'Autorité concernant l'importance des coûts de transport et de logistique, comparée aux taux de marge moyens des grossistes-distributeurs a pu décourager la livraison à des clients situés en dehors de leur zone de chalandise, ce qui a limité les gains potentiels qu'aurait pu produire une mise en concurrence des grossistes, suffisent à établir qu'elle a bien pris en considération les études économiques produites par les parties ;

Qu'en outre, les prétendus bénéfices que les auteurs d'une entente auraient entendu réaliser en enfreignant les règles de concurrence ou les prétendus avantages dont ils auraient entendu faire bénéficier leurs clients ou les consommateurs n'ont, à les supposer d'ailleurs établis, aucune incidence sur le dommage que cette infraction est, par ailleurs, de nature à causer à l'économie ;

Qu'il n'est pas non plus déterminant, en l'espèce, que les pratiques de prix imposés mises en œuvre par Royal Canin n'aient concerné que les magasins sous enseigne, puisque les autres infractions ont concerné les produits destinés à l'ensemble des distributeurs et, partant, contribué à la réduction de la concurrence intra-marque sur les marchés sur lesquels des pratiques tarifaires n'étaient pas mises en œuvre ;

Que c'est également à tort que NPPF et Nestlé soutiennent que la concurrence intra-marque n'a pas été affectée par des pratiques d'exclusivité de clientèle mise en œuvre par NPPF et ses grossistes au motif que les vétérinaires n'auraient eu aucun intérêt à négocier avec les plateformes qui ne couvraient qu'une partie de la demande ;

Qu'en effet, s'il ne peut être contesté que, nonobstant la mise en œuvre des pratiques, les plates-formes n'auraient pas toutes été à même de fournir aux vétérinaires l'ensemble des produits des gammes destinées à la distribution en circuit spécialisé, la concurrence intra-marque aurait pu, tout de même, s'exercer ce qui concerne les produits communs à l'ensemble des revendeurs, c'est-à-dire ceux qui ne sont pas destinés aux seuls vétérinaires ;

Que l'Autorité était également fondée à relever que les différentes ententes mises en œuvre par les fabricants et leurs grossistes-distributeurs ont porté sur des produits qui peuvent susciter un certain attachement affectif des consommateurs finals, dont la fidélité aux marques tend à rendre la demande plus faiblement élastique au prix, dès lors que les études de NPPF elles-mêmes confirment qu'un nombre très important de propriétaires de chiens et chats - 61 à 96 % d'entre eux - choisissent la marque de produits recommandée par le vétérinaire ou par les éleveurs ;

Que Royal Canin et Mars soutiennent encore à tort que la Décision aurait retenu de manière erronée que la conjonction des pratiques de NPPF et de Royal Canin n'a pas pu produire d'effet de fermeture du marché mais à l'inverse un certain nombre d'effets positifs, dès lors qu'il ne peut être utilement contesté que les pratiques des requérantes ayant consisté en la mise en œuvre d'un mono-marquisme ont limité, voire éliminé la concurrence sur le segment aval de la distribution en gros, ce type d'infractions, combinées avec des pratiques visant à l'élimination de la concurrence intra-marque, n'ont pu que renforcer les effets anticoncurrentiels que ces dernières étaient de nature à engendrer ;

Considérant que c'est également en vain que Hill's et sa société mère opposent à l'Autorité sa pratique décisionnelle dont, en l'état d'un dommage à l'économie limité ou inexistant, il résulterait une absence de sanction, dès lors que, comme il a été dit, des entreprises sanctionnées au titre de pratiques anticoncurrentielles ne sont pas fondées à tirer argument, pour contester leur sanction, de la pratique décisionnelle antérieure de l'Autorité sur tel ou tel point, les sanctions étant déterminées par l'Autorité en fonction d'un ensemble de circonstances de fait et de droit ainsi que d'un ensemble d'appréciations nécessairement différentes d'une affaire à une autre ou d'une entreprise à une autre ;

Que ce n'est qu'au surplus que la cour relève que les précédentes décisions invoquées par les requérantes ne concernaient pas, comme en l'espèce, des pratiques d'interdiction de ventes passives, pratiques qui, au regard des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et de l'article 101, paragraphe 1, du TFUE sont anticoncurrentielles par leur objet même, peu important que la clause incriminée ait ou non reçu application ;

Qu'à tout le moins, il suffit de renvoyer aux constatations de l'Autorité (point 264 de la Décision) dont il ressort que le dommage à l'économie est extrêmement limité en ce qui concerne la pratique mise en œuvre par Hill's ce qui, pour l'essentiel, suffit à priver de portée ses critiques ainsi que celles de sa société mère sur la décision déférée du chef de ses appréciations sur l'importance du dommage causé à l'économie ;

Qu'enfin, Hill's et sa société mère ne sont pas fondées à reprocher à la Décision une contradiction entre ses motifs et son dispositif tirée du fait que, pour ce qui la concerne, en dépit de ses appréciations sur l'importance très réduite du dommage à l'économie, l'Autorité a, malgré tout, retenu une proportion de 4 % de la valeur des ventes pour calculer le montant de base de la sanction, dès lors que, contrairement à ce que sous-entendent les requérantes, et ainsi que le rappelle l'Autorité dans ses observations (points 119, 120 et 121), l'Autorité a, ainsi qu'il a été dit, apprécié au préalable la gravité des pratiques pour déterminer cette proportion ;

En ce qui concerne la prise en compte de la durée des pratiques :

Considérant que c'est encore à tort que les requérantes critiquent la prise en compte par l'Autorité de la durée des pratiques, dont le communiqué sanctions (point 22) rappelle que, constituant un facteur pertinent pour apprécier tant la gravité des faits que l'importance causé à l'économie, la durée des pratiques fait l'objet d'une prise en considération distincte sous ce double angle ;

Considérant, en effet, que, contrairement à ce qui est soutenu, les dispositions du troisième alinéa du 1 de l'article L. 464-2 du Code de commerce, en ce qu'elles prévoient que les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés ainsi qu'à l'importance du dommage causé à l'économie, ne font pas obstacle à cette démarche et qu'ainsi que le relève à bon droit la Décision (point 267), plus la période pendant laquelle se déroule une infraction est longue, plus l'atteinte qu'elle porte au jeu de la concurrence et la perturbation qu'elle entraîne pour le fonctionnement du secteur en cause et plus généralement pour l'économie sont susceptibles d'être substantielles et persistantes ;

Qu'il s'agit seulement d'opérer, dans le cadre de la mise en œuvre de détermination des sanctions, une référence explicite, individualisée et circonstanciée à un facteur qui affecte tant la gravité des pratiques que le dommage causé à l'économie ;

En ce qui concerne la prise en compte de la situation individuelle de chaque entreprise :

I Sur l'atteinte au principe d'égalité de traitement :

Considérant que NPPF et Nestlé ne sont pas droit de reprocher de manière générale à la Décision de leur avoir appliqué un traitement différent de celui accordé à Hill's et Colgate en retenant à l'encontre de Hill's un pourcentage de valeur ventes de 4 %, alors que ce pourcentage s'élève à 8 % en ce qui concerne NPPF, dès lors qu'au regard des dispositions de l'article L. 464-2 du Code de commerce, une entreprise n'est pas en droit se prévaloir d'une comparaison de la sanction qui lui a été infligée avec celle qui a été prononcée à l'encontre d'une autre entreprise poursuivie au titre de pratiques anticoncurrentielles, étant au surplus observé qu'à la différence de NPPF, une seule pratique a été retenue à l'encontre de Hill's ;

II Sur l'appartenance à un groupe :

Considérant qu'afin d'assurer le caractère à la fois proportionné et dissuasif de la sanction, il peut être tenu compte, au titre des éléments d'individualisation de la sanction, de l'appartenance de l'entreprise concernée à un groupe disposant d'une taille ou d'une puissance économique importante ;

Qu'il suffit en effet de rappeler qu'il résulte des termes de l'article L. 464-2 du Code de commerce précité que, dans des conditions exclusives d'une atteinte au principe d'égalité de traitement et, à l'inverse, afin de contribuer au caractère proportionné et dissuasif de la sanction, les sanctions pécuniaires infligées par l'Autorité sont proportionnées "à la situation individuelle de l'entreprise sanctionnée ou du groupe auquel l'entreprise appartient" (soulignement ajouté) ;

Considérant que les requérantes ne sont pas non plus en droit d'objecter que leur appartenance à un groupe, caractéristique qui leur est commune, aurait déjà été prise en compte au niveau de la valeur des ventes, dès lors que la référence à cette donnée, destinée à donner une traduction chiffrée à l'appréciation par l'Autorité de la gravité des faits et de l'importance du dommage causé à l'économie, ne prend en compte que la valeur de l'ensemble des catégories de produits ou de services en relation avec l'infraction et non, en tant que telle, la puissance économique de l'entreprise ou du groupe dans son ensemble ;

Considérant, enfin, qu'au regard de l'application des dispositions de l'article L. 464-2 du Code de commerce, il est également indifférent que le groupe auquel l'entreprise est adossée ait joué ou non un rôle dans l'accomplissement des pratiques anticoncurrentielles poursuivies ;

III Sur la prise en compte de circonstances aggravantes ou atténuantes :

Considérant que l'Autorité a utilement rappelé (point 275 de la Décision) qu'en fonction des éléments propres à chaque cas d'espèce, elle peut prendre en considération différentes circonstances atténuantes ou aggravantes caractérisant le comportement de chaque entreprise dans le cadre de sa participation à l'infraction, ainsi que d'autres éléments objectifs pertinents relatifs à sa situation individuelle, cette prise en considération pouvant, selon les cas, conduire à ajuster la sanction tant à la hausse qu'à la baisse ;

Qu'en ce qui concerne spécialement la réitération, celle-ci, qui constitue une circonstance aggravante personnelle, permet d'augmenter le montant de la sanction pécuniaire à l'encontre d'une entreprise qui, déjà sanctionnée pour des pratiques similaires, a manifesté une propension à s'affranchir des règles relatives à la concurrence, afin de l'inciter à modifier son comportement ;

Qu'ainsi que l'a rappelé à bon droit la Décision (point 289), la réitération implique la réunion de quatre conditions tenant au fait :

- qu'une précédente infraction au droit de la concurrence doit avoir été constatée avant la fin des nouvelles pratiques ;

- que ces dernières doivent être identiques ou similaires, par leur objet ou leur effet, à celles ayant fait l'objet du précédent constat d'infraction ;

- que ce dernier doit être devenu définitif à la date à laquelle l'Autorité de la concurrence statue sur les nouvelles pratiques ;

- que le délai écoulé entre le précédent constat d'infraction et le début des nouvelles pratiques doit être pris en compte pour appeler une réponse proportionnée à la propension de l'entreprise à s'affranchir des règles de concurrence ;

Considérant que pour décider, en l'espèce, que la société Royal Canin se trouve dans une situation de réitération telle que prévue par le I de l'article L. 464-2 du Code de commerce et retenir ainsi l'existence d'une circonstance aggravante tenant à la réitération, la Décision a exactement constaté :

- que Royal Canin s'est entendue avec ses grossistes-distributeurs, sur une période comprise entre 2004 et 2008, sur les prix de revente de ses produits destinés aux magasins spécialisés appartenant à une enseigne ;

- que ces pratiques anticoncurrentielles ont été mises en œuvre postérieurement à constatation, par le Conseil, dans la décision n° 05-D-32 du 22 juin 2005 précitée, de pratiques de prix de vente imposés et d'accords de restriction de clientèle mises en œuvre par Royal Canin et certains de ses distributeurs, comportements qui ont eu pour objet et pour effet, comme dans la présente espèce, de restreindre la concurrence intra-marque sur les produits de Royal Canin ;

- que ce constat d'infraction est devenu définitif, faute pour l'arrêt de la cour d'appel du 4 avril 2006 qui a statué sur le recours formé contre la décision du Conseil d'avoir fait l'objet d'un pourvoi en cassation ;

- qu'il y a lieu de prendre en compte le délai, en l'espèce très court, entre les deux infractions commises par Royal Canin, dans la mesure où cette dernière était informée des règles de la concurrence pour la violation desquelles elle avait été sanctionnée, ce qui aurait dû l'inciter à mettre fin aux pratiques en cause en l'espèce ;

Considérant, en effet, que les requérantes ne sont pas en droit de faire grief à la décision déférée de retenir, au titre du premier constat d'infraction, la date de la décision du Conseil de la concurrence et non la date du prononcé de l'arrêt de la cour d'appel du 4 avril 2006 dès lors, qu'en tout état de cause, une précédente infraction au droit de la concurrence a été constatée avant la fin des nouvelles pratiques ;

Considérant que c'est également à tort que Royal Canin et sa société mère contestent l'existence d'une réitération en faisant valoir que la poursuite partielle des pratiques précédemment constatées trouvait son origine dans des difficultés à modifier la structure de leur réseau de distribution des aliments pour animaux et que Royal Canin n'était pas animé par la volonté de s'affranchir à nouveau des règles de concurrence ;

Qu'en effet, la Décision a justement relevé (point 292) que la décision de Royal Canin, d'opter pour une intégration de la fonction de distribution de gros n'avait pas été imposée par le Conseil de la concurrence ou la cour d'appel mais qu'elle dépendait de ses choix stratégiques propres et que, dès lors, cette circonstance n'est pas de nature à remettre en cause l'existence d'une réitération au sens du I de l'article L. 464-2 du Code de commerce ;

Considérant que, ainsi que cela a été souligné dans les développements qui précédent, Royal Canin et sa société mère ne sont pas en droit de contester le niveau des sanctions qui leur ont été infligées au titre d'une circonstance aggravante en se référant à des décisions antérieures de l'Autorité constatant des situations de réitération et que, plus généralement, est tout autant inopérante la critique des requérantes sur l'application, à leur détriment, d'un taux de majoration portant atteinte au principe d'égalité de traitement au motif que cette majoration serait plus importante que celle qui a été retenue pour Hill's et Colgate, dès lors qu'il ne peut être utilement contesté que leurs chiffres d'affaires respectifs différent de manière substantielle ;

Considérant, concernant la situation individuelle de NPPF, à l'encontre de qui l'Autorité ne relève, ni circonstance atténuante, ni circonstance aggravante, que c'est à tort que NPPF et Nestlé croient devoir invoquer l'existence de circonstances atténuantes tenant à une coopération immédiate et de bonne foi pour mettre fin aux pratiques en cause, dès lors que le concours effectif des parties à la procédure devant l'Autorité est susceptible de se traduire par une réduction de la sanction pécuniaire lorsque les entreprises concernées optent pour la procédure de non-contestation des griefs prévue par le III de l'article L. 464-2 du Code de commerce, ce qui est précisément le cas en l'espèce ;

Considérant, s'agissant de la situation individuelle de Hill's, que cette société et sa société mère ne sont pas en droit d'invoquer le bénéfice d'une circonstance atténuante tenant à une cessation volontaire de la pratique par Hill's en se prévalant des énonciations du document-cadre de l'Autorité du 10 février 2012 sur les programmes de conformité aux règles de concurrence ;

Qu'en effet ce document ne permet à une entreprise de se prévaloir d'une telle circonstance atténuante qu'à la condition que l'entreprise qui s'en prévaut se soit dotée, avant l'ouverture à son encontre d'une enquête ou d'une procédure, d'un programme de conformité correspondant aux bonnes pratiques décrites dans le document-cadre et que, précisément, Hill's et sa société mère n'établissent, ni d'ailleurs n'allèguent, l'existence d'un tel programme ;

Que, par ailleurs, ainsi que le précise l'Autorité dans ses observations, l'abandon spontané des pratiques par Hill's, en ce que cette circonstance se reflète sur la durée de celles-ci, a déjà été prise en compte dans la détermination de la sanction - durée des pratiques et dommage à l'économie - de sorte qu'il n'y a pas Lieu de l'apprécier au titre d'une éventuelle circonstance atténuante ;

Considérant, enfin) que c'est à tort que les requérantes invoquent, à leur détriment, l'application d'un taux de majoration portant atteinte au principe d'égalité de traitement au motif que cette majoration serait plus importante que celle qui a été retenue pour Royal Canin et Mars, dès lors qu'il ne peut être utilement que leurs chiffres d'affaires respectifs différent de manière substantielle ;

En ce qui concerne la mise en œuvre du III de l'article L. 464-2 du Code de commerce :

Considérant qu'ainsi que le rappelle la Décision (points 306 et 307), NPPF et Nestlé SA ont proposé des engagements structurels, d'une part, et des engagements comportementaux, amendés le 2 décembre 2012, d'autre part ;

Que les premiers consistent en une réorganisation complète de la distribution sur le marché "spécialiste" des aliments pour chats et pour chiens et à l'internalisation de l'intégralité de la fonction commerciale pour les magasins sous enseigne, les magasins indépendants et les éleveurs ; que les engagements prévoient également que la fonction logistique fera l'objet d'une externalisation auprès de logisticiens tiers (plateformes existantes ou autres logisticiens) ;

Que l'Autorité, qui indique qu'elle n'a pas à prendre parti sur les choix des entreprises en matière d'organisation de leur réseau de distribution, précise qu'elle prend acte de cet engagement ;

Que les seconds engagements, qui ont été présentés aux services d'instruction avant la publication du document-cadre de l'Autorité de la concurrence du 10 février 2012 sur les programmes de conformité aux règles de concurrence, consistent en l'amélioration des programmes de conformité aux règles de concurrence déjà en place dans la division "spécialiste" ; que cette proposition prévoit notamment des mesures d'information, de formation et de sensibilisation de son personnel concerné aux règles de concurrence, la mise en place de dispositifs de contrôle et l'identification d'équipes de soutien, ainsi que la mise en place d'un dispositif d'alerte professionnelle ;

Considérant, sur les engagements structurels, que c'est à tort que NPPF et Nestlé SA reprochent à l'Autorité de ne pas avoir valorisé ces engagements en en prenant seulement acte, dès lors que l'Autorité n'est pas tenue de rendre obligatoires les engagements proposés par les parties qu'elle juge ne pas être suffisamment pertinents, crédibles ou vérifiables, alors qu'ils doivent viser à assurer ou à rétablir, selon les cas, le fonctionnement concurrentiel du marché ;

Qu'en effet, ainsi que le mentionne exactement l'Autorité dans ses observations (point 168), ces engagements concernent le choix d'une réorganisation du réseau de distribution, d'ores et déjà décidée par les entreprises concernées, sur laquelle l'Autorité n'a, en effet, pas à prendre parti ;

Considérant, sur les engagements comportementaux, que rien ne permet de remettre en cause les appréciations de l'Autorité (point 308 de la Décision) la conduisant à émettre des réserves selon lesquelles :

- le programme de conformité proposé par NPPF ne prévoit, au-delà de ces éléments aucune mesure substantielle de responsabilisation de ses cadres ou de ses agents, d'une part, et de suivi en cas de méconnaissance du programme, à l'exception de celles liées à son dispositif d'alerte professionnelle, d'autre part ;

- il résulte des termes mêmes de la proposition d'engagement amendée le 2 décembre 2012 que la société NPPF conditionne la mise en place de ce dernier à l'obtention de "l'ensemble des autorisations requises dans un délai de six mois à compter de la décision de l'Autorité", sans autre précision ;

- dans ces conditions, le caractère relativement incertain de l'obtention de ces autorisations dans un tel délai ne permet pas de considérer cet aspect de l'engagement proposé comme aussi crédible qu'il l'aurait été en son absence ;

Qu'en effet, la proposition d'engagement ne précise pas le nombre et la nature des autorisations requises ce qui, ainsi que le confirme l'Autorité dans ses observations (point 174), pourrait laisser croire que la mise en œuvre de cet élément du programme est conditionnée à la discrétion d'organes ou d'instances internes à l'entreprise ou au groupe qui pourraient ne pas être tenus de se prononcer dans le délai annoncé de six mois sur l'engagement, voire même ne pas être habilités à l'autoriser ;

Considérant, s'agissant des engagements proposés par les sociétés Royal Canin et Mars Incorporated, qu'il est renvoyé à la Décision (points 310 et 311), qui énonce :

- que Royal Canin et Mars Incorporated ont proposé des engagements comportementaux le 7 mai 2010, soit avant la publication du document-cadre de l'Autorité de la concurrence du 10 février 2012 sur les programmes de conformité aux règles de concurrence ;

- que ces engagements consistent en la mise en œuvre d'un programme de conformité aux règles de concurrence prévoyant des mesures d'information, de sensibilisation et de formation des collaborateurs concernés par les règles de concurrence, des dispositifs de contrôle, de suivi et de responsabilisation individuelle, l'identification d'équipes de soutien, ainsi que tamise en place d'un dispositif d'alerte professionnel ;

- que le programme ne se limite pas au seul secteur d'activité de Royal Canin et s'étend à toutes les activités et entités du groupe Mars en France ;

Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu par les requérantes, l'Autorité a correctement apprécié la portée de la proposition d'engagements en relevant, pour en apprécier la pertinence, qu'elle comporte des mesures substantielles, en particulier en matière de suivi de responsabilisation, et que, comme cela vient d'être rappelé, elle s'étend également à l'ensemble des activités du groupe, au-delà du seul secteur de l'alimentation animale ;

Et considérant que Royal Canin et Mars Incorporated, d'une part, NPPF et Nestlé SA, d'autre part, ne sont fondées à se prévaloir, ni des propositions de réduction des sanctions formulées par le rapporteur général au titre des engagements proposés, qui ne lient pas le collège, ni des réductions de sanctions accordées par l'Autorité, dans d'autres espèces et, dès lors, au regard d'éléments distincts ;

Considérant qu'eu égard aux éléments généraux et individuels tels qu'ils ont été appréciés ci-dessus par l'Autorité conformément aux critères légaux et eu égard aux éléments du chiffre d'affaires en cause ainsi qu'aux montants respectifs des maximum légaux, éléments mentionnés par la Décision dans ses développements auxquels la cour se réfère expressément, les moyens et justificatifs avancés par les requérantes ne conduisent pas la cour à modifier le montant des sanctions infligées par l'Autorité de la concurrence ;

Considérant qu'il s'ensuit que les recours seront rejetés ;

Par ces motifs : Rejette les recours de la société Royal Canin et de la société Mars Incorporated, de la société Hill's Pet Nutrition et de la société Colgate-Palmolive Company, de la société Nestlé Purina Petcare France et de la société Nestlé SA contre la Décision n° 12-D-10 du 20 mars 2012 de l'Autorité de la concurrence, Condamne la société Royal Canin et la société Mars Incorporated, la société Hill's Pet Nutrition et la société Colgate-Palmolive Company, la société Nestlé Purina Petcare France et la société Nestlé SA aux dépens. Vu l'article R. 470-2 du Code de commerce, dit que sur les diligences du greffe de la Cour d'appel de Paris, le présent arrêt sera notifié, par lettre recommandée avec accusé de réception, à la Commission européenne, à l'Autorité de la concurrence et au ministre chargé de l'Economie.