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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 5 décembre 2013, n° 11/15092

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

CAP 20 (EURL)

Défendeur :

Du Pareil Au Même (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Perrin

Conseillers :

Mme Michel-Amsellem, M. Douvreleur

Avocats :

Mes Monin, Guizard, Bendrihem

T. com. Evry, 3e ch., du 8 juin 2011

8 juin 2011

FAITS ET PROCÉDURE

La société Du Pareil Au Même (ci-après, DPAM) a pour activité principale la conception, la création et la vente de vêtements pour enfants. Elle a développé un réseau de distribution succursale depuis sa création en 1986.

Elle a étendu la gamme de ses produits aux chaussures et aux articles de puériculture.

Fin 2003, la société DPAM a ouvert son réseau à des commerçants indépendants par le biais de l'affiliation.

C'est dans ce contexte, qu'en janvier 2004, M. François-Olivier Boyer, qui exploitait déjà des franchises dans la région de Nevers, notamment une franchise Orchestra spécialisée dans le secteur du textile enfant, s'est rapproché de la société DPAM.

Le 6 mai 2004, les sociétés DPAM et Cap 20 dont M. Boyer était le gérant ont signé un contrat de commission-affiliation à durée déterminée pour la période du 01 juin 2004 au 31 mai 2009, régissant leurs relations contractuelles dans le cadre d'un point de vente destiné à exploiter le triple concept (enfant-bébé-chaussures) dans une zone commerciale située à l'entrée de Nevers.

Par courrier du 29 octobre 2008, la société Cap a notifié à la société DPAM la résiliation du contrat de commission-affiliation.

Estimant avoir subi un préjudice imputable à la société DPAM, la société Cap 20 a assigné cette dernière devant le Tribunal de commerce d'Evry.

Par jugement du 8 juin 2011, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce d'Evry a :

- débouté Cap 20 de l'ensemble de ses demandes,

- condamné Cap 20 à payer à DPAM la somme de 20 000 euro sur le fondement de l'article 32-1 du Code de procédure civile.

- condamné Cap 20 à payer à DPAM la somme de 15 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Vu l'appel interjeté le 9 août 2011 par la société Cap 20 contre cette décision.

Vu les dernières conclusions signifiées le 5 mars 2012 par la société Cap 20 par lesquelles il est demandé à la cour de :

- dire DPAM irrecevable et mal fondée en son incident de procédure,

- prononcer la nullité du jugement rendu par le Tribunal de commerce d'Evry le 8 juin 2008,

- constater l'inexécution de son obligation d'information pré contractuelle et d'assistance par DPAM.

En conséquence,

- prononcer la résiliation de la convention dite de commission affiliation aux torts exclusifs de DPAM,

- condamner DPAM à réparer le préjudice subi par Cap,

- à ce titre, la condamner au paiement de la somme de 754 284 euro TTC, montant de l'écart constaté entre les résultats stipulés par DPAM et les résultats constatés par Cap 20,

- la condamner à lui payer la somme de 15 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens

Subsidiairement,

- dire que la convention dite de commission affiliation est soumise aux dispositions de l'article 1984 du Code civil,

- condamner DPAM à payer à Cap 20 les sommes de 144 268 euro au titre des avances et frais faits pour l'exécution du mandat, et 73 678 euro au titre de la marge dont elle a été privée.

La société Cap 20 soutient que le jugement entrepris doit être déclaré nul sur le fondement des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, dans la mesure où le débat judiciaire aurait été escamoté par le tribunal, notamment en négligeant de reprendre les moyens de droit développés par elle.

Elle fait valoir que si la société DPAM qualifie la convention de contrat de commissionnement, le tribunal devait se prononcer sur deux qualifications possibles, à savoir soit la qualification de mandat, soit celle de contrat de commission. Elle affirme que l'indépendance alléguée par sa contradictrice ne résiste ni à l'examen du contrat, ni à celui de la manière dont la convention s'est exécutée, et qu'étant tenue d'agir non seulement au nom, mais aussi pour le compte de la société DPAM, elle avait en réalité la qualité de mandataire de cette dernière.

La concluante expose également ne pas être un agent commercial, et insiste sur le fait que cette qualification ne résulte ni de la convention, ni des conclusions de première instance ou d'appel régularisées dans son intérêt.

Elle affirme ensuite que la qualification de contrat de commission est exclue tant au regard de la convention que de la manière dont les parties l'ont exécutée dans la mesure où elle n'achetait pas les produits et n'encaissait pas les recettes en provenance de la vente.

Elle expose d'une part que les incidents présentés comme des inexécutions contractuelles sont au nombre de 5, et se situent essentiellement en 2005, à rapprocher de la durée de contrat qui s'est exécuté pendant 5 ans et que la société DPAM se garde bien d'évoquer ses propres manquements.

Sur son préjudice, elle expose que son mode de calcul est fonction de la qualification de la convention, si celle-ci est un contrat de commission, alors le préjudice est constitué par l'écart cumulé pendant toute la durée de la convention entre la stipulation de chiffre d'affaires transmise par la société DPAM et le chiffre réalisé par elle, soit 754 284 euro TTC au total, en revanche, si celle-ci est un mandat, alors le préjudice équivaut à la somme des montants des avances et frais, ainsi que celui de la marge promise et s'élève donc à la somme de 217 964 euro HT.

Vu les dernières conclusions signifiées le 2 août 2013 parla société DPAM, par lesquelles il est demandé à la cour de :

In limine litis :

déclarer irrecevable et infondée la société Cap 20 en son appel, faute d'indiquer dans ses conclusions d'appel, et le bordereau annexé, les pièces précises sur lesquelles elle fonde ses demandes, et faute d'avoir produit lesdites pièces,

En tout état de cause, sur le fond,

A titre principal :

- débouter la société Cap 20 de sa demande en nullité du jugement,

- débouter la société Cap 20 de toutes ses demandes tendant à la réformation ou l'infirmation du jugement entrepris,

- confirmer le jugement entrepris et y ajoutant condamner la société Cap 20 à lui payer une somme de 15 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

A titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour devait prononcer l'annulation du jugement, statuant à nouveau,

- débouter la Société Cap 20 de toutes ses demandes, fins et conclusions tendant à la condamnation de la société DPAM, pour un fait fautif quelconque de nature contractuelle ou quasi-délictuelle,

- condamner alors la Société Cap 20 à lui payer :

. une somme de 20 000 euro en application des articles 1382 du Code civil et 32-1 du Code de procédure civile, à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée,

. une somme de 30 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel,

In limine litis, la concluante expose que les demandes de sa contradictrice doivent être déclarées irrecevables pour défaut d'indication des pièces et de communication conforme. Elle insiste sur le fait qu'il lui est impossible de savoir ce qui est communiqué en cause d'appel et ce qui ne l'est pas.

S'agissant de l'argument de l'appelante au terme duquel le tribunal aurait négligé de répondre aux moyens de droit par elle développés, elle affirme que cette affirmation ne résiste pas à la simple lecture du jugement.

Elle insiste sur le caractère spécifique du contrat de commission-affiliation en ce qu'il permet aux commissionnaires affiliés de débuter une exploitation immédiate sans avoir à financer l'achat du moindre stock, ni à supporter la charge des marchandises invendues, de sorte que le contrat ne constitue ni un contrat de franchise, ni un contrat de mandat.

L'intimée fait ensuite valoir que la convention la liant à l'appelante a pris fin le 31 mai 2009, terme exact de sa durée contractuelle de 5 ans, et date à laquelle elle a repris possession des stocks et la société Cap la libre disposition de son fonds de commerce. Elle en tire la conséquence que la demande de cette dernière visant à voir prononcer la résiliation de la convention est sans objet, et irrecevable.

Elle insiste sur le fait que les arguments de sa contradictrice, aux termes desquels le partenariat aurait échoué pour des faits lui étant imputables, ne résistent pas à l'analyse, notamment au regard de la longue expérience de M. Boyer et affirme que la société Cap n'a pas mis en œuvre les moyens humains d'organisation et de management nécessaires pour faire progresser son chiffre d'affaires.

Sur les demandes financières formées par l'appelante, l'intimée expose que cette dernière ne saurait exiger la garantie d'un chiffre d'affaires, d'autant qu'elle seule avait la maîtrise des moyens de vente et de leur mise en œuvre dans son propre fonds de commerce et qu'en toute hypothèse, l'indemnisation n'a pas vocation à enrichir celui qui la réclame. Sur la demande au titre du prétendu contrat de mandat, elle oppose qu'il incombe au mandataire d'établir la réalité et le montant des avances dont il réclame le remboursement.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la société CAP 20

Considérant que la société DPAM demande à la cour de déclarer irrecevable et infondée la société Cap en son appel, faute d'avoir indiqué dans ses conclusions d'appel, et le bordereau annexé, les pièces précises sur lesquelles elle fonde ses demandes, et faute d'avoir produit lesdites pièces,

Considérant que, malgré la demande qui lui a été faite par la cour, notifiée par RPVA, l'appelant n'a produit aucune pièce ;

Considérant que l'article 954 du Code de procédure civile dispose que "Les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ses prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées" ;

Que cette disposition procédurale n'est assortie d'aucune sanction ; que, dès lors, il appartient à la cour d'examiner les moyens soulevés par la société Cap 20 à l'appui de son appel, dont celui de la nullité du jugement pour défaut de motivation, question qui ne repose que sur l'examen de cette décision dont la cour a connaissance et qui ne requiert la production d'aucune autre pièce.

Sur la nullité du jugement

Considérant que la société CAP 20 soutient que le jugement doit être déclaré nul sur le fondement des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, dans la mesure où il n'a pas répondu aux moyens de droit qu'elle avait développés ;

Qu'elle indique que le tribunal a ignoré sa contestation d'une détermination commune du chiffre d'affaires prévisionnel ; qu'il convient d'observer que le tribunal a indiqué que "lors de négociations qui se sont tenues entre le 06-01-2004 et le 06-05-2004 date de la signature d'un accord entrant en vigueur le 01.06-2004, les parties en ont amplement débattu et vérifié les détails avant en particulier de déterminer d'un commun accord un chiffre d'affaires prévisionnel" ;

Que si le tribunal a fait état des éléments présentés par la société DPAM et les retient comme probants, la société CAP 20 prétend qu'il n'aurait pas tenu compte des pièces qu'elle-même avait communiquées et qui rapportaient la preuve contraire ; que pour autant elle ne précise pas de quelle pièce elle fait état ; qu'elle met d'autant moins la cour en mesure d'apprécier la pertinence de son affirmation qu'elle n'a produit en cause d'appel aucune pièce ;

Considérant que, devant les premiers juges, la société CAP 20 a demandé à titre principal de constater l'inexécution par la société DPAM de son obligation d'information pré contractuelle et d'assistance et en conséquence, de prononcer la résiliation de la convention dite de commission affiliation, subsidiairement de dire que cette convention est soumise aux dispositions de l'article 1984 du Code civil et de condamner la société DPAM à lui rembourser les sommes de 144 268 euro au titre des avances et frais faits pour l'exécution du mandat et 73 678 euro au titre de la marge dont elle a été privée ;

Que la société CAP 20 soutient que le tribunal n'a pas examiné son subsidiaire portant sur la question juridique du mandat ; que la cour observe que la société CAP 20 a demandé au tribunal de qualifier la convention de mandat ; que le tribunal a débouté la société CAP 20 de ses demandes et que la société CAP 20 n'allègue pas que le défaut de motivation aurait eu une incidence sur le calcul de son préjudice ; que, dès lors, il n'en résulte pas un défaut de motivation du jugement, mais tout au plus une omission dont la société CAP 20 ne précise pas les conséquences ; que la cour étant saisie de l'ensemble du litige, elle évoquera en conséquence la question de la nature de la convention.

Sur la nature de la convention

Considérant que la société CAP 20 soutient que le contrat liant les parties est un contrat de mandat alors que la société DPAM le qualifie de contrat de commission-affiliation ;

Considérant que la société CAP 20 fait valoir qu'aux termes du contrat, la société DPAM restait propriétaire des produits jusqu'à leur vente, gérait l'approvisionnement, le retour ou la redistribution des produits, décidait de leur prix de vente et des rabais pouvant être consentis ; qu'à cette fin, elle s'était vu imposer un modèle de terminal de gestion, dont le loyer était à sa charge ; qu'elle ajoutait que devait être versée chaque soir et, au plus tard le lendemain midi, la totalité de sa recette journalière sur le compte de la société DPAM, que l'aménagement tant intérieur qu'extérieur de son magasin devait correspondre aux instructions de la société DPAM et qu'enfin, elle avait l'obligation de créer un fichier de clientèle qui était géré par la société DPAM, de sorte que la clientèle devenait selon elle celle de la société DPAM ;

Considérant que M. Boyer a constitué une EURL avec son propre nom commercial Cap 20; qu'il a directement négocié un bail commercial, qui lui permettait même en cas de cessation de ses relations contractuelles avec la société DPAM de poursuivre une activité de commerce de confection, habillement, prêt à porter et accessoires, de sorte que sa société a pu y développer sa propre clientèle ; que la création d'un fichier des clients porté à la connaissance de la société DPAM avait une utilité dans un réseau, dans la diffusion d'opérations de promotion sans qu'il s'ensuive une quelconque appropriation de la clientèle par celle-ci, la clientèle étant attachée au fonds de commerce et non à la marque ; que d'ailleurs, M. Boyer a fait connaître à la société DPAM qu'il envisageait d'y poursuivre une activité identique sous l'enseigne Orchestra, activité à l'occasion de laquelle il avait développé une clientèle en centre-ville ;

Que la société CAP 20 a acquis le mobilier d'agencement de son magasin ; que l'existence d'un stock restant la propriété de la société DPAM, n'exclut pas l'existence d'un fonds de commerce ;

Que la société CAP 20 a également engagé du personnel selon ses propres choix ;

Que l'ouverture d'un compte distinct, destiné à recevoir les recettes journalières encaissées par l'affilié, constitue une modalité de gestion ; que ce compte était destiné au seul encaissement des recettes, la société CAP 20 disposant d'un compte bancaire personnel sur lequel elle encaissait les commissions versées par la société DPAM et sur lequel elle réglait les dépenses liées à sa gestion ;

qu'il ne saurait démontrer une dépendance de la société CAP 20 dans la gestion de son fonds de commerce ;

Que l'article 16-3 du contrat précise que "l'affilié s'est engagé à faire figurer obligatoirement sur tous ses documents commerciaux son nom, sa raison sociale, son adresse et son numéro d'immatriculation au registre du commerce" ; qu'en conséquence, la société CAP 20 était le vendeur des marchandises agissant en son nom et qu'il lui appartenait de le faire apparaître sur les documents qu'elle éditait, de sorte qu'elle ne saurait se prévaloir d'un ticket de caisse sur lequel ces indications ne figuraient pas ;

Considérant que la clientèle est attachée à un fonds de commerce et non à une marque ou à une enseigne, ces deux éléments constituant seulement un élément parmi d'autres dans la décision du consommateur ; que la société CAP 20 a ainsi développé une clientèle sur son point de vente ; qu'elle ne démontre d'ailleurs pas que la suppression de l'enseigne Du Pareil au Même aurait mis à néant la clientèle drainée par le fonds de commerce, dès lors que cette clientèle a été de fait écartée de ce fonds de commerce à raison de la nouvelle activité exercée à savoir la vente de produits électroniques ; que, si la société CAP 20 affirme que la société DPAM a ouvert un autre magasin à Nevers grâce à la constitution de sa clientèle, elle n'en rapporte pas la preuve, la société DPAM exposant qu'elle a seulement repris un magasin de vente de chaussures pour enfants, déjà exploité sous une autre enseigne, à l'occasion d'une opération de fusion ;

Qu'enfin, il résulte des dispositions de l'article 2004 du Code civil que le mandant peut révoquer librement son mandataire quand bon lui semble alors que le contrat litigieux excluait toute possibilité pour la société DPAM de le résilier avant son terme sauf en cas d'inexécution par l'affilié de certaines obligations définies à l'article 26 ;

Considérant en revanche que l'article L. 132-1 du Code de commerce définit le commissionnaire comme étant "celui qui agit en son propre nom ou sous un nom social pour le compte d'un commettant" ;

Que, la société CAP 20 en adhérant au réseau DPAM a bénéficié en contrepartie d'un droit d'entrée a bénéficié de sa notoriété, du savoir-faire et de l'expertise d'une marque et d'une enseigne connue et a débuté son activité sans avoir à mobiliser sa trésorerie pour l'achat d'un stock, ni à supporter les invendus, ce qui constituait des avantages qu'elle a acceptés en sa qualité de commerçant indépendant, quand bien même elle vendait pour le compte de la société DPAM ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments que le contrat en cause est un contrat de commission affiliation ; qu'il y a lieu de débouter la société CAP 20 de sa demande tendant à le voir qualifié de contrat de mandat ;

Sur la demande de la société CAP 20 sur le fondement du document d'information pré contractuel

Considérant que la société CAP 20 fonde sa demande sur le fait que le document d'information pré contractuel ne comporte aucune information sur le réseau, ni sur l'état général et local du marché, faisant valoir que la société DPAM lui a annoncé un chiffre d'affaires annuel de 11 000 euro par mètre carré de surface de vente, montant qu'elle a ramené à 2192 euro au regard du marché local et qu'elle lui a garanti un taux de commission minimum les deux premières années ;

Qu'elle relate n'avoir jamais atteint ce chiffre et que, de plus, son chiffre d'affaires annuel au mètre carré a régulièrement diminué passant de 1712 euro en 2005 à 1270 euro en 2008 ; que la société DPAM alertée sur cette baisse ne lui a apporté ni conseils ni mesure de nature à l'enrayer ;

Considérant que M. Boyer s'est vu remettre un document d'information pré contractuel dès le mois de janvier 2004 ce qu'il ne conteste pas ; qu'il n'a fait aucune observation sur ce document dans les mois précédant la signature alors que celle-ci est intervenue le 6 mai 2004 ;

Considérant que la société DPAM étant une société cotée au second marché, toutes les informations financières et commerciales la concernant étaient disponibles en temps réel notamment sur son site et sur celui de L'AMF ce que M. Boyer qui était lui-même dans le monde des affaires en tant que gérant et associé de plusieurs franchises dans le secteur textile ne pouvait pas ignorer et qui lui permettait de constater que le chiffre d'affaires de la société DPAM avait subi une baisse de 7,3 % en 2003 ;

Que s'agissant du marché local, M. Boyer était un commerçant investi sur le plan local et, étant gérant et/ou associé au sein de sept sociétés commerciales dont une franchise dans le domaine du vêtement enfant, alors que la société DPAM n'avait aucune implantation locale ; qu'il ne précise d'ailleurs pas quel élément sur le plan local, qu'il ne connaissait pas, aurait pu lui être fourni par la société DPAM ;

qu'il a pris la décision d'installer son fonds de commerce à l'extérieur de la ville de Nevers dans une zone commerciale ; que le choix du triple concept enfant-bébé-chaussures exigeait nécessairement plus de surface et de personnel que celui d'une seule activité ce qu'il ne pouvait ignorer ; qu'il ne saurait imputer son choix à la société DPAM ;

Que le compte d'exploitation prévisionnel indiquait "CA déterminé d'un commun accord entre DPAM et Affilié" ; que M. Boyer ne conteste pas que la société DPAM a pris en compte la situation particulière de son fonds de commerce ; qu'il ne saurait prétendre que celui-ci a été déterminé de façon unilatérale par la société DPAM puisqu'il indique que celle-ci a accepté de ramener le chiffre d'affaires moyen annuel à 2 192 euro TTC ce qui démontre qu'une négociation a eu lieu ;

Considérant que la société DPAM fait observer qu'au cours de ses deux premiers mois d'activité, la société CAP 20 a réalisé des chiffres d'affaires qui, ramené sur 12 mois, étaient supérieurs au prévisionnel ;

Que la société DPAM expose qu'au cours des années suivantes, le chiffre d'affaires du réseau a augmenté alors que celui de la société DPAM n'a cessé dans le même temps de baisser ;

Considérant que la société CAP 20 met en cause des défaillances dans son approvisionnement et prétend n'avoir bénéficié d'aucune assistance de la société DPAM pour remédier à la baisse de son chiffre d'affaire ; que, toutefois, elle n'apporte aucune pièce pour justifier de ses affirmations.

Qu'en revanche, il résulte des pièces produites par la société DPAM qu'elle a rapidement pris en considération les baisses du chiffre d'affaires de son affilié et les a analysées ; qu'ainsi par courrier recommandé du 18 juin 2007, la société DPAM a, d'une part, répondu au grief de M. Boyer qui se plaignait de ne pas avoir été invité à une réunion du 29 mai, lui rappelant qu'il en avait été informé par un émail du 5 mai, par une confirmation lors d'un déjeuner du 14 mai avec remise du descriptif de la réunion et enfin par un rappel téléphonique, d'autre part lui a indiqué avoir procédé à un diagnostic dont il résultait que son chiffre d'affaires était "très en retrait de celle des autres affiliés en Enfant et Chaussure" alors que celui relatif au bébé était supérieur à celui réalisé en moyenne par les affiliés ; que la société DPAM concluait que selon ce diagnostic "cette contre-performance (...) est due en grande partie à l'insuffisance de personnel en magasin. En effet trop souvent le personnel DPAM sert à combler les absences dans vos autres magasins et du coup il y a sous-effectif en surface de vente d'où notamment l'insuffisance notable des réalisations du département chaussure. Un autre élément pénalisant pour le chiffre est le faible relais que vous donnez aux opérations d'animation qui sont pourtant un levier évident pour l'activité" ;

Que la société DPAM démontre que cette insuffisance de personnel n'a fait que s'aggraver; que le prévisionnel avait prévu une équipe composée d'une responsable à plein temps, de trois vendeuses à plein temps, d'une vendeuse à plein partiel et la présence de M. Boyer lui-même à temps partiel ce qui était rendu nécessaire par le triple concept qui supposait une équipe suffisante pour assister les clients dans leur choix, surveiller la surface de vente, procéder au garnissage et au réassortiment des casiers et des linéaires ; que l'examen des liasses fiscales et des déclarations sociales de la société CAP 20 ont mis en évidence que les heures de travail rémunérées n'avaient cessé de diminuer, étant en 2005 de 5,77 salariés soit 3,4 salariés présents concomitamment en boutique, en 2007 de 3,4 salariés soit 2 salariés présents concomitamment en boutique, en 2008 de 3,1 salariés soit 1,9 salarié présent en boutique ; que pour l'année 2008 tous les salariés sans exception étaient des salariés à temps partiel ; que M. Boyer se déplaçait sur ses différents points de vente ; qu'au surplus, la société DPAM faisait valoir qu'il s'agissait en majorité de salariés non qualifiés, notamment en apprentissage ce qui n'est pas contesté ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments que la boutique n'a pas bénéficié des moyens humains nécessaires à son activité alors que ceux-ci avaient d'une part étaient précisés par le prévisionnel et que la société DPAM avait attiré l'attention de son affilié sur cette insuffisance, expliquant ainsi à son affilié la cause d'un chiffre d'affaires inférieur à celui réalisé dans des conditions identiques par d'autres affiliés ; que M. Boyer n'a tenu aucun compte de ces observations puisqu'au contraire il a, après réception de cette analyse, accentué sa politique consistant à diminuer le nombre de salariés ;

Considérant que la société DPAM ajoute que le magasin dédié à l'enfance et à la puériculture ne donnait pas une image soignée conforme à un tel concept ; que selon des compte rendus de visite qu'elle produit, il résulte que des cartons étaient empilés à même le sol, des palettes remplies de cartons étaient abandonnées dans l'espace bébé, contenant des articles hors saison, que dans le corner chaussures, des modèles étaient déposés à même le sol alors qu'un pied de chaque modèle devait être disposé sur des présentoirs prévus à cet effet, de sorte que le magasin se présentait comme un magasin de solderie ;

Qu'une partie de la marchandise n'était pas déballée et stockée dans la réserve sans être rangée par thème ce qui compliquait les réassorts et la rotation des stocks ;

Que M. Boyer ne conteste pas ces constatations, résultant notamment d'une visite réalisée dans son magasin le 6 octobre 2006, affirmant qu'il s'agit d'un constat ponctuel effectué alors qu'il avait reçu le matin même de cette visite des marchandises représentant 150 pièces en 11 colis et qu'il lui avait été demandé le 29 septembre de transférer 250 pièces vers d'autres magasins ; que la date de cette demande de transfert de marchandises ne saurait expliquer les constatations faites sur la surface de vente plusieurs jours après ; que la livraison de 11 colis ne justifie pas davantage le stockage de cartons vides ou pleins dans la boutique alors que elle-ci avait une réserve ; que M. Boyer reconnaît ainsi ses difficultés à gérer ses stocks, ce qui exigeait de fait un personnel suffisant et qualifié ;

Considérant que la société CAP 20 ne démontre pas, ni même n'allègue qu'elle aurait accepté un prévisionnel qu'elle ne pouvait manifestement pas atteindre, ni de faute de la société DPAM par manque d'assistance ; que c'est donc à juste titre qu'elle a été déboutée de ses demandes par les premiers juges.

Sur la demande tendant au prononcé de la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la société DPAM

Considérant que, par courrier recommandé avec AR du 29 octobre 2008, la société CAP 20 a dénoncé le contrat à la société DPAM, lui indiquant "J'ai donc été dans l'obligation de vendre mon magasin de centre-ville, de même que celui situé en périphérie, dans lequel j'exploitais l'enseigne DPAM. Ce dernier a en effet intéressé la société Orchestra convaincue du potentiel de la périphérie. Par conséquent je suis aujourd'hui contraint de résilier, par la présente, la convention conclue entre nos sociétés. Aussi je vous demande de faire le nécessaire pour enlever au plus vite et sous un délai de trois semaines à compter de la réception de ce courrier, l'ensemble des éléments appartenant à votre société" ;

Que, par courrier du 18 novembre 2008, la société DPAM en a pris acte que de ce fait le contrat a pris fin à la date contractuellement convenue par les parties soit le 31 mai 2009; que la société DPAM a repris ses stocks et la société CAP 20 la libre disposition de son fonds de commerce ;

Que l'article 3 du contrat excluait tout renouvellement par tacite reconduction ;

Que la convention ayant été dénoncée à la demande et à l'initiative de la société CAP 20 par un courrier antérieur à son assignation, le contrat a donc pris fin à son terme contractuel; que la société CAP 20 doit donc être déclarée irrecevable en sa demande de résiliation ;

Sur l'article 700 du Code de procédure civile

Considérant que la société DPAM a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge, qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 dans la mesure qui sera précisée au dispositif.

Par ces motifs Et, adoptant ceux non contraires des Premiers Juges, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme le jugement déféré sauf à y ajouter, Evoque la question de la qualification juridique de la convention et Dit qu'il s'agit d'un contrat de commission d'affiliation, Déclare irrecevable la société CAP 20 en sa demande de résiliation du contrat du 6 mai 2004, Condamne la société CAP 20 à payer à la société DPAM la somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société CAP 20 aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile