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Décisions

CA Versailles, 1re ch. sect. 2, 21 mai 2013, n° 12-05824

VERSAILLES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Entrepots europeens du meuble et du salon (SARL)

Défendeur :

Cescutti

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M.Portelli

Conseillers :

Mmes Catry, Capra

Avocats :

Mes De Carfort, Nouel

CA Versailles n° 12-05824

21 mai 2013

FAITS ET PROCÉDURE,

Le 9 septembre 2010, les époux Cescutti ont passé commande d'une armoire lit autoportante avec canapé, de vérins, de matelas, d'une armoire lit couchage et d'un matelas auprès de la Maison de l'armoire-lit, SARL EEMS, sise à [...], pour un montant de 6 100 euro. Ils ont versé un acompte de 2 100 euro. La livraison a eu lieu le 16 novembre 2010.

Les époux Cescutti se sont aperçus qu'une fois la bibliothèque-lit dépliée, le meuble empêchait l'ouverture de la porte et de la porte-fenêtre de la pièce ne permettant plus de circuler aisément dans la pièce. Les meubles ont été repris par la société de livraison. Les époux Cescutti ont adressé à la société EEMS un courrier avec accusé de réception sollicitant le remboursement de l'acompte. La société estimait que la marchandise était donc conforme au bon de livraison signé, lu et compris des acheteurs. Par courrier en date du 5 janvier 2011, le conseil des époux Cescutti mettaient en demeure la société de restituer l'acompte.

Le 10 février 2011 la SARL EEMS a saisi le tribunal d'instance de Colombes aux fins de voir condamner les époux Cescutti au paiement de différentes sommes qu'elle a limitées lors de l'audience aux postes suivants :

- 4 000 euro au titre du restant dû de la commande de marchandise,

- 1 000 euro à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile .

Les époux Cescutti, en défense, ont demandé que la SARL EEMS soit déboutée de toutes ses demandes et condamnée à leur payer les sommes suivantes:

- 2 100 euro, montant de l'acompte versé,

- 500 euro à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- 1 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile .

Le 9 mars 2012 le tribunal d'instance de Colombes a condamné la SARL EEMS à payer aux époux Cescutti la somme de 2100 euro avec intérêts au taux légal, a débouté les parties de toutes leurs autres demandes, a condamné la SARL EEMS à payer aux époux Cescutti la somme de 200 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile .

La SARL EEMS a fait appel. Dans ses dernières conclusions l'appelante formule les demandes suivantes:

- réformer le jugement en toutes ses dispositions;

en conséquence, condamner les époux Cescutti au paiement des sommes de :

- 4 000 euro, solde de la commande passée,

- 2 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance lesquels seront recouvrés par Maître Chantal de Carfort, avocat, conformément à l'article 699 du Code de procédure civile .

Dans ses dernières conclusions l'intimé formule les demandes suivantes :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

en conséquence,

- condamner la société EEMS à payer aux époux Cescutti la somme de 2100 euro en remboursement de l'acompte versé et celle de 1500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile .

MOTIFS

Le tribunal a fondé sa décision sur l'article 111-1 du Code de la consommation qui prévoit que "tout professionnel vendeur de bien doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien" et qu'en "cas de litige... il appartient au vendeur de prouver qu'il a exécuté ses obligations". La lecture du bon de livraison n° 4334 du 9 septembre 2010 retient le juge car elle permet de constater que les époux Cescutti ont commandé une armoire-lit autoportante de dimensions 103 x 220 x 111 et une armoire lit couchage de dimension 153x220x59, avec matelas : il s'agit de meubles pliants, offrant couchage et rangement sous forme d'armoire ou de bibliothèque. Cette typologie de meubles implique que les dimensions sont un élément essentiel du choix effectué dans l'optique d'un gain de place. Le bon de livraison - en réalité un bon de commande - a été réalisé par un professionnel spécialisé mais ne fait mention que des dimensions des meubles repliés et non dépliés. Cette omission peut être à l'origine d'une confusion chez le consommateur qui peut croire que la longueur du meuble déplié équivaut à sa hauteur. Le tribunal en conclut que vendeur ne prouve pas qu'il a indiqué les dimensions des meubles une fois dépliés et qu'il a ainsi manqué à son obligation de délivrance d'un meuble conforme aux indications données lors de la commande.

Le tribunal n'a pas alloué de dommages et intérêts aux époux Cescutti pour action abusive, la mauvaise foi de la société EEMS n'étant pas démontrée.

L'appelante soutient que l'ensemble de la marchandise fonctionnait et était conforme au format figurant sur le bon de livraison. La société EEMS a fourni un mobilier en fonction des indications des clients. Les époux Cescutti ont été reçus par l'ensemble de l'équipe de la SARL EEMS et ils ont pu essayer les biens commandés, analyser les cotes des matelas, des armoires-lit au regard de leurs besoins et des dimensions de leur appartement.

Les intimés exposent qu'ils sont venus dans le magasin du vendeur munis des plans des pièces destinées à recevoir lesdits meubles. Ces plans, réalisés par un architecte, mentionnaient avec exactitude les dimensions de ces pièces, les ouvertures et leur envergure. Sur la base de ces documents, un bon de commande était établi pour des meubles aux dimensions appropriées. Après livraison, les époux Cescutti se sont rendus compte qu'une fois la bibliothèque-lit dépliée dans la chambre, il était impossible de circuler dans la pièce. De plus, la porte entre la chambre et le couloir se heurtaient au lit déplié et la porte-fenêtre ne pouvait plus se fermer, contrairement à ce que le vendeur avait affirmé. Les époux Cescuti affirment qu'ils n'auraient évidemment pas contracté, s'ils avaient su que le meuble ne convenait pas compte tenu des dimensions de la pièce, lesquelles étaient connues de la société venderesse. En agissant de la sorte, concluent-ils, la société EEMS a manqué à son devoir d'information et de conseil et à son obligation de délivrance.

L'article 111-1 du Code de la consommation prévoit que "tout professionnel vendeur de bien doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien". La loi impose donc au vendeur de fournir à l'acheteur toutes les indications lui permettant de disposer et de jouir normalement de son bien. S'agissant d'un vendeur de meubles d'intérieur destinés à garnir un appartement de faible dimension tels qu'une armoire-lit autoportante et une armoire-lit de couchage, une des obligations essentielles du vendeur est donc de s'assurer que ce mobilier pourra prendre place dans les lieux qui l'accueilleront. Il lui appartient donc d'informer précisément le consommateur non seulement des dimensions du mobilier mais de sa compatibilité avec l'espace indiqué en procédant à toutes les vérifications nécessaires. Telle n'a pas été le cas en l'espèce malgré les indications fournies par le client sous forme de plan des lieux. La société EEMS a donc manqué à son obligation d'information telle que prévue par l'article L 111-1 du Code de la consommation. Il y a donc lieu de confirmer le jugement.

La société EEMS ayant succombé dans ses demandes, elle sera condamnée aux dépens ainsi qu'à payer aux époux Cescutti une somme de 1 000 euro titre de l'article 700 du Code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement, confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, rejette les demandes de la société EEMS, condamne la société EEMS à payer aux époux Cescutti la somme de 1 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, la condamne aux dépens qui seront recouvrés par les avocats dans les termes de l'article 699 du Code de procédure civile.