CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 15 novembre 2013, n° 12-09953
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Service Affaires (SAS)
Défendeur :
Service Exécutive Paris (SAS), Risbourg, Service Prestige (SA), Air Limousine (SARL), Service Réservation (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Aimar
Conseillers :
Mmes Nerot, Renard
Avocats :
Mes Fisselier, Szleper, Bernabe, Gougé, Teytaud, Maggiani
La société Service Affaires a pour activité le transport en voiture particulière avec chauffeur. Elle est titulaire de la marque verbale française "Service Affaires" déposée le 26 septembre 2008 et enregistrée sous le n° 3600999 pour désigner les "véhicules" en classe 12 et les services de "transports" en classe 39, et est également titulaire du nom de domaine "serviceaffaires.fr" enregistré le 4 novembre 1999.
La société Service Exécutive Paris, ci-après la société Service Exécutive, qui a pour activité la mise à disposition de voitures de grande remise, la location de voitures et limousines avec et sans chauffeur, les services divers de mobilité et logistique de transport et le transport de personnes, a réservé les 17 mai 2010 et 14 avril 2011 les noms de domaine "servicesaffaires.com", "service-affaire.com" et "serviceaffaire.com", tandis que Monsieur Paul Risbourg, son président et ancien salarié de la société Service Affaires, a réservé lui-même le 16 juin 2008 le nom de domaine "service-affaires.com".
L'ensemble de ces noms de domaine dirigeait vers le site Internet de la société Service Exécutive Paris, lequel mentionnait en outre les adresses Internet des sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation, ces sociétés exerçant également une activité dans le domaine de la réservation et de la location de véhicules avec chauffeur.
La société Service Affaires a dans ce contexte fait assigner à jour fixe, par exploits d'huissier des 13 et 14 décembre 2011, les sociétés Service Exécutive Paris, Service Réservation, Air Limousine ainsi que Monsieur Paul Risbourg en contrefaçon de la marque n° 3 600 999 ainsi qu'en concurrence déloyale pour atteinte à sa dénomination sociale et à son nom de domaine.
Par jugement contradictoire en date du 29 mars 2012 dont appel, le tribunal a prononcé l'annulation de l'assignation en justice délivrée à chacun des défendeurs du fait d'une erreur dans l'indication de l'adresse de la société requérante causant un grief aux défendeurs ayant formé des demandes reconventionnelles et qui souhaiteraient faire signifier le jugement, et a alloué à chacun des défendeurs la somme de 2 000 euros sur le fondement de l' article 700 du Code de procédure civile .
La société Service Affaires a fait appel de ce jugement par déclaration au greffe du 31 mai 2012.
Par dernières conclusions signifiées le 18 septembre 2013, la société Service Affaires demande à la cour de :
- déclarer irrecevables et en tout cas mal fondés Monsieur Paul Risbourg, la société Service Exécutive Paris, la société Service Prestige, la société Air Limousine et la société Service Réservation de toutes leurs demandes,
- lui adjuger à l'entier bénéfice de son appel et de ses conclusions d'appel des 31 août 2012 et 6 septembre 2013 (sic),
- lui donner acte de ce que, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Nanterre sous le n° 350 500 195, n° de gestion 1993 B 02197, l'adresse de son siège social au moment de l'assignation devant le Tribunal de grande instance de paris était (...) et que par décision de sa présidence en date du 25 janvier 2013, son siège social est fixé au (...),
- constater que l'assignation des 13 et 14 décembre 2011 délivrée aux différents intimés remplit les conditions de validité prévues par les dispositions des articles 56 et 648 du Code de procédure civile et qu'en toute hypothèse, l'erreur dans l'adresse de son siège n'a causé aucun grief aux défendeurs,
- en toute hypothèse, constater que cette erreur a été régularisée tant dans la déclaration d'appel que dans les conclusions d'appel et que la prétendue irrégularité de l'assignation a été couverte conformément aux dispositions des articles 115 et 121 du Code de procédure civile ,
- réformer en conséquence en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
- dire et juger que M. Paul Risbourg et la société Service Exécutive Paris, en procédant à l'enregistrement des noms de domaine "www.service-affaires.com", "www.servicesaffaires.com", "www.serviceaffaire.com" et "www.service-affaire.com", ont porté atteinte à ses droits sur sa dénomination sociale et sur son nom de domaine www.serviceaffaires.fr et ont commis des actes de concurrence déloyale,
- dire et juger que les sociétés Service Exécutive Paris, Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation, en utilisant un lien internet entre les noms de domaine précités et un site Internet présentant leur activité, ont commis des actes de concurrence déloyale par le détournement de sa dénomination sociale et de son nom de domaine, et de détournement de sa clientèle,
- condamner in solidum les intimés à lui payer une indemnité de 100 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale,
- interdire à Monsieur Paul Risbourg et aux sociétés Service Exécutive Paris, Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation d'utiliser sous quelque forme et à quelque titre que ce soit la dénomination "Service Affaires" pour promouvoir leur activités, et cela sous astreinte de 1 000 euros par infraction constatée à partir de la signification de l'arrêt à intervenir,
- condamner in solidum les intimés à lui payer une indemnité de 25 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens, dont distraction au profit de son conseil.
Par dernières conclusions signifiées le 21 juin 2013, la société Service Exécutive Paris et son président, Monsieur Paul Risbourg entendent voir :
- déclarer irrecevables les demandes de la société Service Affaires,
- confirmer le jugement entrepris en ce que le Tribunal de grande instance de Paris a considéré comme nulles les assignations à jour fixe délivrées les 13 et 14 décembre 2011 et condamné la société Service Affaires à verser à chacun des défendeurs la somme de 2 000 euros au titre de l' article 700 du Code de procédure civile ,
à titre subsidiaire,
- dire et juger qu'ils ne se sont pas rendus responsables d'actes de concurrence déloyale en procédant à l'enregistrement des noms de domaines "services-affaires.com", "servicesaffaires.com", "serviceaffaire.com" et "service-affaire.com", ni d'actes de concurrence déloyale par détournement de dénomination sociale et de nom de domaine et de détournement de clientèle de cette dernière en ayant prétendument utilisé un lien internet entre les noms de domaines précités et le site Internet de la société Service Exécutive,
- débouter en conséquence l'appelante de son action en concurrence déloyale,
- subsidiairement, dire et juger que la société Service Affaires ne rapporte pas la preuve du préjudice allégué au titre des actes argués de concurrence déloyale,
- dire et juger que les mesures de condamnation sollicitées par la société Service Affaires sont mal fondées et disproportionnées au regard des faits de l'espèce,
- débouter en conséquence la société Service Affaires de sa demande indemnitaire,
en tout état de cause,
- condamner la société Service Affaires à leur payer la somme de 20 000 chacun à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- condamner la société Service Affaires à leur payer la somme de 10 000 euros chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de son conseil ;
Par dernières écritures signifiées le 26 septembre 2013, les sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation demandent à la cour de :
- confirmer le jugement du 29 mars 2012 en ce qu'il a annulé l'assignation à jour fixe délivrée à tous les intimés et condamné la société Service Affaires à payer à chacune la somme de 2 000 sur le fondement de l' article 700 du Code de procédure civile , ainsi qu'aux entiers dépens,
en tout état de cause,
- annuler la marque française dénominative "Service Affaires" déposée par la société Service Affaires le 26 septembre 2008 et enregistrée par l'INPI sous le n° 3 600 999,
- rejeter l'ensemble des demandes dirigées contre elles par la société Service Affaires,
- leur donner acte qu'elles se réservent le droit de demander à Monsieur Paul Risbourg et à la société Service Exécutive Paris garantie de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre dans cette affaire,
- condamner la société Service Affaires à leur payer à chacune la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice causé par le caractère abusif de son action,
- condamner la société Service Affaires à leur payer à chacune la somme de 30 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, en sus de la somme allouée en première instance, ainsi qu'aux entiers dépens.
Le 18 septembre 2013, les sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation ont, sous la rubrique "texte divers" dans le système de communication électronique dit RPVA, signifié des concluions de rejet des conclusions et pièces de la société Service Affaires postérieures au 16 septembre 2013 (sic).
Le 19 septembre 2013 la société Service Exécutive Paris a également signifié des conclusions de rejet des conclusions de la société Service Affaires du 18 septembre 2013 pour violation du principe du contradictoire.
La société Service Affaires a conclu le 24 septembre 2013 au rejet de ces demandes.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 septembre 2013.
SUR CE,
Sur les demandes de rejet de conclusions :
Considérant que les intimés ont renoncé à l'audience de plaidoiries du 3 octobre 2013 à leurs demandes de rejet de conclusions et pièces signifiées par la société Service Affaires le 18 septembre 2013, ce qui a été acté par le greffier ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer sur les demandes de rejet étant observé en tout état de cause que les sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation ont signifié de nouvelles écritures le 26 septembre 2013, soit le jour de la clôture ;
Sur la recevabilité des demandes :
Considérant qu'aucune des parties n'invoquant de fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de déclarer irrecevables tant les demandes de la société appelante que celles des intimés ;
Que par ailleurs en application de l' article 954 du code de procédure civile la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures et à défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer sur le grief allégué dans les motifs des dernières écritures de la société appelante relatif à l'atteinte à son nom commercial par la réservation et l'usage des noms de domaine litigieux dès lors que cette demande n'est pas reprise par le dispositif de ces mêmes écritures ;
Que de même, il n'y a pas lieu d'adjuger à la société Service Affaires l'entier bénéfice de son appel et de ses conclusions d'appel des 31 août 2012 et 6 septembre 2013 comme elle le demande ;
Sur la nullité de l'assignation :
Considérant que la société appelante poursuit l'infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré nulle l'assignation délivrée les 13 et 14 décembre 2011 aux sociétés Service Exécutive Paris, Service Réservation, Air Limousine et à Monsieur Paul Risbourg au motif qu'il existait une erreur dans l'indication de l'adresse de la société requérante causant ainsi un grief aux défendeurs ayant formé des demandes reconventionnelles et qui souhaiteraient faire signifier le jugement ;
Qu'elle fait valoir que l'erreur d'adresse dans l'assignation n'a causé aucun grief aux intimés, ceux-ci étant parfaitement en mesure, au vu de l'acte et des pièces jointes, de l'identifier, que le grief caractérisé par le tribunal n'était ni actuel ni sérieux, les défendeurs vérifiant toujours l'adresse du demandeur avant de procéder à la signification d'un jugement et qu'en tout état de cause l'absence de grief est confirmée par la signification du jugement faite par les intimés ; qu'elle ajoute avoir régularisé cette erreur d'adresse par sa déclaration d'appel et les différentes conclusions signifiées devant la cour, et sur le grief tenant à l'absence de la requête à fin d'assigner à jour fixe, que la nullité pour ce motif n'est prévue par aucun texte, qu'aucun grief n'est invoqué de ce chef et que d'ailleurs, le grief manque de fait puisque l'acte notifié aux intimés comporte, à la première page, la demande d'autorisation de délivrer l'assignation à jour fixe en raison de l'urgence ;
Considérant que les intimés répliquent que l'erreur dans l'assignation concernant l'adresse de la société Service Affaires leur a nécessairement causé un grief, puisqu'ils ne pouvaient ni proposer d'issue amiable, ni signifier avec certitude le jugement rendu en premier ressort et que la société appelante n'a procédé à aucune régularisation durant la procédure de première instance ; qu'ils ajoutent que l'absence de la requête au sein de l'assignation est un second motif de nullité et constitue un manquement à la règle du contradictoire ;
Considérant ceci exposé, que selon l' article 648 du Code de procédure civile tout acte d'huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs, notamment, si le requérant est une personne morale, sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement et ces mentions sont prescrites à peine de nullité ;
Que conformément à l'article 114 alinéa 2 du même Code la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public ;
Qu'en l'espèce il n'est pas contesté qu'à la date de la délivrance de l'assignation à jour fixe devant le Tribunal de Grande Instance de Paris aux intimés, l'adresse du siège social de la société Service Affaires n'était pas celle indiquée sur l'acte à savoir (...) mais, et ce jusqu'au 25 janvier 2013, (...) ;
Qu'étant précisé que l'adresse erronée était celle du président de la société Service Affaires, soit celle du siège de la société Service Affaires développement qui la représente, il y a lieu de relever que concomitamment à l'acte a été produit en pièce n° 1 un extrait Kbis de la société Service Affaires qui indiquait son adresse exacte ;
Que cet élément permettait donc aux intimés d'identifier la société Service Affaires, ce d'autant que cette dernière a indiqué tant dans sa déclaration d'appel que dans les conclusions devant la cour, l'adresse exacte de son siège social ;
Que dès lors les sociétés intimées ne peuvent se prévaloir d'aucun grief que leur aurait causé l'erreur invoquée ;
Considérant par ailleurs que l'acte notifié aux sociétés intimées les 12 et 14 décembre 2011 comporte sur sa première page la demande de la société Service Affaires tendant à être autorisée à délivrer à jour fixe, en raison de l'urgence, l'assignation transcrite ;
Que le second moyen manque donc en fait ;
Considérant que le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a déclaré nulle l'assignation délivrée les 13 et 14 décembre 2011 par la société Service Affaires aux sociétés Service Exécutive Paris, Service Réservation, Air Limousine et à Monsieur Paul Risbourg ;
Sur la concurrence déloyale :
Considérant que la société Service Affaires incrimine l'enregistrement le 16 juin 2008 par Monsieur Paul Risbourg, employé par elle de mai 1996 à juin 2002, et les 17 mai 2010 et 14 avril 2011 par la société Service Exécutive Paris dont Monsieur Paul Risbourg est le dirigeant, des noms de domaine www.service-affaires.com pour le premier et www.servicesaffaires.com, www.serviceaffaire.com et www.service-affaire.com pour la seconde, portant ainsi atteinte à sa dénomination sociale ainsi qu'à son nom de domaine www.serviceaffaires.fr du fait de la proximité entre les signes en présence et du risque de confusion existant entre les services respectivement proposés, la société Service Exécutive Paris lui ayant fait perdre en outre une partie de ses investissements en matière d'image et de communication et ayant profité, sans bourse délier, de ses investissements ;
Qu'elle ajoute que les sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation doivent être tenues comme co-responsables avec la société Service Exécutive Paris, comme étant liées entre elles par leurs dirigeants, tous deux figurant parmi ses anciens salariés et ayant bénéficié de la présentation de leurs activités sur le site Internet litigieux et rappelle qu'elle n'invoque plus en cause d'appel la marque n° 3 600 999, de sorte que les sociétés intimées sont mal fondées à se prévaloir d'une action en contrefaçon de cette marque et à invoquer la nullité de celle-ci ;
Que la société Service Exécutive Paris et Monsieur Paul Risbourg font en substance valoir qu'aucune faute ne peut leur être imputée, dès lors que signe "Service Affaires" est un terme banal, excluant tout risque de confusion, et que l'internaute, en se rendant sur les noms de domaine litigieux, avait parfaitement conscience d'être en présence de services commercialisés par une entité distincte de celle de l'appelante ;
Que les sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation ajoutent que
la demande en concurrence déloyale de l'appelante masque une demande en contrefaçon de marque, puisqu'elle se fonde explicitement sur une reproduction à l'identique de son signe pour des produits et services identiques ou similaires alors que la marque "Service Affaires" doit être annulée, celle-ci présentant un libellé trop large pour déterminer les produits et services réellement déposés ; qu'elle ajoute que du fait de la quasi-inexistence de trafic sur le site des intimés, la probabilité d'un préjudice causé à la société Service Affaires est infime, et que les investissements en communication allégués par cette dernière ne sont pas démontrés ;
Considérant ceci exposé, qu'il a été dit que la société Service Affaires n'oppose plus en cause d'appel la marque verbale "Service Affaires" n° 3600999 dont elle est titulaire et la cour n'est pas saisie d'une action en contrefaçon de marque mais bien d'une action en concurrence déloyale fondée sur les dispositions de l'article 1382 du Code civil ;
Qu'en conséquence, par application des dispositions de l'article 70 du Code de procédure civile , la demande incidente en nullité de la marque n° 3600999 formée par les sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation qui ne s'inscrit pas dans le périmètre des droits que l'appelante entend opposer dans le cadre du présent litige, est irrecevable ;
Considérant par ailleurs, qu'il n'est pas contesté que la société Service Affaires exploite un site internet accessible à l'adresse www.serviceaffaires.fr ;
Qu'elle a pour activité le transport de personnes en voitures de grande remise en longue durée, la location de voitures avec services annexes et les transports publics routiers de personnes, et a été immatriculée sous cette dénomination le 11 mai 1993 au Registre du commerce et des sociétés de Nanterre ;
Or considérant que Monsieur Risbourg et la société Service Exécutive ont réservé les 16 juin 2008, 17 mai 2010 et 14 avril 2011 les noms de domaine "servicesaffaires.com", "service-affaire.com", "serviceaffaire.com" et 'service-affaires.com' alors que la société Service Exécutive dont Monsieur Risbourg est le dirigeant, propose, comme il a été précédemment indiqué, ses services dans le même domaine d'activité de transports de personnes que la société Service Affaires ;
Considérant en outre que la société Service Exécutive ne conteste pas avoir, lors de la mise en ligne de son site Internet, au cours du mois de septembre 2011, "maladroitement" activé la redirection des noms de domaine litigieux vers son site ;
Que ces agissements portent atteinte au nom de domaine et à la dénomination sociale de la société appelante et sont constitutifs à son encontre de concurrence déloyale dès lors qu'ils engendrent, de par la forte similitude entre les signes en cause et les activités exercées, un risque de confusion dans l'esprit du public qui sera amené à croire en l'existence de liens commerciaux entre les parties, et ce malgré la présence du nom et du logo de la société intimée sur la première page de son site Internet, et sont de nature à détourner une partie de sa clientèle ;
Qu'à cet égard la société Service Exécutive ne peut valablement se retrancher derrière la "maladresse" de son webmaster dès lors qu'elle est responsable des agissements de son prestataire envers les tiers ni invoquer ici l'absence de caractère distinctif du signe opposé dès lors qu'il constitue le nom de domaine et la dénomination sociale de la société appelante et qu'il suffit qu'il existe un risque de confusion entre les signes en cause et les activités concernées ;
Qu'elle ne peut pas plus se référer au fonctionnement des moteurs de recherche dès lors que l'internaute peut lui-même taper directement un nom de domaine au moment de sa recherche sur Internet ;
Qu'il s'ensuit que la société Service Affaires est bien fondée à reprocher des actes de concurrence déloyale à la société Service Exécutive ;
Considérant par ailleurs que la société Service Affaires recherche la responsabilité des sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation au motif que les activités de ces sociétés étaient présentées sur le site Internet sur lequel étaient dirigés les internautes ayant fait une requête "service affaires" ;
Que les intimées font valoir en substance qu'il n'existe pas 'de complicité' de leur part, que l'existence de la rubrique incriminée n'est pas établie, et qu'elles n'ont pas l'obligation de surveiller les réservations de nom de domaine effectuées par des tiers ;
Considérant en effet que la pièce n° 10 versée aux débats par la société Service Affaires à l'appui de son argumentation n'est pas issue du constat d'huissier du 5 décembre 2011 mais est constituée d'une page libre qui ne comporte comme date, quoique non certaine, que celle de son impression ;
Que surtout cette page, qui mentionne les adresses Internet des sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation soit www.serviceprestige.fr, airlimousines.fr et servicereservation.net est extraite du site Internet de la société Service Exécutive, laquelle a elle-même réservé, avec Monsieur Risbourg les noms de domaine litigieux qui permettaient la redirection vers le site de la société ;
Que les liens manifestes qui existent entre les parties et leurs relations anciennes communes ne sont pas suffisantes à établir la participation en connaissance de cause des sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation aux faits qui sont reprochés à la société Service Exécutive ;
Que dès lors les demandes dirigées à l'encontre des sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation sur le fondement de l'article 1382 du Code civil doivent être rejetées ;
Que la demande de garantie par la société Service Exécutive et Monsieur Paul Risbourg devient sans objet ;
Sur les mesures réparatrices :
Considérant qu'il sera fait droit à la mesure d'interdiction sollicitée dans les conditions énoncées au dispositif de la présente décision ;
Considérant qu'il y a lieu d'allouer à la société Service Affaires, à titre de dommages-intérêts, la somme de 30 000 euros en réparation des atteintes portées à son nom de domaine et à sa dénomination sociale de par leur utilisation non autorisée, la société appelante n'apportant aucun élément de nature à établir ni la notoriété qu'elle invoque, ni l'importance de la clientèle détournée ni encore la réalité des investissements allégués ;
Sur les autres demandes :
Considérant que l'exercice d'une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus que dans le cas de malice, de mauvaise foi, ou d'erreur grossière équipollente au dol ;
Que faute pour la société Service Exécutive et Monsieur Paul Risbourg ainsi que pour les sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation de rapporter la preuve d'une quelconque intention de nuire ou d'une légèreté blâmable de la part de la société Service Affaires, qui a pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits, leurs demandes tendant à voir condamner cette dernière au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive seront rejetées ;
Considérant qu'il y a lieu de condamner la société Service Exécutive, partie perdante, aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Qu'en outre, elle doit être condamnée à verser à la société Service Affaires, qui a dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits, une indemnité au titre de l'V article 700 du Code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme de 8 000 euros ;
Qu'en revanche il n'apparaît pas inéquitable de laisser aux sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation la charge de leurs propres frais irrépétibles.
Par ces motifs : Dit n'y avoir lieu à rejet de conclusions et pièces. Infirme le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de paris le 29 mars 2012 en toutes ses dispositions. Déboute les sociétés Service Exécutive Paris, Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation et Monsieur Paul Risbourg de leur demande de nullité de l'assignation à eux délivrée les 13 et 14 décembre 2011. Déclare irrecevable la demande incidente en nullité de la marque n° 3600999 formée par les sociétés Service Prestige, Air Limousine et Service Réservation. Dit qu'en procédant à l'enregistrement des noms de domaine "www.service-affaires.com", "www.servicesaffaires.com", "www.serviceaffaire.com" et "www.service-affaire.com" et en utilisant un lien internet entre ces noms de domaine et le site Internet de la société Service Exécutive, Monsieur Paul Risbourg et la société Service Exécutive Paris ont porté atteinte aux droits de la société Service Affaires sur sa dénomination sociale et sur son nom de domaine www.serviceaffaires.fr. Interdit à Monsieur Paul Risbourg et à la sociétés Service Exécutive Paris la poursuite de ces agissements sous astreinte de 1 000 euros par infraction constatée à compter de la signification de la présente décision. Condamne in solidum Monsieur Paul Risbourg et la société Service Exécutive Paris à payer à la société Service Affaires la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale. Condamne in solidum Monsieur Paul Risbourg et la société Service Exécutive Paris à payer la société Service Affaires la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires. Condamne in solidum Monsieur Paul Risbourg et la société Service Exécutive Paris à tous les dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.