CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 17 octobre 2013, n° 11-04310
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Fernandez
Défendeur :
Compagnie Internationale André Trigano (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Perrin
Conseillers :
Mmes Michel-Amsellem, Pomonti
Avocats :
Mes Fanet, de Lamaze, Olivier, Vanchet
FAITS ET PROCEDURE
La société Compagnie internationale André Trigano (la société CIAT), qui a pour activité la fabrication et la vente d'habitats de loisir, notamment de tentes de camping, a confié par un contrat d'agence commerciale internationale, conclu le 22 février 1996, sa représentation en Grande-Bretagne à M. Fernandez.
Le 25 mars 1996, M. Fernandez a créé la société de droit anglais Plotstone Limited, devenue Sunside Limited (la société Sunside) en avril de la même année.
Le 10 février 2007, une lettre portant en tête de la société Sunside, signée par M. Fernandez a annoncé à la société CIAT la résiliation du contrat d'agence commerciale avec un préavis de six mois.
La société CIAT a écrit le 4 juin 2008 à M. Fernandez pour lui indiquer que le solde de sa dette se montait à 41 514,71 , somme qui tenait compte des commissions qui lui étaient dues, et lui demander de verser un premier acompte.
Par acte du 8 décembre 2008, la société CIAT a fait assigner M. Fernandez devant le Tribunal de commerce de Paris, afin qu'il soit condamné à lui payer le solde de sa dette.
Par jugement en date du 10 février 2011, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Paris a :
- dit mal fondée la fin de non-recevoir formulée par M. Fernandez,
- condamné M. Fernandez à payer à la société CIAT la somme de 41 514,71 , avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires,
- condamné M. Fernandez à payer à la société CIAT la somme de 4 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Vu l'appel interjeté le 8 mars 2011 par M. Fernandez contre cette décision,
Vu les dernières conclusions, signifiées le 27 mai 2013 par M. Fernandez par lesquelles il est demandé à la cour de :
In limine litis: sur l'irrecevabilité,
- constater que le contrat d'agent commercial entre M. Fernandez et la société CIAT est caduc dès sa signature en 1996, pour ne jamais avoir été appliqué,
- constater, à défaut, que la société Sunside Limited s'est substituée à M. Fernandez dans l'application du contrat d'agent commercial du 22 février 1996 avec le plein accord et la totale connaissance de la société CIAT depuis 1996,
- constater qu'aucun lien contractuel n'existe entre la société CIAT et M. Fernandez,
- constater au surplus que les créances alléguées par la société CIAT dont le paiement est sollicité sont issues de factures ou de remboursement émis par la société CIAT sur la société Sunside Limited et non sur M. Fernandez,
- constater que la société CIAT n'a aucun intérêt à agir contre M. Fernandez,
Par conséquent,
- déclarer la société CIAT irrecevable en toutes ses demandes formulées dans son assignation par la suite contre M. Fernandez,
- infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 10 février 2011, en toutes ses dispositions,
- condamner la société CIAT au paiement à M. Fernandez de la somme de 46 932,66 avec intérêts au taux légal à compter du 1er septembre 2011, date de paiement de cette somme à la société CIAT,
- constater le caractère manifestement abusif de l'action intentée par la société CIAT,
- condamner la société CIAT à payer à M. Fernandez, à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, la somme de 20 000 ,
Au fond, à titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour ne relevait pas l'irrecevabilité de la société CIAT à agir contre M. Fernandez,
- constater que le contrat d'agent commercial n'a pas été nové sur Sunside Limited et dans ce cas que M. Fernandez est l'agent commercial de la société CIAT
- appliquer ledit contrat d'agent commercial en toutes ses dispositions,
- constater que le décompte de janvier 2007 au terme duquel la société CIAT dit que son agent commercial lui doit la somme de 41 514,71 est imparfait à quatre titres :
- constater que la société CIAT a reconnu devoir la somme de 13 001,05 à son agent commercial dans son propre décompte de septembre 2005 pour les opérations Four Hills et KGLC,
- constater qu'un surplus de commissions sur 2007 de 14 975,26 est dû à l'agent commercial au titre de ces factures émises auprès de 4 clients, factures opportunément dissimulées par la société CIAT,
- constater le défaut de production par la société CIAT de sa comptabilité et dire qu'une commission complémentaire estimative pour 2007 est due à M. Fernandez à hauteur de 10 000 ,
- constater que le compte entre les parties après compensation de part et d'autre s'établit seulement à 3 538,40 en faveur de la société CIAT,
- constater la rupture fautive du contrat d'agent commercial aux torts de la société CIAT et allouer à ce titre 3 années de commissions moyennes à M. Fernandez, soit un total de 80 915,89 ,
- ordonner la compensation entre ces sommes et constater que la société CIAT est donc débitrice de la somme de 77 377,49 vis-à-vis de M. Fernandez,
Par conséquent,
- infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 10 février 2011, en toutes ses dispositions,
- condamner la société CIAT au paiement à M. Fernandez de la somme de 46 932,66 avec intérêts au taux légal à compter du 2 septembre 2011, date de paiement de cette somme à la société CIAT, en remboursement des sommes indûment reçues,
- condamner la société CIAT au paiement à M. Fernandez de la somme de 77 377,49 ,
- constater le caractère abusif de l'action intentée par la société CIAT,
- condamner la société CIAT à payer à M. Fernandez, à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, la somme de 20 000 ,
En toutes hypothèses,
- condamner la société CIAT à payer la somme de 20 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
M. Fernandez expose que compte tenu du déroulement des relations entre lui et la société CIAT, soit le contrat d'agent commercial a été nové envers la société Sunside Limited, qu'il a créée au moment de la signature du contrat en 1996, et qui s'est substituée à lui, soit ce contrat n'est jamais entré en vigueur, faute d'exécution par lui et doit donc être considéré comme caduc. Par conséquent, il fait valoir que, dans un cas comme dans l'autre, l'action de la société CIAT est dirigée contre une mauvaise personne et qu'elle est donc irrecevable.
Il soutient que si la cour ne retient pas l'irrecevabilité cela signifie alors qu'il est l'agent commercial de la société CIAT et dans ce cas, il fait valoir que le décompte des sommes dues entre les parties doit être établi de manière correcte, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Par ailleurs, il fait valoir que la rupture du contrat d'agent commercial n'est pas de son fait mais répond à une stratégie menée par la société CIAT qui l'a contraint à mettre un terme à leurs relations en l'empêchant de livrer correctement les matériels.
Enfin, il ajoute que l'action de la société CIAT a été intentée de mauvaise foi puisque la société CIAT savait pertinemment qu'il n'était pas son cocontractant. Il demande réparation au titre de l'article 1382 du Code civil.
Vu les dernières conclusions signifiées le 15 mai 2013 par lesquelles la société CIAT demande à la cour de :
- déclarer irrecevable l'appel diligenté par M. Fernandez et à tout le moins ses dernières conclusions dans la mesure où l'adresse figurant dans ces deux actes de procédure est erronée,
- par voie de conséquence, débouter M. Fernandez de l'intégralité de ses demandes,
- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné M. Fernandez au paiement de la somme de 41 514,71 outre les intérêts au taux légal à compter du jugement ainsi que la somme de 4 000 au titre de l'article 700,
- infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté la société CIAT de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 15 000 en raison de préjudice subi par la société CIAT du fait de la rétention abusive par M. Fernandez des fonds reçus des clients et ce, depuis l'année 2005,
Et statuant à nouveau,
- condamner M. Fernandez au paiement de la somme de 15 000 en raison du préjudice subi par la société CIAT du fait de la rétention abusive par M. Fernandez des fonds reçus des clients et ce, depuis l'année 2005,
- débouter M. Fernandez de toutes ses fins, moyens, arguments et demandes et notamment de son moyen d'irrecevabilité et de toutes ses demandes de dommages intérêts, indemnités de rupture, article 700 ainsi que de celles formées au titre de commissions qui ne sont nullement dues,
- dire et juger qu'en tout état de cause M. Fernandez n'a exercé aucune action dans le délai d'un an à la suite de la rupture du contrat laquelle lui est imputable et qu'il est donc forclos dans son action,
- dire et juger que le contrat d'agence commerciale a été rompu unilatéralement et sans motif légitime par M. Fernandez impliquant ainsi que celui-ci n'est nullement en droit de prétendre à une indemnité de rupture dudit contrat,
- dire et juger qu'en toute hypothèse le comportement fautif de M. Fernandez implique que le contrat a été rompu à ses propres torts et ne saurait par conséquent ouvrir droit à aucune indemnisation à son profit,
- condamner M. Fernandez au paiement d'une somme complémentaire de 5 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile correspondant aux frais irrépétibles exposés en cause d'appel par la société CIAT.
La société CIAT soutient que la déclaration d'appel et les conclusions déposées par M. Fernandez sont irrecevables puisque celui-ci n'aurait pas communiqué sa véritable adresse.
Elle précise que M. Fernandez est son seul interlocuteur et que celui-ci est, à son égard, contractuellement tenu par le contrat d'agence commerciale auquel aucun avenant n'a été adjoint, qui aurait opéré un transfert à une autre personne physique ou morale.
Elle ajoute que M. Fernandez ne peut pas invoquer la novation dont les conditions ne sont pas remplies et que la référence à "Sunside", qui est l'enseigne de M. Fernandez, ou sous agent de celui-ci, n'impliquait nullement la disparition des relations contractuelles existant entre M. Fernandez et elle en vertu du contrat d'agence commerciale conclu en 1996, qui a continué de produire tous ses effets.
Elle fait valoir que les demandes formulées contre elle, pour les années 2007 et 2008, sont infondées et conteste en tout état de cause la réalité des prestations invoquées par M. Fernandez ainsi que le compte qu'il présente, lequel ne repose sur aucune réalité tangible.
Par ailleurs, elle soutient que, outre le fait que toute demande soit forclose, M. Fernandez ne démontre aucun préjudice et que c'est de manière infondée qu'il entend obtenir la compensation entre les sommes qu'il aurait dû lui reverser depuis 2005 et le préjudice qu'il invoque.
Enfin, elle estime que la mauvaise foi de l'appelant et son comportement depuis 2005 justifient qu'il soit condamné à lui verser une somme complémentaire de 15 000 correspondant au préjudice qu'elle a subi du fait des promesses réitérées de son ancien agent, qui n'ont jamais été tenues.
La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la recevabilité de l'appel de M. Fernandez
La société CIAT soutient que M. Fernandez indique une adresse à Fontainebleau depuis le début de la procédure qui n'est pas sa véritable adresse et que les diverses recherches qu'elle a effectuées, ne lui permettent pas de localiser l'appelant, ce qui lui cause préjudice, car elle ne pourrait, dans ces conditions, exécuter contre lui le reliquat des condamnations prononcées contre lui.
Cependant, elle ne rapporte aucune preuve des difficultés qu'elle aurait pu rencontrer pour localiser M. Fernandez, ni même qu'elle aurait eu à effectuer des recherches particulières à cet égard et que celles-ci auraient été vaines. Sa demande d'irrecevabilité de l'appel doit donc être rejetée.
Sur la recevabilité de la demande en paiement de la société CIAT à l'encontre de M. Fernandez
M. Fernandez soutient que la société CIAT est liée contractuellement à la société Sunside et qu'elle ne peut agir en paiement directement contre lui. Elle fait valoir à ce sujet que le contrat d'agent commercial conclu entre lui et la société CIAT a été nové et que, depuis 1996, toutes les relations se sont déroulées entre les deux sociétés. Il invoque à ce titre que les factures ont toujours été établies au nom de la société Sunside, les règlements ont été adressés à celle-ci et les courriers relatifs à l'exécution du contrat d'agence commerciale ont toujours été échangés entre les sociétés CIAT et Sunside.
Il résulte de l'article 1271 du Code civil que la novation par changement de débiteur s'opère de deux manières, soit lorsque le débiteur contracte envers son créancier une nouvelle dette qui est substituée à l'ancienne, laquelle est éteinte, soit lorsqu'un nouveau débiteur est substitué à l'ancien qui est déchargé par le créancier ;
Par ailleurs, l'article 1273 du même Code précise que la novation ne se présume pas et qu'il faut que la volonté de l'opérer résulte clairement de l'acte.
Les pièces produites par M. Fernandez à l'appui de sa prétention à ce sujet démontrent effectivement que depuis l'origine les factures établies dans le cadre du contrat d'agence le sont par la société Sunside à la société CIAT ou inversement, que la société CIAT a effectué des ordres de virement au bénéfice de la société Sunside, que les échanges de courriers et de courriels se sont effectués entre les société Sunside et CIAT, enfin que les décomptes établis par la société CIAT mentionnent ce qui est dû par la société Sunside et non par M. Fernandez.
Cependant, aucun de ces documents n'apporte la preuve que M. Fernandez, débiteur de la société CIAT, aurait contracté envers elle une nouvelle dette qui aurait éteint une dette préalable, ni que la société CIAT aurait déchargé expressément M. Fernandez de la dette qu'aurait contracté la société Sunside envers elle.
En effet, ni le fait que les factures envers la société CIAT aient été établies par la société Sunside sur son papier à en-tête et qu'elles aient été réglées par la première, ni qu'à l'inverse, la société CIAT ait établi des factures envers la société Sunside, que celle-ci aurait payées, ne démontrent que la société CIAT aurait expressément accepté que M. Fernandez, avec lequel elle avait conclu le contrat d'agent commercial, se substitue la société Sunside, alors même qu'il continuait à effectuer les prestations sous le nom de cette société. L'envoi par la société CIAT d'un agent pour contrôler les comptes de la société Sunside n'établit pas non plus l'acceptation par ce mandant d'un autre mandataire que M. Fernandez. Le document intitulé "Situation Sunside du 30.09.2005 et échelonnement de la dette", signé par M. Fernandez ne démontre pas plus que la société CIAT aurait consenti à un changement de débiteur. Le fait que sa signature soit suivie de la mention "Sunside Ltd" n'apportant aucun élément de preuve à ce sujet. Tous ces documents démontrent en réalité que la société CIAT a accepté que la société Sunside pouvait être sa débitrice, mais nullement qu'elle a, dans le même temps, accepté de décharger M. Fernandez des sommes qui pouvaient lui être dues dans le cadre de l'exécution du contrat d'agent.
Enfin les échanges de lettres et de courriels montrent que M. Fernandez n'a jamais clairement établi une dissociation entre sa personne et la société Sunside. Ainsi dans un courriel du 19 octobre 2006 écrivait-il à M. Galpin de la société CIAT "Je fais le nécessaire pour vous payer la somme de Sunside. Une fois cette somme de 24 K réglée, entre les commissions de 2007 et les ajustements que nous devons faire, ainsi que quelques factures que je dois vous faire, nous ne serons pas très loin du solde", dans un autre du 22 novembre 2006, il précisait "Je vous laisse le soin de considérer de me rendre le point de commission auquel j'avais renoncé pour vous aider à avoir la commande (...)".
Enfin, si par une lettre du 15 janvier 2007 adressée à M. Trigano de la société CIAT, M. Fernandez indiquait "nous devons faire le nécessaire afin que les comptes entre Sunside et CIAT soient réglés (...). Sunside n'a pas de liquidité ni d'actif. La société a cessé de fait toute activité afin d'éviter de créer plus de dette", les termes de cette lettre n'apportent non plus de démonstration de ce que la société CIAT aurait manifesté son accord à ce que la société Sunside soit son débiteur unique au bénéfice de M. Fernandez. Ce n'est finalement que par la lettre du 10 février 2007 que M. Fernandez a clairement manifesté qu'il considérait que seule la société Sunside était débitrice de la société CIAT en indiquant "Je note que vous ne vous adressez pas à Sunshine Ltd mais à Carlos Fernandez personnellement et je prendrai ceci comme une erreur de votre part, tout en vous rappelant que les comptes qui nous occupent sont entre CIAT et Sunside Ltd. (...)".
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. Fernandez ne rapporte pas la preuve qu'une novation du contrat conclu entre lui et la société CIAT le 22 février 1996 se serait opérée lui substituant la société Sunside.
Ces mêmes éléments, ainsi que les témoignages, courriers et courriels, qu'il apporte lui-même aux débats, démontrent qu'il a lui-même exécuté le contrat d'agence sous couvert, ou par l'intermédiaire de la société Sunside et il ne saurait se prévaloir de la caducité de celui-ci, ni d'une nouvelle relation commerciale entre la société CIAT et la société Sunside.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception d'irrecevabilité invoquée par M. Fernandez.
Sur les sommes dues entre les parties
Les factures Four Hills et KGLC
Les parties ont arrêté un solde de leurs comptes au 30 septembre 2005 qui prévoyait un échelonnement de la dette de la société Sunside, qui est ainsi qu'il a été retenu ci-dessus, en réalité, la dette de M. Fernandez. Ce document est signé par celui-ci.
Ce document, comporte une série de calculs effectués à partir d'une somme de 120 441,86 correspondant au "solde Sunside au 30.09.05". Après déduction d'un certain nombre de montants correspondant à des commissions figurent les mentions suivantes :
"Total restant dû par Sunside à fin septembre 2005 / 53 836,79
Acompte de novembre / 1 500
Acompte de décembre 1 500
Clients en attente de paiement sur Sunside facturés par Sunside Four Hills / 4 001,05
KGLC / 9000 "
A la suite de ces mentions, figure encore l'énoncé de quatre acomptes pour janvier à avril "à Recevoir" pour un total de 7 500 . L'ensemble fait l'objet de la conclusion intermédiaire "Total restant dû par Sunside fin avril 2006 : 30 335,74".
Cette conclusion est suivie d'une liste d'acomptes de 3 000 à recevoir entre les mois de mai 2006 à janvier 2007, puis d'un acompte complémentaire de 3 335,74 en février 2007. Le total définitif "restant dû par Sunside à fin février 2007" étant de "0 ".
Le "Total restant dû par Sunside fin avril 2006 : 30 335,74" a été calculé en déduisant de la somme de 53 836,79, les sommes de 7 500 au titre des acomptes de novembre et décembre et celle de 13 001,05 , représentant le total de 4 001,05 et 9 000 relatifs aux paiements des sociétés Four Hills et KGLC. Il s'en déduit que lors de l'établissement de ce décompte par la société CIAT, celle-ci considérait que les sommes énoncées comme étant relatives aux sociétés Four Hills et KGLC pour un total de 13 001,05 devaient venir en déduction des sommes dues par M. Fernandez à la société CIAT.
Il n'est donc pas compréhensible qu'elle n'ait pas tenu compte de ces sommes dans le décompte qu'elle a établi ultérieurement le 4 juin 2008 en reprenant comme base de départ celle de 120 441,86 due au 30.09.05 et qu'elle persiste à soutenir que cette somme devait être versée par M. Fernandez et non par elle. Elle ne démontre d'ailleurs pas à ce sujet que celui-ci aurait reçu un paiement de ces sommes ou qu'il se serait engagé à en supporter le paiement.
Il convient donc d'infirmer le jugement sur ce point et de déduire la somme de 13 000,01 des sommes dues par M. Fernandez à la société CIAT.
Les commissions dues pour les exercices 2007 et 2008
Il n'est pas contesté que le contrat a été rompu par M. Fernandez le 10 février 2007 avec un préavis de six mois et qu'il a donc pris fin le 31 août 2007. La société CIAT ne conteste pas non plus que toutes les commandes passées en Angleterre ouvraient droit à commission pour M. Fernandez, ni que le préavis a bien été exécuté.
En se fondant sur des factures qui lui ont été transmises par ses anciens clients, M. Fernandez revendique le paiement de la somme de 13 538,40 au titre de commissions dues pour des commandes de janvier à fin août 2007 et de 10 000 pour la même période au titre de factures qu'il n'aurait pas pu obtenir d'autres clients et faute pour la société CIAT d'avoir produit ses livres comptables.
La société CIAT fait valoir sur ce point que le décompte établi par elle et transmis à M. Fernandez le 4 juin 2008 a pris en compte un montant de solde de commissions pour plus de 15 000 et que les factures produites par l'appelant correspondent à des livraisons réalisées jusqu'en juin 2007, soit avant la rupture du contrat, qui ont été comptabilisées dans les rubriques "Commissions Eurocamp (9 777 ) et Commission sur solde 5 335,30 ".
M. Fernandez produit un certain nombre de factures à en-tête "Maréchal", dont les pièces du dossier permettent de constater qu'il s'agit d'une marque exploitée par la société CIAT dont les coordonnées se trouvent d'ailleurs en bas de page. Ces factures adressées aux clients Tents direct, Gwent Camping, Pyramids Products et Camping Division Eurocamp, entre les mois de mars et septembre 2007 pour un montant total de 249 587,68 . Il réclame paiement de sa commission de 6 % sur ces ventes soit la somme de 14 975,26 .
L'imprécision des mentions "Commissions Eurocamp (9 777 ) et Commission sur solde 5 335,30 " ne permettent pas à la cour, faute d'autres éléments venant conforter cette allégation, de vérifier que ces deux mentions concernent bien des commissions dues au titre des commandes passées en 2007, alors que le décompte du 4 juin 2008 ne fait état que de commissions 2005 et 2006.
Il n'est donc nullement établi que les commissions auxquelles avait droit M. Fernandez pour l'année 2007 aient été comptabilisées.
En revanche, M. Fernandez ne démontre pas qu'il aurait réclamé les livres de comptes ou autres justificatifs lui permettant de calculer les commissions dues au titre d'autres clients, il ne justifie pas non plus de l'identité de ces autres clients et qu'il les aurait démarchés pendant la durée du préavis et par conséquent, sa demande de paiement de commissions complémentaires évaluées par lui à 10 000 , doit être rejetée.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société CIAT devait à M. Fernandez au titre des commissions pour 2007 une somme de 14 975,26 .
L'indemnité de rupture revendiquée par M. Fernandez
Il résulte des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce que, si en cas de rupture du contrat, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice du préjudice subi, d'une part, il perd ce droit lorsqu'il n'a pas notifié au mandant, dans le délai d'un an suivant la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits, d'autre part, il ne peut le revendiquer s'il a pris l'initiative de la cessation du contrat, à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant.
La société CIAT fait valoir que M. Fernandez n'ayant pas fait connaître qu'il entendait faire valoir ses droits dans le délai d'un an après la cessation du contrat, ne peut réclamer ni les commissions qui ne lui auraient pas été payées ni indemnité de rupture.
On relèvera sur ce point à titre liminaire que le délai d'un an fixé par l'article L. 134-12 précité, ne concerne que le versement de l'indemnité de rupture et nullement celui des commissions non payées.
S'agissant de l'indemnité de rupture, il résulte des termes mêmes de la lettre de rupture adressée par M. Fernandez que la société CIAT était avertie de ce qu'il entendait réclamer le paiement de l'indemnité de rupture. En effet, il indiquait "Si vous décidez de porter nos affaires devant les tribunaux (...), Sunside, humblement, demandera aussi ce que l'agent est en droit de demander (...), une réparation du préjudice causé par le non-respect de vos obligations contractuelles et par l'abandon de l'activité objet de notre contrat et du manque à gagner causé par la nouvelle situation de la SA CIAT égale à 3 ans de commissions et un minimum de 60 000 ". Par ces termes, M. Fernandez avait clairement manifesté son intention de demander le paiement de l'indemnité de rupture au moment même de celle-ci, la société CIAT ne saurait donc invoquer l'application du délai de déchéance, et non de prescription comme elle l'indique dans ses conclusions.
En ce qui concerne l'imputabilité de la rupture, M. Fernandez a indiqué dans sa lettre que sa décision était motivée par le "non-respect, grave réitéré et prolongé dans le temps de vos obligations contractuelles ayant causé des préjudices pour lesquels je vous demande une compensation égale à trois ans de commissions, et en tout cas un minimum de 60 000 ". Les principaux reproches énoncés par M. Fernandez dans les développements de sa lettre résident, d'une part, dans le fait d'avoir fermé l'usine de Rosières, fabriquant des matériels concernés par le contrat d'agence, sans l'avoir informé de cette décision qui avait des conséquences importantes pour son activité, d'autre part, d'avoir désinvesti progressivement la branche d'activité pour laquelle il la représentait. La société CIAT fait valoir que M. Fernandez ne s'est jamais plaint de dysfonctionnements dans les livraisons qu'elle effectuait, mais qu'en revanche, il était dans la période précédant la rupture, débiteur envers elle d'un total de sommes importantes ce qu'il reconnaissait. Elle en déduit que la fermeture de l'usine de Rosières n'a été pour lui qu'un prétexte pour revendiquer une indemnité de rupture.
M. Fernandez produit un certain nombre de courriels, qui font, dans leur ensemble, état d'interrogations au sujet de livraisons, mais qui ne témoignent pas de réelles difficultés ou de carence dans les livraisons de ses clients laquelle démontrerait un désintérêt particulier à leur égard. Par ailleurs il n'est pas établi que des informations relatives à la fermeture de l'usine de Rosières lui auraient été volontairement cachées, puisqu'il a constaté lui-même la réduction progressive de l'activité, et il ne démontre d'ailleurs pas avoir posé de question à ce sujet. Enfin, il n'est pas contestable, d'une part, que lui-même avait laissé, préalablement à la rupture, s'accumuler un passif important envers la société CIAT en 2005 et 2006, résultant des ventes par Internet réalisées par lui et dont il devait reverser le paiement à la société CIAT, d'autre part, qu'il n'a jamais, dans les échanges de courriers, fait mention des difficultés qu'il dénonce dans sa lettre. Au contraire, dès le 15 janvier 2007, soit un mois avant la lettre de rupture, il écrivait à M. Trigano de la société CIAT que cette année était "plus que probablement, la dernière année de leur collaboration", ce qui démontre qu'il envisageait alors une rupture amiable.
Il se déduit de l'ensemble de ces éléments que M. Fernandez, qui a pris l'initiative de la rupture et ne démontre pas que cette décision était justifiée par des circonstances imputables à la société CIAT, ne peut revendiquer le paiement de l'indemnité de rupture et que c'est à juste titre que le tribunal a rejeté sa demande à cet égard.
En conclusion, il convient au vu de ce qui précède de déduire de la somme de 41 514,71 due par M. Fernandez au 4 juin 2008, selon le décompte de celle-ci, les sommes de 13 000,01 et de 14 975,26 . La somme due par M. Fernandez à la société CIAT est donc de 13 539,44 .
Le jugement sera infirmé en conséquence sur le montant de la condamnation.
Sur les demandes de dommages-intérêts
La demande de la société CIAT
La société CIAT ne démontre pas qu'elle aurait subi un préjudice du fait du retard de reversement des sommes que M. Fernandez lui devait, alors qu'elle même était débitrice d'un certain nombre de commissions à son égard.
Par ailleurs, M. Fernandez a dans le cadre de la procédure initiée par la société CIAT fait valoir la défense de ses droits, sans que cette défense ne dégénère en abus. Les moyens qu'il a développés en première instance et en appel, bien que n'étant pas fondés n'ont manifestement pas été invoqués de mauvaise foi et la demande de la société CIAT sera rejetée.
La demande de M. Fernandez
Ainsi qu'il résulte des développements précédents, c'est de manière fondée que la société CIAT a mis en cause M. Fernandez à titre personnel. Le fait qu'elle ait fait exécuter le jugement qui était revêtu de l'exécution provisoire ne peut être retenu contre elle. La demande de M. Fernandez sera donc elle aussi rejetée.
Sur les frais irrépétibles
Au regard de l'ensemble de ce qui précède il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Rejette la demande de la société CIAT tendant à fait constater l'irrecevabilité de l'appel, Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné M. Fernandez à payer à la société CIAT la somme de 41 514,71 ; Statuant à nouveau, Condamne M. Fernandez à payer à la société CIAT la somme de 13 539,44 outre intérêts au taux légal à compter du jugement ; Rejette toutes les demandes autres, plus amples ou contraires des parties ; Dit n'y avoir lieu à condamnation en application de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne M. Fernandez aux dépens de l'instance qui seront recouvrés en application de l'article 699 du Code de procédure civile.