CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 29 novembre 2013, n° 12-15203
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Converse Inc. (Sté), All Star CV (Sté)
Défendeur :
Atlanta (SARL), Le Garage (SARL), Sport Négoce International (SARL), Dieseel AG (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Aimar
Conseillers :
Mmes Renard, Gil
Avocats :
Mes Olivier, Bloret-Pucci, Guin, Pireddu
Vu les articles 455 et 954 du Code de procédure civile,
Vu le jugement du 4 mai 2012 rendu par le Tribunal de grande instance de Paris (3e chambre 3e section),
Vu l'appel interjeté le 8 août 2012 par la société Converse Inc. appelante,
Vu les dernières e-conclusions de la société Converse Inc. appelante et de la société All Star CV venant partiellement aux droits de la société Converse Inc., intervenante volontaire, en date du 2 octobre 2013,
Vu les dernières e-conclusions des sociétés Le Garage, Atlanta et Sport Négoce International, intimées en date du 3 octobre 2013,
Vu les dernières conclusions de la société Dieseel AG, intimée, en date du 11 septembre 2013,
Vu l'ordonnance de clôture en date du 3 octobre 2013.
Sur ce, LA COUR,
Il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures des parties,
Il sera simplement rappelé que la société Converse Inc. est titulaire de plusieurs marques dont :
* la marque internationale Converse All Star n° 924 653 enregistrée le 16 mai 2007 désignant l'Union européenne et couvrant notamment des articles chaussants en classe 25,
* la marque internationale All Star n° 929 078 enregistrée le 15 mai 2007 désignant l'Union européenne et couvrant notamment les articles chaussants en classe 25,
* la marque française Converse All Star Chuck Taylor n° 1 356 944 déposée le 30 mai 1986 renouvelée le 22 mars 2006 pour désigner les chaussures en classe 25.
Par suite de l'inscription au Registre National des Marques effectuée le 22 avril 2013 enregistrée sous le n° 599 393, de la cession par Converse Inc. de la marque française précédente n° 1 356 944 à son profit, la société de droit néerlandais All Star CV est intervenue volontairement à la présente instance.
Ces marques désignent notamment des chaussures en toile ou en cuir, basses ou montantes qui sont commercialisées dans le monde entier avec succès.
Au mois de février 2009 la société Royer Sport, distributeur exclusif de la société Converse en France, a requis un huissier de justice afin de faire constater le 5 février 2009 des achats de chaussures revêtues des marques Converse, dans les magasins marseillais Le Garage et Atlanta ayant le même gérant et ayant une activité de mise en vente notamment de textiles et chaussures.
Après analyse des paires de chaussures acquises dans ces conditions, la société Converse a estimé que celles-ci constituaient des contrefaçons.
Le 24 mars 2009, la direction des opérations douanières de Marseille a informé la société Converse Inc. du placement en retenue douanière de 424 paires de chaussures provenant de la société Le Garage sur lesquelles ont été prélevés par procès-verbal du 25 mars 2009, 22 échantillons et à la retenue de 851 chaussures provenant de la société Atlanta sur lesquelles ont été prélevés 39 échantillons selon procès-verbal du même jour.
Par courrier du 30 mars 2009 la société Converse Inc. a indiqué qu'aux termes des analyses réalisées par ses experts techniques, 9 échantillons prélevés dans le magasin Le Garage et 13 de ceux prélevés dans le magasin Atlanta constituaient des contrefaçons de ses marques.
Selon actes d'huissier du 1er et 8 avril 2009 la société Converse Inc. a fait assigner devant le Tribunal de grande instance de Paris les sociétés Le Garage et Atlanta en contrefaçon de ses marques.
Les deux affaires ont été jointes dans le cadre de la mise en état et la société Sport Négoce International (ci-après SNI) se présentant comme propriétaire des chaussures mises en dépôt dans les deux magasins marseillais est intervenue volontairement à la procédure.
La société SNI a par la suite fait assigner en intervention forcée selon acte d'huissier du 7 février 2011, son fournisseur, la société suisse Dieseel AG.
La jonction d'entre les procédures a été prononcée le 3 mai 2011.
La société Converse Inc. soutient que les produits commercialisés par les sociétés intimées sont contrefaisants, alors que celles-ci indiquent s'être fournies auprès de la société Dieseel qui a acquis de façon légale sur le marché dit parallèle les produits litigieux.
Suivant jugement dont appel, le tribunal a essentiellement :
- déclaré recevable l'intervention volontaire de la société Sport Négoce International,
- écarté des débats les pièces 20 et 39 produites par la société Dieseel AG,
- rejeté la demande de la société Converse Inc. tendant à écarter des débats comme tardive la pièce 21 (40) de la société Dieseel AG,
- écarté des débats les pièces 4, 9, 22 à 29 versées aux débats par les sociétés Atlanta, Le Garage et SNI et les pièces identiques versées sous les n° 1 à 15 par la société Dieseel AG,
- débouté la société Converse Inc. de l'ensemble de ses demandes,
- ordonné la mainlevée des retenues et saisies douanières effectuées par la direction des opérations douanières de Marseille portant sur les chaussures saisies dans les magasins des sociétés Atlanta et Le Garage,
- débouté les sociétés Atlanta, Le Garage et SNI de leurs demandes reconventionnelles,
- condamné la société Converse Inc. à payer à la société Dieseel AG la somme de 6 000 euros et à chacune des sociétés le Garage, Atlanta et SNI la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
En cause d'appel la société Converse Inc. appelante et la société All Star CV venant partiellement aux droits de la société Converse Inc. demandent essentiellement dans leurs dernières e-écritures du 2 octobre 2013 de :
- donner acte à la société All Star CV de son intervention volontaire en sa qualité de cessionnaire dûment inscrite de la marque française Converse All Star Chuck Taylor N° 1 356 944 et la déclarer recevable,
- confirmer le jugement en ce qu'il a écarté des débats les pièces listées communiquées par les sociétés intimées, et rejeté les demandes reconventionnelles des sociétés intimées,
- infirmer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau,
- dire et juger que la matérialité de l'usage illicite est établi et qu'aucun élément n'accrédite la possibilité d'une autorisation donnée par le titulaire de la marque,
- subsidiairement, dire que toute mesure d'expertise doit avoir lieu hors la présence des parties elles-mêmes,
- dire et juger que les sociétés intimées ont échoué à rapporter la preuve qu'elles se situent dans le champ d'application de l'épuisement des droits,
- faire interdiction, sous astreinte, aux sociétés intimées de poursuivre la détention, l'offre à la vente et la vente sur le territoire de l'Union européenne de tout produit portant atteinte à leurs marques,
- condamner solidairement les sociétés intimées à payer chacune à la société Converse Inc. la somme de 20 000 euros et à la société All Star CV celle de 10 000 euros en réparation de l'atteinte portée à leurs marques respectives,
- condamner solidairement les sociétés intimées à payer chacune à la société Converse Inc. la somme de 60 000 euros et à la société All Star CV celle de 40 000 euros en réparation de leur préjudice commercial,
- ordonner la publication de la décision,
- débouter les sociétés intimées de l'ensemble de leurs demandes,
- condamner solidairement les sociétés intimées à payer à la société Converse Inc. et à la société All Star CV la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Les sociétés le Garage, Atlanta et Sport Négoce International s'opposent aux prétentions des appelantes, et pour l'essentiel, demandent dans leurs dernières e-écritures du 3 octobre 2013 de :
Sur la charge de la preuve,
- dire et juger qu'elles n'ont pas à apporter la preuve de l'authenticité des produits argués de contrefaçon,
- dire et juger qu'elles rapportent la preuve que les produits de marque Converse sont commercialisés dans l'Espace économique européen par le biais d'un système de distribution exclusive qui présente par nature un risque de cloisonnement des marchés,
Sur les allégations des appelantes,
- dire et juger que les sociétés appelantes ne rapportent pas la preuve qu'elles auraient commercialisé des produits non authentiques,
- subsidiairement, ordonner une mesure d'expertise,
Sur l'épuisement des droits,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Converse Inc. de leurs demandes sans qu'il soit nécessaire d'examiner les constats d'huissiers versés aux débats par la société Dieseel AG,
- subsidiairement, dire et juger que la société Dieseel AG justifie de l'épuisement des droits par les constats d'huissiers qu'elle verse aux débats,
- subsidiairement, surseoir à statuer pour permettre à la société Dieseel AG de verser aux débats les factures justifiant de la mise sur le marché des produits sur le territoire de l'Espace économique européen avec le consentement de la société Converse,
- débouter les sociétés appelantes de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts,
- dire et juger que la société Dieseel AG devra les garantir de toutes condamnations prononcées à leur encontre et condamner la société Dieseel AG à payer à la société SNI la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Converse Inc. de l'ensemble de ses demandes et débouter de la même manière la société All Star CV,
- condamner les sociétés appelantes à payer à chacune des sociétés la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 40 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société Dieseel AG demande dans ses dernières e-écritures du 11 septembre 2013 de :
- dire et juger que la société Converse procède à la distribution de ses produits selon un système de distribution induisant un risque réel de cloisonnement des marchés et que la preuve que les produits litigieux n'ont pas été mis dans le commerce sur le territoire de l'Espace économique européen avec l'autorisation du titulaire de la marque lui incombe,
- surseoir à statuer sur les autres demandes,
- subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Converse Inc. de l'ensemble de ses demandes et ordonné la mainlevée des retenues douanières,
- et y ajoutant,
- condamner la société Converse Inc. à lui payer la somme de 20,00 (en réalité 20.000) euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Il convient de recevoir la société All Star CV en son intervention volontaire, non contestée, en sa qualité de cessionnaire dûment inscrite de la marque française Converse All Star Chuck Taylor N° 1.
Sur les demandes relatives à la contrefaçon :
Aux termes des articles L. 716-1 et L. 713-2 du Code de la propriété intellectuelle, l'atteinte portée au droit du propriétaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur, et notamment, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction ou l'usage d'une marque reproduite, pour les produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement.
En application de l'article 9 du règlement CE 207-2009 du Conseil du 26 février 2009 ayant abrogé le règlement CE 40-94 du Conseil du 20 décembre 1993, le titulaire de la marque communautaire est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, à faire usage dans la vie des affaires :
a) d'un signe identique à la marque communautaire pour des produits et services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée.
En application de l'article L. 713-4 du Code de la propriété intellectuelle, "le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d'interdire l'usage de celle-ci pour les produits qui ont été mis dans le commerce dans la communauté économique européenne ou de l'Espace économique européen sous cette marque par le titulaire de la marque ou avec son consentement". L'article 13 du règlement CE n° 207-2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire contient des dispositions similaires.
Il n'est pas contesté par les sociétés intimées que les produits litigieux reproduisent à l'identique les marques internationales désignant l'Union européenne, Converse All Star n° 924 653 et All Star n° 929 078 dont est titulaire la société Converse Inc. et la marque Converse All Star Chuck Taylor n° 1 356 944 dont est présentement titulaire la société All Star CV.
Selon les sociétés appelantes, seule la preuve du défaut d'autorisation de la commercialisation des produits reproduisant leurs marques, est requise et elles soutiennent que les nombreuses et convergentes anomalies présentées par les marchandises litigieuses par rapport aux marchandises originales sont de nature à susciter un doute légitime jointes au fait que les sociétés intimées n'auraient pu contracter directement ou indirectement avec la société Converse, suffisent à rendre inconcevable la possibilité d'une autorisation d'usage de la marque.
Cependant la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit dans l'arrêt Van Doren du 8 avril 2003 (C-244-00) que "dans l'hypothèse où le tiers poursuivi par le titulaire de la marque parvient à démontrer qu'il existe un risque réel de cloisonnement des marchés nationaux, si lui-même supporte la charge de cette preuve, en particulier lorsque le titulaire de la marque commercialise ses produits dans l'Espace économique européen au moyen d'un système de distribution exclusive, il appartient au titulaire de la marque d'établir que les produits ont été initialement mis dans le commerce par lui-même ou avec son consentement en dehors de l'Espace économique européen".
Si cette preuve est rapportée il incombe alors au tiers poursuivi d'établir l'existence d'un consentement du titulaire à la commercialisation ultérieure des produits dans l'Espace économique européen.
En l'espèce, les sociétés appelantes contestent l'existence d'un risque réel de cloisonnement des marchés nationaux et exposent que les produits litigieux ont été mis sur le marché en dehors de l'Espace économique européen sans leur consentement et qu'ils ne sont donc pas authentiques.
Toutefois, il ressort par les pièces issues du site Internet de la société Converse, www.converse.com que son réseau de distribution est sectorisé, car il est octroyé à une entreprise un territoire sur un ou plusieurs pays sur lequel elle bénéficie d'une distribution exclusive, ce que la société Converse Inc. ne conteste pas.
Le distributeur exclusif en France étant la société Royer Sport.
Il résulte des réponses faites par les distributeurs des produits Converse, en Allemagne, Autriche, Suisse, Italie, Scandinavie, Hongrie, Espagne, Portugal, Slovenie, Pologne et France, que ces derniers, identifiés par des courriers électroniques datés et portant leur nom, et adresse e-mail dont la réalité et la véracité n'est pas contestée par les attestations communiquées par les appelantes, et donc probantes, sollicités par des acheteurs tiers à leur territoire, ont tous indiqué qu'il leur était interdit de vendre et livrer des produits Converse dans d'autres pays à des acheteurs autres que des consommateurs, qu'il en est de même entre revendeurs sur un même territoire, et ce, sans être contredits par des éléments pertinents contraires.
En effet, l'attestation versée par la société Converse de l'un de ses préposés Monsieur Meozzi, directeur juridique commercial Europe qui indique que les contrats de distribution de la société Converse ne contiennent aucune disposition susceptible de limiter "la possibilité pour les licenciés et distributeurs de procéder à des ventes passives" constitue une preuve à soi-même contredite par des tiers.
Les sociétés Converse ne justifient par ailleurs d'aucune vente passive manifestant l'existence de ventes inter-secteurs, et de flux inter-secteurs, réalisés notamment par la société Royer Sport distributeur de produits Converse en France.
La possibilité de vente passive constatée par un tribunal de Dusseldorf, à défaut de la preuve réelle de ventes de ce type, ne saurait à elle seule établir une absence de cloisonnement entre ces distributeurs exclusifs, pas plus que l'attestation d'un des subordonnés de la société Converse Inc., Monsieur Meccozi, sans justifier par des factures et autres documents de ventes réelles à des tiers hors du territoire concédé.
Il s'en évince que des différences de prix sur les mêmes produits peuvent exister entre les Etats membres et que la connaissance par les sociétés Converse de la source d'approvisionnement de la société Dieseel AG lui permettrait de faire obstacle à la libre circulation des produits sur le territoire de l'Espace économique européen en tarissant cette source.
Il appartient en conséquence aux sociétés appelantes d'établir que les produits ont été initialement mis dans le commerce par la société Converse Inc. ou avec son consentement dans l'Espace économique européen sans avoir à exiger que la société Dieseel AG identifie la source de son approvisionnement.
Les sociétés appelantes prétendent établir le caractère contrefaisant des produits mis sur le marché sans leur consentement en faisant valoir qu'ils ne présentent pas les caractéristiques des produits authentiques.
Elles indiquent à cet effet que l'étiquette thermocollée apposée sur la langue intérieure n'est pas conforme aux produits authentiques car elle ne réagit pas à un marqueur d'authenticité situé dans l'étoile positionnée à gauche du nom Converse, le passage du laser sur cette étoile faisant apparaître habituellement un point vert.
Mais les sociétés intimées justifient que contrairement aux termes de l'attestation de Monsieur Baier, directeur en chef de l'intégrité des produits au sein de la société Converse Inc., le test du laser n'est pas toujours fiable dès lors que les chaussures authentiques peuvent présenter des défauts de fabrication résultant de la température inappropriée lors de la pose de l'étiquette, de la nature de l'encre ou des manipulations, ce dont il est justifié et ce qui a été constaté par le tribunal de ce siège dans une autre affaire.
Les sociétés intimées ont d'ailleurs acquis à Paris le 12 mai 2011 par l'intermédiaire d'un huissier de justice, des chaussures commercialisées dans le réseau officiel Converse dont les étiquettes ne réagissent pas au stylo laser, les sociétés appelantes déclarant alors que ce revendeur est un contrefacteur.
Les sociétés appelantes incriminent également le positionnement de l'étiquette sur la languette garnissant la chaussure et versent à cet effet le constat d'un huissier de justice à qui a été communiqué un document qualifié de Charte de fabrication qui est restée confidentielle. Si l'authenticité des constations personnelles de l'huissier ne peuvent être contestées en revanche le document qui lui a été remis et dont il n'a pu déterminer s'il correspondait aux documents adressés aux usines, ni permis de déterminer s'il correspondait aux périodes de validité des prescriptions de chaque document et aux périodes de fabrication, ne peut servir de référence, alors que les sociétés appelantes n'établissent pas que dans tous les modèles de produits les étiquettes sont placées de façon identique alors que les sociétés intimées justifient que les sociétés appelantes, qui ne les contredisent pas, mettent volontairement sur le marché des produits non homogènes voire défectueux.
La société Dieseel AG a d'ailleurs acquis des chaussures auprès d'un revendeur Converse présentant une étiquette positionnée de la même manière que celles garnissant les produits saisis.
Les comptes rendus de contrôle d'authenticité des chaussures Converse communiqués aux débats par les sociétés appelantes ne donnent aucune indication sur le positionnement des étiquettes présentement contesté.
Le positionnement de l'étiquette ne peut donc servir comme "marqueur" d'authenticité.
Les sociétés appelantes communiquent également des attestations de : Monsieur Berner, vice-président de la société Converse et de Madame Cinque, directrice de la protection des marques de la société, qui ne peuvent valoir, à elles seules, preuve à soi-même, et des attestations émanant de représentants de quatre usines situées en Chine et au Vietnam selon lesquelles les produits litigieux n'auraient pas été fabriqués aux dates mentionnées sur les étiquettes et n'émaneraient pas de ces usines. Cependant ces dernières attestations, non conformes en la forme, établies par des personnes sous la dépendance économique des sociétés Converse, ne rapportent pas des faits constatés par leurs auteurs, et apparaissent peu pertinentes puisque le même témoin Madame Wu Wu Chang Hou se présente dans une attestation de 9 septembre 2011 comme directrice de l'usine située en Chine, puis, dans une attestation du 25 janvier 2011 comme responsable d'activités dans une usine située au Vietnam de sorte qu'en l'absence d'autres éléments venant corroborer leurs déclarations, en regard du très grand nombre de produits fabriqués, elles ne peuvent établir que les chaussures litigieuses ne sont pas authentiques.
Les sociétés appelantes ne permettent pas de procéder à des comparaisons dès lors que les règles de fabrication ne sont pas communiquées, que les produits sont fabriquées dans plusieurs usines différentes dans le monde et qu'il n'est donc pas communiqué "d'échantillons étalons" issus des mêmes séries de fabrication, du même modèle, de la même usine.
Les sociétés intimées demandent que les pièces leur permettant d'établir que la fabrication des produits n'est pas uniforme ne soit pas écartées des débats en regard des graves griefs qui leur sont reprochés et l'absence d'expertise permettant d'apprécier l'authenticité des produits.
Mais c'est à bon droit que le tribunal a écarté ces documents internes, confidentiels (pièces 1 à 15 communiqués par Dieseel AG et (4, 9, 22 à 29 des autres sociétés intimées), propriété de la société Converse, soumises de par leur contenu au secret des affaires, dont la licéité de leur obtention n'est pas établie, alors que l'absence de ces documents ne portent pas atteinte aux droits de défense des sociétés intimées à qui la preuve de l'authenticité des produits n'incombe plus à titre principal.
La société Dieseel AG verse aux débats des constats d'huissier détaillés établissant l'existence d'une chaîne de factures cohérentes dont la première est celle d'un distributeur exclusif de la société Converse Inc. établi dans l'Espace économique européen sans que son identité soit révélée mais dont l'authenticité est confirmée par une attestation de son expert-comptable.
Par ailleurs, les intimées justifient que sur des chaussures présentées comme authentiques que celles-ci ne sont pas homogènes : différence de police dans les inscriptions, colle du patch qui s'étend, inscription "R" différente, les patchs situés à l'arrière diffèrent en ce que certains comportent la lettre "R", présence de colle.
Les sociétés appelantes soutiennent également que la distribution hors réseau constitue en elle-même un acte d'usage illicite de la marque. Mais à défaut d'établir que les produits ne sont pas authentiques et qu'ils n'ont pas été acquis de façon licite alors que leurs droits n'étaient pas épuisés, elles ne sont pas fondées en leur demande à ce titre, alors que la société Dieseel AG comme précisé ci-dessus justifie d'une chaîne de factures cohérente corroborée.
Il ressort de l'ensemble de ces éléments que c'est à bon droit que le tribunal a débouté, nonobstant la commercialisation, établie par les pièces pertinentes versées aux débats par les appelantes, de produits sur lesquels sont apposés les marques litigieuses, la société Converse Inc. de ses demandes formées au titre des actes de contrefaçon de ses marques, dès lors qu'elle ne rapporte pas suffisamment la preuve de l'usage non autorisé de celle-ci. Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Converse Inc. de l'ensemble de ses demandes et de débouter la société All Star CV venant aux droits de cette dernière, du chef de la marque française Converse All Star Chuck Taylor n° 1 356 944.
Sur les demandes reconventionnelles pour procédure abusive :
La présente procédure ne revêtant pas en regard des circonstances de l'espèce, de caractère manifestement abusif, mais ne constituant que l'exercice normal d'un droit, la demande en paiement de dommages et intérêts, formée à ce titre par les sociétés intimées, non fondée sera rejetée.
Sur les autres demandes :
L'équité commande d'allouer à la société Dieseel AG la somme de 10 000 euros et aux sociétés le Garage, Atlanta et Sport Négoce International, chacune, la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et de rejeter la demande formée de ce chef par les sociétés appelantes.
Les dépens resteront à la charge des sociétés appelantes et seront recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Par ces motifs, déclare recevable la société All Star CV en son intervention volontaire en sa qualité de cessionnaire dûment inscrit de la marque française Converse All Star Chuck Taylor N° 1 356 944, confirme le jugement déféré, y ajoutant, déboute la société All Star CV de l'ensemble de ses demandes, condamne les sociétés appelantes à payer à la société Dieseel AG la somme de 10 000 euros et aux sociétés le Garage, Atlanta et Sport Négoce International, chacune, la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, rejette le surplus des demandes reconventionnelles, condamne les sociétés appelantes aux entiers dépens qui seront recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.