CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 11 décembre 2013, n° 11-20287
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Toys International Inc. (Sté)
Défendeur :
Gigamic (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Cocchiello
Conseillers :
Mmes Nicoletis, Luc
Avocats :
Mes Bernabe, Brunet-Stoclet, Maupas Oudinot, Le Pechon
Une relation d'affaires, prenant la forme d'une succession de commandes sans qu'un contrat soit signé, s'est nouée à compter de l'année 2002 entre :
- d'une part, la société Toys International Inc., société de droit canadien, qui exerce une activité de fabrication et de distribution de jouets et de jeux de société sous la marque Family Games,
- et d'autre part, la société Gigamic qui exerce une activité de fabrication et de distribution de jeux de société sous sa propre marque dans le monde entier et assure en France et en Europe, la distribution des produits d'autres fabricants de jeux.
La société 155030 Canada Inc., faisant affaires sous le nom de Family Games, qui appartient au même groupe de sociétés que la société Toys International Inc., le groupe Family Games, et qui a le même dirigeant que la société Toys International Inc., M. Yvan David, distribuait depuis 1998 les produits de la société Gigamic en Amérique du nord.
La société Gigamic assurait la commercialisation des produits Toys International Inc. en Europe, principalement en France et en Belgique.
La société Gigamic a rompu ses relations commerciales avec la société Canada Inc. par courrier recommandé du 10 septembre 2007.
Par acte du 27 mars 2008, la société 155030 Canada Inc. a assigné la société Gigamic devant la Cour supérieure du Canada en réparation du préjudice qu'elle aurait subi du fait d'une rupture brutale des relations commerciales par la société Gigamic (soit un montant de 1 100 000 dollars canadiens soit 734 758,74 euros).
Dans le courant du mois de mars 2008 la société Toys International Inc. a cessé de vendre ses produits à la société Gigamic. Par courrier du 2 avril 2008, la société Gigamic a pris acte de la rupture des relations commerciales.
Par actes du 24 juillet 2008, la société Gigamic a assigné la société Toys International Inc. devant le Tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer sur le fondement de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce.
Par jugement du 12 janvier 2011, par le Tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer a :
- dit que la société Toys International a rompu brutalement ses relations commerciales avec la société Gigamic ;
- condamné la société Toys International à payer à la société Gigamic la somme de 150 000 euros au titre du manque à gagner et de l'atteinte à l'image ;
- dit n'y avoir lieu à prononcer l'exécution provisoire du jugement ;
- condamné la société Toys International à payer à la société Gigamic la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile
- condamné la société Toys International aux dépens.
La société Toys International Inc. a interjeté appel le 14 novembre 2011 devant la Cour d'appel de Paris.
Vu les dernières conclusions au fond, notifiées et déposées le 27 septembre 2013, par lesquelles la société Toys International demande à la cour de :
Aux visas des articles 1375, 2837, 2857 au Code civil québécois, L. 442-6 I 5 et III, D. 442-3 et D. 442-4 du Code de commerce, 1316-1 et 1382 au Code civil,
- infirmer le jugement du 12 janvier 2011 en ce qu'il a écarté l'application du droit québécois au litige ;
- constater en conséquence que les conditions de la rupture des relations commerciales nouées entre les sociétés Toys International et Gigamic doivent être appréciées au regard du droit québécois, qui s'il prévoit également un délai de préavis, ne requiert, au contraire, aucun formalisme particulier pour l'annonce de la rupture ;
- infirmer le jugement en ce qu'il a jugé que la rupture des relations commerciales existant entre les deux sociétés présentait un caractère brutal ouvrant droit à indemnisation de la société Gigamic ;
- débouter la société Gigamic de l'intégralité de ses prétentions à son encontre ;
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement en ce qu'il a constaté que la société Toys International avait confirmé, par écrit, à la société Gigamic d'une part, sa volonté de rompre les relations contractuelles nouées 5 ans auparavant et d'autre part, la durée de la période de préavis expirant le 31 décembre 2007 ;
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
* retenu l'existence d'une relation commerciale exclusive entre les sociétés Toys International et Gigamic ;
* estimé que la rupture par la société Toys International des relations commerciales existant avec la société Gigamic était brutale ;
* condamné la société Toys International à payer à la société Gigamic la somme de 100 000 euros au titre d'un prétendu manque à gagner et la somme de 50 000 euros au titre d'une prétendue atteinte à l'image de marque et à la crédibilité de la société Gigamic ;
* en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes fondées sur les actes de dénigrement commercial commis par la société Gigamic ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté toute intention de nuire à l'encontre de la société Gigamic ;
Statuant à nouveau,
- constater que le préavis de rupture d'une durée effective de quatre mois accordé à la société Gigamic était suffisant ;
- de juger que la rupture des relations commerciales non exclusives la liant à la société Gigamic n'était pas brutale ;
- constater que la société Gigamic n'a subi aucun préjudice à quelque titre que ce soit ;
- juger que la société Gigamic a commis des actes de dénigrement commercial à son encontre ;
- condamner la société Gigamic à lui verser la somme de 30 000 euros au titre du préjudice subi du fait des actes de dénigrement ;
- autoriser la publication de l'arrêt dans trois revues de son choix aux frais de la société Gigamic sans que le coût de chaque insertion ne puisse excéder la somme de 5 000 euros HT ;
A titre infiniment subsidiaire,
Si par extraordinaire, la cour estimait devoir confirmer l'appréciation des premiers juges quant à la durée du préavis de rupture qui aurait dû être accordé à l'intimée,
- limiter le paiement des dommages et intérêts alloués à la société Gigamic au titre d'un manque à gagner la somme maximale de 12 998,74 euros ;
En tout état de cause,
- condamner la société Gigamic à verser à la société Toys International la somme de 35 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.
Vu les dernières conclusions au fond, notifiées le 4 octobre 2013, par lesquelles la société Gigamic demande à la cour de :
Aux visas des articles 46 et 643 du Code de procédure civile, L. 442-6 I 5° du Code de commerce, 1382 et suivants du Code civil,
- confirmer le jugement en ce qu'il a considéré que la société Toys International Inc. a rompu brutalement leurs relations commerciales établies avec la société Gigamic ;
- porter la condamnation de la société Toys International Inc. au titre du manque à gagner à la somme de 403 752 euros ;
- confirmer la décision du Tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer en ce qu'elle a considéré que la société Toys International Inc. a porté atteinte à l'image et à la crédibilité de la société Gigamic ;
- porter la condamnation de la société Toys International Inc. au titre du préjudice d'atteinte à l'image à la somme de 150 000 euros ;
- infirmer partiellement le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande indemnitaire au titre du préjudice de désorganisation ;
- condamner la société Toys International à lui verser la somme de 60 000 euros à ce titre ;
- infirmer partiellement le jugement en ce qu'il n'a pas retenu l'intention de nuire de la société Toys International ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Toys International Inc. à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
y ajoutant,
- condamner la société Toys International à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 en cause d'appel ;
- dire les demandes reconventionnelles de la société Toys International Inc. mal fondées et l'en débouter intégralement ;
- condamner la société Toys International aux dépens de l'instance dont distraction.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 octobre 2013.
Vu les conclusions les conclusions de procédure, notifiées et déposées le 16 octobre 2013, par lesquelles la société Toys International Inc. sollicite que soit :
- révoquée l'ordonnance de clôture rendue le 8 octobre 2013 et que les plaidoiries prévues le 23 octobre 2013 soient renvoyées afin de lui permettre de répondre aux dernières conclusions et pièces de la société Gigamic,
Subsidiairement,
- rejetées des débats les conclusions et pièces notifiées et communiquées les 4 et 7 octobre 2013, soit tardivement par la société Gigamic.
Vu les conclusions de procédure, notifiées et déposées le 18 octobre 2013, par lesquelles la société Gigamic demande à la cour de :
- prendre acte de ce que ses dernières conclusions au sens de l'article 954 du Code de procédure civile sont celles du 4 octobre 2013 ;
- débouter la société Toys International de l'ensemble de ses moyens formulés dans ses écritures d'incident du 16 octobre 2013 ;
- maintenir les plaidoiries au 23 octobre 2013 ;
- condamner la société Toys International à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance dont distraction.
Cela étant exposé, LA COUR :
Sur les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture et de rejet des débats des conclusions et pièces notifiées les 4 et 7 octobre 2013 :
Considérant que la société Toys International reproche à la société Gigamic d'avoir notifié des conclusions récapitulatives et communiqué 6 nouvelles pièces, datées de 2008 et 2010, le vendredi 4 octobre 2013 et d'avoir notifié deux nouvelles pièces le lundi 7 octobre 2013, alors que l'ordonnance de clôture a été rendue, comme prévu au calendrier de procédure, le 8 octobre 2013 ; que l'appelante soutient qu'elle doit répondre aux conclusions et pièces notifiées le 4 et 7 octobre 2013 qui ne constituent pas une réponse aux conclusions récapitulatives n° 2 qu'elle a notifié le 27 septembre 2013, car les conclusions de l'intimée contiennent une argumentation totalement différente de celle développée par la société Gigamic dans ses conclusions précédentes du 27 mai 2013 ;
Considérant que la société Toys International n'a notifié que le 27 septembre 2013, soit une semaine avant la date prévue de l'ordonnance de clôture, ses conclusions récapitulatives n° 2 en réponse aux conclusions n° 2 de la société Gigamic notifiées le 27 mai 2013 et a communiqué trois nouvelles pièces dont un courriel du 13 novembre 2008 ; que les conclusions de la société Gigamic notifiées le 4 octobre 2013 constituent une réplique aux conclusions que la société Toys International a notifié le 27 septembre 2013 ; que, s'il est exact que la société Gigamic a ajouté de nouveaux développements au soutien de sa demande d'indemnisation au titre de la désorganisation, l'intimée n'a formulé aucune prétention nouvelle ; que les pièces 34 à 40 communiquées par la société Gigamic ont été produites en réponse aux derniers développements de l'appelante ; que les pièces 41 et 42, produites par la société Gigamic le 7 octobre 2013, soit la veille de l'ordonnance de clôture, ont été communiquées tardivement ;
Considérant que les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture et de rejet des débats des conclusions notifiées par la société Gigamic le 4 octobre 2013 seront rejetées, qu'en revanche les pièces 41 et 42 communiquées par la société Gigamic le 7 octobre 2013 seront écartées des débats ;
Sur la loi applicable au litige :
Considérant que la société Toys International soutient que la société Gigamic invoque à tort les dispositions de l'articIe L. 442-6 I 5° du Code de commerce français relatif à la rupture brutale des relations commerciales ; que les sociétés Toys International et Gigamic n'ayant pas choisi la loi applicable à leurs relations commerciales, il convient de déterminer le pays avec lequel leurs relations commerciales présentent les liens les plus étroits, qu'en l'espèce il s'agit de la Province du Québec ; que d'ailleurs les tarifs des produits Family Games, adressés chaque année à la société Gigamic par la société Toys International indiquaient, sans ambiguïté, l'application de la loi de la Province du Québec, laquelle ne connaît pas de disposition équivalente à l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce français ;
Considérant que les parties n'ont pas conclu de contrat écrit et n'ont pas désigné d'un commun accord la loi applicable à leurs relations commerciales ; que l'indication dans les tarifs de la société Toys International que la loi de la Province du Québec est applicable n'est pas opposable à la société Gigamic dès lors que cette dernière n'a pas expressément accepté cette clause attributive de compétence ;
Considérant qu'en application de l'article L. 442-6-I 5° du Code de commerce, le fait pour tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de rompre brutalement une relation commerciale établie engage la responsabilité extracontractuelle de son auteur ; que ces dispositions relèvent de la catégorie des lois de police et sont d'ordre public ;
Considérant que la loi applicable à la responsabilité extracontractuelle est celle de l'État du lieu où le fait dommageable s'est produit, ce lieu s'entendant aussi bien de celui du fait générateur du dommage que du lieu de réalisation de ce dernier ; qu'en l'espèce, le lieu de la réalisation du dommage est le siège social de la société Gigamic, situé sur le territoire français ;
Considérant que les dispositions l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce français sont applicables au litige ;
Sur la rupture des relations commerciales :
Considérant que, aux termes de l'article L. 442-6-I 5° du Code de commerce, "Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers... 5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels" ;
Considérant que la société Toys International expose que début septembre 2007, prenant acte de la rupture par la société Gigamic des relations commerciales existant avec la société Family Games en Amérique du Nord, elle a décidé de rompre les relations existant en France avec la société Gigamic a effet au 1er janvier 2008 ; que la rupture a été confirmée, une première fois, en octobre 2007 lors au salon du Jouet de Essen, en Allemagne, puis une deuxième fois dans un courrier électronique du 5 novembre 2007 et encore rappelée à nouveau le 6 décembre 2007 en raison du refus de la société Gigamic de comprendre la situation ; que la société Gigamic, qui n'était pas son distributeur exclusif, a bénéficié d'un préavis de 4 mois, qui est suffisant pour des relations commerciales d'une durée de 5 ans représentant 10 % du chiffre d'affaires global de la société Gigamic ;
Considérant que la société Gigamic fait valoir que la société Toys International a rompu oralement leurs relations commerciales sans préavis, qu'elle ne l'a pas informée par écrit, de manière claire et définitive, de sa volonté de mettre un terme à leurs relations commerciales, qu'elle a ensuite maintenu une incertitude sur son intention de rompre ; que le délai de préavis dont se prévaut la société Toys International est de toute façon inexistant puisque aucune commande n'a été honorée pendant la période du 11 septembre au 31 décembre 2007 ; que ce comportement est constitutif d'une rupture brutale ;
Considérant qu'il est constant que la société Gigamic a commercialisé les produits de la société Toys International à compter de l'année 2002 jusqu'à la fin de l'année 2007, ce qui a représenté pour l'année 2007 un chiffre d'affaires de 400 000 euros ; que la société Toys International soutient sans le démontrer que la société Gigamic n'était pas son distributeur exclusif en France et en Belgique ;
Considérant que par courriel du 5 novembre 2007 M. David écrivait à M. Gires, dirigeant de la société Gigamic "il me semble très bizarre de voir à la fin de ton email que tu mentionnes l'année 2008. Il me semble bien que lors de notre rencontre à Essen il y a deux semaines, nous nous sommes bien entendus de terminer notre association pour la distribution de Family Games en France et en Belgique à la fin de l'année en cours. Je croyais pouvoir avoir confiance en ta parole mais comme je vois il semble que tu essaies par tes écrits de confondre la situation et de préparer une défense à tes actions... Troisièmement il avait été entendu de terminer notre entente de distribution avec Gigamic à la fin de 2007 mais il semble que tu as oublié ce fait. Donc la présente servira de notice écrite à ce sujet. Je te ferais parvenir par voie de nos avocats une lettre formelle à ce sujet incluant également le manque constant de Gigamic à remplir ses obligations envers Family Games" ;
Considérant qu'il apparaît que la société Toys International a rompu le contrat de distribution la liant à la société Gigamic en raison de la rupture par la société Gigamic de ses relations commerciales avec la société Canada Inc. (Family Games), ce que l'appelante reconnaît, et que la rupture des relations commerciales entre les sociétés Toys International et Gigamic a été évoquée oralement puis formalisée par le courriel du 5 novembre 2007, prévoyant un préavis expirant à la fin de l'année 2007, soit moins de deux mois plus tard ;
Considérant que la société Gigamic ne démontre pas que la société Toys International a laissé subsister une incertitude sur la fin des relations commerciales dès lors que la volonté de rompre les relations commerciales a été clairement réaffirmée par M. David dans les courriels des 5 novembre et 7 décembre 2007 en réponse aux courriels de M. Gires qui lui demandait de reconsidérer sa décision de rupture ; qu'il n'est démontré par aucune pièce versée aux débats que la société Toys International n'ait pas honoré ses engagements durant l'année 2007 ;
Considérant qu'au regard de la relation commerciale établie entre les parties durant près de 6 années, un préavis inférieur à deux mois est insuffisant ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu que la société Toys International a rompu brutalement ses relations commerciales avec la société Gigamic et fixé à 6 mois la durée raisonnable du préavis qui aurait dû être respecté ;
Sur le préjudice de la société Gigamic :
Considérant que la société Gigamic expose que le comportement de la société Toys International, qui a initié la rupture dans un dessein manifeste de lui nuire, est à l'origine d'un important préjudice et sollicite, en réparation de son manque à gagner, une indemnité d'un montant de 403 752 euros correspondant à 24 mois de marge brute, en réparation de la désorganisation de la société, prenant la forme d'une désorganisation au sein de l'entreprise et d'un détournement de clientèle, la somme de 60 000 euros, en réparation de l'atteinte à l'image et à la crédibilité, la somme de 150 000 euros ; l'intimée sollicite également que soit reconnu que la société Toys International a décidé de rompre afin de porter atteinte aux intérêts de son distributeur ;
Considérant que la société Toys International soutient que le préjudice prétendument subi par la société Gigamic est inexistant, comme le démontrent notamment les comptes annuels clos le 31 mars 2008 et le 31 mars 2009, qui font apparaître une progression du chiffre d'affaires et du bénéfice de la société intimée, ainsi que les rapports de gérance ; elle conteste le montant de la marge brute alléguée par la société Gigamic et fait valoir que la commande passée par cette société en 2007 était de seulement 2 829,60 euros, ainsi que le caractère saisonnier du marché des jouets, dont 60 % des ventes ont lieu à la période de Noël, et de son remplacement rapide par un autre fournisseur ;
Considérant qu'il résulte des échanges de courriels entre les parties que la société Toys International a rompu les relations commerciales avec son distributeur en raison d'un litige existant entre la société Gigamic et une société appartenant au même groupe que la société Toys International et ce bien qu'il n'y ait aucune réciprocité ou dépendance entre les différentes relations commerciales qui existaient et pouvaient se poursuivre indépendamment les unes des autres ; que cependant, si ces courriels attestent de la volonté unilatérale du dirigeant de la société Toys International de rompre les relations commerciales avec la société Gigamic en raison de ce litige, il n'en résulte pas pour autant une volonté de nuire à la société Gigamic ;
Considérant que la société Gigamic ne justifie ni d'une désorganisation de la société, ni de l'existence d'un détournement de clientèle par la société Toys International ; qu'ainsi dans un courriel du 21 novembre 2007, M. Gires indiquait à M. David que le catalogue en préparation ne contenait plus de produits Toys International ; qu'il ne peut être reproché à la société Toys International d'avoir noué des relations commerciales avec des clients de son ancien distributeur postérieurement à la rupture des relations commerciales ;
Considérant que le préjudice résultant du manque à gagner de la société Gigamic à la suite de la rupture brutale des relations commerciales, doit être fixé, compte tenu du chiffre d'affaires fait par cette société en 2007 avec les produits de la société Toys International, soit 411 278,01 euros, et de la marge brute en résultant, soit 43,6 %, à la somme de 75 000 euros ;
Considérant que si la rupture des relations commerciales a empêché, dès la fin de l'année 2007, la société Gigamic de répondre favorablement aux demandes de ses clients relatives aux produits Toys International, néanmoins la société Gigamic a expliqué que cette situation était la conséquence d'une rupture unilatérale imposée par la société Toys International ; que si cette situation a été préjudiciable en terme de chiffre d'affaires à la société Gigamic, ce préjudice a été indemnisé, et aucun préjudice d'image n'en est résulté pour la société Gigamic ;
Sur les actes de dénigrement :
Considérant que la société Toys International soutient que que la société Gigamic a commis des actes de dénigrement à son encontre et à l'encontre de ses produits en répandant des informations fausses et malveillantes de nature à jeter un discrédit sur la société et ses produits ;
Considérant que les courriels échangés entre la société Gigamic et ses clients ne contiennent pas une version mensongère des faits, mais la version subjective de la société Gigamic qui a souhaité jusqu'à la fin de l'année 2007 que la société Toys International revienne sur sa décision de mettre un terme à leurs relations commerciale ; que les courriels en cause ne contiennent aucune allégation malveillante et ne jettent aucun discrédit sur la société Toys International ou sur ses produits, la société Gigamic ne faisant qu'expliquer à ses clients son impossibilité de continuer à distribuer les produits Toys International et les raisons de cette situation ;
Considérant que le fait pour la société Gigamic de rappeler ou revendiquer ses droits ne peut lui être reproché ; que le jugement sera confirmé de ce chef.
Par ces motifs : Rejette des débats les pièces 41 et 42 communiquées par la société Gigamic le 7 octobre 2013 ; Confirme le jugement sauf en ses dispositions ayant condamné la société Toys International Inc. à verser à la société Gigamic la somme de 150 000 euros au titre du manque à gagner et de l'atteinte à l'image ; Et statuant à nouveau dans cette limite : Condamne la société Toys International Inc. à verser à la société Gigamic la somme de 75 000 euros au titre du manque à gagner résultant de la rupture brutale des relations commerciales entre les parties ; Condamne la société Toys International Inc. à verser à la société Gigamic la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Déboute les parties de leurs autres demandes ; Condamne la société Toys International Inc. aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.