CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 4 décembre 2013, n° 13-08506
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Jaziri, Sam & Co (SARL)
Défendeur :
Casa Concept (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Cocchiello
Conseillers :
Mmes Luc, Nicoletis
Avocats :
Mes Grappotte-Benetreau, Etevenard, Lorcy
La société par actions simplifiée Casa Concept Services créée et immatriculée le 4 mars 2009 dont le gérant est Monsieur Arrondeau a pour activité en France et à l'étranger, l'exploitation de tous fonds de débit de boissons bar brasserie et restauration, toutes prestations de services qui sont liées à ces activités. Elle a acquis le 5 février 2009 de la société Delavega laquelle les avait acquis elle-même de la société Heineken Entreprises les droits afférents à l'exploitation de la marque "Casa del Campo", de l'enseigne du concept et du savoir-faire Casa del Campo et entend les exploiter par des contrats de franchise.
Après remise du document d'information précontractuelle le 3 avril 2009, la société Casa Concept Services a signé le 4 mai 2009 un contrat de franchise pour une durée de sept ans avec Samir Jaziri, agissant en son nom personnel et en qualité de dirigeant et d'associé de la société Sam & Co.
Après une lettre recommandée avec accusé de réception de mise en demeure du franchisé de respecter ses obligations restée infructueuse, la société Casa Concept Services signifiait à la société Sam & Co la rupture du contrat par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 septembre 2011.
Estimant que les grosses difficultés de trésorerie qu'elle rencontre sont la conséquence des fautes commises par le franchiseur tant lors de la conclusion du contrat qu'au cours de son exécution, la société Sam & Co a assigné devant le Tribunal de commerce de Paris par acte du 21 décembre 2011, la société Casa Concept Services en nullité du contrat, subsidiairement en résolution du contrat de franchise et en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis.
La société Casa Concept Services qui a formé des demandes reconventionnelles a assigné, par acte du 21 mai 2012, Monsieur Jaziri aux fins de condamnation solidaire.
Par jugement 19 avril 2013, le Tribunal de commerce de Paris a :
- Débouté la société Sam & Co et Monsieur Samir Jaziri de leur demande d'annulation du contrat de franchise,
- Constaté la résiliation du contrat de franchise aux torts respectifs des parties à compter du 6 septembre 2011,
- Débouté les parties de leurs demandes de dommages et intérêts,
- Condamné solidairement la société Sam & Co et Monsieur Samir Jaziri à payer à la société Casa Concept Services la somme de 22 318,13 euros HT outre les intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 2011 et anatocisme,
- Ordonné à la société Sam & Co et à Monsieur Samir Jaziri de déposer l'enseigne au logo de Casa Del Campo dans les 15 jours de la signification du présent jugement, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, pendant 60 jours après quoi il sera fait droit à nouveau :
- Débouté les parties pour leurs demande autres plus amples ou contraires
- Ordonné l'exécution provisoire
- Condamné les parties à leurs propres dépens.
Samir Jaziri et la société Sam & Co ont interjeté appel de ce jugement le 25 avril 2013.
Par ordonnance du 18 septembre 2013, le Premier Président de la Cour d'appel de Paris a autorisé la fixation de l'affaire à jour fixe.
Par conclusions du 8 octobre 2013, la société Sam & Co et Monsieur Jaziri demandent à la cour de :
- Constater que la société Casa Concept Services a caché des informations essentielles,
En conséquence,
- Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
- Annuler le contrat de franchise du 4 mai 2009,
-Condamner la société Casa Concept Services au paiement d'une somme de 350 086 euros avec intérêts au taux légal à compter 4 mai 2009 et capitalisation des intérêts,
Subsidiairement, Vu les articles 1147 et 1184 et 1154 du Code civil,
- Constater que la société Casa Concept Services a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité contractuelle,
En conséquence,
- Prononcer la résolution du contrat de franchise,
- Condamner la société Casa Concept Services au paiement d'une somme de 350 086 euros avec intérêts au taux légal à compter 4 mai 2009 et capitalisation des intérêts,
Vu l'article 32-1 du Code de procédure civile,
- Constater que la procédure diligentée par la société Casa Concept Services à l'encontre de Monsieur Jaziri est abusive,
En conséquence,
- Condamner la société Casa Concept Services au paiement d'une somme de 3 000 euros à titre d'amende civile,
- Condamner la société Casa Concept Services à payer à Monsieur Samir Jaziri la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- Mettre hors de cause Monsieur Jaziri,
- Débouter la société Casa Concept Services de toutes ses demandes fins et conclusions.
- Condamner la société Casa Concept Services au paiement d'une somme de 10 000 euros à la société Sam & Co et 10 000 euros à Monsieur Jaziri au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens dont le montant pourra être recouvré directement par la Scp Grapotte et Benettreau conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
Par conclusions du 17 octobre 2013, la société Casa Concept Services demande à la cour de :
- Débouter la société Sam & Co et Monsieur Jaziri de l'ensemble de leurs prétentions, fins et conclusions,
- Déclarer la société Casa Concept Services recevable et bien fondée en ses demandes,
- Confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la solidarité entre la société Sam & Co et Monsieur Jaziri,
- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné solidairement la société Sam & Co et M. Jaziri au paiement des factures impayées avec intérêt au taux légal à compter du 29 juillet 2011 avec anatocisme,
- Condamner solidairement la société Sam & Co et Monsieur Jaziri au paiement à la société Casa Concept Services de la somme de 94 918,13 euros se décomposant comme suit :
- Factures impayées : 22 318,13 euros HT
- Indemnisation conventionnelle du préjudice : 72 600 euros
- Dire et juger que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la première mise en demeure,
- En tout état de cause :
- Constater que le mobilier prêté le 17 septembre 2010 n'a fait l'objet d'aucune restitution,
- Partant, réformer le jugement entrepris sur ce point et condamner solidairement la société Sam & Co et Monsieur Jaziri, sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, à restituer à leurs frais les biens mobiliers en parfait état, au siège de la société franchiseur,
- Condamner solidairement la société Sam & Co et Monsieur Jaziri à verser une indemnité d'utilisation des biens mobiliers d'un montant de 250 euros par mois à compter de la première mise en demeure d'avoir à les restituer,
- Liquider l'astreinte prononcée par le tribunal,
- Confirmer de plus fort le jugement en ce qu'il a condamné solidairement la société Sam & Co et Monsieur Jaziri, sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, à déposer complétement l'enseigne selon les stipulations contractuelles,
- Condamner solidairement la société Sam & Co et Monsieur Jaziri au paiement de la somme de 4 500 euros à la société Casa Concept Services par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- Les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement pourra être poursuivi par Maître Frédérique Etevenard Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Sur ce
1) Sur la mise en cause de Monsieur Jaziri :
Considérant que l'intimée fait valoir que Monsieur Jaziri a signé le contrat de franchise tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant de la société Sam & Co, de sorte qu'il est tenu solidairement des obligations contractées et des conséquences de leur inexécution ; que les appelants exposent que Monsieur Jaziri qui est tiers au contrat n'est pas tenu des obligations de la société Sam & Co, qui a seule signé le contrat de franchise avec la société Casa Concept Services ;
Considérant que, contrairement à ce que les appelants soutiennent, le contrat de franchise dont les termes sont parfaitement clairs sur ce point, précise que sont parties à l'acte outre la société Casa Concept Services, Samir Jaziri, " agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'associé majoritaire et représentant légal de la société pour laquelle il est autorisé à exploiter, la société Sam & Co (...) sachant que la non-exécution d'une des obligations du contrat par la société Sam&co sera immédiatement et solidairement opposable à Monsieur Samir Jaziri, franchisé à titre personnel ", que les parties ont ainsi parfaitement manifesté leur volonté que Samir Jaziri se reconnaisse et soit reconnu par la société Casa Concept Services comme franchisé et qu'il réponde, avec la société Sam & Co des obligations que celle-ci n'aurait pas respectées ;
Considérant dès lors que la mise en cause de Monsieur Jaziri est justifiée ;
2) Sur la nullité du contrat de franchise :
Considérant que les appelants demandent à la cour de prononcer la nullité du contrat de franchise pour dol, erreur sur la rentabilité lors de la phase précontractuelle puis lors de la phase contractuelle, qu'ils font valoir :
- que l'information précontractuelle qui leur a été fournie a été volontairement tronquée, qu'en réalité, Monsieur Arrondeau a acquis pour la somme de 5 000 euros du Groupe Frères Blanc la marque exploitée dans deux magasins pilotes, alors que le Groupe Frères Blanc cherchait à se " débarrasser " de ceux-ci, et que ces deux restaurants " pilotes " ont rapidement cessé leur exploitation, peu après la signature du contrat de franchise,
- que Monsieur Arrondeau qui était l'unique animateur du réseau a tu qu'il avait dirigé une société " le Fournil de Beauce " entre 1989 et 1993 qui a fait l'objet d'un redressement judiciaire selon jugement du 8 juin 1993, qu'il avait cependant indiqué faire avec cette société qui employait 45 personnes un chiffre d'affaires de 17 millions de francs, ce qui laissait croire qu'il était un professionnel avisé, que cette information donnée faussement a été déterminante du consentement donné,
- que la société Casa Concept Services n'avait aucune structure véritable, alors qu'elle s'était présentée autrement dans le document d'informations précontractuelles,
- que le franchiseur n'a pas transmis ses comptes,
- qu'ils font encore valoir qu'ils ont commis une erreur sur la qualité substantielle qu'est la " rentabilité " de l'entreprise, qu'ils ont établi un bilan prévisionnel à partir des chiffres du franchiseur, que les résultats obtenus sont bien inférieurs aux prévisions du franchiseur, qu'ils se sont engagés sur la foi d'informations communiquées par le franchiseur dans la croyance de résultats qui en pratique n'ont jamais été atteints pour des raisons indépendantes d'eux-mêmes ;
Considérant que le franchiseur soutient que la preuve qu'un manquement volontaire à l'obligation d'information a été déterminant du consentement du franchisé n'est pas faite, qu'il en va ainsi du curriculum vitae de Monsieur Arrondeau, de l'historique des unités pilotes et de la présentation de la gestion du réseau ou de la prétendue modification du concept ;
Considérant que le contenu de l'information précontractuelle que doit donner le franchiseur par document avant la signature du contrat de franchise est détaillé dans les articles L. 330-3 et R. 330-1 et R. 330-2 du Code de commerce ;
Considérant que le document comporte les éléments relatifs à l'état, aux perspectives de développement du marché, qu'il présente l'état général et local du marché concernant le concept, les perspectives de développement du marché, indique la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la société Sam & Co doit engager avant de commencer l'exploitation ; qu'il précise divers éléments répondant aux griefs actuellement formés par les appelants ;
Considérant que l'historique du concept et de son exploitation est parfaitement expliqué en pages 8, 9 et 10, qu'il est ainsi précisé que le concept de restauration de bar à tapas dégustés avec de la bière créé en 2004 par la société Heineken Entreprise a été exploité sous la dénomination Casa Del Campo, que deux établissements " unités pilotes " ont été créés à Paris et à Nantes, dont l'exploitation a été confiée par la société Heineken Entreprise à la société Los Gatos dirigée par Monsieur Texier, que les deux établissements ont été cédés à la société en nom collectif Delavega dirigée par Monsieur Texier, que cette société a cédé les marques, le concept et le savoir-faire à la société Casa Concept Services dont le gérant était Monsieur Arrondeau, qu'un nouvel établissement pilote a été créé à Paris en 2007, qu'il est encore indiqué que l'exploitation en franchise commence en 2009 ;
Considérant encore que le curriculum vitae de Monsieur Arrondeau était fourni en page 5, qu'il a dirigé la société Fournil de Beauce entre 1989 et 1993, puis une coopérative agricole (le centre d'exploitation Epis Centre) entre 1993 et 1996, qu'il a été directeur régional de la société Elior (restauration collective et commerciale) entre 1996 et 2001, qu'il a ensuite dirigé une société filiale du groupe Toshiba entre 2002 et 2007, qu'il a été directeur du réseau Groupe Frères Blanc, groupe de restauration de 2000 personnes en 2007 et 2008 ; qu'il est indiqué qu'il a obtenu un diplôme de l'ESSEC en 2000 ;
Considérant que la société Casa Concept Services était présentée comme une société ayant été créée le 5 mars 2009, qu'aucun bilan n'est disponible en raison de la date de la création ;
Considérant enfin qu'il est indiqué que " le réseau démarre. Il y a à ce jour trois points de vente à l'enseigne Casa del campo ", dont la liste et les adresses sont donnés ;
Considérant que les éléments fournis dans le document précontractuel d'information permettaient à Monsieur Jaziri et à la société Sam & Co d'avoir une parfaite connaissance de l'histoire du concept, de la nouveauté de son exploitation par un réseau de franchise, qu'il ne démontre pas en quoi la connaissance qu'il aurait dû avoir de ce que le gérant de la société Casa del Campo aurait dirigé une société qui a été placée en redressement judiciaire en 1993 aurait déterminé autrement l'expression de sa volonté ; que par ailleurs rien ne justifie l'allégation selon laquelle que la vente des deux magasins pilotes aurait répondu à la volonté pour le vendeur de " s'en débarrasser ", ou encore selon laquelle la société Casa Concept Services serait présentée autrement qu'il vient d'être rappelé ;
Considérant encore que la société Sam & Co a fait établir un business plan par un cabinet d'audit et conseil grace aux informations fournies par le franchiseur à partir des chiffres des autres établissements parisiens,
- la marge brute de 72 % qui " traduit le mode de fonctionnement des établissements Casa Del Campo ", " les franchisés reçoivent les plats préparés et n'ont qu'à les réchauffer pour les servir ", " ce type de restauration ne nécessite pas la présence d'un cuisinier ",
- le nombre de salariés retenu hors gérant (quatre salariés à plein temps et trois salariés à temps partiel),
- le taux de charges sociales (40 %),
- les royalties (4 % du chiffre d'affaires), le montant des travaux à financer estimé par le franchiseur à 160 K euros, qu'il n'est pas rapporté que ce business plan a été établi sur la base d'informations erronées fournies par le franchiseur ; Considérant que le seul fait que les bénéfices que les appelants espéraient faire au regard du business plan n'aient pas été atteints ne peut en soi traduire l'erreur qu'ils auraient commise sur la rentabilité de l'entreprise ; que des paramètres multiples liés au commencement de l'activité, à la conjoncture économique, à la gestion du gérant interviennent dans la détermination de la rentabilité ; que des dysfonctionnements étaient constatés et que l'attention du gérant a été attirée très vite tant par le franchiseur que par le comptable sur plusieurs points de sa gestion financière qui rendait la situation " préoccupante ", qu'il s'agisse des prélèvements personnels d'un montant élevé du gérant remarqués par le comptable, des frais de personnels liés à un turn-over important, de l'absence de paiement des fournisseurs et des salariés ; que les pièces versées révèlent également un comportement parfois inapproprié de la part du personnel ou du gérant lors de l'accueil des clients ; que la société Casa Del Campo a suivi la situation de la société Sam & Co très précisément, qu'elle a rencontré le dirigeant, adressé des courriers, prodigué des conseils ; que l'on peut constater que dans le même temps, les autres établissements quel que soit leur mode d'exploitation, ont des résultats bénéficiaires ; que manifestement, Monsieur JazirI et la société Sam & Co ne peuvent faire état d'une erreur sur la rentabilité de l'établissement ;
Considérant que la demande d'annulation du contrat n'est pas justifiée ;
3) Sur l'inexécution du contrat :
Considérant que les appelants soutiennent que le franchiseur a failli à ses obligations malgré les mails qu'ils lui ont adressés :
- d'assurer la publicité, le transfert du savoir-faire et l'assistance technique et commerciale au franchisé tout au long de l'exécution du contrat, de lui fournir les documents nécessaires à l'exploitation, de sorte que les redevances n'ont pas de véritable contrepartie ; que le franchiseur ne démontre pas, par l'affirmation qu'il a fait une publicité nationale dont les conséquences ont été " désastreuses ", qu'il a accompli ses obligations,
- d'offrir un accompagnement, tant en début d'activité que lors de l'exécution du contrat : qu'il n'a donné aucun conseil, faisant engager des dépenses inutiles, qu'il n'a effectué aucune visite, n'a offert aucun stage de formation, aucune réunion de réseau, qu'il n'a fait aucune communication sur l'évolution du savoir-faire, sur la définition des offres et gammes de produits, ce qui est expliqué par la structure de la société Casa Concept Services qui ne le permettait pas ;
Considérant que les appelants soutiennent enfin que le franchiseur s'est livré à une concurrence déloyale, débauchant Monsieur Tamache, qu'il a au surplus fait une publicité au cours d'une émission télévisée qui a gravement nui à l'ensemble du réseau, qu'il percevait des fournisseurs des commissions " occultes " " sur le dos des franchisés " qui se sont plaints des prix élevés des matières premières ;
Considérant que la société Casa Concept Services expose n'avoir commis aucune des fautes invoquées par les appelantes (dépenses inutiles, embauche de personnel, perception de commissions occultes) et avoir au contraire fait ce qui était en son pouvoir pour faciliter l'activité de la société Sam & Co, n'ayant aucun intérêt à aggraver la situation du franchisé ; qu'elle ajoute avoir respecté son obligation de communication par la remise des documents dès lors que la société Sam & Co payait ce qui était dû, son obligation d'assistance lors notamment du recrutement des salariés, et même par la suite alors que les redevances n'étaient plus payées, qu'elle souligne que le franchisé ne s'est jamais plaint ;
Considérant qu'elle soutient que le gérant de la société Sam & Co n'a pas suivi les préconisations du franchiseur, que ce sont les " errements " de Monsieur Jaziri dans la gestion qui sont à l'origine des difficultés, que les prélèvements du gérant étaient excessifs, ce que lui avait fait remarquer le comptable, que la société Sam & Co ainsi que Monsieur Jaziri ne payaient pas les fournisseurs ;
Considérant ainsi qu'il a été dit plus haut que le franchiseur a assisté tout au long de l'exécution du contrat la société Sam & Co tant techniquement que commercialement, qu'il l'a accompagnée au début de l'exécution du contrat, lui faisant payer d'ailleurs un droit d'entrée de moitié compte tenu de la nouveauté du réseau, lui proposant des choix lors du recrutement du personnel sans toutefois se substituer à elle qui restait l'employeur, qu'il l'a accompagnée encore au cours de l'exécution du contrat, la mettant en garde contre une gestion inappropriée de son personnel, contre des choix de politique commerciale inadaptés, la mettant en garde contre une insuffisance de surveillance du fonctionnement de l'établissement, lui rappelant les principes d'hygiène, de péremption des produits, la conseillant sur tous ces points ;
Considérant par ailleurs que rien ne justifie que l'employeur se soit livré à une opération de débauchage de Monsieur Tamache ou ait incité la société Sam & Co à faire des achats inutiles ; que de même, la preuve n'est pas établie par deux attestations de clients mécontents que le reportage concernant l'enseigne Casa Del Campo lors d'une émission télévisée au début du mois de juillet 2009 ait eu les retombées financières défavorables que lui impute la société Sam & Co dont les résultats n'étaient pas bons depuis plusieurs mois et alors que d'autres enseignes Casa Del Campo connaissaient un regain d'activité à la même époque ;
que rien enfin ne justifie l'assertion selon lesquels les prix des fournisseurs, dont il convient de rappeler que ceux-ci n'étaient pas payés par la société Sam & Co, auraient été anormalement élevés en raison du comportement du franchiseur ;
Considérant toutefois que la société Casa Concept Services ne conteste pas vraiment ne pas avoir fourni certains documents d'exploitation tels que les sets de table, les menus et les flyers ; qu'elle ne peut l'expliquer par le défaut de paiement des redevances et des documents dès lors qu'elle relève elle-même qu'elle a continué à accomplir son obligation d'assistance malgré le non-paiement des redevances ; que ne tirant pas elle-même les conséquences de la non-exécution du contrat par le franchisé, elle devait exécuter l'intégralité de ses obligations ;
Considérant que la résiliation du contrat doit être prononcée en considération des fautes contractuelles commises par les deux parties lors de l'exécution du contrat ;
4) Sur les demandes liées à la résiliation du contrat de franchise de la société Casa Concept Services :
a) sur les sommes dues :
Considérant que la société Casa Concept Services demande le paiement de la somme de 21 903,13 euros HT au titre des redevances impayées outre les intérêts conventionnels prévus par l'article 10.8 du contrat, le paiement de la somme de 72 600 euros en raison de la perte de redevances liée à la rupture anticipée ; que les appelants estiment avoir été fondés à invoquer l'exception d'inexécution et à ne pas verser les redevances ;
Considérant que la société Casa Concept Services a adressé vainement plusieurs mises en demeure de payer les sommes dues au titre des redevances, qu'il y a lieu de faire droit à sa demande ; que la somme due produira des intérêts au taux légal à la date d'échéance des factures augmenté de deux points selon les termes de l'article 10.8 du contrat ;
Considérant que selon l'article 12.3 du contrat, les parties ont prévu qu'en cas de résiliation anticipée du contrat aux torts du franchisé, celui-ci doit verser une indemnité réparatrice du manque à gagner équivalente au montant des redevances dues jusqu'à l'échéance normale majorée de 10 % ; que ce texte n'a pas vocation à s'appliquer en l'espèce ; que la société Casa Concept Services sera déboutée de sa demande ;
b) sur les restitutions de biens mobiliers :
Considérant que la société Casa Concept Services demande également la restitution des meubles restés en possession de la société Sam & Co, outre le paiement d'une indemnité d'utilisation et d'une astreinte de 300 euros par jour de retard, qu'elle sollicite également la dépose complète de l'enseigne sous astreinte de 300 euros par jour de retard, que les appelants estiment ne rien devoir au titre du mobilier qui a été repris par le franchiseur ;
Considérant que la pièce 10 versée aux débats indique " Suite à notre accord, l'attestation a valeur de document validant la reprise du mobilier selon la liste jointe et le prêt du matériel pour la liste ci-dessous. Cette liste est conforme à celle que nous avons faite ensemble le 16 juin 2010 ", et révèle que les 49 pièces de matériel ont été reprises le 17 septembre 2010 mais qu'elles ont fait immédiatement l'objet d'un " prêt ", et que cet échange " annule la dette de 15 000 euros du prêt qui avait été versé le 10 août 2009 " ; qu'il ne résulte manifestement pas des termes de ce document que le mobilier a été restitué à la société Casa Concept Services ; que la restitution de ce mobilier sera ordonnée sans astreinte et que l'indemnité mensuelle d'utilisation de ce mobilier (4 tables rondes, 20 tables carrées, 3 mange-debout, 14 tabourets hauts) sera fixée, compte tenu du pouvoir d'appréciation de la cour sur ce point, à dix euros ;
c) Sur la demande de dépose d'enseigne :
Considérant que rappelant les dispositions de l'article 13 du contrat, la société Casa Concept Services demande la condamnation de la société Sam & Co a déposer l'enseigne " Casa Del Campo " sous astreinte et ajoute que " le caviardage, le découpage, le recouvrement " réalisés par la société Sam & Co ne saurait être satisfaisant, créant une confusion entre l'établissement qu'exploite désormais la société Sam & Co et les membres de son réseau ; que la société Sam & Co soutient rapporter la preuve que l'enseigne a été déposée, qu'elle ne peut se voir reprocher d'avoir une devanture rouge et d'utiliser le mot " Casa " dans sa nouvelle enseigne " Casa France Espagne " ;
Considérant que la société Sam & Co et Monsieur Jaziri justifient par la production d'un procès-verbal établi par Monsieur Naulet, clerc habilité de Maître Coatmeur, huissier de justice, en date du 15 février 2012 que l'établissement qu'elle exploite 58 avenue des Gobelins ne porte aucune enseigne " Casa del Campo ", que la société Casa Concept Services qui ne forme dans le dispositif de ses écritures qu'une demande de dépose d'enseigne sera déboutée de sa demande ;
5) Sur les sommes demandées par la société Sam & Co et Monsieur Jaziri :
Considérant que ceux-ci demandent la condamnation de la société Casa Concept Services à leur payer la somme de 350 086 euros se décomposant en droit d'entrée (15 000 euros), en redevances (16 944 euros), en perte de l'exercice (151 142 euros), en bénéfice non réalisé (17 000 euros) et en préjudice moral (50 000 euros) ;
Considérant toutefois que les sommes sont demandées au titre de la résiliation ; que la société Sam & Co et Monsieur Jaziri ne justifie pas que les pertes, les bénéfices non réalisés, le préjudice moral sont la conséquence directe de la faute contractuelle commise par le franchiseur ; que par ailleurs, ils ne sauraient faire état du préjudice que leur a causé le paiement du droit d'entrée et de la redevance qui n'étaient que la traduction de leurs obligations contractuelles et alors que la résiliation du contrat de franchise est largement causée par la commission de fautes contractuelles de leur part ; qu'ils seront déboutés de leurs demandes.
Par ces motifs : LA COUR : Infirme le jugement sur l'injonction de déposer l'enseigne et sur la restitution du matériel, statuant à nouveau : Condamne la société Sam & Co et Monsieur Jaziri à restituer à la société Casa Concept Services le matériel listé, Fixe l'indemnité mensuelle d'utilisation du matériel à la somme de 10 euros, Condamne solidairement Monsieur Jaziri et la société Sam & Co au paiement de cette somme jusqu'à restitution du matériel, Déboute la société Casa Concept Services de sa demande de dépose d'enseigne, Déboute la société Casa Concept Services de sa demande de liquidation d'astreinte, Confirme le jugement pour le surplus, Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile, Fait masse des entiers dépens, Condamne la société Sam & Co et Monsieur Jaziri solidairement d'une part, la société Casa Concept Services d'autre part, à les supporter chacun à hauteur de moitié.