CA Rennes, 3e ch. com., 5 novembre 2013, n° 12-02736
RENNES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Mafille, Laurier, Fleurexpert (SARL)
Défendeur :
Pihan, Passiflore (SARL), Amarylis (SARL), Floreal Developpement (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Poumarede
Conseillers :
Mmes Andre, Gueroult
Avocats :
Mes George, Beucher, Dervillers
I - EXPOSE DU LITIGE
M. David Mafille a déposé le 19 mars 2003 à l'INPI la marque "Fleurs ô naturel création" enregistrée sous le n° 03 3 215 967 pour désigner les produits et services suivants "produits chimiques destinés à l'industrie, à l'agriculture, l'horticulture ; engrais pour les terres. Ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine non électriques (ni en métaux précieux ni en plaques). Instrument d'arrosage, arrosoirs, brûle-parfum, cache-pot non en papier, pot de fleur, supports pour fleurs (arrangements floraux). Fleurs artificielles ; terrariums d'appartements (culture des plantes). Produits agricoles horticoles ni préparés ni transformés, semences (graines), plantes et fleurs naturelles. Fleurs et plantes séchées pour la décoration. Transmission de commandes florales par réseau de télécommunication. Communication (transmissions) par terminaux d'ordinateurs. Services de jardiniers paysagistes, composition florale. Confection de couronnes (art floral)".
M. Mafille a ensuite déposé le 15 mai 2003 la marque semi figurative "Fleurs ô naturel, créateur de couleur", enregistrée sous le numéro 033 227 987 et la marque semi figurative "Fleurs ô naturel naturellement plus" enregistrée sous le numéro 033 227 969, déclinaisons de la première marque pour désigner les produits ou services suivants "fleurs artificielles ; produits agricoles, horticoles ni préparés ni transformés, semences (graines) plantes et fleurs naturelles. Fleurs et plantes séchées pour la décoration. Services de jardiniers paysagistes. Compositions florales, confection de couronnes (art floral)".
Ces marques ont été renouvelées par déclaration du 12 mars 2013.
M. Mafille a également déposé avec M. Patrice Laurier le 14 avril 2005 une autre déclinaison, la marque semi figurative "O fleurs ô naturel offrez la nature au meilleur prix parce que la nature nous offre le meilleur et parce que le bonheur se cultive, fleurs ô naturel vous aide à le concevoir", enregistrée sous le numéro 053 352 880.
Par acte sous seing privé du 14 avril 2005, enregistrée à l'INPI le 21 septembre 2005 M. Mafille a transmis partiellement à Monsieur Laurier la propriété des 3 premières marques "Fleurs ô naturel" déposées sous les numéros n° 03 3 215 967, 033 227 987 et 033 227 969, de sorte qu'ils sont devenus également copropriétaires de ces marques.
Le même jour, Messieurs Laurier et Mafille ont conclu avec la SARL Fleurexpert, dont M. Mafille est gérant un contrat de licence d'usage et d'exploitation de la marque "Fleurs ô naturel", enregistrée sous les 4 numéros, publié au registre national des marques le 21 septembre 2005, sur tous les départements français à l'exception de l'Indre-et-Loire, du Maine-et-Loire, du Loiret, du Morbihan, du Finistère et de la Loire-Atlantique.
Les différentes marques déclinant la marque "Fleurs ô naturel" sont exploitées par 13 ou 14 magasins dans le cadre d'une charte d'exploitation signée le 1er septembre 2006.
Le 4 février 2008, Madame Cécile Pihan a déposé la marque en couleurs "Le marché ô fleurs", enregistrée à l'INPI sous le numéro 3 554 041 pour désigner les produits et services suivants : "produits agricoles, horticoles et forestiers ni préparés ni transformés ; animaux vivants ; fruits et légumes frais ; semences (graines), plantes et fleurs naturelles ; aliments pour les animaux ; malt ; gazon naturel ; crustacés vivants ; appâts vivants pour la pêche ; céréales en grains non travaillés ; arbustes ; plantes ; plants ; arbres (végétaux) ; agrumes ; bois brut ; plantes séchées pour la décoration ; fourrages."
Par contrat du 29 janvier 2010, cette marque a été cédée à la SARL OCPI, société holding créée par les époux Pihan qui détient des participations dans trois sociétés filiales, les SARL Floreal Développement, Amaryllis et Passiflore dont chacune exploite un magasin de fleurs à Angers sous l'enseigne "Le marché ô fleurs"
Le 19 novembre 2009 M. Mafille a mis en demeure, en vain, Mme Pihan de procéder au retrait de la marque "Le marché ô fleurs" et les trois sociétés exploitant l'enseigne de cesser l'utilisation de la dénomination "Le marché ô fleurs".
C'est dans ces circonstances que M. Mafille, M. Laurier et la SARL Fleurexpert ont fait assigner le 2 juin 2010 Mme Pihan et les SARL Floréal développement, Amarylis et passiflore en contrefaçon de marque et concurrence déloyale.
Par jugement contradictoire du 27 mars 2012, le Tribunal de commerce de Rennes a :
Débouté M. Mafille, M. Laurier et la SARL Fleurexpert de l'ensemble de leurs demandes dirigées à l'encontre de Mme Pihan, de la SARL Passiflore, de la SARL Amarylis et de la SARL Floreal developpement,
Condamné in solidum M. Mafille, M. Laurier et la SARL Fleurexpert à verser à Mme Pihan, à la SARL Passiflore, à la SARL Amarylis et à la SARL Floreal Developpement, chacune la somme de 1 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
Débouté les parties du surplus de leurs demandes,
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
Condamné M. Mafille, M. Laurier et la SARL Fleurexpert aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
M. Mafille, M. Laurier et la SARL Fleurexpert ont déclaré faire appel de cette décision le 25 avril 2012.
Les appelants demandent à la cour de :
Infirmer la décision du Tribunal de grande instance de Rennes en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau,
Ordonner à la société Passiflore, la société Amarylis, et la société Floreal Developpement, soit directement soit indirectement, et sous astreinte de 300 euro par jour de retard, à compter du Jugement à intervenir de :
- cesser l'utilisation de la marque Le marché ô fleurs n° 3554041 ;
- modifier le nom des magasins exploités par la société Passiflore, la société Amarylis, et la société Floreal Developpement.
- Cesser tout acte de concurrence déloyale tendant à la reprise des éléments de communication développés par la société Fleurexpert et notamment la distribution des catalogues édition spéciale mariage, l'utilisation des tabliers de même couleur, ou tous autres de nature à copier la marque Fleurs ô naturel.
Condamner in solidum Madame Pihan, la société Passiflore, la société Amarylis, et la société Floreal Developpement, à verser à Monsieur Mafille et Monsieur Laurier, chacun, la somme de 25 000 euro en réparation de leur préjudice lié à l'utilisation contrefaisante des marques déposées n° 05 3352880, 03 3227987 et 03 3227969.
Condamner in solidum la société Passiflore, la société Amarylis, et la société Floreal Developpement, à verser à la société Fleurexpert, la somme de 15 000 euro en réparation de son préjudice lié aux actes de concurrence déloyale.
Ordonner la publication de la décision à intervenir dans trois quotidiens au choix de Monsieur Mafille et de Monsieur Laurier, aux frais avancés Madame Pihan, la société Passiflore, la société Amarylis, et la société Floreal Developpement sans que le montant de chacune ne dépasse la somme 4 500 euro.
Déclarer Madame Pihan, la société Passiflore, la société Amarylis et la société Floreal Developpement irrecevables, en tout cas mal fondées en leur appel incident et en toutes leurs demandes, fins et conclusions ; les en débouter ;
Condamner Madame Pihan, la société Passiflore, la société Amarylis, et la société Floreal Developpement à verser à Monsieur Mafille et Monsieur Laurier la somme de 10 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP D. Chatteleyn & B. George aux offres de droit.
Les intimés demandent à la cour de :
Vu les articles 32 et 122 du Code de procédure civile
Vu l'article L. 713-23 du Code de la propriété intellectuelle
Vu l'article 1382 du Code civil
Mettre hors de cause Madame Cécile Pihan comme n'ayant aucune qualité à se défendre et Déclarer irrecevables toutes demandes à son encontre,
Dire Juger que Monsieur Laurier n'a plus qualité à agir et en conséquence le Déclarer irrecevable en toutes ses demandes,
Dire et Juger irrecevables et en tous cas mal fondés M.M Mafille et Laurier et la société Fleurexpert en leurs demandes, fins et conclusions,
Constater qu'il n'existe aucun acte de contrefaçon par imitation des marques Fleurs ô naturel par la marque Le marché ô fleurs,
Constater qu'il n'existe aucun acte de contrefaçon par imitation des marques Fleurs ô naturel par la marque Le marché ô fleurs,
Confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions.
Débouter purement et simplement Messieurs Mafille et Laurier et la société Fleurexpert de toutes leurs demandes,
Les condamner à payer in solidum à chacune des intimées la somme de 6 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre aux entiers dépens qui seront recouvres conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.
L'ordonnance de clôture est du 5 juin 2013.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties la cour se réfère aux énonciations de la décision déférée et aux dernières conclusions des parties :
- du 24 mai 2013 pour les appelants
- du 29 mai 2013 pour les intimés
II MOYENS DES PARTIES
Les appelants soutiennent qu'il n'y a pas lieu à prononcer la mise hors de cause de Mme Pihan dès lors qu'elle a déposé la marque Le marché ô fleurs et qu'elle l'a exploité jusqu'au 9 janvier 2010. Par ailleurs la cession des marques Fleurs ô naturel au profit de M. Mafille est du 14 novembre 2011 si bien que M. Laurier est parfaitement fondé à solliciter l'indemnisation du préjudice qu'il a subi à raison des actes de contrefaçon dénoncés à une époque où il était propriétaire des marques en cause. Mme Pihan, déposante de la marque "Le marché ô fleurs" et les trois sociétés qui l'exploitent commettent une contrefaçon par imitation de leurs propres marques par la reprise de ses éléments distinctifs, Le risque de confusion est manifeste.
Par ailleurs l'exploitation de la marque "Le marché ô fleurs" à titre d'enseigne en reprenant la charte graphique utilisée dans ses propres points de vente, ainsi que la reprise systématique de visuels de sa publicité, réalisée par une société rémunérée par la société Fleurexpert, combinés avec la reprise de l'onglet propre à la communication Fleurs ô naturel, le fait que la société Passiflore a même également sollicité des tabliers de couleur identiques à ceux utilisés par la société Fleurexpert et que les magasins Le marché ô fleurs ont repris l'idée d'un carrelage également brun et noir et en outre alors que la zone d'exploitation est similaire, engagent la responsabilité délictuelle des sociétés Passiflore Amaryllis et Floréal Développement sur le terrain de la concurrence déloyale. Elle souligne que le projet de Messieurs Mafille et Laurier est bien de créer un réseau sous cette dénomination et dans le cadre de réseaux de chaînes, le marché géographiquement pertinent est celui du réseau de la chaîne, et ne peut se limiter à un marché départemental comme l'a retenu le tribunal.
Les intimées soutiennent quant à eux que du fait du contrat de cession de marque 29 janvier 2010, Mme Pihan doit être mise hors de cause, que les marques "Fleurs ô naturel" opposés par les appelants et exploités par la société Fleurexpert ne contiennent aucun des éléments distinctifs nécessaires tels que prévu à l'article L. 711-2 du Code de la propriété intellectuelle et contestent ainsi toute imitation pouvant faire naître un risque de confusion entre les marques. Par ailleurs du fait du contrat de cession de marque 29 janvier 2010, Mme Pihan ne peut être concernée par des actes de concurrence déloyale. Les sociétés Passiflore Amarylis et Floréal Développement réfutent tout acte de concurrence déloyale au motif que les marques respectives n'engendrent aucune confusion dans l'esprit de la clientèle et d'autre part qu'elles exploitent leur magasin sur Angers, territoire exclu de la concession faite à la société Fleurexpert et il n'est nullement justifié de la mise en place d'un réseau.
Les publicités diffusées dans les magazines Le p'tit zappeur, la commande et l'utilisation de tabliers marron ainsi que la brochure destinée aux futurs mariés ne sont nullement constitutifs d'actes de concurrence déloyale;
III- MOTIFS
Sur les demandes de mise hors de cause de Mme Pihan et d'absence d'intérêt à agir de M. Laurier
Le 4 novembre 2011, la propriété des quatre marques Fleurs ô naturel a été transmise à M. Mafille, si bien que M. Laurier n'est donc plus titulaire d'aucun droit sur celles-ci.
L'existence de l'intérêt s'apprécie cependant au jour de l'appel. L'intérêt peut-être pécuniaire ou purement moral et M. Laurier, condamné à des frais irrépétibles et aux dépens dispose en toute hypothèse d'un intérêt, nonobstant le fait qu'il ne soit plus titulaire aujourd'hui d'aucun droit sur les marques qu'il a cédées à M. Mafille.
Mme Pihan est l'auteur du dépôt de la marque Le marché ô fleurs. Il n'y a pas lieu de la mettre hors de cause pour ce qui concerne les demandes afférentes à la contrefaçon de marque. Elle a exploité cette marque entre le 4 février 2008 et le 9 janvier 2010. Il n'y a pas lieu de la mettre hors de cause pour ce qui concerne les demandes afférentes à la concurrence déloyale.
Sur la contrefaçon de marque
L'article L. 716-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose que :
"l'atteinte portée au droit du propriétaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur. Constitue une atteinte au droit de la marque la violation des interdictions prévues aux articles L. 713-1, et L. 713-4."
Par application des articles L. 713-2 et suivants, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, ainsi que l'usage d'une marque reproduite pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement.
Il convient d'indiquer dans un premier temps qu'il ne s'agit pas en l'espèce de déterminer si le signe Fleurs ô naturel est suffisamment distinctif pour constituer une marque et se pencher ainsi sur les conditions de validité de la marque dès lors qu'elle est enregistrée comme telle, et qu'aucune nullité de ladite marque n'est invoquée si bien qu'elle bénéficie de la protection légale indépendamment du degré de distinctivité qui la caractérise, et ce sur tout le territoire, si bien que les échanges des parties afférents à la prétendue distinctivité ou pas de la marque Fleurs ô naturel et la comparaison avec les signes d'autres marques que Le marché ô fleurs ne présente pas d'utilité.
Il s'agit de déterminer si la marque Le marché ô fleurs, également déposée, et dont le dépôt n'a pas fait l'objet d'un recours, contrefait la marque antérieure.
Le fait que M. Mafille ait déposé une nouvelle marque complexe Fleurs ô naturel premium dans une couleur uniforme grise, est totalement indifférent au litige relatif à la contrefaçon des marques en cause. La marque déposée par Mme Pihan, Le marché ô fleurs n'étant pas la reproduction à l'identique de la marque Fleurs ô naturel, faute de la reproduire sans modification ni ajout en tous les éléments qui la composent, il y a lieu de rechercher s'il existe entre les signes en présence, un risque de confusion qui doit être apprécié globalement et se faire en ce qui concerne la similitude visuelle phonétique et conceptuelle sur l'impression d'ensemble, en tenant compte de leurs éléments distinctifs et dominants respectifs.
Les parties ne discutent pas que chacune des marques désigne notamment des produits et services fournis identiques ou à tout le moins similaires s'agissant notamment de fleurs, plantes naturelles et compositions florales.
D'un point de vue conceptuel, les deux marques évoquent les fleurs mais la marque contestée évoque également les marchés aux fleurs existant dans les grandes villes et notamment à Paris et qui propose un très grand nombre de variétés, tandis que la marque Fleurs ô naturel évoque davantage l'idée de produits naturels et la réalisation de bouquets avec des fleurs naturelles ou de bouquets à l'aspect non sophistiqué.
Au plan visuel, il existe certes des ressemblances entre la marque antérieure et ses déclinaisons n° 987, 969 et 880. Le terme fleurs dans chacune des marques, le signe O, surmonté d'un accent circonflexe, de couleur rose, la présence de la couleur verte dans les deux signes, mais qui n'est pas la même, vert pomme dans la marque antérieure, vert kaki dans la marque contestée.
Au plan phonétique, il existe le mot fleurs et cinq syllabes à prononcer dans chaque signe mais les signes d'attaque ne sont pas les mêmes et marché et naturel n'ont strictement aucune ressemblance.
L'élément dominant de chacune de ces marques est le signe O, surmonté de l'accent circonflexe, à la place du AUX dans la marque contestée et AU dans la marque antérieure, tous deux placés dans un angle, mais opposé, sachant que les autres termes FLEURS, NATUREL dans la marque antérieure sont principalement descriptifs, peu distinctifs, tout comme le terme MARCHE dans l'autre marque, même associé au Ô, lequel existe de la même façon dans d'autres marques.
Le Ô n'a en outre pas la même forme, ovoïde dans la marque antérieure, parfaitement rond et figurant à l'intérieur d'un pétale et ne domine pas à lui seul l'image de marque que le consommateur garde en mémoire.
L'utilisation de la couleur verte et même de la couleur rose pour le Ô n'est nullement significative compte tenu des produits et services visés, le vert représentant la nature, et le rose étant une couleur particulièrement répandue parmi les fleurs.
Surtout, au plan visuel les termes de la marque antérieure, à l'exception du Ô sont en noir ou vert selon les déclinaisons de la marque, sur fond blanc tandis qu'ils sont en blanc sur fond vert kaki dans la marque contestée et que dans la marque antérieure figurent également un O de grande taille, en blanc sur fond de feuilles vert pomme, qui apparaît également comme un signe dominant fort dans la marque antérieure et qui attire autant l'attention que l'autre O, surmonté de l'accès circonflexe. Il convient à cet égard de préciser que la marque numéro 335 28 80 est d'ailleurs expressément la suivante "O Fleurs ô naturel (...)"
Les autres termes, certes descriptifs et explicatifs figurent également dans les marques antérieures, "créateur de couleur", "naturellement plus", "offrez la nature au meilleur prix parce que la nature nous offre le meilleur, parce que le bonheur se cultive, fleurs ô naturel vous aide à le concevoir" et modifient la physionomie visuelle du signe. Aucun autre terme que Le Marché ô Fleurs ne figure dans la marque contestée. Par ailleurs les appelants ne justifient pas que la marque Fleurs ô naturel soit particulièrement renommée.
Il résulte de ces éléments que l'impression d'ensemble donnée par les deux marques sont différentes, que les ressemblances existantes entre les deux marques sont insuffisantes à créer le risque de confusion allégué par les appelants, et les différences entre les deux marques ne sont nullement insignifiantes, ce nonobstant les deux attestations produites en ce sens par les appelants, précision au demeurant apportée que les deux émanent de personnes qui connaissent M. Mafille comme propriétaire de la marque, et donc son signe, ce qui explique l'attention qu'ils ont pu porter aux ressemblances existantes entre les marques.
L'impression d'ensemble, même en faisant abstraction des éléments non dominants des deux marques, est différente si bien qu'il n'existe pas risque de confusion entre les deux marques, pour le consommateur d'attention moyenne auquel elles s'adressent.
Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande au titre de la contrefaçon.
Sur la concurrence déloyale
Aux termes de l'article L. 121-1 du Code de la consommation "une pratique commerciale est trompeuse lorsqu'elle crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial, ou un autre signe distinctif d'un concurrent".
Les appelants ne justifient ni de l'utilisation par les sociétés Passiflore, Amarylis et Floreal Developpement d'un tablier acheté auprès de la même entreprise, de même couleur que ceux utilisés dans les magasins qu'ils exploitent, ni du fait que les sols mis en place seraient identiques aux leurs, précision d'ailleurs apportée que les tabliers vendus, certes par la même entreprise, sont un outil de travail classique en fleuristerie et qu'ils sont vendus en 17 coloris.
Par ailleurs l'existence de publicité similaire faite par les intimées dans le journal Le p'tit zappeur n'apparaît pas davantage un élément significatif. Il est justifié que la société Westcom qui édite Le p'tit zappeur crée les publicités et a proposé à la société Floreal Developpement trois maquettes à partir de photographies émanant de sa banque de données, en provenance d'une banque de donnée payante accessible en ligne. Le fait que la société Fleurexpert ait elle-même fourni une de ces photographies au p'tit zappeur apparaît indifférent. Il est par exemple justifié que la photo d'une femme dont la robe est constituée d'une rose provient de cette base de données et qu'elle est par ailleurs utilisée sur de nombreux sites Internet à l'occasion de la présentation de toutes sortes de produits. Il n'est pas justifié que cette photographie fasse l'objet d'une exclusivité. La présentation en bas de page en utilisant une vague pour mettre en valeur un titre est un classique de la composition. Il ne s'agit pas d'un signe distinctif susceptible d'appropriation. Il convient en outre de relever que le journal d'annonces gratuites a une vocation locale, concerne des entreprises locales et est distribué dans un rayon géographiquement limité et les SARL Floréal Développement, Amaryllis et Passiflore exploite chacune un magasin de fleurs situé à Angers.
Il en est de même pour l'édition d'un dépliant aux caractéristiques certes très similaires, s'agissant de la brochure des mariés, avec des termes aussi peu significatifs que bonheur, bouquet de la mariée (...) et des photographies de fleurs blanches dépourvues d'originalité et où les images utilisées ont été proposés à la société Floreal Developpement par l'entreprise Del'a kote qui crée les dépliants publicitaires à partir de photographies achetées sur une base de donnée Fotolia. Il est justifié que ce format de présentation et cette façon de mettre en avant des compositions florales n'est pas distinctif, l'entreprise à l'enseigne Le jardin des fleurs y ayant également recours.
Il convient par ailleurs de rappeler qu'il n'existe pas de contrefaçon des marques et le fait que l'enseigne des magasins exploités par les intimés aient une enseigne horizontale reprenant les termes de sa marque comme la société Fleurexpert apparaît indifférent.
Ni individuellement ni même appréciés de façon globale les éléments reprochés par les appelants aux intimés ne constituent pas d'actes de concurrence déloyale, ce d'autant que les sociétés Passiflore, Amarylis et Floreal Developpement exploitent chacune un magasin de fleurs situé à Angers. Les appelants produisent pour justifier du développement de la marque Fleurs ô naturel via un réseau de magasin intégrés ou franchisés qu'une simple liste établie par ses soins de 13 magasins avec deux qui seraient franchisés ce qui n'est cependant corroboré par aucun justificatif alors que les intimés contestent l'existence d'un réseau en évoquant néanmoins un magasin à Saumur, distant d'Angers d'une cinquantaine de kilomètres.
Au demeurant il apparaît purement hypothétique d'envisager qu'une clientèle de fleurs se déplace au-delà de quelques kilomètres si bien que le marché géographique pertinent n'a pas vocation à dépasser l'échelon départemental, élément justement considéré par les premiers juges.
Il convient en conséquence de confirmer également le jugement en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande au titre de la concurrence déloyale.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Les appelants qui succombent à l'instance seront condamnés aux dépens et ne peuvent de ce fait prétendre aux dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; que l'équité commande en revanche de faire droit à la demande des intimés sur le fondement de ce texte et de condamner les appelants à verser in solidum, à chacune d'entre elle, la somme de 2 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile qui s'ajoutera à celle déjà fixée à ce titre par les premiers juges.
Par ces motifs, LA COUR : Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions Condamne in solidum la société Fleurexpert, Monsieur Laurier, Monsieur Mafille à verser, à Mme Cécile Pihan et aux sociétés Passiflore, Amarylis et Floreal Developpement, la somme de 2 500 euro chacune sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne in solidum la société Fleurexpert, Monsieur Laurier et Monsieur Mafille aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.